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Chapitre 3 Conclusion générale

3.3 Variation génotypique, croissance en hauteur et aoûtement

Une troisième hypothèse testée était que pour certains gènes reliés à l’acclimatation, il y avait une interaction entre le génotype et le stade physiologique, c’est-à-dire que l’expression génique de certains génotypes pourraient varier dans le temps alors que d’autres le feraient moins. La dernière hypothèse était que le niveau d’expression des transcrits de certains gènes potentiellement reliés à l’acclimatation variait selon le génotype observé. Des variations de niveau d'expression entre les classes génotypiques ont été observées pour quatre gènes candidats analysés dans cette étude (tableau 3 et figures 3 et 4): deux gènes pour les dates #1 et #2 (leucine-rich receptor-like protéine kinase [BT108223] et le facteur de transcription GRAS [BT114502]), un gène à la date #1 (zinc finger C2H2 [DV997502]) et un gène à la date #2 (zinc finger C3HC4 [BT106728]). La plupart des zinc fingers se lient à un ADN double brin, l'ARN ou les protéines (Iuchi 2001) et peuvent jouer plusieurs rôles divers, tels que régulateur de la transcription dans les réponses au froid et à la sècheresse chez Arabidopsis (Huang et al. 2005). Les Leucine-rich receptor kinases (LRR-RKS) constituent quant à elle la plus grande sous-famille des récepteurs kinases transmembranaires comme chez les plantes, et elles sont déjà reconnues pour réguler une grande variété de processus de développement ou de défense, y compris la prolifération cellulaire, la perception d’hormones, la défense et la guérison de blessures chez Arabidopsis (Torii 2004). Quant aux protéines GRAS, elles ont été signalées dans la tolérance au sel et à la sécheresse chez Arabidopsis. Les variations significatives d’expression observées entre les classes génotypiques pour ces gènes soutiennent l’idée de la participation directe de ces SNPs dans l'adaptation.

Une interaction génotype x date a été observée pour les deux gènes de type Zinc finger (C2H2 type et C3HC4 type) (tableau 3 et figure 3), démontrant que le lien entre

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l’expression et le génotype peut varier à un moment de l'année. Ceci était attendu, étant donné la complexité de la régulation transcriptionnelle et le grand nombre de facteurs y contribuant. Compte tenu des différents profils d’expression liés à différentes étapes de développement chez l'épinette blanche (El Kayal et al. 2011), ces interactions entre le génotype et l'état physiologique étaient aussi espérées.

Des analyses de la variance entre classes génotypiques pour les différentes valeurs phénotypiques des arbres (aoûtement et la croissance) ont montré une forte association entre l’aoûtement et le génotype à la première date d'échantillonnage pour trois gènes (Zinc finger C2H2 type, 2-oxoglutarate (2OG) et Fe (II)-dépendante oxygénase et B-Box zinc finger) (Tableau S2). Le score d’aoûtement pour un des génotypes homozygotes était significativement différent des autres classes génotypiques. Un score d’aoûtement plus élevé signifie que les arbres forment les bourgeons plus tôt. Plus tôt le bourgeon se forme, plus tôt l'arbre est prêt à traverser la saison froide, ce qui implique également une meilleure adaptation aux conditions environnementales les plus froides (Bigras et Colombo 2001). Pour le zinc finger C2H2, le génotype lié à la cote la plus élevée d’aoûtement était également le génotype lié au niveau d'expression plus faible pour ce gène.

Des interactions entre la date d'échantillonnage et le génotype ont été observées pour deux des gènes ayant également présenté des effets génotypiques significatifs (zinc finger de type C2H2 et zinc finger C3HC4). En outre, un effet significatif du génotype du SNP candidat sur l’aoûtement a été observé pour deux gènes (Zinc finger C2H2, 2- oxoglutarate (2OG) et Fe oxygénase (II) dépendant) au jour #1. Au total, ces résultats démontrent un lien entre le génotype, son expression et le phénotype, en particulier pour le gène Zinc finger C2H2. Ce lien avait déjà été démontré pour la qualité du bois chez l'épinette blanche par Beaulieu et al. (2011), qui ont trouvé une majorité de facteurs de transcription dans un ensemble de gènes présentant des corrélations entre les génotypes, l’expression et les phénotypes. Les autres SNPs des gènes candidats étudiés pourraient aussi être liés à la fois à l'expression des gènes et aux variations phénotypiques comme pour ce gène Zinc finger C2H2, mais l'échantillonnage d’un seul SNP par gène et à seulement deux dates n’était probablement pas suffisant pour montrer toutes les variations d'expression reliées au génotype.

49 Cependant que de telles études à plusieurs dates, avec un plus grand nombre de gènes candidats et plusieurs SNPs par gène candidat nécessiteraient des dispositifs expérimentaux imposants et coûteux selon les technologies disponibles. Nos résultats ici se veulent une fenêtre sur le potentiel de telles études. Ainsi, cette expérience pilote a pu démontrer hors de tout doute raisonnable l’intérêt de telles études et comment la variation génotypique peut se répercuter sur la variation d’expression de gènes candidats incluant celle des facteurs de transcription.

La variation d’expression observée entre classes génotypiques d’un même gène n’a pas l’ampleur de celle mesurée entre différents tissus ou entre différentes dates durant la saison de croissance, mais elle fut tout de même significative dans quelques cas (atteignant un facteur de deux) pour certains gènes et classes génotypiques. Ceci démontre que pour des caractères quantitatifs comme l’aoûtement ou la croissance, et qui sont contrôlés par une multitude de gènes (El Kayal et al. 2011), les effets de la variation génotypique à un seul gène peuvent être importants, au niveau de son expression. Alors on peut imaginer, par exemple, l’ampleur du résultat combiné de tels effets génotypiques impliquant des dizaines de gènes, et qui se répercute sur le phénotype et la valeur adaptative de chaque individu.

D’autre part, les SNPs analysés ne sont pas nécessairement les SNPs causals de la variation d’expression observée mais ils sont sûrement liés à ces derniers par vertu de déséquilibre de liaison (Namroud et al. 2008; Prunier et al. 2011, 2012). Des études plus détaillées des cas les plus prometteurs à l’aide de l’analyse génotypique par séquençage complet de gènes candidats pourraient permettre d’affiner les présentes conclusions.

La présente étude avait aussi pour but ici que de ne tester les effets génotypiques de type cis-. Il est évident que la présente étude n’a pas été élaborée en fonction de détecter de possibles effets trans- de la variation génotypique à un gène, sur l’expression d’un ou plusieurs autres gènes. Ces études sont complexes et demanderaient des dispositifs raffinés avec des couples de facteurs de transcription et de gènes constitutifs où de tels effets seraient présumés. Il en ressort donc que même si des effets cis- n’ont pas été détectés pour tous les gènes candidats analysés dans la présente étude, de possibles effets trans- pourraient exister. Il n’en demeure pas moins que la présente étude constitue l’une des

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premières permettant de démontrer une relation directe entre la variation génotypique et la variation d’expression chez les conifères.

Les deux hypothèses sont validées, car l’expression de certains gènes a présenté une interaction entre le génotype et le stade physiologique et l’expression des transcrits de certains gènes variait selon le génotype observé. Ces validations s’applique toutefois à une faible proportion des gènes étudiés.

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