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Le dilemme que certains croient voir entre une théorie qui soutient que l'éducation est la transformation de l'homme en un être nouveau, indé-

pendant et autonome, capable de créer un monde nouveau à partir de l'édu- cation de soi-même, et l'autre qui affirme que l'éducation est la déter- mination sociale exprimée en termes culturels, qu'elle est le processus d'adaptation à la réalité existente, et, qu'à partir d'elle, l'homme peut seulement trouver sa propre réalité sociale, nous semble être un faux dilemme.

Il nous semble qu'à partir d'une affirmation simple, nous pouvons résoudre ce dilemme.

Nous concevons l'éducation comme étant lié au processus de produc- tivité. Le travail éducatif, en tant qu'expression historique, est un pro- cessus qui toujours cherche quelque chose et y conduit. Plus clairement, il est une force de production. Comme nous le disions auparavant, c'est un processus qui peut conduire au "savoir", au "savoir-faire" ou au "sa- voir-quoi et pourquoi faire".

Bourdieu et Passeron ont fait diverses analyses des expressions socio-culturelles de ces forces productives mises au service d'un système de production déterminé .

Toute force productive réalise son existence à l'intérieur de rap- ports de production déterminés. Entre eux, il nous semble y avoir une relation d'affirmations et de négations mutuelles. Relation semblable à celle qui existe entre la superstructure et l'infrastructure sociale, c'est-à-dire, non pas une simple relation de dépendance unilatérale, mais plutôt dialectique. C'est ainsi que, quand les produits de la conscience sociale "entrent en conflit avec les relations existantes, cela se produit seulement parce que les relations sociales existantes sont entrées cn contradiction avec la force productive existante" .

D'où le double rôle de l'éducation, d'une part elle est conséquence de l'affirmation de la réalité sociale qui cherche à se perpétuer, et de l'autre une négation de l'affirmation d'une telle perpétuation.

Répétons-le, l'éducation nous semble être une force productive, un processus qui "vise à transmettre une certaine compétence, un savoir et

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un savoir-faire" . Elle est, en tant que pratique éducative, une appro- priation du milieu humain. Selon l'expression de E. Balibar, une relation d'appropriation réelle.

Cette force productive se trouve organisée à l'intérieur d'un rap- port de production, c'est-à-dire dans un système de relation de propriété. Les forces productives reflètent les types de rapport de production dans lesquels elles se trouvent. Mais en même temps ce rapport de production est sa propre limite. De telle façon que "toutes les collisions de l'his- toire tirent leur origine de la contradiction entre les forces productives

g et les systèmes de relation" .

Nous pourrons donc distinguer trois interprétations du sens de l'éducation:

1) L'éducation comme l'expression directe des rapports de produc- tion, c'est-à-dire les forces productives sont sous la dépendance déter- minante du système dominant. L'éducation est une force instrumentalisée d'adaptation aux relations sociales.

2) Les forces productives sont indépendantes des rapports de pro- duction. En ce cas l'éducation a son propre chemin. Elle est créativité de l'homme autonome, de la conscience autonome.

3) Les forces de production sont à l'intérieur des rapports de production, mais dans son développement, en conséquence de cette dialec- tique interne, elles "entrent en contradiction avec les rapports de pro- duction en vigueur, ou, ce qui n'est rien d'autre que son expression juridique, avec les rapports de propriété et dans lesquels elles se sont jusqu'alors développées. A partir des formes de développement des forces productives, ces rapports se transforment en chaînes. C'est alors que

g commence une époque de révolution sociale" .

En ce cas l'éducation serait à notre avis une antithèse. D'une part, reflet de la réalité de la thèse et d'une autre, sa négation. A partir de là, nous établirons la relation avec l'éthos social. Trois pos- sibilités se présentent à nous, selon la triple considération formulée tout à l'heure:

1) L'éducation comme adaptation; expression des rapports de pro- duction. Dans ce cas l'action éducative ou son résultat impliqueraient de concéder une plus grande importance sociale aux valeurs d'adaptation instrumentale à la réalité, à la motivation négative ou positive des va- leurs de contrôle social et de transmission culturelle. C'est-à-dire que du point de vue structural de l'éthos, à une plus haute scolarité devrait correspondre une plus grande valorisation de ce que nous avons appelé économie, morale et éducation. Par contre nous devrions observer une déva- lorisation de la politisation ou de l'importance relative accordée aux valeurs politiques.

2) L'éducation comme création de la conscience autonome, située en dehors de la détermination des rapports de production, recherche de l'intériorité et de l'autarcie.

En ce cas, nous devrions constater qu'à mesure qu'on y trouve un plus haut niveau de scolarisation, les valeurs économiques devraient per- dre en importance. Les valeurs morales, dans le sens sociologique, ex- pression de contrôle social, devraient également subir une dévalorisation progressive. Par contre, les valeurs qui comprennent le maniement de la tension, l'expression des sentiments, c'est-à-dire les valeurs affectives aussi bien que les valeurs éducatives devraient acquérir une importance croissante à l'intérieur de la structuration de l'éthos.

3) L'éducation comme antithèse.

Dans cette éventualité, les valeurs morales devraient accroître en importance comme une conséquence de la prise de conscience du poids des valeurs de contrôle social existantes dans le système. Les valeurs éco- nomiques, expression des rapports de production qui entrent en conflit avec les forces productives en expansion, devraient suivre un chemin dé- croissant. Par contre, les valeurs politiques devraient présenter un mouvement de croissance, expression d'une part, d'une plus grande politi- sation et de l'autre expression d'opposition au contrôle social et à la frustration économique.

En résumé, dans la construction d'un indice de la structure de l'éthos en rapport avec les quatre catégories de la scolarisation compri- ses dans l'étude, nous devrions constater un des trois cas que nous pré- sentons dans le tableau suivant:

Cas 1 Cas 2 Cas 3

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