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8.1 Contexte de l’étude

Que ce soit dans un contexte de conception d’un nouveau matériel, de qualifica-tion ou d’expertise d’un matériel existant, la connaissance fiable des caractéristiques dynamiques relatives aux vibrations d’une structure industrielle est indispensable. Cette connaissance permet de maîtriser les phénomènes vibratoires pouvant occa-sionner des incidents, voire même des accidents dangereux pour la sécurité des per-sonnes et la sûreté des installations. Les coûts humains, les pertes de production et les coûts de maintenance supplémentaires liés à ces défaillances peuvent atteindre des valeurs considérables dans le cas de grosses unités industrielles.

Les simulations numériques sont de plus en plus utilisées pour répondre à ce be-soin, d’une part car elles sont moins coûteuses que la réalisation de mesures, d’autre part car elles permettent un prototypage rapide de solutions techniques. De la même manière qu’un résultat de mesure est théoriquement assorti de son incertitude as-sociée, un résultat numérique doit être fourni assorti d’une mesure de la confiance ou de la crédibilité qu’on peut lui accorder. Deux approches sont possibles. La pre-mière, plus traditionnelle, consiste à affecter le résultat d’un calcul d’un coefficient de sécurité généralement issu d’un retour d’expérience. La seconde consiste à réaliser des simulations numériques, souvent lourdes, pour estimer un intervalle de confiance ou une densité de probabilité à partir d’incertitudes supposées sur les paramètres du modèle.

Un exemple d’application de ces démarches concerne les spécifications techniques qu’EDF impose aux constructeurs de pompes. Dû à un retour d’expérience défavo-rable, et pour la construction du nouveau palier nucléaire EPR (réacteur pressurisé européen), il est important pour EDF de savoir, a priori :

— la capacité de ces constructeurs à réaliser des études (a priori par voie de simulation numérique) permettant de satisfaire aux exigences d’EDF ; — le niveau de confiance qu’EDF pourra accorder aux résultats de calculs

four-nis par les constructeurs de pompes sur leurs matériels.

Étant donné que les travaux de benchmarking en dynamique des structures pré-sents dans la littérature ne permettent pas de répondre de manière satisfaisante aux besoins d’EDF, un benchmark international est organisé par EDF R&D sur la pé-riode 2008–2010 [Audebert 2010,Audebert et al. 2014]. Il a permis, sur la base des simulations effectuées par les différents participants, d’observer la variabilité numé-rique des caractéristiques dynamiques d’une pompe, à l’arrêt et non connectée (cf.

Figure 8.1et Figure 8.2), issues de calculs purement prédictifs (en aveugle).

Les résultats de ce benchmark ont révélé un besoin de poursuivre les développe-ments dans les domaines suivants :

(a) Pompe Booster mono-étagée à axe horizontal

(b)CAO des 7 composants principaux assemblés

Figure 8.1: Démonstrateur du benchmark et du projet SICODYN équipant les centrales thermiques

(et en particulier les pompes) ;

— la quantification des incertitudes de calcul ; — la quantification des incertitudes expérimentales.

8.2 Principaux objectifs

Un programme de recherche plus ambitieux a été proposé par EDF R&D et a été accepté comme projet FUI (Fonds Unique Interministériel), intitulé SICODYN (pour des SImulations crédibles via la COrrélation calcul-essai et l’estimation d’in-certitudes en DYNamique des structures), initié en 2012 et réalisé jusqu’en 2016. Le démonstrateur est toujours la pompe de la figure 8.1, considérée maintenant dans son environnement industriel. La complexité liée à la prise en compte de l’environ-nement réel est illustrée sur la figure8.3 : l’exploitation des données expérimentales est extrêmement plus difficile dans le cas où la pompe est couplée (pics de résonance difficilement identifiables) que dans le cas où la pompe est déconnectée des tuyau-teries (pics de résonance bien marqués).

L’objectif principal de ce projet est de quantifier et caractériser les incertitudes sur le comportement dynamique des assemblages sous deux aspects :

— l’aspect expérimental en cherchant à observer la variabilité liée à la diversité des spécimens, la variabilité liée à l’opérateur et à la variation des conditions de liaison, ainsi que la variabilité liée aux moyens de mesure et aux méthodes de traitement des données d’essais ;

— l’aspect numérique en cherchant, d’une part, à observer l’incertitude totale via une opération de benchmarking et, d’autre part, à caractériser par calcul

(a)Arbre de pompe (acier) (b)Corps de palier (fonte) (c) Support de palier (fonte)

(d) Anneau de refroidissement (fonte)

(e) Corps de pompe (fonte) (f ) Flasque d’aspiration (acier)

(g) Coude (acier) (h)Châssis soudé (acier)

(m.s-2).N-1 -1, 00E-0 3 1, 00E-0 3 3, 00E-0 3 5, 00E-0 3 7, 00E-0 3 9, 00E-0 3 0 ,00 50 ,00 10 0,00 150,00 200 ,00 250, 00 ___________

non connected pump (upper curve)

___________

connected pump (lower curve)

Hz

Figure 8.3: Fonctions de réponse en fréquence de la pompe SICODYN à une excitation au marteau de choc : pompe non couplée (courbe rose) et pompe

couplée aux tuyauteries (courbe bleue) (tirée de [Audebert et al. 2014]) les incertitudes liées à la propagation des erreurs sur les paramètres et celles liées à la simplification ou la non prise en compte de phénomènes physiques. Le but final est d’avoir une boîte à outils et des méthodologies de calcul qui per-mettent d’estimer le niveau de confiance a priori associé au résultat d’un calcul prédictif en dynamique. L’organisation générale des 6 lots du projet est décrite sur la figure 8.4.

Le lot 1 présente un inventaire des benchmarks existants en dynamique des struc-tures, en plus d’un état de l’art des méthodes de propagation et quantification des incertitudes.

Le lot 2 est un benchmark qui a pour but d’observer la variabilité expérimen-tale liée à l’opérateur et à la variation des conditions de liaison sur des structures nominalement identiques.

Un autre benchmark fait l’objet du lot 3 permettant d’observer la variabilité numérique totale qui résulte des différentes options de modélisation prises par les partenaires (type de modèle physique, type de conditions de liaison, type d’équa-tion et de schémas numériques utilisés, code de calcul) et des différentes opd’équa-tions de paramétrage retenues (valeurs des caractéristiques mécaniques utilisées par chacun des partenaires). Les configurations retenues sont celle de la pompe à l’arrêt, coulée dans le béton, non connectée puis connectée aux tuyauteries.

Le lot 4 est consacré à la corrélation calcul-essai en utilisant une collection de résultats numériques et de mesures expérimentales. Son objectif est d’établir un modèle présentant le meilleur compromis entre le temps mis pour l’élaborer, le temps

Figure 8.4: Structuration scientifique du projet SICODYN

de calcul lié directement à la taille du modèle et la représentation du comportement dynamique global de la structure.

Dans le lot 5, il s’agit de confronter des méthodes paramétriques et non paramé-triques de quantification des incertitudes, dans un contexte déterministe puis dans un cadre probabiliste.

Enfin, le lot 6 propose de comparer les variabilités numériques totales observées (via le benchmark du lot 3) et simulées (dans le lot 5). Cette comparaison permettra de statuer sur la capacité des méthodes utilisées dans le lot 5 à quantifier de manière prédictive la confiance qu’on peut accorder au résultat de calcul. Les méthodes les plus adaptées à une application industrielle seront retenues en vue d’en dégager des coefficients de sécurité et des intervalles de confiance pouvant être employés dans d’autre cas en dynamique des structures.

La littérature récente présente des applications intéressantes de la démarche sui-vie dans le cadre du projet SICODYN à des structures de différentes tailles et échelles [Schuëller et Pradlwarter 2007,Atamturktur et al. 2012,Linderholt et al. 2015,Van Buren et al. 2015].

8.3 Verrous technologiques

Les principaux verrous techniques et scientifiques que le projet se propose de lever sont les suivants :

— Application de méthodes à des structures à grand nombre de de-grés de liberté :

Un enjeu important est celui d’éprouver, sur des structures à grand nombre de degrés de liberté, des méthodes décrites théoriquement, et éventuellement testées sur des structures académiques simples, conçues spécialement pour la démonstration de leur faisabilité.

— Application de méthodes à des structures assemblées :

Outre les problèmes liés à la taille généralement élevée des modèles de struc-tures assemblées, la prise en compte des liaisons, source majoritaire d’incerti-tudes, augmente considérablement le nombre de paramètres à considérer dans les processus de corrélation calcul-essai et de quantification des incertitudes. — Prise en compte du milieu environnant :

La prise en compte du milieu environnant est essentielle pour l’industriel. L’enjeu est de statuer sur la capacité d’un modèle, mis au point avec des conditions aux limites simplifiées, à représenter le comportement dynamique de cette structure considérée dans son environnement industriel, dans un contexte purement prédictif.

— Estimation de l’incertitude de modèle et de l’incertitude numérique totale :

L’estimation de l’incertitude liée aux paramètres de modèle est réalisée par des méthodes éprouvées depuis un certain nombre d’années. La quantification des incertitudes de modèle est en revanche un champ nouveau, qui commence à être étudié par certains laboratoires. Ce projet permet de statuer sur la ca-pacité des méthodes numériques à reproduire les incertitudes effectivement observées.

— Amélioration de la robustesse des modèles vis-à-vis des incerti-tudes :

La robustesse est un des éléments justifiant de la crédibilité d’un modèle. Ce projet répond à l’état de robustesse de modèles numériques de structures assemblées, en distinguant ce qui relève de la robustesse du phénomène phy-sique lui-même (certaines conditions aux limites) et de la représentation de ce phénomène par le modèle.

Analyse modale expérimentale

Ce chapitre présente l’analyse modale expérimentale réalisée sur un assemblage de deux composants de la pompe. Plusieurs configurations de serrage et différents

niveaux de sollicitation ont été envisagés. Les résultats obtenus permettent d’évaluer la variabilité expérimentale

de réalisation d’une structure industrielle.

Sommaire

9.1 Description du montage. . . 152