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2.1.1Des résultats, un brevet et un article

La confrontation à grande échelle des lignées transgéniques de N. benthamiana exprimant le Nb23:EGFP avec le GFLV a mis en évidence un phénotype de résistance au virus. Considérant

l’importance des perspectives agronomiques et économiques émanant de cette observation, j'ai consacré la fin de ma thèse à approfondir ce nouveau volet du projet. La stabilisation de trois lignées homozygotes, dont deux exprimant le Nb23:EGFP et une lignée contrôle exprimant la EGFP, a permis de caractériser en détail cette résistance et de confirmer qu'elle est directement liée à la reconnaissance spécifique du GFLV par le Cb. En effet, si la protection s’est avérée très efficace contre le GFLV suite à l’inoculation mécanique de huit isolats naturels différents ou d’ARN viraux et aussi suite à la mise en contact des racines avec des nématodes virulifères, aucune protection croisée vis-à-vis de l’ArMV n’a été observée. Au cours de ces tests impliquant plus de 450 plantes, une lignée s’est révélée de façon remarquable complètement immune à l’infection par le GFLV. Sous une forte pression d’inoculum, la résistance a toutefois été partiellement levée conduisant à l’émergence de souches mutantes de GFLV pour lesquelles le Nb23 possède une affinité réduite, suggérant un mécanisme de contournement de la résistance par échappement du virus à la reconnaissance par le Nb. L’analyse structurale du complexe Nb23/GFLV, corrélant la position de toutes les mutations identifiées avec la zone de contact du Nb23 sur la capside, a permis d’asseoir cette hypothèse. De plus, cette zone est située à proximité immédiate des déterminants de la spécificité de transmission du GFLV déjà décrits (Schellenberger et al, 2010; 2011; Belval et al, 2015). L’examen de la transmissibilité par nématodes a révélé qu’au moins un des mutants caractérisés n’est absolument plus transmis par X. index, indiquant que l’épitope du Nb23 joue probablement un rôle important dans la transmission du virus par son vecteur naturel. Sur la base de ces résultats expérimentaux originaux et prometteurs, la rédaction d'une demande de brevet et celle d'un article ont été initiées, rédactions auxquelles j’ai pris part.

Le brevet EP 14305100 "Resistance to Grapevine fanleaf virus" a fait l’objet d’un premier dépôt le 24 janvier 2014 pour protéger au niveau européen les séquences des cinq Nb issus de la famille majoritaire à laquelle appartient le Nb23. Il comporte comme revendication principale le recours à une méthode permettant de conférer ou d’accroître la résistance d'une plante au GFLV par l’expression constitutive ou par le transfert de fragments d'anticorps à chaînes lourdes reconnaissant le même épitope que le Nb23. Le rapport préliminaire émis par l’Office européen des brevets a reconnu d’emblée le caractère nouveau de l’ensemble des revendications dans la lutte contre le court-noué, mais a sollicité des clarifications pour en justifier l’activité inventive en regard de la description antérieure de scFv produisant un effet antiviral similaire (Nölke et al, 2009). Ce point a été éclairci par la mise en évidence d’une résistance moindre ou inexistante conférée respectivement par l’expression constitutive du Nb122:TRFP et du Nbp59:TRFP dans des N. benthamiana qui ont été générés par Kamal HLEIBIEH dans le but de valoriser les Cb en tant que biosensors du GFLV afin d’étudier les stades précoces de l’infection et de la transmission.

Malgré la profusion de résultats accumulés, une première version d'un manuscrit a été rédigée dans un format délibérément court de type letters ou reports. Ce parti pris s‘inscrit dans l'optique de viser une publication dans un journal généraliste afin d'atteindre l’audience la plus large possible et de positionner ces travaux en pionniers pour une lutte antivirale innovante chez les plantes. La majeure partie du manuscrit présente de façon aboutie l'ensemble des résultats concernant la caractérisation biologique et moléculaire de la résistance induite par le Cb. Dans l'autre partie, figurent les résultats, restant à compléter, de l’étude structurale de l'interaction du Nb avec la particule virale qui a été réalisée en collaboration avec Bruno KLAHOLZ (Institut de génétique et de biologie moléculaire et cellulaire, IGBMC, Illkirch). Les prérequis pour la réalisation de cette étude, à savoir les conditions d'obtention de complexes Nb23/GFLV solubles, ont été déterminés par Léa ACKERER grâce à la collaboration avec Bernard LORBER (Institut de biologie moléculaire et cellulaire, IBMC, Strasbourg), ce qui a permis à Igor

ORLOV (IGBMC, Illkirch) d'obtenir par cryo-microscopie électronique (single particle cryo electron

microscopy, cryo-EM) la structure du Nb23 en complexe avec le GFLV-F13. Le modèle tridimensionnel

moyen a été reconstruit par ordinateur en combinant les images, ou plus précisément les projections à deux dimensions, de 6139 particules sélectionnées à partir de 1055 acquisitions et a été affiné en s'appuyant sur la structure cristallographique du GFLV disponible depuis 2011 (Schellenberger et al, 2011). En périphérie, où le Nb est peu ordonné, la résolution obtenue se situe entre 3,5 et 5 Å, mais d’autres régions, plus contraintes et donc moins soumises à des variations de conformation comme le site de contact du Nb avec la particule, ont pu être résolues localement à moins de 3 Å permettant de discerner précisément les chaînes latérales des résidus en interaction. La résolution globale du complexe est estimée à 2,8 Å par corrélation des enveloppes de Fourier (Fourier shell correlation, FSC) avec le critère de référence standard FSC0.143. Les dernières avancées des techniques et des équipements, comme le microscope Titan Krios utilisé dans cette étude, permettent actuellement à la cryo-EM d’atteindre de telles résolutions réservées jusqu’il y a peu à la cristallographie et à la résonnance magnétique nucléaire (RMN). De plus, dans le cas de molécules comme des capsides de virus, l’information apportée par leur symétrie intrinsèque facilite considérablement l’amélioration de la précision de leur reconstruction 3D. Pourtant, sur 586 structures de virus déposées à ce jour dans la banque européenne de données de cryo-microscopie électronique (Electron Microscopy Data Bank, EMDB) moins de 10 structures icosaédriques sont publiées à une résolution inférieure à 3,5 Å. Quant aux complexes de Nb avec un virus, même si les structures d'un Nb avec un fragment de la protéine de capside du norovirus (Koromyslova & Hansman, 2014) ou avec la protéine accessoire Nef du HIV-1 (Lülf et al, 2014) ont été obtenues par cristallographie à une résolution de 1,7 Å et 2,1 Å, respectivement, la plus haute résolution en cryo-EM a été récemment obtenue à seulement 4,8 Å avec des Nb neutralisant le poliovirus (Schotte et al, 2014). L’approche structurale apporte donc, outre la confirmation et l’illustration des résultats biologiques obtenus, une véritable valeur ajoutée à ces travaux et renforce d’autant plus leur dimension novatrice.

2.1.2Article en préparation

Note : Le manuscrit inséré ci-après correspond à une version postérieure à la soutenance de thèse. Il contient des éléments structuraux nouveaux qui peuvent être source d'incohérences ou de redondances avec le reste du mémoire de thèse dont le texte n'a pas été modifié.

Structural basis of Nanobody-mediated plant virus resistance and vector