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Anesthésie en chirurgie thoracique

E. Ventilation uni pulmonaire :

L'intubation et la ventilation à poumons séparés sont des spécificités de la chirurgie thoracique. L'utilisation de cette modalité ventilatoire n'est pas consensuelle et ses indications sont très variables d'une équipe à l'autre et dans la littérature. L'intubation sélective comporte cependant des avantages non négligeables dont il serait dommage de ce priver par crainte d'effets secondaires le plus souvent mineurs.

1. Indications :

Les indications de ventilation unipulmonaire et d'intubation sélective ne font pas l'objet d'un consensus. mais on reconnait des indications dites « absolues » et d'autres dites « relatives » en fonction des équipes [51,52,53] .

Les indications « absolues » sont :

la protection du poumon sain en cas d'infection ou d'hémorragie du poumon pathologique, protégeant des complications telles que les atélectasies, les pneumopathies et les infections postopératoires ;

le contrôle de la distribution des flux ventilatoires dans les pathologies particulières telles que les fistules broncho pleurales, la chirurgie majeure de l'arbre bronchique, les bulles d'emphysème géantes [51].

Parmi les indications dites « relatives », on peut citer les circonstances ou l'exposition chirurgicale revêt une grande importance. Ce sont en particulier les interventions de chirurgie vasculaire, les résections pulmonaires systématisées ou non, l'abord du médiastin. De l’œsophage et du rachis dorsal ainsi que les pathologies Pulmonaires hypoxémiantes unilatérales graves. En effet par

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exemple lors d'une pneumonectomie, l'effondrement du poumon permet un bien meilleure exposition du hile.

Avec l'apparition de nouvelles techniques chirurgicales, on a mieux ciblé les utilisations de l'intubation sélective et de la ventilation uni pulmonaire [53]. Parmi ces nouvelles techniques, la thoracoscopie est de plus en plus répandue en chirurgie thoracique (chirurgie pulmonaire proprement dite, mais aussi chirurgie de l'œsophage, du rachis dorsal). La thoracoscopie permet d'éviter la grande incision de thoracotomie, ce qui atténue les douleurs postopératoires. La thoracoscopie nécessite obligatoirement une exclusion pulmonaire parfaite pour permettre le geste chirurgical, car sinon il serait impossible de bien exposer le site. L'introduction d'écarteurs reste bien sûr possible mais complique le geste.

La chirurgie de réduction pulmonaire est le plus souvent unilatérale et ses indications se multiplient. On recourt d'abord à ces interventions dans les bulles géantes unilatérales. Il est alors recommandé de ne pas ventiler le côté pathologique (intubation et exclusion pulmonaire avant toute ventilation), car la ventilation en pression positive fait courir le risque de pneumothorax. Ensuite en cas de petites bulles multiples, la ventilation risque d'augmenter le volume pulmonaire et l'auto-PEP, contre-indiquant le protoxyde d'azote.

2. Inconvénients :

a. Hypoxie :

Une baisse de la PO2 est obligatoire en ventilation uni pulmonaire, de 25 à 30% des patients devenant hypoxiques (PaO2< 80 mm Hg), même quand le poumon inférieur est ventilé en oxygène pur. Cette hypoxie s'explique par le

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shunt intra pulmonaire du poumon supérieur, aggravé éventuellement par une altération du rapport ventilation/perfusion [53].

Pour lutter contre hypoxie, il importe de bien connaitre les facteurs influençant le shunt. Les facteurs qui l'augmentent comportent les vasodilatateurs (trinitrine). Les inhibiteurs calciques ou les B2-mimétiques. L'hypocapnie et l'alcalose l'augmentent également, d'où l’intérêt du monitorage de la FeCO2, permettant d'optimiser la ventilation. Enfin le remplissage vasculaire, la dopamine ou une PEP sur le poumon inférieur sont susceptibles de majorer le shunt.

En fait, le shunt en ventilation uni pulmonaire dépend principalement de la répartition droite et gauche de la perfusion pulmonaire. On peut l'évaluer en préopératoire par une scintigraphie pulmonaire de perfusion et prévoir ainsi la tolérance à l'exclusion pulmonaire [53].

La vasoconstriction pulmonaire hypoxique, qui est un facteur limitant le shunt, peut être altérée dans certains cancers bronchiques.

Le monitorage systématique de l'oxymétrie de pouls permet d'adapter la conduite à tenir au cas par cas.

Quand l'hypoxie survient au bloc opératoire, plusieurs moyens permettent d'y remédier. Il est logique de ventiler le poumon inférieur en oxygène pur (il est même recommandé de ventiler en 100% FiO2, au moins 15 minutes de avant l'exclusion).

On peut aussi reventiler le poumon exclu pendant quelques secondes mais cela suppose une interruption transitoire du geste opératoire, surtout en thoracoscopie. L'insufflation d'oxygène sous pression positive permanente (5.7

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cmH2O) dans le poumon exclu permet des échanges gazeux par diffusion et mérite d'être largement utilisée.

En dernier recours, un clampage total ou partiel de l'artère pulmonaire du poumon exclu résout le problème.

La crainte d'une hypoxie ne doit donc pas faire contre indiquer une ventilation uni pulmonaire. Les moyens cités plus haut permettent de résoudre le problème et ainsi facilitent l'utilisation de la ventilation séparée [53].

b. Difficultés techniques :

Des conformations anatomiques particulières, notamment trachéales, peuvent rendre l'intubation difficile. Une solution simple peut consister à pratiquer une intubation sélective avec un tube usuel en le poussant dans la bronche souche éventuellement sous contrôle fibroscopique (pour le côté gauche). Cette technique simple expose cependant à l'atélectasie du lobe supérieur droit par blocage de la bronche lobaire supérieure droite. De plus on ne peut ni pratiquer des aspirations bronchiques sur le côté opéré ni y administrer de l’oxygène. Cette méthode ne constitue donc pas ici une solution satisfaisante.

Une solution plus sophistiquée réside dans l'utilisation de la sonde Univent soit d'emblée, soit sur un guide mis en place sur une sonde d'intubation classique »[52,53]. L'intubation difficile n'est pas un obstacle à la ventilation sélective. même si elle apporte des contraintes supplémentaires.

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c. Complications :

L'intubation sélective est responsable de complications propres. La fréquence des traumatismes laryngés est évaluée à 1%. Ils sont le plus souvent dus à une mauvaise position de l'ergot lors du passage des cordes vocales. La manifestation la plus fréquente en est la laryngite. Une lésion cordale ou une atteinte des aryténoïdes est exceptionnelle. Les ruptures trachéales ou bronchiques sont beaucoup plus rares, de l'ordre de 1/500. Elles apparaissent au niveau des ballonnets trachéaux ou bronchiques[52].

Les complications peropératoire sont le plus souvent liées à une mauvaise position de la sonde : déplacement au cours des changements de position, impossibilité d'exclusion ou d'affaissement du poumon, fuites.

En cas de difficultés. Il faut reprendre la ventilation bilatérale, vérifier la position de la sonde et la corriger puis reprendre l'exclusion.

En définitive, l'intubation sélective et la ventilation uni pulmonaire font appel à des techniques éprouvées avec du matériel rode. Les indications, même si elles restent débattues, sont admises par un grand nombre d'équipes. La ventilation séparée a ses indications classiques auxquelles il faut en ajouter de nouvelles depuis l'apparition de nouvelles techniques chirurgicales et de nouvelles indications. L’exemple typique en est la thoracoscopie où l'exclusion pulmonaire est obligatoire.

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Gestion de l’intubation difficile en

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