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Les variables néo-institutionnelles et l’innovation : idées, intérêts, institutions et

Chapitre 2 : Cadre théorique et méthodologique : idées, intérêts, institutions,

1. Approche théorique : le néo-institutionnalisme

1.1. Les variables néo-institutionnelles et l’innovation : idées, intérêts, institutions et

La problématique centrale du néo-institutionnalisme est l’explication du rôle des institutions22 dans la détermination des résultats politiques, économiques et sociaux (Hall et Taylor 1997; Gazibo 2005). Deux axes de recherche privilégiés par les théoriciens néo- institutionnalistes correspondent à la problématique qui fait l’objet de la présente recherche. Le premier axe analyse le développement des institutions et des politiques publiques. Il s’intéresse à l’émergence des institutions ou des politiques, à leur maintien et à leur disparition. Il analyse les mécanismes d’innovation, de changement et de stabilité politique.

Le second axe se focalise sur la relation existant entre les institutions et les acteurs. Il recherche la manière par laquelle les institutions ou les politiques publiques structurent le comportement des acteurs et produisent des résultats donnés (Weingast 1997; 2002; Weingast et Marshall 1988; Alt et Schepsle 1998; Bates 1981; 1988; 1997; Bates et Schepsle; Greif et Levi 1998). Il s’intéresse également à la manière par laquelle les acteurs influencent les institutions pour obtenir certains résultats. Afin de résoudre ces problèmes, plusieurs concepts sont développés par les institutionnalistes.

Pour l’une ou l’autre des problématiques, les institutionnalistes utilisent quatre principales variables tantôt considérées comme dépendantes ou indépendantes pour expliquer les phénomènes observés. Il s’agit des idées (Saint-Martin 2002; Blyth 2002; Brinton et Nee 1998; Cambell 1998; Di Maggio 1998; Di Maggio et Powell 1991), des intérêts (Alt et Shepsle 1998; Bates et Shepsle 1997; Scharpf 1989; 1992; 1997), des institutions (Atkinson 1993; Béland 2002; Chang 2002; Gazibo 2005a; 2006; 2007;

Bratton et van de Walle 1997) et du temps (Pierson 2004; Abbot 1983; 2001; Arthur 1994; Collier et Collier 1991). Une présentation schématique nous permettra d’aboutir à l’élaboration de notre cadre théorique.

Les auteurs qui privilégient les idées (March et Olsen 1984; 1989; Remmer 1997, Koelble, Di Maggio et Powell 1991) comme variables indépendantes expliquent le développement institutionnel par les valeurs, les facteurs culturels et cognitifs qui y sont sous-jacents. Aussi, la relation entre institutions et acteurs reflète, oriente-telle ou reproduit-elle les logiques culturelles, cognitives et sociales dominantes. Cette variable est le plus souvent utilisée par les institutionnalistes dits sociologiques et les perspectives culturelles ou des idées de l’institutionnalisme historique (Hall et Taylor 1997). Il en va autrement pour les auteurs qui privilégient les intérêts.

Les institutionnalistes qui privilégient les intérêts (North 1990; Levi 2001; Weingast 1997; 2002; Weingast et Marshall 1988; Bates 1981; 1983; 1988; 1997; Bates et Schepsle 1997; Shepsle et Weingast 1982; 1995; Shepsle 1986) ont le plus souvent une perspective épistémologique individualiste et une conception stratégique des institutions. Ils expliquent le développement institutionnel et la relation entre les institutions et les acteurs à partir des intérêts et de la stratégie des acteurs qui cherchent à maximiser leurs gains en minimisant leurs coûts. Cette variable est le plus souvent utilisée par les institutionnalistes dits du choix rationnel et la perspective calculatrice ou des intérêts de l’institutionnalisme historique (Hall et Taylor 1997).

Les institutions sont utilisées par la quasi-totalité des auteurs, mais certains insistent plus que d’autres sur leur rôle structurant dans la détermination de résultats politiques,

économiques et sociaux (Evans et al. 1985; Pierson 1993; 1994; 1996; 2000; 2004; Alexander 2001; Chang 2002; Thelen 2003)23.

La dernière variable utilisée est le temps. Les auteurs situent l’analyse dans le temps24 afin de détecter des mécanismes qui permettent d’expliquer les phénomènes observés (Collier et Collier 1991; Abbot 2001; Mahoney et Rueschemeyer 2003; Pierson 2004). Cette variable est particulièrement prisée par les institutionnalistes historiques et, dans une moindre mesure, par les institutionnalistes sociologiques.

Si plusieurs auteurs sont restés cloisonnés dans l’usage des différentes variables, on note une combinaison croissante de ces dernières dans plusieurs analyses (Hall 1989; Weinsgast 2002; Thelen 2003; Gazibo 2005). Cette combinaison accroît la valeur heuristique des analyses du fait que chacune des variables soit utilisée pour expliquer l’aspect du phénomène dont elle est le mieux capable de rendre compte.

Afin d’éviter la redondance, une présentation plus exhaustive de ces différentes variables et de la manière par laquelle elles affectent l’innovation en matière de stratégie de développement est proposée dans chacun des chapitres y afférents, notamment le chapitre 3 (le temps et le contexte sociohistorique), le chapitre 4 (les idées, valeurs et paradigmes) et le chapitre 5 (Intérêts, stratégies des acteurs et innovation politique en Afrique).

23 En effet, si les institutionnalistes de la variante sociologique ont une interprétation plus structurante des

institutions, ceux de la perspective historique ont une conception mi-structurante mi-volontaire, tandis que ceux du choix rationnel ont une vision davantage instrumentaliste.

24 Ces derniers sont d’avis qu’il est important de considérer l’aspect temporel afin de mieux comprendre les

variables autres que factuelles à l’origine des transformations sociales observées. Cette considération permet également de mieux expliquer l’origine ou la configuration des variables plus factuelles. Il s’agit au final de mettre en relation les origines et les explications historiques et celles contextuelles des résultats de politiques. Pierson (2004), par exemple, identifie diverses manières par lesquelles le temps permet d’avoir une meilleure acuité des processus de transformation sociale en cours; les causes cumulatives, les effets cumulatifs, les chaînes causales et, enfin, la dimension qu’il critique le plus, les courtes causes pour les effets courts, qu’il est aussi possible de qualifier d’effets immédiats. Pour bien comprendre un phénomène social, il est important de savoir à quels niveaux temporels se situent ses causes.

1.2. Définition des concepts clés de l’approche institutionnelle utilisée dans la présente