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Utilisation thérapeutique des inhibiteurs de PARP dans les cancers

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III. La protéine PARP1

III.4. Utilisation thérapeutique des inhibiteurs de PARP dans les cancers

Le développement de l’utilisation des inhibiteurs de PARP dans le traitement des cancers est en plein essor. Actuellement, 163 essais cliniques évaluant l’effet de PARP en monothérapie ou en association sont en cours ou en phase de recrutement dans le traitement des tumeurs solides (ClinicalTrials.gov, 2017).

Les premières expériences in vitro menées avec différents inhibiteurs de PARP ont montré que ces molécules exerçaient des effets synergiques lorsqu’elles étaient associées à

108 divers cytotoxiques comme les agents alkylants (témozolomide, cisplatine), les inhibiteurs de Top1 ou les IR (Calabrese et al., 2003; Murai et al., 2014b; Thomas et al., 2007). De plus, les inhibiteurs de PARP peuvent être utilisés en monothérapie puisqu’ils ont la capacité de sensibiliser des modèles mutés ou déficients pour un gène impliqué dans les voies de réparation de l’ADN (Bryant et al., 2005; Farmer et al., 2005).

III.4.1. Association à la chimiothérapie et à la radiothérapie

Le développement clinique initial des inhibiteurs de PARP est basé sur la potentialisation de la mort des cellules cancéreuses par les agents ciblant l’ADN tels que les agents alkylants, les inhibiteurs de Top1 et les IR. Les premiers essais cliniques ont consisté à évaluer la tolérance de ces associations et vérifier si la sensibilisation des inhibiteurs de PARP observée au niveau préclinique était retrouvée chez les patients.

L’inhibition de PARP par la molécule AG14361 chimiosensibilise les xénogreffes de tumeurs coliques humaines au traitement par le témolozomide ou l’irinotécan ainsi que les radiosensibilise (Calabrese et al., 2004). Le véliparib potentialise les effets du témolozomide, des platines et des IR dans différentes modèles de xénogreffes de tumeurs humaines (Donawho et al., 2007). L’olaparib (AZD2281) montre des effets synergiques en association avec le cisplatine et le carboplatine dans des modèles tumoraux déficients en BRCA1 (Rottenberg et al., 2008).

De nombreux essais cliniques en phase I, II ou III associant les inhibiteurs de PARP aux agents cytotoxiques sont actuellement menés dans le traitement des tumeurs solides (ClinicalTrials.gov, 2017). Par exemple, huit essais cliniques de phase I ou II associant les inhibiteurs de PARP aux analogues de la CPT sont actifs ou en phase de recrutement.

III.4.2. Létalité synthétique

L’utilisation des inhibiteurs de PARP en monothérapie est basée sur le concept de létalité synthétique et a été décrit par Bryant et al. et Farmer et al. en 2005 (Bryant et al., 2005; Farmer et al., 2005). Le terme de létalité synthétique a été introduit pour la première fois par Dobzhansky en 1946 et repose sur l’idée que la perte de fonction simultanée de deux gènes essentiels induit la mort cellulaire, alors que la déficience d’un seul n’est pas létale (Dobzhansky, 1946). Ainsi, par exemple, les cellules tumorales possédant la mutation

109 inactivatrice non létale, des gènes BRCA1 ou BRCA2 impliqués dans la réparation des DSB de l’ADN par HR peuvent être tuées après exposition aux inhibiteurs de PARP (Fong et al., 2009; Hay et al., 2009; Rottenberg et al., 2008). L’hypothèse initiale était que les DSB persistantes résultant de l’inhibition de PARP1 seraient convertis en DSB lors de la réplication. Dans les cellules normales non mutées pour le gène BRCA1/2, les DSB seront normalement réparées par HR alors qu’elles ne pourront pas être réparées dans les cellules cancéreuses déficientes en BRCA1/2. Ce défaut de réparation aboutirait à l’augmentation de l’instabilité génomique et à la mort de la cellule tumorale (Ashworth, 2008).

De nombreuses études précliniques et cliniques ont confirmé les effets antitumoraux des inhibiteurs de PARP dans les tumeurs mutées BRCA1/2 (Bryant et al., 2005; Farmer et al., 2005; Gelmon et al., 2011; Ledermann et al., 2012; Mirza et al., 2016; Swisher et al., 2017). L’équipe de Bryant et al. a montré que les deux inhibiteurs de PARP NU1025 et AG14361 diminuent la survie des cellules déficientes en BRCA2 (Bryant et al., 2005). En accord avec ces résultats, le laboratoire de Farmer et al a rapporté que l’inhibition de PARP par KU0058684 et KU0058948 sensibilisait les cellules déficientes en BRCA2 mais également celles déficientes en BRCA1 (Farmer et al., 2005). La potentialisation de l’effet de l’inhibition de PARP dans des modèles mutés BRCA1/2 a été validé in vivo chez la souris puis chez le patient (Fong et al., 2009; Hay et al., 2009; Rottenberg et al., 2008). Le traitement de modèles murins de cancers du sein déficient en BRCA1 ou BRCA2 par l’olaparib diminue la croissance tumorale et augmente la survie des souris (Hay et al., 2009; Rottenberg et al., 2008). L’effet antitumoral de l’inhibition de PARP dans les cancers mutés BRCA a été affirmé dans un essai clinique de phase I mené chez des patients atteints de différents types de tumeurs solides (ovarien, mammaire, colorectal, mélanome, sarcome, prostate…) mutés BRCA1 ou BRCA2 (Fong et al., 2009).

En 2014, l’olaparib (LYNPARZA®) a bénéficié d’une autorisation de mise sur le marché par l’AEM (Agence Européenne du Médicament). La molécule est indiquée en monothérapie dans le traitement d'entretien des patientes adultes atteintes d'un cancer épithélial séreux de haut grade de l'ovaire, des trompes de Fallope ou péritonéal primitif : (1) récidivant et sensible au platine, (2) avec une mutation du gène BRCA (germinale et/ou somatique) et (3) qui sont en réponse, complète ou partielle, à une chimiothérapie à base de platine (HAS, 2015; VIDAL, 2017). Récemment, deux autres molécules, le rucaparib (RUBRACA®) et le niraparib (ZEJULA®), ont été autorisées aux Etats-Unis par la FDA,

110 dans le traitement des cancers de l’ovaire mutés BRCA, en monothérapie (FDA, 2016, 2017). De nombreux essais cliniques avec les différents inhibiteurs de PARP dans des cancers mutés BRCA sont en cours (ClinicalTrials.gov, 2017).

La stratégie de létalité synthétique peut être étendue aux cancers déficients pour la voie de réparation en HR par des mécanismes différents de BRCA1/2, phénomène appelé « BRCAness » (Cerrato et al., 2016; del Rivero and Kohn, 2017). Plusieurs mécanismes peuvent être impliqués : perte de RAD51, mutation d’ATM/ATR, de CHK2 ou du gène Fanconi, amplification de EMSY…

III.4.3. La résistance aux inhibiteurs de PARP

Certains patients ne répondent pas initialement ou développent des résistances secondaires aux inhibiteurs de PARP. Ces résistances peuvent être liées à la restauration de la réparation par HR dans les tumeurs. En effet, il a été rapporté que certains patients deviennent résistants au traitement par l’olaparib après acquisition d’une mutation secondaire de BRCA2 (Barber et al., 2013). De plus, un des mécanismes de résistance rapporté est dû à la perte d’expression de PARP1 (Bajrami et al., 2014; Murai et al., 2012). Un autre mécanisme de résistance est lié au fait que les inhibiteurs de PARP soient des substrats de la protéine d’efflux MDR1/Pgp (Multidrug Resistance Protein 1/ Permeability-GlycoProtein) (Henneman et al., 2015; Lawlor et al., 2014; Parrish et al., 2015).

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