• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 3 Intégration Technologique

3.4 Perspectives d’améliorations

3.4.1 Usage de l’ALD

La force du procédé de fabrication tel qu’il est défini dans ce manuscrit est qu’il permet l’obtention d’une épaisseur de canal de seulement quelques nanomètres. Toutefois, la production de largeur de canal inférieur à 20nm est très difficile, ce qui limite la section de jonction atteignable, et donc les performances possibles du SET. Les données recueillies dans la partie 3.2.2 indiquent qu’une largeur de canal entre 5 et 10nm produirait de bons résultats à température ambiante. Une amélioration possible serait l’utilisation de l’ALD pour la réduction de la largeur du canal.

En effet, l’ALD a la particularité de pouvoir déposer individuellement et de manière parfaitement isotrope les couches atomiques d’un matériau donné. Il est alors possible de contrôler l’épaisseur déposée au nanomètre près. La technique de fabrication intègrerait donc cette étape après la première électrolithographie (i.e. après avoir gravé les structures de canal et de box). On serait alors capable de réaliser facilement des canaux de moins de 10nm de large. Il y a toutefois une limite imposée à cette technique, liée à la rugosité de la ligne de canal. Comme le met en évidence la Figure 3-32, un canal ne pourra être affiné au-delà de sa rugosité sans entrainer de coupure dans le chemin de conduction. La rugosité de nos structures étant de l’ordre du nanomètre, on ne pourra probablement pas créer des canaux plus fins que 5nm.

Figure 3-32 Schématisation de la procédure de diminution de la largeur de canal par ALD, et du risque de rupture du chemin de conduction dans le cas où la largeur du canal après diminution est du même ordre de grandeur que la rugosité du canal.

Un autre emploi de l’ALD pourrait être la déposition de l’oxyde réalisant la jonction tunnel. Les caractéristiques de cet oxyde ont une importance capitale sur le fonctionnement du SET, et l’oxydation par plasma O2 n’en permet qu’un contrôle grossier. L’ALD permettrait une bien meilleure maîtrise de la qualité de l’oxyde et de son épaisseur déposée. Elle autoriserait de plus à pouvoir réaliser des SETs dont l’oxyde et le métal ne sont plus conjugués, offrant une plus grande variété de dispositifs réalisables. Il sera alors envisageable de choisir l’oxyde ayant la hauteur de barrière, et la permittivité adéquate pour le type de dispositif envisagé (i.e. fort courant d’attaque, ION/IOFF élevé, …).

Le procédé de fabrication présenté ici diffère du procédé nanodamascène usuel. Cet enchainement d’étape a été préféré à un simple remplacement de l’étape d’oxydation sous plasma O2 par dépôt d’oxyde ALD. En effet, il permet une diminution des dimensions de l’îlot, l’oxyde déposé diminuant la largeur du canal, ainsi que la largeur de la zone gravée, tout en permettant au reste du canal de conserver une épaisseur au moins équivalente à celle de l’oxyde déposé après CMP, ce qui permettra d’éviter toute coupure dans le chemin de conduction.

Toutefois, les techniques envisagées pour le dépôt des jonctions par ALD entrainent une capacité minimale plus élevée. En effet, comme on peut le voir sur la Figure 3-33-d, si après CMP avec la méthode de fabrication classique, il est possible d’obtenir une hauteur de 2nm pour les éléments source/drain et pour l’îlot, avec cette méthode une hauteur de 2nm pour l’îlot implique une hauteur de {2nm + (épaisseur de l’oxyde)} pour la source et le drain. La capacité des jonctions s’en trouve donc augmentée.

Figure 3-33 Illustration par une vue en coupe du canal dans le sens de la longueur, des étapes de fabrication pour le procédé nanodamascène à grille auto-alignée (a à d), et du procédé à déposition d'oxyde par ALD (e-h). Etape a) déposition de l’îlot par électrolithographie et soulèvement, oxydation de l’îlot par plasma O2 (b), et dépôt d’une épaisse couche de Ti (c). Résultat après CMP (d). Le point de départ est différent ; le canal a été gravé, mais une couche de Ti a été déposée sur la surface juste après. Cette couche de Ti est gravée pour créer l’îlot (e). Dépôt de l’oxyde par ALD (f), et d’une couche de Ti (g). Résultat après CMP (h).

On peut imaginer pousser le contrôle des jonctions encore plus loin à l’aide de l’ALD, en déposant des oxydes de natures différentes, chacun destiné à remplir une fonction bien précise. Ainsi qu’il a été illustré dans en 2.1.3, la conductivité Schottky a un impact défavorable sur la visibilité des oscillations de Coulomb. Utiliser une hauteur de barrière élevée permettrait la diminution de ce mode de conduction au profit du Fowler-Nordheim, permettant d’atteindre des ION/IOFF élevés. Toutefois, si cette barrière est trop large, l’intensité du courant transmis par le SET devient négligeable. L’idée est ici de combiner :

• Un oxyde à faible permittivité et hauteur de barrière. On obtient ainsi une petite capacité de jonction sans pour autant avoir besoin d’une épaisseur trop élevée. De plus, cette combinaison d’une faible épaisseur et hauteur de barrière évite la diminution trop importante du courant tunnel.

• Un oxyde de permittivité quelconque, mais de hauteur de barrière élevée. Seules quelques couches atomiques seront déposées. L’objectif est de pouvoir diminuer fortement la conduction thermoïonique tout en n’ayant qu’un faible impact sur le courant tunnel.

Le programme MARSSEA tel qu’il est défini présentement ne permet pas la simulation de dispositifs SETs possédant ce type de jonction. Son adaptation nécessiterait quelques modifications :

• Courant thermoïonique : la modification est mineure : il faudra juste être capable de fournir la hauteur de barrière la plus haute entre les deux oxydes, ainsi que le champ appliqué sur ce dernier.

• Résistance tunnel : le problème est cette fois plus complexe et nécessitera un traitement matriciel (cf. Figure 3-34). Le formalisme utilisé est basé sur l’emploie des fonctions d’Airy (Govoreanu et al., 2003) et remplacera le calcul du WKB réalisé jusqu’à présent.

Figure 3-34 Schématisation de l'approche matricielle pour le traitement d'une jonction tunnel à oxydes multiples à gauche. Simulation illustrant la différence entre jonction à un oxyde obtenu par WKB, et jonction à deux oxydes calculé grâce aux fonctions d’Airy. Images tirées de (Govoreanu et al., 2003).

Des simulations effectuées avec MARSSEA ont permis néanmoins d’établir en première approximation que la création d’une hétéro-jonction combinant les oxydes O1 et O2 aux caractéristiques indiquées dans le Tableau 3-6, devrait permettre d’obtenir une diminution d’environ six ordres de grandeur du courant thermoïonique, sans pour autant affecter la conductivité tunnel. Il serait alors possible de négliger complètement l’impact du courant thermoïonique. Comme on peut le voir dans la Figure 3-35, les rapports ION/IOFF obtenus dans ce cas sont très prometteurs, tout en conservant potentiellement la possibilité d’avoir une conductivité élevée.

Oxyde Section jonction Epaisseur JT Phi0 Permittivité m*

O1 100 nm² 8 nm 0.3 eV 3 0.44

O2 100 nm² 0.5 nm 0.7 eV x x

Tableau 3-6 Indication des paramètres considérés pour les oxydes O1 et O2. L'objectif de l'oxyde O2 étant simplement la coupure du courant thermoïonique, seules comptent sa faible épaisseur et sa hauteur de barrière élevée. C'est pourquoi les valeurs de sa permittivité comme de sa masse effective n’ont pas été indiquées.

Figure 3-35 Rapport ION/IOFF en fonction de ION pour différents paramètres de jonctions. Les points rouges indiquent les résultats obtenus lorsque seule la conduction Fowler-Nordheim a été considérée. Les points bleus prennent en compte la conduction thermoïonique en plus de la conduction Fowler-Nordheim.

L’emploi d’une hétérojonction semble créer un comportement asymétrique de la jonction tunnel (cf. Figure 3-36). La caractéristique de l’asymétrie est elle-même très dépendante de l’épaisseur des différentes couches, ce qui implique un grand contrôle de ce paramètre pour pouvoir produire des SETs de manière reproductible. Toutefois, la capacité de maîtriser l’épaisseur de matériau déposé à une échelle inférieure au nanomètre grâce à l’ALD devrait se montrer bien suffisante pour cela.

Figure 3-36 Illustration de différents types de jonctions MIIM en polarisation positive et négative, avec simulation du comportement électrique des MIIM à droite. La différence entre l’asymétrie de la MIIM Step et de la MIIM Resonant est due aux effets de résonnance de cette dernière. Images tirées de (Grover & Moddel, 2012).

ION ION /IOF F Barrière rectangulaire Hétérojonction