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Chapitre 6 Aspects généraux des interactions en L2 à distance synchrones

6.3 Observation de la structure des énoncés en L2

6.3.2 Utilisation des structures complexes

La nécessité de relever le lexique dans les énoncés selon le critère de la variété de base a été abordée dans la partie précédente. Dans cette partie, nous allons nous focaliser sur les aspects linguistiques plus spécifiques observés chez notre public cible.

Comme nous l'avons mentionné dans la partie 2.3.3.2, les écarts entre natifs et apprenants avancés sont peu visibles lorsqu'il s'agit des connaissances lexicales et syntaxiques. Cependant, contrairement aux natifs, le "parfum d'étrangeté" persiste lors des discours chez les apprenants avancés comme Lambert et al. (2003) le mentionnent. Afin d'en comprendre la raison, il nous semble indispensable de réfléchir sur la manière selon laquelle les apprenants avancés organisent des informations mettant en jeu différentes composantes de leurs connaissances linguistiques.

Carroll et von Stutterheim (1997) s'appuient sur l'importance de l'organisation des informations pour que les apprenants atteignent la compétence des natifs.

[…] si ces apprenants [apprenants avancés] maîtrisent les règles de

grammaire au niveau de l'énoncé, il leur faut apprendre à agencer l'information en un tout cohérent dans un contexte donné et à l'exprimer par une forme grammaticale plutôt qu'une autre, pour atteindre une compétence égale à celle des autochtones (Carroll & von Stutterheim,

Focalisons-nous sur le fait de pouvoir "agencer l'information en un tout cohérent dans un

contexte donné". Les apprenants de niveau intermédiaire et avancé commencent à utiliser la

subordination et les connecteurs pour l'organisation des informations, mettant ainsi en jeu différentes composantes de leurs connaissances linguistiques. A ce propos, il nous semble pertinent de nous référer à certains traits caractéristiques acquisitionnels liés à la compétence textuelle que plusieurs chercheurs acquisitionnistes ont étudiés (Hancock, 1997 ; Bartning & Kirchmeyer, 2003 ; Lambert et al., 2003). Par ailleurs, comme Chini (2003) le souligne, la subordination est un phénomène qui n'apparaît guère dans des lectes d'apprenants débutants. En ce sens, il nous semble intéressant de prendre en considération la subordination employée chez les apprenants dans la mesure où cet emploi peut être une spécificité des apprenants de niveau plus avancé qui leur permet de mieux organiser les informations lors de la co- construction de la discussion.

Nous avons donc relevé, au niveau de la complexité syntaxique, la construction des énoncés simples, la planification des énoncés sans conjonction et l'utilisation des relatives. Pour ce qui est de la complexité discursive, nous nous sommes intéressée à l'utilisation de subordonnées introduites par "que", de la subordination par conjonction explicite, du participe passé et du participe présent.

Le tableau en-dessous résume les catégories d'analyse que nous allons effectuer à partir des études que nous avons présentées plus haut (voir la partie 5.2.1) :

Structure complexe

Complexité syntaxique Proposition simple

Planification des propositions sans conjonction Les relatifs

Complexité discursive Subordination introduite par "que" Subordination par conjonction explicite Utilisation de participe passé

Utilisation de participe présent Tableau 4 : catégories d'analyse

La subordination et l'emploi des connecteurs de subordination ont souvent été utilisés comme mesure du développement de la complexité syntaxique (Klein & Perdue, 1992). Notons qu'il

est également important de prendre en compte la fonction discursive liée à cette complexité ; "la complexité syntaxique est renvoyée à la capacité de structurer et de hiérarchiser les

énoncés en unités textuelles plus larges au niveau macro-syntaxique et textuel" (Bartning &

Kirchmeyer, 2003).

Voici le résultat de l'analyse.

0,0000 0,0500 0,1000 0,1500 0,2000 0,2500 0,3000 Phrase

simple Planification sans conjonction

Relatives Subordination

par "que" Subordination par conjonction explicite

Participe

passé Participe présent.

Apprenants Tuteurs

Figure 22 Moyenne par prise de parole d'utilisation des énoncés au niveau de la structure complexe. La Figure 22 montre que les apprenants construisent plus fréquemment des phrases simples sans subordination que les tuteurs lors de leurs interventions. Cette différence est également notable au niveau de la planification des énoncés sans conjonction, de l'utilisation de relatives, de la subordination introduite par "que" et par une conjonction explicite chez les apprenants. Pour ce qui est de l'utilisation des subordinations, il est nécessaire de tenir compte du fait que les tuteurs (indiqués par T1, T2) ont volontairement utilisé des consignes simplifiées comme l'indique Exemple 4.

Exemple 4

T2>>ce serait intéressant de faire des phrases entières s'il vous plaît T2>>Qu'as-tu voulu dire par incentive ?

Concernant la planification des énoncés sans conjonction, les apprenants ont notamment juxtaposé des propositions. Voici un exemple.

Exemple 5

TUNI>>moi j'ai remarqué qu'en france les gens plaident souvent bienqu'ils ont des avantages que chez nous on ne peut pas les envisager même dans les rêves, je crois que c'est l'exés de la démocratie qui engendre ça BRAM>>je ne sais même pas, je penses qu'il n'y a pas un code, une loi pour les embauc hes privées. je sais que pour les fonctionnaires publics, cela est assuré

Par ailleurs, les participants, tuteurs et apprenants, ont souvent utilisé ":" ou ";" pour remplacer certains connecteurs.

Voici un cas d'utilisation par un tuteur : Exemple 6

T1>>On p eut parler de t ous les t rois si v ous v oulez : la t olérance au sein de la fa mille à travers le cinéma français

T1>>Alors, la danse : phénomène culturel ou génétique ?

Dans le cas des apprenants : Exemple 7

MEXZ>>mais... il y a des intéret par tout; et on peut prendre n'importe quel excuse pour y arriver

TUNI>>pour résum er m on point de vue T1, m oi je suis trés socialiste, donc j'ai l'espoir de voir un jour un peuple qui traville, et récolte les fruits de son travail équitablement sans abuser le pouvoir et sans avoir une hiérarchie particulière : c'est presqu e systématique: ma is peut eter c'est une vision platonienne de la ville éternelle où il n'y a pas du mal et il y a que la paix: donc moi j'insiste sur le respect mutuel et c'est tout

Nous avons remarqué qu'il y a également une différence entre groupes dans l'utilisation de ces marques de ponctuation. Par rapport aux tuteurs, qui les ont utilisées pour remplacer certaines conjonctions, les apprenants les ont utilisées de pair avec des connecteurs.