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1. LES ÉVALUATIONS ENVIRONNEMENTALES EN DROIT INTERNATIONAL :

1.1. PRESENTATION : ROLE, PROCEDES ET CONTENU DE L’EIE

1.2.3. Une obligation à portée géographique spécifique

1.2.3.1. La Convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est (Convention OSPAR)

La Convention OSPAR de 1992 bénéficie d’une portée géographique limitée étant donné que dans la région arctique, seuls le Danemark et la Norvège y sont Parties344. Son champ

d’application spatial s’étend à la « zone maritime OSPAR » qui comprend les eaux intérieures, la mer territoriale et la ZEE des Parties contractantes ainsi que la haute mer345. Cet instrument

ayant une application très large reste cependant limité puisque seulement un segment de l’océan Arctique appartient à la région Atlantique Nord-Est346.

Son objectif principal vise à ce que les États s’engagent à la mise en œuvre d’actions nationale, régionale et mondiale pour :

“ [...] la prévention et la suppression de la pollution marine de même que pour une gestion durable de la zone maritime, qui consiste en une gestion des activités humaines telle que l’écosystème marin puisse continuer d’assurer les

341 Roger MERINO, « Re-politicizing participation or reframing environmental governance? Beyond indigenous’ prior consultation and citizen participation », (2018) 111 World Development 75,76.

342 E. BARRY-PHEBY, préc., note 1, 51-53. 343 Id., 53.

344 Convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est, préc., note 67.

345 Art.1 (a) Convention OSPAR. Les zones maritimes sont comprises comme étant situées dans les « région des océans Atlantique et Arctique et de leurs mers secondaires, qui s’étendent au nord du 36° de latitude nord et entre le 42° de longitude ouest et le 51° de longitude.

utilisations légitimes de la mer et de répondre aux besoins des générations actuelles et futures. ” 347

En effet, cette Convention va au-delà d’une gestion de la pollution marine en assurant la protection des zones maritimes contre les effets préjudiciables des activités humaines en mer348.

Pour ce faire, elle s’emploie à règlementer la plupart des activités humaines prenant place dans l’environnement marin par le biais de ses différentes annexes. Celles-ci concernent la prévention et l’élimination de la pollution d’origine tellurique, de la pollution par immersion ou incinération, de la pollution d’origine extracôtière349. La Convention veille à ce que les États

parties s’appuient sur certains principes et procédures afin qu’ils puissent prendre de meilleures décisions vis-à-vis du développement et de l’évaluation des effets des activités qu’ils souhaitent entreprendre.

Parmi ces principes, le principe de précaution figure comme l’outil essentiel pour la mise en œuvre de la Convention OSPAR ; c’est d’ailleurs la première fois que celui-ci est adopté explicitement par un traité international350. Le principe de précaution doit être appliqué

en mettant en œuvre des mesures de prévention lorsque des substances introduites dans le milieu marin seraient susceptibles d’entrainer des risques pour l’homme et/ou les écosystèmes marins « même s’il n’y a pas de preuves concluantes d’un rapport de causalité entre les apports

et leur effets »351. De la sorte, l’incertitude vis-à-vis des effets engendrés par la pollution

émanant de certaines activités entreprises en mer ne peut constituer un moyen permettant de justifier qu’aucune mesure de prévention de la pollution n’ait été prise.

Le lien établi entre les mesures de prévention et les effets de certaines activités constitue un élément essentiel du régime pour la protection de l’environnement marin crée par la Convention OSPAR. En effet, l’approche employée par celle-ci vise à encourager les États à assoir leurs décisions sur une connaissance préalable des effets environnementaux que pourraient avoir certains projets. Les États sont donc encouragés à développer leurs connaissances vis-à-vis des répercussions environnementales352.

C’est l’article 6 de la Convention OSPAR qui oblige les États à publier conjointement des bilans de suivi et d’évaluation de la qualité de l’environnement marin dans l’Atlantique du

347 Préface, Convention OSPAR. 348 Id.

349 Annexe I, II, III Convention OSPAR.

350 Lilly WEIDELANN, International governance of the arctic marine environment: with particular emphasis on high seas fisheries, New York, Springer, 2014, p.100.

351 Art. 2 (a) Convention OSPAR.

Nord-Est353. Il est indiqué qu’au sein de ces bilans doit figurer une évaluation de l’efficacité

des mesures de prévention ainsi qu’une évaluation des mesures de protection de l’environnement en place354. L’originalité de la Convention tient au fait qu’elle ne contient pas

de dispositions explicites concernant les EIE mais que le processus qu’elle met en place s’appuie majoritairement sur ces dernières.

À titre d’exemple, l'annexe IV impose de facto des EIE pour certaines activités humaines en mer lorsqu’elle mentionne que les Parties contractantes355 :

“ […] procèdent individuellement ou de préférence conjointement, aux recherches considérées comme nécessaires à l’évaluation de la qualité du milieu marin et au développement des connaissances et de la compréhension scientifiques du milieu marin et, notamment, du rapport entre les apports, les teneurs et les effets.”356

Ces recherches font parties de ce que la Convention appelle la « surveillance continue » qui consiste au suivi et à l’évaluation de la qualité de l’environnement marin357. L’évaluation

bénéficie d’une grande portée car les apports anthropogènes des activités doivent être évalués pour chacune des composantes de l’environnement marin358. Ainsi, la Convention OSPAR

contribue clairement à déterminer si les activités existantes et les activités anticipées pourraient avoir des effets sur les écosystèmes de la région qu’elle englobe359.

Même si la Convention ne s’étend qu’à une portion limitée de la zone marine arctique, ses dispositions ne restent pas dénuées d’importance pour ce qui est du développement d’hydrocarbures dans la région. Mayrand souligne à cet égard que la Convention OSPAR: “provides a framework enabling the continuous development of the obligation to prevent,

reduce, and control pollution from oil and gas activities”360. En effet, au sein de son annexe III,

la Convention OSPAR identifie les activités offshore pour lesquelles les évaluations sont nécessaires. Parmi celles-ci : l’exploration de pétrole de gaz et de minéraux, la mise en place

353 Art. 6 (a) Convention OSPAR. 354 Art. 6 (b) Convention OSPAR.

355 Timo KOIVUROVA, Erik J MOLENARR, WWF (ORGANIZATION) et INTERNATIONAL ARCTIC PROGRAMME, International governance and regulation of the marine Arctic: overview and gap analysis, Oslo, WWF International Acrtic Programme, 2009, en ligne : <http://lpintrabp.parl.gc.ca/lopimages2/bibparlcat/21000/Ba432951.pdf> (consulté le 27 juin 2019), p.19. 356 Art. 2 (d) Annexe IV Convention OSPAR.

357 Art.1 de l’Annexe IV Convention OSPAR. 358 Id.

359 T. KOIVUROVA, E. J. MOLENARR, WWF(ORGANIZATION) et INTERNATIONAL ARCTIC PROGRAMME, préc., note 355, p.19.

360 Helne MAYRAND, « Arctic Community of Practice and Offshore Oil and Gas Activities: Determining the Legal and Political Dimensions of the Obligation to Prevent, Reduce, and Control Pollution », (2015) 11-2 McGill International Journal of Sustainable Development Law and Policy 258, 280

de structures pour l’exploitation de pétrole et du gaz et la mise en place de pipelines. L’objectif est d’identifier les impacts de ces activités sur le milieu marin afin de servir de base aux décisions relatives à l’élaboration de programmes et de mesures vis-à-vis ces projets361.

En se basant essentiellement sur l’état actuel des connaissances sur l’environnement marin et en favorisant l’application du principe de précaution, la Convention OSPAR :

“[…] is thought to provide a model for creating an innovative system of pollution control for a specific region.” 362

En effet, un aspect original de la Convention tient au fait qu’elle ait établi la Commission OSPAR. Cet organisme supervise la mise en œuvre de la Convention et évalue l’efficacité des mesures ayant été adoptées par les États363. Elle peut par la suite développer des plans de

prévention de pollution auxquels les États seront soumis364. La Convention OSPAR constitue

un exemple en droit international où les États se sont engagés à prendre des décisions reflétant les résultats obtenus à l’issue de la réalisation d’EE.

361 T. KOIVUROVA, E. J. MOLENARR, WWF(ORGANIZATION) et INTERNATIONAL ARCTIC PROGRAMME, préc., note 355, p.18.

362 L. WEIDELANN, préc., note 350, p.97. 363 Art. 10 (2) (a) (b) Convention OSPAR 364 Art. 10 (2) (c) et 10 (3) Convention OSPAR

2. LES EIE EN DROIT NATIONAL : LE REGIME APPLICABLE DANS LES

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