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Un processus participatif difficile à mettre en oeuvre.

“C’est un processus extrêmement complexe qui forcément génère

beaucoup de tensions”.

Extrait d’un entretien avec un membre de l’IVC

En envisageant la marginalité urbaine comme “ le manque de participation des groupes et individus dans les domaines dans lesquelles, en accord avec certains critères, il leur reviendrait normalement de participer6”,

la participation, au delà d’être une ressource pour le projet, serait aussi une manière d’intégrer socialement

6 Mezzini, Melina. « De lo individual a lo comunitario. Experiencias de trabajo participativo en vivienda social ». HI-Hábitat inclusivo, no 13 (2019). 100 B-“ AU D ELÀ D’UN P RO JET , C’EST UN P ROCESSUS” . L ’EXP ÉRIEN CE D E LA FO RMALISA TI ON D E L ’INFO RMEL D ANS LA VILLA 31.

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101 03. AN AL YSE D U P ROCESSUS D’URB ANISA TI ON À TRA VERS L ’ÉTUD E D E CAS D E LA VILLA 31.

Au delà du consensus qui semble général vis à vis de l’importance de la participation dans le processus de ré-urbanisation, la réalité de la réalisation d’un projet participatif à l’échelle des 60 000 habitants de la villa s’avère beaucoup plus complexe. Pour l’élaboration de la loi comme pour l'exécution du projet, différentes instances participatives composées d'habitants du quartier appelées les Mesa de Urbanizacion ont été créés. Ainsi, le projet se développe à la fois par ces instances mais aussi par l’intermédiaire des représentants de chaque secteurs du quartier, et de réunions et d’assemblées ouvertes à tous les habitants.

“Dans le cas de la villa 31, il y a un nombre d’acteurs prenant part au projet particulièrement important. Permettre la participation dans ce contexte est très difficile parce que bien sur, les besoins, les priorités et les intérêts de chacun sont très variés. C’est aussi une des plus grandes villa de la ville à cette échelle, le processus

est particulièrement complexe.”

Entretien avec un architecte de l’IVC.

Conséquence des rapports historiquement conflictuelles entre l’Etat et les habitants de ces espaces et ce, particulièrement dans le cas de la villa 31, “ il est commun de rencontrer dans les communautés les plus exclus un

grand niveau d’incrédulité9 ”:

“Il est beaucoup plus facile de

travailler dans des asentamientos ou villas récents. Parce que lorsque l’Etat est déjà intervenu, et qu’il est mal intervenu, les habitants sont méfiants, ou alors ils ne participent pas. La 31, c’est la plus ancienne, elle a environ 90 ans donc forcément c’est dans cette villa que la participation est la plus complexe à mettre en

oeuvre.”

Entretien avec un membre de l’IVC

Comme l’exprime ces extraits d’entretiens, les récentes politiques d’éradication de la villa 31, ont donc provoqué une certaine de forme de méfiance ou de désintérêt de la part des habitants vis à vis des actions de la SECISyU. Ceci implique, comme ont pu l’exprimer de nombreux acteurs de la ré-urbanisation de la villa 31 dans le cadre de l’ENAC, la difficulté particulière de l'exécution du projet dans ce quartier. Pourtant un des éléments fondamentaux à la mise en place de ce processus me semble être la confiance. Au cours de divers entretiens avec des habitants du quartier, j’ai particulièrement remarqué la récurrence avec laquelle était abordés “ les mensonges de la SECISyU” ou le fait “ qu’il ne faut pas croire ce qu’ils disent”, “ ils manipulent

9 Mezzini, Melina. « De lo individual a lo comunitario. Experiencias de trabajo participativo en vivienda social ». HI-Hábitat inclusivo, no 13 (2019).

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la réalité”. Dans d’autres cas, certains habitants traduisaient le désintérêt des autres vis à vis du processus d’urbanisation :

“ Parce qu’on va être sincère il y a des réunions mais il y a peu de personnes qui y assistent. Les gens ne

s’informent pas beaucoup”.

Entretien avec une habitante de la villa 31.

La relation de confiance entre les différents acteurs du projet qui semble pourtant nécessaire à la mise en place d’un processus participatif d’une telle ampleur m'a donc paru, dans ce cas précis, très affaiblie. Au cours de certaines discussions, j’ai même pu observer le développement, par certains habitants d’un discours binaire opposant systématiquement la proposition de la SECISyU et la réalité. Le concept même d’urbanisation proposé par l’institution étant alors remis en question à travers la revendication d’une “ urbanisation réelle”:

“ Nous avons d’abord demandé l’urbanisation et maintenant nous demandons l’urbanisation réelle. Ce

n’est pas la même chose.”

Entretien avec une habitante de la villa 31, membre de la Mesa para la

urbanización real.

J’ai par ailleurs eu l’occasion d’assister

à la présentation orale de fin de semestre des étudiantes de l’université populaire de la villa 31, le Bachillerato Popular Alberto Chejolan. Ce projet réalisé par des habitantes intitulé “Urbanisation réelle VS Urbanisation

communiquée” traduisait également le développement de

ce binaire opposant la réalité à la communication effectuée par le gouvernement. L'exécution, pour la première fois de l’histoire de la villa, d’un projet d’urbanisation semble donc provoquer des questionnements et désaccords sur le concept même d’urbanisation et ce qu’il traduirait projectuellement.

Lors de mon enquête, j’ai pu constater que les espaces publics de la villa, étaient particulièrement investis par des éléments de communications et de revendications concernant le projet. J’ai en effet été frappée par l’abondance dans l’espace de la rue aussi bien de la communication officielle sur le projet, que des messages de revendications et de protestations de la part des habitants.

102 B-“ AU D ELÀ D’UN P RO JET , C’EST UN P ROCESSUS” . L ’EXP ÉRIEN CE D E LA FO RMALISA TI ON D E L ’INFO RMEL D ANS LA VILLA 31.

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