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1.2 Applications considérées

1.2.3 Véhicule Urbain à pile à combustible Cityjoule

Depuis 1984, La Joliverie développe des véhicules prototypes à très faible consommation. Ils sont destinés à participer à des courses énergétiques, dont la plus célèbre est l’Eco-Marathon Shell. Le principe de ces compétitions est de parcourir une certaine distance, généralement comprise entre 20 et 30 km, en ayant consommé le moins d’énergie possible. La performance est alors calculée sur la base de la distance qui aurait été parcouru avec l’équivalent énergétique d’un litre d’essence4. La dernière génération de prototypes développés par La Joliverie, appelée

Figure. 1.4 – Véhicule Cityjoule lors de l’Eco-Marathon Shell à Londres en 2016.

Microjoule, est propulsée par un moteur à combustion interne. Il est, depuis 1992, le véhicule dans la catégorie essence le plus économe en énergie du monde, avec comme meilleur résultat 3771 km/l. Mais les marges de progression sur cette voiture étaient devenues si faibles que seule une rupture de technologie était à même d’améliorer ses performances. C’est en 2003

4. Cette notion d’équivalence vient du fait que de nombreuses technologies de véhicules ayant des sources d’énergie très différentes doivent être comparées. Le principe est donc de ramener toutes les performances à 1 litre d’essence sans plomb 95, qui est une référence facilement interprétable et compréhensible par le grand public.

que sont apparues à l’eco-marathon Shell les premières voitures à pile à combustible, qui ont intrinsèquement des rendements de conversion plus élevés. Ainsi, dès 2005, l’équipe de l’ETH Zurich réalise une performance équivalente de 3836 km/lSP 95. C’est dans ce contexte que s’est opéré dès 2005 le rapprochement entre le lycée de La Joliverie et l’école Polytech’Nantes, afin d’associer les compétences de ces deux établissements pour développer en quelques années un véhicule à pile à combustible à très faible consommation énergétique.

L’aventurePolyjoule a démarré. Le lycée de La Joliverie, fort de son expérience dans ce type de projet, s’occupe de la partie mécanique et de l’intégration de la nouvelle chaîne de conversion, en tenant compte de l’ensemble des contraintes réglementaires inhérentes à la technologie hydrogène. De leur côté, les étudiants de l’école d’ingénieur Polytech’Nantes se chargent de la conception de la chaîne de puissance, avec le départementGénie Electrique pour la partie électronique de puissance et informatique, et le départementThermique Energétique pour le système pile à combustible. L’équipePolyjoule est structurée autour d’une association d’étudiants de Polytech’Nantes et de La Joliverie. Une équipe enseignante dont je fais partie s’est alors formée pour donner les grandes orientations techniques et encadrer les projets d’ingénieurs et les stages de MASTER en lien avec le projet. C’est ainsi que dès 2009, une solution de chaîne de propulsion entièrement réalisée par l’équipe est intégrée dans le véhicule. Sa structure, qui a très peu évoluée depuis, est composée d’un moteur à courant continu, d’un convertisseur abaisseur et d’un système pile, lui même constitué de 28 cellules (développées par la société MES), d’un compresseur pour l’alimentation en air et d’un ventilateur de refroidissement (voir Figure 1.5). L’ensemble des ces organes est supervisé par un calculateur central, qui assure également les fonctions de protection et de sécurité. Depuis 2010, le véhiculePolyjoule a toujours fini premier de sa catégorie avec un record de 5136 km/lSP 95en 2011.

Bien qu’une grande part de la réalisation de cette chaîne de conversion soit le fruit du travail des étudiants de l’association, sa conception et son optimisation a été réalisée principalement par l’équipe enseignante dans le cadre de stages de MASTER 2 Recherche. L’idée plus générale est en fait d’utiliser ce véhicule comme support à des développements et études autour des

DC

Alimentation en air convertisseur DC-DC r´eservoir H2 PEMFC syst`eme de refroidissement s´ecurit´e et supervision Im

problématiques de mobilité, avec pour critère la performance énergétique. C’est dans ce cadre qu’un deuxième véhicule a vu le jour en 2013, nomméCityjoule, et qui entre dans la catégorie des Urban-Concept. Cette dernière vise à proposer des petits véhicules urbains plus proches de ceux pouvant être proposés dans le cadre d’un usage en conditions réelles. Les nouvelles dimensions de ce véhicule et son cycle de conduite se rapprochant d’un cycle urbain avec plusieurs démar- rages et arrêts, permet d’imaginer des chaînes de conversions plus complexes, pouvant intégrer par exemple un système de stockage pour la récupération d’énergie au freinage ou encore de recourir à des hybridations entre plusieurs sources. Aujourd’hui, le véhiculeCityjoule fonc- tionne avec trois architectures différentes, à savoir une version pile à combustible pouvant être hybridée avec des supercondensateurs, une version batteries et enfin une version avec panneaux photovoltaïques couplés à des batteries tampon. Bien que ces trois architectures présentent des intérêts scientifiques réels et complémentaires, nous nous sommes plus particulièrement intéressés à la chaîne hydrogène. En effet, l’utilisation en régime instationnaire de ce système associé à une démarche d’optimisation des performances nous a conduit à travailler avec un mode de fonctionnement assez peu classique pour une pile à combustible. En premier lieu, la pile est configurée enanode bouchée, ce qui permet de fonctionner avec une stoechiométrie unitaire en hydrogène et donc de minimiser la consommation. Or, ce type d’usage s’accompagne généralement de purges régulières, nécessaires pour évacuer l’eau qui se serait accumulé à l’anode. Du fait de leur trop fort impact sur la consommation moyenne d’hydrogène, ces purges ont été supprimées de notre système. La pile doit ainsi fonctionner en mode bouché tout au long de la course qui peut durer entre 35 et 50 minutes (selon la course et le circuit). En second lieu, pour atteindre des performances élevées, la pile à combustible est utilisée dans sa zone d’activation, qui correspond aux plus faibles densités de courant et qui présente les meilleurs rendements de conversion électrochimique. Or, le fonctionnement d’une pile dans cette zone est particulièrement difficile à stabiliser et à maîtriser. De plus, elle nécessite de faire fonctionner ses accessoires d’alimentation en air et de refroidissement sur des points de fonctionnement qui ne sont pas optimaux. Enfin, plusieurs études que nous avons menées dans le cadre de projets ingénieurs ou de stages de MASTER ont montré que l’intégration d’un système de stockage pour la récupération d’énergie au freinage était difficilement viable, compte tenu des trop faibles masses et vitesses du véhicule. C’est pourquoi nous avons proposé dans un premier temps une chaîne de conversion sans élément de stockage et donc avec un couplage direct entre le besoin mécanique du véhicule et la puissance fournie par la pile. Or, un tel fonctionnement en régime instationnaire pose encore une fois des problématiques de performance et de fiabilité. De plus, le profil d’usage du véhicule étant directement corrélé à celui de la pile à combustible, il a été nécessaire de modéliser finement toute la chaîne de conversion, et une optimisation globale a dû être menée pour nous aider à définir les meilleures stratégies de pilotage. Cette application nous a donc amené à proposer une modélisation multi-physique du système complet et son optimisation sur cycle, tant pour sa conception que pour son pilotage.

Cette application qui à première vue peut sembler très spécifique et difficilement transposable, trouve en réalité de nombreux points communs avec toute une gamme de systèmes dont la problématique principale est l’efficacité énergétique. Sans être exhaustif, nous pouvons par exemple citer les applications de mobilité légère urbaine, les systèmes embarqués de surveillance

mobile, les drones, etc. Il était donc naturel de chercher à développer des outils couvrants un spectre plus large que cette application de véhicule urbain, en vue d’une part d’aider à la conception de systèmes pile plus performants, et d’autre part à mieux maîtriser leurs conditions opératoires malgré un nombre réduit d’accessoires. Toutes ces considérations nous on poussé à proposer des travaux originaux autour du diagnostic par impédancemétrie à l’échelle dustack en se basant sur une représentation multi-physique du modèle direct, utilisée pour la détection de conditions opératoires critiques. Plus particulièrement, nous avons proposé une procédure de détection d’engorgement en eau des canaux, grâce à une mesure indirecte de la stœchiométrie locale en air. Cette mesure s’appuie sur la prise en compte de la variation de concentration de réactif le long des canaux, qui permet de remonter à une signature spectrale caractéristique.