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Tel que brièvement mentionné plutôt, la NVU (Fig. 1.5) représente l’unité intrinsèque au sein de laquelle les cellules de la BBB (cellules endothéliales et péricytes), les cellules gliales (astrocytes, oligodendrocytes et microglies) et les neurones interagissent et communiquent étroitement entre eux (119,121). Les cellules endothéliales composent l’endothélium des microvaisseaux où elles forment des jonctions serrées et adhérentes qui limitent les échanges passifs (119,240). Les péricytes entourent près de 80% de la surface de ces microvaisseaux (241) via un contact peg-socket essentiel à leur maintien, qui constitue des projections cytoplasmiques entrelancées ancrant les péricytes sur les cellules endothéliales (242). Les pieds astrocytaires entourent les cellules endothéliales complétant la BBB et permettant la communication entre les neurones et les cellules de la BBB (243), en plus de maintenir la fonction de la celle-ci (244). L’intégrité de cette unité fonctionnelle est essentielle au bon fonctionnement du cerveau (121). La NVU contribue notamment à la maintenance de l’homéostasie cérébrale, au couplage neurovasculaire (119,121,243,245,246), à la perméabilité de la BBB (119,240,247), etc.

1.5.1. Fonction de l’unité neurovasculaire

Par exemple, la BBB forme une barrière physique et sélective (247) régulant les échanges de métabolites et de nutriments nécessaires au bon fonctionnement neuronal (119). La BBB est donc cruciale à la maintenance de la composition du fluide interstitiel du cerveau, mais également à l’élimination de macromolécules potentiellement toxiques (119) telles l’Aβ (68).

Les péricytes, quant à eux, sont des cellules contractiles modulant le CBF via la constriction de la paroi des vaisseaux sanguins (246). Ils expriment d’ailleurs plusieurs protéines associées à la contraction dont l’α-actine spécifique aux muscles lisses, la tropomyosine et la desmine (248). Ils stabilisent également les capillaires nouvellement formés (249). En effet, ils jouent un rôle important dans la régulation de la prolifération, la survie et la migration des cellules endothéliales, en plus de moduler les connections des vaisseaux cérébraux (250). Ils prennent part à l’inflammation du fait de l’expression de récepteur de l’immunité innée (251) et leur capacité de recrutement de leucocytes au site d’inflammation (252,253). Qui plus est, les péricytes possèdent une activité semblable aux macrophages induite par la signalisation de récepteurs tels le récepteur de type Toll(TLR)-4 (254,255) et LRP1 (46). Cela leur permet d’ailleurs d’internaliser l’Aβ pour le dégrader (46).

Figure 1.5. Représentation de l’unité neurovasculaire et de la microcirculation cérébrale. Les artères

piales, situées dans l’espace sous-arachnoïdie, se divisent en capillaires innervant le parenchyme. Les cellules endothéliales entourées par les péricytes et en contact avec les pieds astrocytaires forment une barrière étanche, la BBB. La BBB interagie avec les neurones et les microglies ce qui forme une unité fonctionnelle, la NVU. SAS: Espace subarachnoïde, VSMC: Cellules vasculaires des muscles lisses. (42) [tiré intégralement].

Comme les péricytes, les astrocytes influencent le CBF (243,245) et aident à l’organisation des nouveaux capillaires (256). Ils contribuent également à la réponse immunitaire par leur capacité à internaliser des macromolécules neurotoxiques (43,45) et à recruter des cellules immunocompétentes (253,257). De plus, ils participent au guidage neuronal, lors du développement, en agissant telle une cellule d’échafaudage (258). Comme les neurones, les astrocytes ont besoin pour fonctionner d’un apport continu en oxygène et en nutriments, ce qui dépend de l’intégrité fonctionnelle de la NVU (259). Lors d’une demande énergétique par les neurones, les astrocytes servent d’intermédiaires à la communication entre les neurones et les cellules endothéliales (260).

Les microglies, quant à elles, sont les cellules immunes principales du SNC (261). L’autoréplication, la division de progéniteurs du cerveau (261) ou l’infiltration de monocytes circulants précurseurs, Ly6CHigh/CCR2+ (262), permettent de maintenir la population de microglies

constante. Elles constituent l’une des principales lignes de défense contre les pathogènes infiltrant le cerveau. En condition physiologique, les microglies sont quiescentes et sondent dynamiquement l’environnement pour détecter toutes molécules toxiques (263). Lorsque la microglie détecte une menace potentielle, celle-ci s’active vers un profil inflammatoire, M1, ou alternatif, M2 (264). Par exemple, lorsque la microglie détecte la présence d’Aβ, elle adopte un profil M1 et est recrutée au site d’agrégation de l’amyloïde (265,266) où elle la phagocytera (43,47). Suite à son recrutement, l’Aβ promeut également la sécrétion de cytokines et chimiokines pro-inflammatoires par la microglie (267). Par la sécrétion de chimiokines et de cytokines, les microglies recrutent les monocytes (253) induisant la réponse inflammatoire. À l’inverse, la microglie activée M2 est associée à une fonction de maintenance ou de réparation tissulaire. Trois sous-types de la M2 ont été décrits, nommés M2a, M2b et M2c. Ces sous-types remplissent des rôles distincts, soit la réparation tissulaire (M2a), l’immunorégulation (M2b) et l’état endocytique (M2c) par lequel la microglie élimine efficacement les débris et contribue à la réparation, malgré sa faible présentation d’antigènes (268). La réponse immunitaire contribue à la maintenance et à la régénération axonale (269). L’ensemble de ses fonctions est d’ailleurs modulé suivant un stress. Notons, toutefois, que cette classification dogmatique est utilisée afin de simplifier les mécanismes complexes d’activation des cellules microgliales. En effet, il n’existe pas deux immunophénotypes précis, mais plutôt un ensemble de différents états de polarisation pouvant être plus ou moins extrêmes.

1.5.2. Remodelage de l’unité neurovasculaire et maladie d’Alzheimer

Ainsi, la communication dynamique et le fonctionnement de l’ensemble des cellules de la NVU sont nécessaires au bon fonctionnement du cerveau (119,121). Toutefois, en condition pathologique, l’unité devient dysfonctionnelle ce qui a des répercutions détrimentaires sur le fonctionnement du cerveau, soit la fonction cognitive.

Avec l’âge, des changements se produisent au sein de la NVU: diminution de l’expression de protéines de jonctions serrées, perte de péricytes (242), défaillance du couplage neurovasculaire (270), réduction du CBF (135) et diminution de la capacité phagocytique des microglies (68). La perte de péricytes induit une dysfonction des microvaisseaux ce qui a été proposé comme événement initiant la neurodégénérescence (Section 1.1.3 – Hypothèse vasculaire) (271). Cette déficience de péricytes augmente la perméabilité de la BBB permettant l’entrée de molécules toxiques (241). Ce phénomène est également observé suite à des troubles vasculaires tels que l’AVC ischémique (179,272) et la AD. Chez les malades d’Alzheimer, ces altérations de la NVU sont plus importantes résultant alors en une accumulation de l’amyloïde (93,119). L’élévation de l’Aβ cérébrale est d’autant plus importante due à la réduction d’activité des protéines de dégradation, dont la plasmine (Section 1.4 – Système de l’activateur du plasminogène) (227,230). Avec la progression de la maladie, les niveaux de chimiokines et cytokines pro-inflammatoires, les molécules d’adhésion et d’autres médiateurs inflammatoires augmentent considérablement (273). Par conséquent, le cerveau devient un environnement inflammatoire ce qui pourrait permettre d’éliminer les macromolécules neurotoxiques du cerveau. Cependant, les macrophages deviennent avec l’âge moins efficace à éliminer l’Aβ (274), en plus d’avoir une présentation réduite des TLRs (275). Une inflammation soutenue et une réduction de l’élimination de l’Aβ se produient alors et contribuent à la neurodégénérescence (68). De plus, il a également été identifié chez des malades d’Alzheimer qu’une diminution de l’expression du transporteur du glucose, GLUT1, survient occasionnant une diminution de l’apport de nutriments et substrats essentiels (276). Ce phénomène est d’ailleurs présent chez des individus asymptotiques susceptibles de développer la AD tel que démontré par des études par PET utilisant un dérivé du glucose radioactif, le 18F-

fluorodéoxyglucose (129,277,278). Ainsi, plusieurs altération au niveau d cerveau orchestré par le remodelage surviennent plusieurs années antérieurs au diagnostic.

Ces phénomènes représentent une forme de remodelage de la NVU commune à plusieurs pathologies. Le remodelage de la NVU se traduit globalement par une réponse moléculaire et cellulaire se produisant au sein de l’unité suite à un dommage (255). Toutefois, le rôle du

remodelage demeure controversé. Ce remodelage essaie de compenser pour l’événement stresseur ce qui peut résulté en une amélioration ou aggravation la cascade pathogénique selon le contexte (150). Dans la phase initiant la AD, l’hypoperfusion s’instaure et induit l’altération de la NVU qui peut contribuer à l’initiation de la pathogenèse via un mécanisme peu connu (Section 1.3 –

Hypoperfusion) (93). Par la suite, un profil inflammatoire s’installe afin de promouvoir

l’élimination de l’Aβ et autres macromolécules toxiques. Toutefois, cette élimination n’est pas efficace et, par conséquent, se prolonge ce qui contribue au dysfonctionnement neuronal. Des investigations supplémentaires, s’intéressant au remodelage de la NVU et son effet sur les pathologies, sont nécessaires et pourraient démystifier la mécanistique derrière la pathogenèse, en plus d’offrir de nouvelles voies de traitement (53).

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