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3.3.1.1- Le mode de fonctionnement

Pour favoriser le verrouillage par effet soliton, nous avons noté précédemment qu’un absorbant saturable doit être impérativement introduit dans la cavité laser. Une première solution serait l’insertion d’un cristal Cr:YAG (Cr4+:Y2Al5O12) comme absorbant saturable.

Mais cet absorbant saturable est inadapté pour un régime « mode-locking ». En effet, c’est le régime « Q-Switch » qui sera observé à cause de sa durée de vie de l'état excité trop longue. Il faut se tourner vers une autre solution : les matériaux semi-conducteurs. Tout d’abord, ils présentent l’avantage d’une transmission non-linéaire suivant l’intensité incidente. Cette transmission non-linéaire leur confère les propriétés d’un absorbant saturable. En effet, en l’absence de saturation du semi-conducteur, celui-ci introduit de fortes pertes pour le régime continu. Par contre, de fortes intensités incidentes provoquent une saturation de l'absorption du matériau semi-conducteur et introduisent en conséquence moins de pertes pour le régime impulsionnel. De plus, pour s’adapter à nos configurations d’études, il est possible de jouer sur les valeurs de certaines caractéristiques des semi-conducteurs comme le « gap », la profondeur de modulation en variant l’épaisseur du matériau, et le temps de réponse en variant la température de croissance du matériau [Brovelli 95]. Il est alors possible d’obtenir des temps de réponse inférieurs à la période du train d’impulsion, et ainsi d’éviter les problèmes de « Q-Switch ». Il devient maintenant concevable de favoriser le régime impulsionnel au détriment du régime continu et du « Q-Switch ». Malheureusement, les semi- conducteurs ont des sections efficaces d’absorption de l’ordre de 10-16 cm², très supérieures aux sections efficaces du milieu amplificateur de l’ordre de 10-19-10-20 cm². En conséquence, le semi-conducteur massif sature déjà en régime continu et il ne peut en conséquence avoir un comportement non-linéaire. Finalement, le dernier inconvénient des semi-conducteurs est l’introduction de pertes trop importantes intracavité.

Pour passer outre ces problèmes de sections efficaces d’absorption importantes du semi- conducteur et des pertes intracavité trop fortes, Keller et al ont développé des miroirs absorbants saturables à semi-conducteur ou couramment appelés SESAM [Keller 92]. Il s'agit d'un absorbant saturant placé entre deux miroirs. Le miroir de fond du SESAM est un miroir de Bragg hautement réfléchissant. Ce miroir de Bragg est la succession d’une vingtaine de paires de couches GaAs/AlAs d’épaisseur optique27 de λ/4, présentant une réflectivité maximale, de plus de 99 %. En comparaison, la réflectivité du second miroir du résonateur Fabry-Pérot peut être variable. La réflectivité du second miroir définit la finesse de Fabry- Pérot du SESAM. Une haute réflectivité signifiera une structure de haute finesse et une faible réflectivité une structure de basse finesse.

Pour que la condition antirésonance soit vérifiée, il faut que le Fabry-Pérot soit d’épaisseur optique de λ/2. Ceci nous permet de nous assurer que l’absorbant soit large bande et qu’il n’introduise aucune dispersion de vitesse de groupe.

Pour un SESAM basse finesse, la réflectivité du miroir d’entrée est due à la réflexion de Fresnel sur l’interface air/semi-conducteur (Figure 3.6 (a)). Etant donné que l’indice de réfraction du GaAs est de 3,5 dans la plage de longueurs d’onde proche infrarouge, la

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Epaisseur optique est définie comme le produit de l’indice de réfraction n du milieu par la longueur physique du milieu traversé l.

réflexion de Fresnel est proche de 30 %. Cette première couche de GaAs permet également au champ électrique d’être sur un ventre (ou anti-nœud) au niveau de la très fine épaisseur (un ou plusieurs puits quantiques) d’absorbant saturable (Figure 3.6 (b)). Cette configuration permet de réduire l’intensité de saturation du SESAM. La fluence de saturation peut varier suivant les configurations de quelques dizaines à la centaine de µJ.cm-2.

Figure 3.6: Schéma représentatif d’une structure SESAM classique basse finesse (a) et zoom sur l’entrée du SESAM (b)

Dans de telles conditions, le SESAM est cavité Fabry-Pérot à la condition d'antirésonance [Fabry 1923]. Une telle cavité introduit à l’antirésonance peu de dispersion de vitesse de groupe (Figure 3.7) : la dispersion de vitesse de groupe étire temporellement l’impulsion laser. De plus, la cavité Fabry-Pérot est hautement réfléchissante à l’antirésonance (Figure

3.7). L’intensité lumineuse sur la couche de l’absorbant saturable peut donc être contrôlée par

la géométrie du Fabry-Pérot. Cette cavité permet ainsi de réduire les pertes et d’accroître l’énergie de saturation à volonté.

Figure 3.7: Caractéristiques d’un Fabry-Pérot à la condition d’antirésonance. La dispersion de vitesse de groupe (bas) et la réflectivité (haut) en fonction de la longueur d’onde

Mais que se passe-t-il dynamiquement au sein de ces SESAMs? La fonction absorbant saturable est réalisée dans le ou les puits quantique(s) en InGaAs du SESAM. La lumière incidente sur l’absorbant saturable excite les porteurs de charge vers les niveaux d'énergie supérieurs. Si tous les niveaux d'énergie supérieurs sont occupés, il y a blanchissement de l'absorbant saturable : il n’absorbe plus. On peut aussi définir le temps de réponse de l'absorbant saturable comme étant le temps de retour à l’équilibre. Ce temps est déterminé par la dynamique des porteurs de charge. La réponse temporelle est en fait une réponse bi- exponentielle (Figure 3.8) avec un temps de recombinaisons très court (recombinaison des excitons) et un temps plus long de retour à l’équilibre des porteurs.

Figure 3.8: Mode d’un absorbant saturable d’un semi-conducteur. La réponse bi-temporelle usuelle de ce dispositif à une excitation Eex énergie d’excitation, D(Eex) densité d’état est également

représentée [Aus der Au, 2001]

Elle est la succession dans un premier temps d’une thermalisation intra-bande et ensuite d’une recombinaison interbande. Tout d’abord, la thermalisation des porteurs est liée à la

désexcitation des électrons. Cette diffusion correspond à une réponse temporelle rapide de l’ordre de la centaine de femtosecondes (Figure 3.8). Ensuite, la recombinaison interbande participe à une contribution beaucoup plus longue variant de la picoseconde à la nanoseconde dans la réponse temporelle (Figure 3.8). Elle peut être accélérée par l’introduction d’impuretés dans la structure (par une croissance à basse température) afin de créer des pièges entre les bandes de conduction et de valence.

3.3.1.2- Propriétés macroscopiques du SESAM

Les caractéristiques macroscopiques principales d’un SESAM sont la fluence de saturation

Fsat (en J.m-²), la profondeur de modulation ΔR et les pertes non-saturables ΔRns, (ou de manière équivalente les réflectivités minimale et maximale du dispositif Rlin et Rns), et enfin le

temps de recouvrement τ. A l’exception du temps de recouvrement, toutes les autres caractéristiques peuvent être aisément déterminées par la mesure de la réflectivité non- linéaire statique du SESAM (Figure 3.9).

Figure 3.9: Représentation de la réflectivité non-linéaire en fonction de la fluence incidente sur le SESAM et définition des principales caractéristiques du SESAM

La profondeur de modulation ΔR représente le maximum de changement de la réflectivité du

SESAM. La fluence de saturation Fsat représente la fluence incidente nécessaire pour blanchir

le dispositif à 1/e de la profondeur de modulation. Rns et Rlin définissent les réflectivités

maximale et minimale du SESAM. Les pertes non-saturables ΔRns incluent les pertes par

diffusion à la surface de l’échantillon, les phénomènes d’absorptions résiduelles dans le semi- conducteur, les pertes par absorption à deux photons et la réflectivité du miroir de Bragg

Pour saturer le SESAM, il faut s’assurer que la fluence incidente soit supérieure à la fluence de saturation. Pour cela, la fluence incidente sur le SESAM est reliée avec le rayon du faisceau laser par la formule suivante :

(3.8)

où F est la fluence incidente, Psortie la puissance moyenne en sortie de l’oscillateur, tsortie la

transmission du miroir ou coupleur de sortie, fres la fréquence du résonateur et wle rayon du

faisceau laser. Pour rappel, la fréquence du résonateur laser correspond à la cadence de répétition des impulsions pour un laser femtoseconde à verrouillage des modes en phase, définie équation (3.2)

Pour obtenir une fluence sur le SESAM de 600 µJ.cm² pour une puissance moyenne souhaitée de 500 mW après un coupleur de sortie de 5 % et une fréquence de répétition de 100 MHz, la taille du faisceau laser doit être égale à 73 µm. Il faut choisir au préalable le miroir de focalisation sur le SESAM.

Cette partie s’est principalement axée sur la description et le principe de fonctionnement d’un SESAM et également le choix du SESAM dans une cavité laser femtoseconde. Ceci nous montrera l’importance de simuler au préalable les rayons du faisceau laser grâce à des logiciels comme LASCAD [LASCAD] ou Paraxia [Paraxia] basés sur le principe de l’optique matricielle adaptée aux faisceaux gaussiens [Caperson 81].