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A UTRES INFLUENCES SUR LE DÉVELOPPEMENT , LA COMMERCIALISATION ET LA DIFFUSION DES TECHNOLOGIES INNOVANTES EN SANTÉ

Le système de santé et ses acteurs ne sont pas les seuls à influencer le destin des technologies de santé. Ainsi des barrières à la diffusion et à l’adoption des technologies en santé seront créées par la démocratisation des biotechnologies, l’omniprésence d’informations sur les nouvelles technologies, la quantité et de la diversité de l’offre en la matière, et enfin le rationnement des budgets aussi bien publics que privés (Hwang et Christensen, 2008, Robinson et Smith, 2008). Ces barrières se retrouveront principalement au niveau du financement à la recherche et au développement, du manque de données et enfin de l’encadrement règlementaire (Amir-Aslani et Mangematin, 2010, Hwang et Christensen, 2008).

LE FINANCEMENT À LA RECHERCHE ET AU DÉVELOPPEMENT

Le processus de financement de la recherche et de la diffusion des innovations technologiques dans le domaine de la santé diffère de manière importante de celui observé au sein d’autres industries (Raab et Parr, 2006). Ainsi, les gouvernements doivent trouver des solutions créatives afin d’ouvrir leurs marchés aux entreprises en plus d’augmenter de manière importante le financement public à la R&D médicale. Des exemples de telles solutions créatives, par l’établissement de mesures fiscales ou réglementaires favorables aux compagnies œuvrant dans le domaine de la R&D médicale, sont la diminution des taxes et impôts, la mise en place d’exceptions limitant la responsabilité en cas de défectuosité du produit et des mesures d’approbation à la commercialisation accélérées (Gardner, Acharya et al., 2007). Les politiques institutionnelles du système de santé ont un impact considérable sur l’implantation des

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innovations technologiques à bien des égards, notamment au niveau du choix des technologies les plus utiles et sécuritaires au regard des besoins de la population, de leur accessibilité par le plus grand nombre, de leur utilisation efficace par la formation d’une main-d’œuvre qualifiée ou de leur maintenance et entretien (Medical Device Registry Task Force et Medical Devices Epidemiology Network, 2015). Les gouvernements doivent donc effectuer les ajustements institutionnels, aux niveaux financier, physique et humain, nécessaires à une plus grande diffusion des nouvelles technologies médicales (Stafinski, Menon et al., 2011). À cette fin, les gouvernements doivent identifier les failles du système de santé et les besoins de la population au regard des informations préalablement recueillies (Nandakumar, Beswick et al., 2009).

Les institutions publiques permettent à l'entreprise de réduire le risque, soit par les crédits d’impôts à la recherche précompétitive ou la participation à des incubateurs. Ainsi, ces incubateurs technologiques facilitent le transfert de technologie du laboratoire vers l'industrie. Il s'agit de mettre à la disposition des jeunes entreprises toute une gamme de services d'accompagnement (Ontario Centres of Excellence, 2016). Bien souvent les chercheurs qui s'improvisent entrepreneurs n'ont pas les compétences dans des domaines aussi variés que la propriété intellectuelle, le droit, le marketing, la fabrication ou encore la finance, et peuvent donc tirer grand profit de tels programmes. Il existe présentement plus de 1000 incubateurs de technologie en santé en Amérique du Nord et en Europe, mais seul ceux disposant d'une équipe complète d'accompagnement ayant une expérience commerciale réussissent (Heubi, 2015). Des accords promettant l’achat et la mise en marché d’une technologie avant même son développement ont déjà été mis en place dans le passé. Ces accords constituent un considérable incitatif pour les entreprises technologiques à se pencher sur certains problèmes de santé. Toutefois, leur caractère viable et favorable envers l’innovation demeure toujours disputé (Gardner, Acharya et al., 2007, Light, 2009, Organisation mondiale de la Santé, 2010). Finalement, le financement aux jeunes entreprises par des marchés boursiers adaptés et des fonds d’investissements spécialisés dans le domaine des technologies médicales permettent aux entreprises de ce secteur d’obtenir les capitaux indispensables à leur développement et d’ainsi éviter une dette qui pourrait les étouffer à plus ou moins long terme (Cambridge Economic Associates, 2015).

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Plusieurs programmes et conseils financés par le gouvernement fédéral appuient la recherche en santé au Canada : les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), les Réseaux de centres d'excellence, le Conseil national de recherches du Canada (CNRC) et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNGC). Le CNRC administre le Programme d'aide à la recherche industrielle (PARI), qui aide les entreprises à développer et à commercialiser des technologies au moyen de financement et de services-conseils. Le Programme d'encouragement fiscal à la recherche scientifique et au développement expérimental (RS-DE), administré par l'Agence du revenu du Canada, encourage les entreprises canadiennes de toutes tailles et de tous les secteurs à effectuer des travaux de R&D au Canada. Il s'agit de la première source en importance de soutien fédéral à la R&D industrielle. Le programme fournit aux demandeurs des crédits en argent ou des crédits d'impôt pour les dépenses de R&D admissibles effectuées au Canada.

LE MANQUE DE DONNÉES SUR L’EFFICACITÉ ET L’EFFICIENCE

Une autre barrière fondamentale à l’implantation des innovations technologiques est le manque d’informations sur leur efficacité et leur utilité (Rising, 2016). Ainsi, le développement, l’acquisition et l’utilisation des innovations technologiques pourraient probablement être optimisés et facilités avec l’accès à des données d’efficacité et de coût-efficacité fiables (Sinha et Barry, 2011). En effet, ces informations faciliteraient la tâche des gestionnaires des systèmes de santé dans le cadre de l’achat des innovations technologiques en guidant leur choix afin de répondre aux besoins des populations ciblées. Une fois les innovations technologiques acquises, ces données pourraient être utilisées afin d’apporter des données d’efficacité sur le terrain et ainsi maximiser leur impact sur la qualité des soins offerts aux patients. Finalement, des efforts devraient être entrepris par l’industrie de R&D médicale afin de rendre plus accessibles les informations sur les innovations technologiques développées aux gestionnaires des systèmes de santé (Grutters, Seferina et al., 2011).

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Les entreprises en technologies de santé ont souffert de réglementations gouvernementales inadéquates, concernant les brevets et la propriété intellectuelle, et de politiques fiscales, telle une réglementation impropre aux investissements, mal adaptée à leurs besoins (Garfield, Polisena et al., 2016). Au Canada, l’environnement réglementaire et la gouvernance en la matière nécessiteraient une révision complète afin que le pays ne perde pas les avantages qu’il a cumulés au cours des dernières années (Stastna, 2013). Par exemple, les multiples retards et l’explosion des coûts de l’implantation du dossier de santé électronique au Québec s’expliquent en partie par l’absence de concurrence, la présence des mêmes firmes qui se séparent la majorité des contrats publics, et dépendance du gouvernement envers les firmes privées (Chouinard, 2011). L’organisme qui chapeaute le projet, Inforoute Santé canada, a été critiqué pour ne pas atteindre son objectif d'avoir des dossiers de santé électroniques pour au moins la moitié des médecins canadiens en 2010. Il a été également accusé de trop se concentrer sur la création d'une grande infrastructure de dossiers électroniques normalisés au niveau national et de délaisser les systèmes en place au niveau local et régional, où la plupart des soins de santé sont dispensés.

En 1984, le gouvernement fédéral a adopté la Loi canadienne sur la santé. Cette Loi a remplacé les lois fédérales sur l'assurance-maladie et l'assurance-hospitalisation, mais a consolidé leurs principes en établissant des critères concernant la transférabilité, l'accessibilité, l'universalité, l'intégralité et la gestion publique (Santé Canada, 2012). Les mesures prises à cette époque ont contribué au développement des capacités scientifiques ainsi qu’à mettre en place la réglementation et le contexte commercial qui ont facilité le développement et la diffusion des technologies de santé. Finalement, le règlement initial a été remplacé par la législation actuelle, DORS/98-282, qui a été introduite le 1er juillet 1998 et amendée plusieurs fois depuis (Jyothi,

Venkatesh et al., 2013). Ainsi, l'innovation est fortement influencée par les groupes de patients, les fournisseurs de soins, le médecin, les tiers-payeurs, les décideurs et les fabricants qui peuvent tous influencer le contexte des soins de santé et la prise de décision associée (Battista, Banta et al., 2004). Mais malgré des réalisations importantes dans certains secteurs, Santé Canada est critiqué pour ne pas respecter ses obligations découlant du Programme des matériels médicaux, particulièrement à l’étape qui précède la mise en marché. Ainsi, dans plus de 45 % des cas, il ne

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respecte pas ses propres normes de service sur les délais de traitement des demandes d’homologation des matériels médicaux (Bureau du Vérificateur général du Canada, 2011).