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Groupes contrôle

7.2 Variables avec influence déterminée

7.2.1 Population

Nos études regroupent une population très hétérogène et nous discuterons dans les paragraphes suivants de certaines variables, comme la proportion des genres et le lieu de recrutement et de leur possible l’influence sur les résultats. L’âge au moment de la brûlure est également une variable importante car nous avons vu que, selon l’âge où survient le traumatisme, sa compréhension et l’influence de l’entourage familial sera très différent.

Compétences sociales

Parmi les trois études s’intéressant aux compétences sociales, deux études démontrent, de manière significative, de moins bonnes compétences sociales chez les enfants brûlés (Landolt et al., 2009 ; Andersson et al., 2003). Elles s’accordent en termes de taille d’échantillon, de proportion filles/garçons, ainsi que de lieu de recrutement. L’âge au moment de la brûlure se situe à moins de 8 ans dans les deux cas. On remarque cependant que la population interrogée par Andersson et al. (2003) était constituée des parents, contrairement à l’étude de Landolt et al.. (2009) où les enfants, eux-mêmes, ont rempli le questionnaire.

Par contre, la troisième étude de Pope et al. (2007) démontre, de manière significative, de meilleures compétences relationnelles chez les enfants brûlés que dans la population générale. L’âge au moment de la brûlure est sensiblement plus bas (3 ans et 8 mois) que dans les études de Landolt et al. (2009) et d’Andersson et al. (2003). Elle se situe néanmoins dans la même tranche d’âge des moins de 8 ans. Cependant, elle contient, de manière surprenante, une proportion inverse de filles et de garçons (63% VS 36%) en comparaison des deux précédentes études. Comme vu dans le chapitre « Introduction», les garçons sont statistiquement plus à risque de subir un accident par brûlure que les filles.

Cela dit, les enfants recrutés dans cette étude viennent principalement (75%) d’une association de brûlés ainsi que de camps de loisirs pour brûlés. Il est donc possible que les filles soient surreprésentées dans les clubs de brûlés et y trouvent d’avantage d’intérêt que les garçons. Cela expliquerait cette proportion inversée. C’est pourquoi, nous pouvons émettre l’hypothèse que le fait de côtoyer des pairs ayant vécu le même traumatisme peut aider à se reconstruire et à faire acte de résilience. L’échange de paroles, de réflexions et le soutien mutuel entre pairs peuvent être des facteurs positifs de récupération. Palmer (2000) a d’ailleurs identifié que les adolescents qui ont survécu à un cancer ont appris à utiliser différentes stratégies de résilience dont notamment le fait de s’exprimer sur leurs émotions douloureuses dans le cadre d’un groupe de pairs ayant survécu au

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cancer. L’étude de Badger & Royse (2010) démontre d’ailleurs que 85% d’adultes ayant survécu à une brûlure grave et côtoyant un groupe de brûlés reportent un sentiment d’espoir et de confiance en l’avenir grâce au soutien apporté par les autres survivants. L’environnement social de la jeune victime et plus précisément le soutien apporté par des pairs ayant vécu le même traumatisme semble donc avoir un impact positif considérable sur le fonctionnement social de l’enfant dans sa phase de réhabilitation. Appartenir à une association de brûlés ayant partagé la même expérience et vivant les mêmes challenges de la vie peut permettre à l’enfant de développer des mécanismes de coping sains afin de mieux accepter son apparence. S’il se sent compris et soutenu par ses pairs, il aura de meilleures chances de développer des aptitudes sociales positives au sein du groupe qui lui serviront ensuite en société. Une étude de Blakeney (2005) démontre d’ailleurs de meilleures compétences sociales que le groupe contrôle chez les participants à un programme de quatre jours d’entraînement des compétences sociales pour brûlés, mesurables une année après.

Cependant, ce cadre favorable à une meilleure réhabilitation sociale ne se retrouve pas dans les deux autres études où les enfants sont issus d’hôpitaux et non d’associations de brûlés (Landolt et al., 2009 ; Andersson et al., 2003). On remarque alors que les résultats tendent à démontrer de moins bonnes compétences sociales.

Troubles externes

Les parents ont été interrogés dans les trois études (Andersson et al., 2003 ; Liber et al., 2008 ; Graf et al., 2011), cependant l’étude de Liber et al. (2008) a utilisé deux outils de mesures différents, dont l’un est rempli par les enfants (YSR). Leurs résultats indiquent tous deux la même tendance qui est en faveur du groupe brûlé. On peut donc émettre l’hypothèse que les victimes de brûlures ainsi que leurs parents identifient et rapportent de manière similaire leurs observations (ou ressenti). Pourtant, l’étude de Salbach-Andrae, Klinkowski, Lenz & Lehmkuhl (2009), affirme que la concordance entre le report des troubles externes des parents et des enfants (11 à 18 ans) est modérée et sa conclusion s’accorde avec des études déjà existantes.

On remarque une majorité de garçons victimes de brûlure dans les trois études traitant des troubles externes. Ceci est en adéquation avec l’épidémiologie qui démontre que les garçons sont les plus touchés.

Concernant l’âge au moment de la brûlure, il varie entre 0 et 8 ans. Une seule étude (Graf et al., 2011) est réalisée avec un groupe d’enfants brûlés plus jeunes (0-44 mois) et démontre des résultats significatifs en faveur des enfants brûlés. En effet, il semble que plus le traumatisme survient tôt, moins il y a de risque de développer de troubles externes. Cela pourrait s’expliquer par le fait que les enfants de moins de 3 ans ne sont pas en mesure de percevoir la gravité d’un accident (Josse, 2011). À ce propos, Meyer et al. (2004) indiquent que les brûlés, ayant vécu le traumatisme avant l’âge des premiers souvenirs, font preuve d’une meilleure acceptation de leurs cicatrices et de leur apparence.

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Selon Howe (2003), l’apparition des premiers souvenirs se situe en moyenne vers la fin de la deuxième année de vie ce qui correspond à la moyenne d’âge au moment de la brûlure. Quant aux études qui incluent les enfants les plus âgés au moment de la brûlure (entre 0 et 8 ans) (Andersson et al., 2003 ; Liber et al., 2008), elles obtiennent des résultats contradictoires. Comme décrit dans le cadre théorique, c’est à partir de trois ans que les enfants développent une meilleure compréhension de la gravité et des conséquences du traumatisme. Ils restent toutefois sensibles à l’influence parentale qui peut palier ou non à cette difficulté (Josse, 2011). Le risque de développer des troubles du comportement social sera plus ou moins important en fonction du stade de développement de l’enfant au moment de l’accident et de la cohésion familiale. Sheridan et al. (2000) relèvent également l’importance du soutien familial qui apporte un énorme bénéfice à l’enfant et facilite ainsi sa réadaptation psychosociale.

En conclusion, nous pouvons observer qu’un traumatisme par brûlure subi avant l’âge de 2 ans aura moins de répercussions sociales chez l’enfant et qu’ainsi, il développerait moins de troubles externes que ses aînés sur le long terme.

7.2.2 Dates de parution des études

On remarque que les études ont été menées et publiées lors des dix dernières années. L’étude la plus ancienne (Andersson et al., 2003) exprime des résultats en défaveur des victimes de brûlure tandis que plus les études sont récentes, plus la tendance s’inverse et s’exprime en faveur des enfants brûlés. Nous pouvons émettre l’hypothèse que ce changement est induit par l’évolution dans la prise en charge des patients brûlés. En effet, nous avons vu, dans le chapitre « Étiologie et incidence de la brûlure » p.1, que la prise en charge bio-médicale n’a de cesse d’être étudiée et codifiée afin d’être constamment améliorée. Il est possible que les progrès de la médecine aient une influence directe sur la récupération des enfants brûlés. De surcroît, Conti et Mares (2009) relèvent que les progrès des techniques de greffes de peau conduisent à de meilleurs résultats aussi bien cosmétiques que fonctionnels. Ces améliorations ont pour but de permettre une meilleure réintégration sociale (Costagliola, 2011). En effet, l’enfant souffrira moins du regard des autres si les séquelles esthétiques sont minimisées. De plus, nous avons aussi vu que l’intérêt pour la psychopathologie de l’enfant était grandissant. Ainsi nous pouvons supposer que les professionnels de la santé se sont sensibilisés à ce sujet. Effectivement, la revue de Cody, Charlton, Dearing, Berry et Johnson (2008) à propos de la communication « centrée sur le patient » (biopsychosociale) influence de manière positive la santé du patient ainsi que son adhérence au traitement. Elle consiste à intégrer le patient dans les décisions de soins et à prendre en compte aussi bien l’environnement émotionnel que social. Par ailleurs, de meilleures connaissances sur les risques de complications psychologiques et comportementales chez l’enfant réduiraient le risque de développer des troubles du comportement suite à un traumatisme par brûlure. En effet, une étude menée en France en 2005 (Walha et al., 2005) a investigué les répercussions psychologiques - mais non comportementales - d’un traumatisme par brûlure chez les enfants. Une prise en charge psychologique précoce est recommandée et il serait pertinent de la

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proposer en parallèle au traitement médical, selon les auteurs. L’enfant doit être considéré dans sa globalité, en associant également ses parents, ceci dans un but de prévention et/ou de guérison. La date de parution de cette étude s’insère exactement entre les deux articles contradictoires (Andersson et al., 2003 et Liber et al., 2008) ce qui laisse supposer qu’au cours des années 2000, les professionnels ont été toujours mieux sensibilisés à ce modèle de prise en charge.

Malgré tout, on remarque que l’étude récente de Landolt et al. (2009) ciblées sur les compétences sociales indique de moins bonnes compétences chez le groupe brûlé. Il est donc possible que les progrès dans la prise en charge des enfants brûlés permettent à l’enfant de retourner plus vite à ses activités scolaires ou de loisirs et favorisent la reprise d’activités en groupe (Descamps et al., 2001). Cette réintégration peut avoir un impact favorable sur le développement de troubles externes mais nos études relèvent tout de même des difficultés d’adaptation relationnelle.

7.2.3 Temps écoulé depuis la brûlure Compétences sociales

On remarque que les deux études menées à moins de 8 ans post-brûlure, soit entre 4.4 ans et 7.7 ans en moyenne (Landolt et al., 2009 ; Andersson et al., 2003) démontrent, de manière significative, de moins bonnes compétences sociales chez les enfants brûlés. Par contre, l’étude de Pope et al. (2007) indique des résultats significatifs opposés à une moyenne de 12 ans post-brûlure. On peut donc supposer qu’avec le temps, l’enfant arrive à se reconstruire et à développer des compétences sociales positives. Le peu d’études retenues ne nous permet pas de définir précisément à partir de combien d’années post-brûlure ce changement s’opère. Néanmoins, on peut déduire qu’il se situe entre 8 et 12 ans en moyenne, d’après les résultats observés. Le temps semble donc jouer en faveur de l’enfant dans son processus de réhabilitation sociale. Dans leur étude, Sheridan et al. (2000) relèvent qu’après 14 ans, des enfants massivement brûlés (>70%) démontrent une qualité de vie similaire à la population normale.

Troubles externes

On remarque que le temps écoulé entre la brûlure et le moment de l’étude varie beaucoup en fonction des études. En effet, l’une est menée à long terme (7.7 ans) après la brûlure (Andersson et al., 2003) et démontre, de manière significative, des troubles externes dans la population d’enfants brûlés, tandis que l’autre est menée à court terme (14 mois) après l’accident (Graf et al., 2011) et relève des résultats contraires significatifs. Les résultats de la troisième étude (Liber et al., 2008), bien que non significatifs, viennent confirmer le manque de tendance claire puisqu’ils indiquent des données en faveur du groupe brûlé à très long terme (10-11 ans) et contredisent ainsi les résultats d’Andersson et al. (2003) dont l’étude à également été menée à long terme.

En résumé, de moins bonnes compétences sociales ont été relevées de manière significative chez les enfants brûlés jusqu’à huit ans post-brûlure. Cependant, la tendance semble s’inverser sur le très long

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terme (en moyenne 12 ans) car les enfants démontrent de meilleures compétences sociales avec le temps. Quant aux troubles externes, l’influence du temps passé depuis l’accident sur les résultats est peu claire et ne semble pas être déterminante.

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