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La MAO-A est une enzyme mitochondriale qui réalise la déamination oxydative des amines biogènes en libérant de l’H2O2. Dans le cœur, son activité augmente dans de

nombreuses conditions pathologiques aiguës (infarctus du myocarde) comme chroniques (constriction aortique). Les raisons de cette augmentation d’activité sont mal connues et peuvent être la résultante de l’augmentation de ses substrats (catécholamines).

Nos travaux démontrent pour la première fois, grâce à un modèle murin transgénique surexprimant la MAO-A, qu’en dehors de toute condition pathologique, la surexpression de la MAO-A aboutit à l’IC. De plus, cette surexpression produit in situ de grandes quantités d’H2O2 et est responsable d’un stress oxydant chronique dont une des cibles est la

mitochondrie. L’ensemble aboutit à la mort des cardiomyocytes par un mécanisme essentiellement nécrotique. Nous avons également montré que cette nécrose était la résultante ultime de l’activation de p53 par phosphorylation. Ce dernier agit comme un répresseur de l’expression de PGC1α, ce qui augmente la dysfonction mitochondriale et les dommages mitochondriaux créant ainsi un cercle vicieux qui potentialise les effets de l’activation de la MAO-A et entraîne la mort du cardiomyocyte. PGC1α est un coactivateur de l’expression de nombreux gènes. Il est un modulateur important du métabolisme énergétique mitochondrial. Il est induit, notamment, dans des situations où les acides gras deviennent le substrat énergétique préférentiel. Il a été montré dans d’autres modèles que les ROS pouvaient diminuer l’expression de PGC1α [493]. Il serait donc intéressant d’étudier s’il existe un lien entre la MAO-A et les modifications du métabolisme cardiaque observé au cours de l’IC (ex : diminution de la β-oxydation) et si ce lien est médié par l’H2O2 produit

par cette enzyme.

L’augmentation inéluctable de la MAO-A au cours de la dysfonction cardiaque aiguë ou chronique est donc bien délétère pour le cardiomyocyte et participe certainement à l’évolution vers l’IC. Nous pourrions confirmer cette hypothèse en étudiant la progression de l’IC dans un modèle murin KO pour la MAO-A de manière inductible et cardiaque spécifique, après constriction aortique. Ce modèle est disponible dans l’équipe.

L’IC survient dans la majorité des cas après 65 ans. Son pronostic est nettement plus défavorable chez le sujet âgé en raison des comorbidités associées à l’âge, mais aussi en raison de la sénescence intrinsèque du myocarde qui constitue une source de vulnérabilité.

L’activité de la MAO-A augmente, chez le rat au cours de la sénescence. Dans la seconde partie de ce travail, nous avons voulu déterminer si la MAO-A était un acteur de la sénescence intrinsèque du myocarde et s’il existait des modifications de la dynamique mitochondriale.

Nous n’avons pas réussi à montrer de lien entre la MAO-A et la sénescence, notamment en ce qui concerne les marqueurs de la sénescence. L’augmentation des marqueurs de la sénescence que nous avons observée semble surtout médiée par le stress oxydant, indépendamment de la MAO-A. Il serait néanmoins intéressant de traiter de façon chronique les rats âgés surexprimant la MAO-A au cours de la sénescence par la clorgyline et d’observer s’il existe un effet sur leur durée de vie et la fonction cardiaque. D’un point de vue tissulaire, nous pourrions nous attacher à l’étude de la survie des cardiomyocytes puisque c’est sur ce point que la MAO-A semble jouer un rôle important au cours du vieillissement. De plus, il a été montré dans une étude récente de la littérature qu’au cours de la sénescence, induite par un raccourcissement télomérique et aboutissant à une IC, l’activation de p53 et la répression de PGC1α qui en résulte, entraîne une dysfonction mitochondriale qui ensuite favoriserait la production de ROS par la mitochondrie. Il faudrait vérifier si notre modèle transgénique mime ce modèle et s’il s’accompagne d’un raccourcissement des télomères.

De manière très intéressante, nous avons mis en évidence des modifications de la dynamique mitochondriale dans le cardiomyocyte, au cours de la sénescence physiologique, faisant de la fission un élément important du vieillissement myocardique. Pour la première fois nous avons montré que ce phénomène était précoce, parallèle à l’hypertrophie des cardiomyocytes et indépendant de l’apparition d’une IC. Dans la littérature, il a été montré que la fission permettait l’isolement de mitochondries présentant des dommages irréversibles comme la perméabilisation de la membrane interne et/ou l’oxydation de ses composants par les ROS. Ces mitochondries endommagées sont prises en charge par un processus autophagique appelé mitophagie. Or il semble qu’avec l’âge, dans le cœur comme dans d’autres organes, on assiste à une diminution graduelle de l’autophagie, ce qui participe grandement à l’accumulation de petites mitochondries et la dysfonction cardiaque [494]. Il faudrait vérifier si au cours de la sénescence physiologique cette accumulation de petites mitochondries, en rapport avec une augmentation de la fission, résulte également d’une diminution de la mitophagie.

Nos travaux montrent également qu’il semble exister un lien entre fission et MAO- A au cours du vieillissement. En effet la fission est particulièrement marquée dans notre

modèle de souris surexprimant la MAO-A, dès 6 semaines de vie, et n’apparaît pas dans le modèle murin KO pour la MAO-A. De façon surprenante, la fission que nous avons observée ne semble pas liée au stress oxydant. Cette hypothèse pourrait être vérifiée en traitant les souris surexprimant la MAO-A par un antioxydant. La MAO-A est située sur la membrane externe de la mitochondrie, lieu d’action de Drp1. Il faudrait rechercher s’il existe une interaction directe entre ces deux protéines et les modalités de cette interaction. La participation des aldéhydes générés par la MAO-A n’est pas exclue. Un tel lien déterminerait une nouvelle fonction de la MAO-A et ouvrirait des perspectives dans le domaine de la dynamique mitochondriale. Enfin, il serait intéressant de mieux comprendre le rôle de cette fission au cours de la sénescence cardiaque. Est-ce un phénomène contribuant à la dysfonction cardiaque ou est-ce un phénomène adaptatif ?

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