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a1. Typologie et choix de la nomenclature

Bien que nous ayons recours à la classification non supervisée pour la réalisation de notre cartographie nous avons cherché à définir, préalablement à la classification automatique de l'image, une ébauche de nomenclature "idéale" qui aurait pu aussi bien servir dans le cadre d'une analyse d'image utilisant la technique de classification supervisée.

Alors que sur le terrain, la nomenclature établie à partir des observations cherche à être la plus exhaustive possible au sein d'une unité d'équivalente apparence, la confrontation avec les données issues de télédétection a nécessité l'adoption d'une nomenclature relativement simplifiée.

Le choix d'une telle nomenclature, adaptée à l'interprétation des données de télédétection, constitue en effet un préalable indispensable à la réalisation d'un document cartographique représentant, le plus fidèlement possible, les différentes

unités paysagères à la fois identifiées sur le terrain et discriminées sur les images satellitales.

Le premier volet de la production cartographique concerne donc le choix de la nomenclature permettant d'aboutir à une classification des types d'unités paysagères.

Tout d'abord, nous nous sommes intéressés à divers travaux similaires réalisés sur les forêts de Tunisie116 afin de nous faire une idée sur les possibilités de discrimination des couverts végétaux à partir de données acquises par le satellite SPOT.

Comme nous l'avons vu, en Tunisie, les résultats du premier inventaire forestier ont été publiés en 1995. Ainsi nous avons pu disposer de la nomenclature utilisée pour l'étude des milieux forestiers tunisiens par télédétection. Cependant, les objectifs d'utilisation de ces données étant relativement différents des nôtres il nous a fallu remanier en de nombreux points la nomenclature existante.

La nomenclature CORINE biotope, sur laquelle repose le programme européen Natura 2000, basée sur une typologie des habitats naturels, bien que peu adaptée au contexte de réalisation de nos missions sur le terrain, nous a aussi été très utile pour la définition des unités paysagères rencontrées dans notre région d'étude.

De telles nomenclatures offrent la possibilité de décliner les principaux types d'occupation du sol en un très grand nombre de classes d'objets. Cependant, afin de limiter les erreurs d'assignation possibles nous avons délibérément opté pour une nomenclature simplifiée.

En effet, tout au long de notre analyse nous nous sommes aperçus que pour certains objets de nombreuses confusions existaient. Certaines classes d'objets,

comme les jeunes plantations (parcelles reboisées mécaniquement) constituent des objets appartenant à plusieurs thèmes. D'autres objets très différents sur le terrain répondaient à des critères images similaires (cas des plantations d'Eucalyptus sp. et des taillis d'Acacias sp.).

Ainsi les unités d'équivalente apparence délimitées sur la composition colorée ayant servie de base pour la mise en place de notre échantillonnage ne correspondent pas toujours à des objets discriminables à partir de l'analyse des radiométries des images satellites. Bien que très différents sur le plan physionomique, les propriétés spectrales de ces objets sont quasi-analogues. Vouloir les dissocier en plusieurs classes d'objet aurait été quelque peu hasardeux.

En conclusion, le premier niveau hiérarchique de notre nomenclature correspond aux trois thèmes discernables à la fois sur le terrain et sur les images satellitales soit l'eau, les surfaces minéralisées et les formations forestières (à dominance de feuillus ou de résineux).

a2. Mise en œuvre des classifications

Alors que nous disposions d'un nombre relativement important de relevés, pour la définition de correspondances entre les observations terrain et les réponses spectrales des surfaces échantillonnées, nous avons retenu la classification non supervisée comme technique de classification de l'image SPOT datée du mois de juin 1998.

Dans ce type d'approche, les propriétés spectrales dominantes sont extraites automatiquement puis identifiées à l'aide des données de terrain et de tout autre document utile à la photo-interprétation des diverses classes obtenues.

Nous avons procédé en réalité en un grand nombre de classifications non supervisées avant d'aboutir à notre cartographie définitive des unités paysagères de la forêt des dunes de Menzel Belgacem.

Sous Idrisi, ce sont les modules cluster et isoclust qui permettent de réaliser ces classifications. Cette famille de classification permet de créer des regroupements de pixels ayant des signatures spectrales similaires grâce à plusieurs itérations d'un algorithme (méthode d'agrégation autour des centres mobiles). Ces deux modules nécessitent au préalable la réalisation d'une composition colorée codée en 8-bits ainsi qu'un nombre de classes désiré à l'issue de ce traitement. Dans la pratique, on fixe toujours un nombre assez élevé de classes qui par la suite feront l'objet d'une agrégation grâce au module reclass.

Dans un premier temps nous avons cherché à extraire, sur l'image SPOT, les trois thèmes principaux correspondant au premier niveau hiérarchique de notre nomenclature. (Fig. 45.)

Pour cela, après avoir extrait pour chaque canal la partie de l'image couvrant la zone d'étude, on procède au calcul de divers indices afin de préparer la classification non supervisée capable de prendre en compte le maximum d'information concernant les couverts végétaux.

Le résultat de cette phase se concrétise par l'obtention de quatre néo- canaux, à savoir, trois axes issus de l'analyse en composantes principales effectuée sur les quatre canaux bruts et un indice de végétation normalisé, le NDVI.

L'analyse en composante principale a pour but de résumer l'information contenue dans les canaux bruts qui comme ont l'a vu sont parfois très fortement corrélés, à l'image des canaux XS1 et XS2. Ce calcul permet d'améliorer très nettement la discrimination entre les thèmes qui sont autant de types d'occupation du sol.

© S. Brun (2005). Fig. 45. – Procédure d'isolement des trois thèmes principaux, premier niveau d'organisation de la nomenclature.

L'indice de végétation normalisé ou NDVI est obtenu à l'aide de la formule suivante : NDVI = (pIR-R / pIR+R) où IR et R correspondent respectivement aux canaux XS3 et XS2. Cet indice de végétation est l'un des plus fréquemment utilisé dans ce type de problématique. En effet, il est reconnu que 90% de l'information spectrale des couverts végétaux est contenue dans les bandes rouges et proche infra-rouge117.

Une première classification non supervisée lancée sur ces quatre néo- canaux donne lieu, après agrégation de classes, à une stratification de l'espace relativement grossière. L'image qui en résulte consiste en une représentation de la distribution des trois thèmes principaux.

A l'issue de ce premier traitement, il nous est possible d'isoler les pixels "marins" ainsi que les pixels "forestiers" par la réalisation d'images masquées correspondant à des images binaires où la valeur 1 est affecté aux pixels retenus et la valeur 0 aux pixels localisés à l'extérieur du thème considéré.

La combinaison de ces masques avec les canaux bruts permet de disposer de meilleurs résultats puisque seuls les pixels contenus à l'intérieur du masque ne font l'objet de la classification non supervisée. Ainsi, les traitements ultérieurs ne concernent plus que le thème "Formations forestières". Une nouvelle classification non supervisée, en 11 classes, s'est plus spécifiquement intéressée à segmenter le milieu forestier. (Fig. 46.)

Une fois encore, les néo-canaux issus de la combinaison linéaire des quatre canaux bruts masqués ont autorisé un découpage de l'espace forestier, après agrégation de classes, entre les formations forestières à dominance de feuillus et les formations forestières à dominance de résineux.

© S. Brun (2005). Fig. 46. – Procédure de traitements visant à obtenir une segmentation plus fine du thème "Formations forestières" (rassemblant les classes feuillus et résineux) par combinaison avec les 3 classes de NDVI également obtenues après CNS.

Ensuite, nous avons procédé à une autre classification non supervisée intéressant le seul indice de végétation, calculé à partir des canaux bruts masqués, aboutissant à l'obtention de trois classes de NDVI sur le thème "Formations Forestières".

A l'issue de ces premières classifications non supervisées nous disposons donc de deux images, une première image résultant de la classification non supervisée en 3 classes de l'indice de végétation et la seconde représentant l'extension des deux classes correspondant aux formations forestières. (Fig. 47. & 48.)

Afin d'obtenir une représentation des différentes unités paysagères structurant le milieu forestier, les thèmes "Formations forestières" et "Surfaces minéralisées" doivent faire l'objet de subdivisions en différentes classes en fonction de divers critères (de recouvrement, d'activité chlorophyllienne et du degré d'hydromorphie des sols) enregistrés par les images satellitales.

Concernant le thème "Formations forestières", il nous a été possible de distinguer trois classes de recouvrement à partir des trois classes d'indices de végétation (NDVI). Ces trois classes semblent traduire des différences d'ordre structural, la classe ndvi-1 rassemblant les secteurs caractérisés par les valeurs les plus faibles de l'indice de végétation.

Ainsi qu'il s'agisse de formations forestières composées essentiellement de feuillus (f) ou de résineux (r) :

La classe "ndvi-1α" correspond toujours aux formations forestières (α) les plus ouvertes avec des taux de recouvrements variables mais toujours inférieurs à 20%.

La classe "ndvi-2α" est une classe intermédiaire, il s'agit de formations forestières (α) dont la strate supérieure a un taux de recouvrement compris entre 20 et 60%.

La classe "ndvi-3α" est constituée de formations forestières (α) relativement fermées disposant de taux de recouvrement supérieurs à 60%.

Dans notre cas précis, le NDVI a aussi été très utile pour la détermination des classes au niveau des surfaces minéralisées ou des couverts végétaux à faible taux de recouvrement. Une classification non supervisée réalisée sur ce néo-canal a permis d'aboutir à une segmentation des espaces fortement minéralisés ou faiblement végétalisés. Il nous a été possible après agrégation de classes d'obtenir trois classes distinctes, "ndvi-1m", "ndvi-2m", "ndvi-3m", couvrant l'essentiel des espaces compris à l'intérieur du thème "Surfaces minéralisées".

À ce stade de la classification, un certain nombre de pixels au contenu mixte se confondent avec la classe "Terres agricoles cultivées". Il s'agit effectivement d'enclaves cultivées à l'intérieur du milieu forestier mais aussi de parcelles passées en coupe ou encore de surfaces reboisées mécaniquement entre 1992 et 1998. Le recours à une image SPOT datée de 1992 a autorisé l'isolement de cette classe supplémentaire. Après réalisation d'une image masquée ne contenant que des pixels "forestiers", nous avons pu localiser les surfaces ayant fait l'objet de traitements divers, par comparaison avec l'image la plus récente. Dès lors, il nous a été possible d'injecter cette dernière classe "Reboisements, jeunes plantations, clairières, coupes rases" à notre classification.

© S. Brun (2005). Fig. 47. – Deux classes de peuplements, résineux et feuillus, issues de la segmentation du thème "Formations forestières".

© S. Brun (2005). Fig. 48. – Trois classes d'indice de végétation obtenues après traitement par classification non supervisée des pixels "forestiers".