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Matériel et méthode

6. Vécu de la relation avec les soignants  Dans le suivi du diabète

Le récit de leur histoire avec le diabète amenait les participants à révéler les relations avec leurs soignants. Le rôle réalisé dans leur accompagnement thérapeutique et le rôle souhaité.

Le médecin traitant était évoqué par tous les participants comme acteur principal dans le suivi de leur diabète. Il était avant tout prescripteur et contrôleur de la bonne évolution : "Moi je

vais chez un médecin on me dit il faut prendre ça, je prends ça et je cherche pas à comprendre." ; "Bon, le médecin, il vient tous les trois mois. Et voilà, il me visite. Il me dit tout va bien. Le cœur, et tout.".

Souvent, il expliquait la physiopathologie du diabète et conseillait les participants sur certains aspects de l'hygiène de vie : "Il me disait : «Si votre pancréas il travaille, vous aurez pas de

diabète. Si il travaille pas, vous aurez du diabète.».".

Il encourageait les résultats mais il était rarement perçu comme un réel soutien moral :

"Comme j’ai eu des soucis, on en parle de temps en temps. Mais bon après si vous voulez, ça reste... Bon, c’est pas péjoratif ce que je vais dire, mais si vous voulez c’est une généraliste. C’est vrai qu’elle va regarder du côté diabète…".

Il était excusé par les participants par le manque de temps au cours d'une consultation : "Bon

bah le docteur P elle a des patients.".

Lorsque les infirmiers libéraux étaient sollicités, les participants les mentionnaient comme un soutien moral primordial. Cet attribut découlait de leur présence quotidienne avec une relation installée depuis plusieurs années : "J’aime bien quand c’est les infirmiers qui passent.". Les infirmiers conseillaient sur l'amélioration de l'hygiène de vie puis encourageaient les efforts : "Par exemple, des fois L (infirmier libéral), il me donne des conseils quand je lui en

demande. Il est sympa L.".

Leur aide matérielle par la gestion des traitements permettait aux personnes concernées de se reposer entièrement sur eux : "J’les trouve bien parce que le soir ils viennent, ils piquent. Ils

voient si… Eux même, ils font le juge.".

L’infirmière Asalée suivait trois des personnes interrogées. Tous, la décrivait comme un pilier dans l'initiation et le maintien aux changements de comportement. En prenant compte des compétences de chacun, elle leur donnait des clefs pour réussir : "Ça a été, quand P

(infirmière Asalée) m’en a parlé, elle m’a soutenu et tout. Du coup j’ai fait le stage et voilà." ; "P (infirmière Asalée) m’avait donné à un moment un podomètre.".

Elle permettait aussi la compréhension de leur diabète par ses explications.

L'endocrinologue, sollicité lorsque le diabète se compliquait, était considéré comme le détenteur du savoir. Il fallait suivre ce qu'il décidait : "Et puis bon après, ça s’est aggravé.

Tout ça, il a fallu voir le diabétologue.".

Il adaptait parfois, sa prescription au vécu de l'insuline.

Il s'inquiétait souvent des ressources matérielles des participants : "Vous avez déménagé à M

(nom de sa ville actuelle) pourquoi ? Bah, c’est le docteur C (endocrinologue). Pour me rapprocher des, des des, des commodités.".

Les autres médecins spécialistes semblaient être consultés pour un suivi d’organe. Leur rôle ne paraissait pas s'étendre au delà.

L’auxiliaire de vie apportait son aide matériel par sa confection des repas et la décharge des taches ménagères. Elle était considérée comme indispensable par sa présence physique et son rôle dans l'alimentation : "Je suis un peu trop seule là. Comme là M (axillaire) est partie, je

vais manger toute seule. J’aime bien avoir de la compagnie.".

Les livreurs de repas étaient également cités.

Le psychiatre était consulté pour des problèmes psychosociaux. Il permettait un travail sur soi. Cependant il n'y avait aucun lien avec leur diabète, selon les participants.

Il en était de même pour le psychologue.

L'hypnotiseur, lorsqu'il était sollicité, ne l'était pas non plus dans le cadre du diabète. Il était vu pour perdre du poids ou arrêter de fumer. Ce qui était indépendant du diabète, selon les participants.

Les professionnels animant des séances d'éducation thérapeutique encourageaient les efforts et les valorisaient.

Parfois ces séances de groupe pouvaient inquiéter. Une des participantes hésitait pour cette raison de s'inscrire dans une association de diabétiques : "Et après je me dis, ça va me foutre

Globalement, les participants étaient satisfaits du suivi par leurs soignants : "Bah je les trouve

très bien. Très bien.".

Ils étaient considérés comme protecteurs de l'évolution du diabète : "Bon y a question de

l’améliorer c’est vrai. Donc, je compte sur eux, sur le personnel médical, les médecins, les infirmières, tout ça.".

Ils étaient source de soutien et de motivation dans l'accompagnement thérapeutique : "Bah je

dis qu’ils font beaucoup d‘efforts pour arriver à nous faire mener une vie à peu près normale.".

Ils rassuraient : "Alors il me dit «C’est pas la peine de vous faire du souci».".

Les personnes interrogées soulevaient cependant quelques effets délétères dans la relation. Certains avaient le sentiment de ne pas être suffisamment impliqué dans les décisions les concernant : "Et vous savez quand vous rentrez à l’hôpital ou à la clinique, ils cherchent pas

midi à quatorze heure. Ils vous prennent le sucre, si vous en avez un petit peu, hop. Y’a pas de cachets là-bas. C’est la piqûre.".

Le manque d'explication sur le diabète et son traitement était très souvent souligné : "Ah bah

peut être, je sais pas moi où en est la science, si y’a une évolution.".

Plusieurs personnes trouvaient que le soutien psychosocial dans le cadre de leur maladie était insuffisant : "«Bon bah y’a rien. Des questions ?». «Bon bah non, pas de question.». Tout va

bien donc pas de question. Et puis voilà, ça passe comme ça.".

Certaines personnes se décrivaient perdues parmi les discours évolutifs ou fluctuants : "Et

puis ça change aussi parce que je me rappelle j’avais fait un stage au CHU, en diabétologie et fallait supprimer tout : le chocolat, les gâteaux, tout ça… Et j’ai refait ce stage euh de 3 ou 4 jours au CHU, et 3 ans plus tard «bah oui vous pouvez manger un gâteau tous les dimanches».".

Le discours des soignants étaient parfois source d'angoisse par l'énumération, trop fréquente, des complications possibles : "Mais ça ferait du bien de sortir de cette sinistrose, bon y’a un

Le comportement des soignants était, dans certains cas, vécu comme infantilisant et culpabilisant : "Y’a l’infirmier, je dis «J’ai mangé un biscuit.», il m’dit «Pourquoi vous

mangez un biscuit.».".

Quelques patients décrivaient des attitudes de soignants qui ne leur convenaient pas. Vécues comme un conflit, elles étaient responsables de souffrances morales chez les patients : "- Un

peu plus avec Y (autre infirmier), un peu plus… (se recule dans son siège). - Un peu plus quoi ? - Un peu plus, j’sais pas… Un peu plus dur lui.". Avant qu'ils réussissent à s'en affranchir en

changeant de professionnels.

A l'inverse, une relation équilibrée et ancienne accentuait le soutien psychologique : "J’ai été

à la clinique là bas (où exerce son ancien médecin traitant), donc je suis retombée sur mon médecin.".

 Dans l'abord de l'estime de soi

La majorité des personnes interrogées n'avait jamais abordé l'estime de soi avec leur soignants.

De la même façon qu'ils n'avaient jamais été sollicités par leurs soignants à ce sujet : "Non, ils

m’en parlent pas.".

Plusieurs participants ne souhaitaient pas discuter avec leurs soignants de leur estime d'eux. Ils trouvaient souvent cela inutile : "Et puis ils m’apportent rien en fait.".

Les raisons énoncées étaient multiples. Ils avaient un diabète non contraignant ou non compliqué qui n'avait pas de répercussion sur leur vie : "Oh non parce-que ils voient que je

me débrouille.". Ils s’estimaient bien, il n'y avait donc rien à changer : "Mais non non moi je me trouve comme ça, je suis bien. J’ai pas à me plaindre comme je suis.". Ils avaient une

mauvaise estime d'eux, ce n'était plus possible de l'améliorer : "Donc maintenant c’est trop

tard (rire).".

Certains participants évoquaient une appréhension à livrer leurs émotions : "Mais moi pour

ma part, me confier, parler pour… Non c’était pas mon truc…" ; "Peut être la peur. Puis le fait de me livrer…".

C'était parfois, trop douloureux : "- Qu’est ce qui fait que ça vous embête d’en parler ?

Deux participants reconnaissaient avoir discuté de l'estime d'eux avec leurs soignants.

Une personne avait vu un hypnotiseur pour la confiance en elle : "Et puis la deuxième fois, il

a essayé de me faire travailler pour que je chaaange. Et...bon peut être que j’ai changé, je sais pas.".

L'estime de soi globale avait été soulevée par un psychiatre, un psychologue, un médecin traitant et dans le cadre d'un groupe d'éducation thérapeutique.

Les résultats n'étaient, selon eux, pas probants : "Non parce-que j’en ai parlé pendant 5 ans,

5, 6 ans avec la psychiatre et bon c’est toujours là, je vois, y’a rien de changé donc.".

Une personne décrivait une mauvaise expérience dans ce domaine. L'évocation en groupe de son estime de lui avait provoqué un repli sur lui-même : "J’avais pas envie d’étaler tous mes

problèmes devant tout le monde, devant tout le groupe donc euh…". Ce n'était selon lui, ni le

lieu, ni le moment : "J’étais pas venu à R pour étaler tous mes problèmes, tout ça. Parce que

je suis sûr que si j’aurais à parler de mes problèmes, je serais pas encore sorti de R.".

Cependant, il y avait une certaine ambivalence des participants sur l'abord de l'estime de soi avec leurs soignants. Beaucoup avait échangé sur leur rapport aux autres ou leur rapport à soi sans qu'ils en soient conscients ou qu'ils le reconnaissent.

La relation de confiance mutuelle semblait indispensable entre soignants et soignés pour permettre d'aborder le sujet de l'estime de soi.

Cette discussion pouvait être responsable d'émotions importantes. Elle semblait donc nécessité un climat de bienveillance : "Je pense que c’est dépendant. Le psy que j’ai vu qui

était à C (nom de ville), ça, ça passait pas. C’est pas passé. J’ai fait 3 séances, j’ai dit bon la quatrième, stop c’est pas la peine." ; "J’ai jamais été la voir ou elle, elle n’est jamais venu me voir." ; "Et quand elle est partie, pour moi ça a été...mal vécu.".

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