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Valeur nutritive des graines de pin gris et d’épinette noire

Les graines de pin gris pèsent en moyenne 3.723 ± 0.620 mg et sont significativement (p< 0.0001) plus grosses (≈3,3 fois) que les graines d'épinette noire (1.123 ± 0.192 mg) (Tableau 2.2). Les graines d'épinette noire possèdent une proportion plus importante de calcium et de magnésium, alors que les concentrations d'azote, de potassium et de phosphore sont plus importantes dans les graines de pin gris. Ces différences sont significatives pour tous les éléments analysés (Tableau 2.2).

Discussion

Notre étude permet d'établir une consommation moyenne quotidienne des graines de pin gris et d'épinette noire pour sept espèces de carabes retrouvées en forêt boréale. Toutes les espèces testées ne consomment pas les graines des deux essences forestières et la capacité de consommation maximale des espèces est liée à la taille de l'insecte par rapport à celle de la graine, tel qu'observé par Honek et al. (2007). Toutes les espèces de carabes testées consomment plus de graines d'épinette noire que de pin gris et les espèces de plus grandes tailles sont capable d'ingérer davantage de graines que les plus petites espèces. En regroupant les espèces selon leur taille, on observe que la quantité de graines consommées tend à augmenter avec la taille des individus. En effet, Mundy et al. (2000) ont déterminé que les plus grosses espèces de carabes consomment davantage de nourriture que les plus petites. Dans notre étude, la taille relative des insectes semble expliquer du moins en partie la quantité de graines consommées par les différentes espèces de carabe et supporte l'idée généralement admise que les grosses espèces consomment davantage que les autres espèces.

La différence de consommation observée entre les graines de pin gris et d'épinette noire pour chacune des espèces de carabes peut s'expliquer par la taille des individus (Kotze et al., 2011). En effet, les individus de plus grande taille consomment des graines plus volumineuses (Honek et al., 2011, 2007) et généralement mieux protégées (Moles et al., 2003) puisque ces insectes possèdent des mandibules plus imposantes (Wheater et Evans, 1989). Toutefois, Wheater et Evans (1989) n'ont pu déterminer de lien significatif entre la force appliquée par les mandibules et la longueur de 13 espèces de carabes adultes. Honek et al. (2007) ont démontré chez des espèces des tribus de Harpalini et Zabrini que les individus de grande taille préfèrent les graines plus volumineuses. Les auteurs expliquent que la taille des individus détermine les limites inférieure et supérieure de la taille des graines qu'ils sont capables de manipuler (Honek et al., 2011, 2007). Agonum

gratiosum et Amara aeneopolita n'ont pas réussi à percer la cuticule des graines de pin gris lors des tests en

laboratoire (observation personnelle), ce qui explique que ces deux espèces n'aient consommé que des graines d'épinette noire. Les graines de pin gris seraient donc trop volumineuses pour être manipulées par ces deux espèces.

Les carabes sont principalement reconnus comme des insectes carnivores (73%), bien que 19% pourraient être considérés comme des omnivores et que quelques espèces de cette famille (8%) seraient phytophages (Larochelle, 1990; Lovei et Sunderland, 1996). Lovei et Sunderland (1996) rapportent que les individus des

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espèces étudiées. Toutefois, la revue de Larochelle (1990) doit être interprétée comme une liste non-exclusive des aliments consommables par les carabes. Certaines espèces des tribus Harpalini et Zabrini (Coléoptères: Carabidae) dont font parties les genres Harpalus et Amara respectivement (Arnett et Thomas, 2001) sont considérées comme des granivores (Kotze et al., 2011). Les tests réalisés dans la présente étude permettent d'affirmer que trois espèces de ces deux genres consomment des graines de pin gris et d'épinette noire.

Les insectes nécessitent des protéines afin de réaliser leur développement et produire des œufs (Trager, 1947; Uvarov, 1929; Wallin et al., 1992; Wigglesworth, 1960). Chez les femelles de Pterostichus cupreus et P.

melanarius une diète variée contenant des protéines, mesurées par la teneur en azote, favorise la production

d'œufs et l'ajout de carbohydrates permet l'accumulation de réserves et la production d'œufs plus volumineux (Wallin et al., 1992). Selon l'analyse des éléments contenus dans les graines des deux essences, les graines de pin gris offriraient un avantage nutritionnel par rapport aux graines d'épinette noire du point de vue de la teneur en azote. Il est reconnu que certains insectes sont capable de moduler leur comportement alimentaire en fonction de leurs besoins physiologiques (Behmer, 2009; Bernays, 1998; Jorgensen et Toft, 1997; Raubenheimer et Jones, 2006). Dans le contexte de notre étude, les carabes doivent consommer environ 3,3 fois plus de graines d'épinette noire que de pin gris pour atteindre la même masse (mg) de nourriture ingérée et environ 4,2 fois pour obtenir la même quantité d'azote (% de la masse moyenne des graines pour une essence donnée).

Plusieurs espèces de carabes sont retrouvées dans les brûlis et l'abondance de certaines d'entre elles, augmente suite au passage du feu (Holliday, 1991; Moretti et al., 2004; Muona et Rutanen, 1994; Saint- Germain et al., 2005). Des sept espèces de carabes testées dans notre étude, trois espèces (P. lucublandus,

P. adstrictus et P. coracinus) ont aussi été capturées dans les brûlis au nord de La Tuque (Chapitre I). De

plus, les individus de ces trois espèces de carabes sont les plus voraces parmi les espèces testées. Quatre sous-espèces de carabes ont été testées lors de cette étude, ne provenaient pas des brûlis et on tout de même consommées des graines, ce qui suggère que les carabes seraient plus omnivores que ce nous croyons a priori. Plusieurs autres espèces de carabes retrouvées dans les brûlis, mais qui n'ont pas été testées dans notre étude sont aussi consommatrices de graines, la pression exercée par les carabes à un stade précoce du recrutement de ces essences forestières pourrait être considérable et ainsi nuire au rétablissement naturel des peuplements après le passage du feu.

Notre étude est l'une des premières à aborder la consommation des graines par les carabes en forêt boréale. Bien que l'alimentation des carabes de la forêt boréale soit peu connue, la présente étude nous a permis de déterminer que certaines espèces appartenant à différentes tribus consomment des graines de pin gris ou d'épinette noire. Toutefois, le taux de consommation des graines par les individus des différentes espèces de

carabes et l'impact de cette consommation sur la régénération naturelle des peuplements de pin gris et d'épinette noire restent méconnus. Les résultats obtenus par la présente étude, ainsi que ceux du premier chapitre de ce mémoire suggèrent que la consommation des graines de ces deux essences forestières par les carabes et les autres invertébrés peut nuire à leur régénération naturelle après le passage du feu. Compte tenu la grande diversité de la faune en forêt boréale, il reste beaucoup de travail à faire avant d'obtenir un portrait exact de l'impact de la consommation des graines sur la régénération. Ces informations manquantes sont nécessaires afin de mieux gérer les ressources forestières dans un contexte de gestion écosystémique.

Remerciements

Je souhaite remercier tous les étudiants et les professionnels qui ont participé à la réalisation de la seconde partie de mon projet. Merci à Maxime Brousseau, Yves Dubuc et George Pelletier. Merci de m'avoir aidé lors des longues heures d'observations, d'identification et pour m'avoir aidé à maintenir ces petites bêtes en vie. Je tiens spécialement à souligner et remercier Jonathan Boucher pour l'aide qu'il m'a apporté pour les analyses statistiques sur R.

Merci aussi aux employés du centre de foresterie des Laurentides pour leur aide, ainsi qu'aux étudiants du laboratoire ÉcoDIF pour l'ambiance détendue et joviale au laboratoire, ainsi que pour l'aide et les conseils: Jean-Michel Béland, Sébastien Bélanger, Jonathan Boucher, Yannick Breton, Olivier Jeffrey, Olivier Norvez et Xavier Prairie.

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Tableaux et figures

Tableau 2.1: Taille moyenne et consommation quotidienne moyenne de graines de pin gris et d'épinette noire

pour sept espèces de carabes (Coleoptera: Carabidae) en conditions contrôlées.

Espèce Tribu Taille (mm)

Consommation quotidienne

(nb graines±SE) Nb d'individus Pin gris Épinette noire

Agonum gratiosum (Mannerheim) Harpalini 6.5 à 9.0 0 0.02 ± 0.01 3

Amara aeneopolita (Casey) Zabrini 5.8 à 6.8 0 1.2 ± 0.17 9

Amara latior (Kirby) Zabrini 7.9 à 10.7 1.1 ± 0.16 4.6 ± 0.48 7

Harpalus fulvilabris (Mannerheim) Harpalini 8.9 à 10.8 1.0 ± 0.14 2.8 ± 0.38 8

Poecilus lucublandus (Say) Pterostichini 9.3 à 12.8 0.7 ± 0.12 5.8 ± 0.38 10

Pterostichus adstrictus (Eschscholtz) Pterostichini 9.5 à 13.1 2.8 ± 0.65 8.2 ± 0.74 2

Pterostichus coracinus (Newman) Pterostichini 12.7 à 18.0 5.3 ± 0.36 6.3 ± 0.50 10 Note: La taille moyenne des insectes provient du Manuel d'identification des carabidae du Québec (Larochelle 1976).

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Tableau 2.2: Comparaison des concentrations (en ppm) de différents éléments nutritifs retrouvés dans les

graines de pin gris et d'épinette noire pour des peuplements originaires du nord de la région du Saguenay- Lac-St-Jean.

Éléments Pin gris ±SE Épinette noire ±SE Valeur de t D.l. p Calcium (ppm) 171.80 ± 41.07 491.20 ±74.01 3.7739 8 0.0054 Potassium (ppm) 1814.52 ± 4.20 1635.48 ±42.93 -4.1503 8 0.0032 Magnésium (ppm) 1211.62 ± 22.49 1374.00 ±23.87 4.9519 8 0.0011 Azote (%) 4.24 ± 0.04 3.32 ±0.07 -11.7475 8 <0.0001 Phosphore (ppm) 2188.00 ± 129.00 1281.00 ±128.27 -4.9857 8 0.0011 Masse (mg) 3.7227 ± 0.06 1.1231 ±0.02 -40.0428 198 <0.0001

Figure 2.1:Taux de consommation en fonction de la densité des graines d'épinette noire et de pin gris (6, 9 et 12 graines) sur une période de 24 heures pour sept espèces de carabes. Les lettres différentes

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Figure 2.2: Consommation des graines d'épinette noire et de pin gris (nb de graines)à trois densités (6, 9 et

Figure 2.3 :Quantité de graines d'épinette noire et de pin gris consommées par les individus de carabes par rapport à la médiane de leur taille selon le guide d'identification de Larochelle (1990).

Conclusions

Notre étude est l'une des premières à aborder la consommation des graines de pin gris et d'épinette noire dans les brûlis récents par différents groupes d'organismes en forêt boréale. Bien que l'alimentation des invertébrés de la forêt boréale soit méconnue, la présente étude nous a permis de déterminer que sept espèces de carabes sont capables de consommer des graines de pin gris ou d'épinette noire et que les individus de plus grandes tailles consomment davantage de graines. De plus, notre étude démontre que les invertébrés sont des consommateurs plus importants de graines de pin gris et d'épinette noire que les vertébrés dans leurs peuplements respectifs après le passage du feu. Avec une consommation par les invertébrés de 10.9 à 31.5% et de 4.6 à 9.9% par les vertébrés pour une période d'un mois, les résultats obtenus dans la présente étude, soutenue par ceux obtenus par Côté et al. (2005), suggèrent que la consommation par les différents groupes d'organismes, particulièrement les invertébrés, peut nuire à la régénération naturelle de ces deux essences forestières après le passage du feu.

Dans un contexte de gestion forestière, il est économiquement avantageux de laisser la régénération naturelle des peuplements de pin gris et d'épinette noire s'établir après le passage du feu plutôt que d'investir dans des opérations de reboisement. Bien que plusieurs facteurs autres que la consommation par les différents groupes d'organismes affectent la capacité de régénération d'un peuplement, les résultats que nous avons obtenus soutiennent que le potentiel de consommation des invertébrés justifie qu'il faudrait prendre leur présence en considération dans l'évaluation du potentiel de régénération naturelle des peuplements brûlés de pin gris ou d'épinette noire. Notre étude se limite à deux essences commerciales de la forêt boréale et les résultats suggèrent l'importance de l'impact des invertébrés sur la régénération, il serait donc indispensable d'élargir ce type d'étude sur des peuplements d'autres essences afin de déterminer si les invertébrés nuisent à leur rétablissement.

L'impact de la dispersion secondaire est la plus grande difficulté dans l'évaluation de la consommation des graines sur le terrain. L'utilisation d'un dispositif ayant trois types de protections (sans protection, contre les vertébrés et contre tous les groupes) permet de limiter l'accès aux graines à certains animaux en se basant sur la taille de ceux-ci. Toutefois, le sort des graines disparues du dispositif n'est pas nécessairement la consommation. Ces graines ont pu être déplacées par un animal ayant accès à celles-ci et survivre. Ces graines dispersées une seconde fois et non consommées peuvent survivre et participer à la régénération du peuplement. Notre méthode permet donc seulement d'estimer la consommation attribuable aux vertébrés et celle attribuable aux invertébrés. Il serait donc intéressant et plus précis d'utiliser une méthode de marquage

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Compte tenu de la grande diversité de la faune en forêt boréale, il reste beaucoup de travail à faire avant d'obtenir un portrait exact de l'impact de la consommation des graines sur la régénération. Notre étude a permis d'identifier sept espèces de carabes consommatrices des graines de pin gris ou d'épinette noire, dont trois se retrouvent dans les brûlis. Plusieurs autres organismes utilisent les brûlis, parmi ceux-ci d'autres familles d'insectes, ainsi que des mollusques comme les limaces sont susceptibles de consommer des graines. Malgré leur importance en tant que consommateurs de graines post-dispersion, il y a peu d'informations sur les habitudes alimentaires des invertébrés utilisateurs des brûlis et l'impact de leurs mœurs sur la régénération naturelle. De plus, les différentes opérations forestières effectuées après les coupes de récupération, comme le scarifiage, pourraient avoir un impact sur la consommation des graines par les invertébrés en modulant, par exemple, la composition des communautés d'organismes. Ces informations manquantes sont nécessaires afin de mieux gérer les ressources forestières dans un contexte de gestion écosystémique.

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