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2.4 Hiérarchies de partitions

2.4.2 Un critère connectif : les zones homogènes

+ Mes publications associées : [51, 56, 67, 70]

En morphologie mathématique, le fait d’avoir un ordre entre les partitions implique que la hiérarchie de partitions forme un treillis complet. Les principaux critères morphologiques permettant de définir une hiérarchie de partitions sont basés sur la notion de connexion. Cette notion réside dans la définition d’un critère : une image est segmentée en zones au regard d’un critère donné. La notion de connexion, d’un point de vue mathématique, revient à dire que si l’on considère une famille d’ensembles connexes possédant au moins un point en commun, alors leur union est elle aussi connexe. Ce qui peut être traduit sous la forme suivante : {Ai connexes} et {∩Ai 6= ∅} ⇒ {∪Ai connexes}. Partant de ceci, SERRA [SERRA88] a établi une nouvelle notion de connexion que nous avons reprise ci-dessous [SERRA03, SERRA02] :

Definition 7. Soit un espace arbitraire notéE. On appelle une classe connexe ou connexion C toute famille dansP (E) telle que :

– ∅ ∈ C et quel que soit un élément ponctuel de P (E) noté x ∈ E, {x} ∈ C, – pour toute famille{Ci} dans C, ∩Ci 6= ∅ entraîne ∪Ci ∈ C

Les principales connexions de segmentation sont les zones plates et la Ligne de Partage des Eaux. Les zones plates d’une imageI sont les composantes connexes ayant une valeur constante,

ce qui constitue évidemment un critère connectif à seuil de segmentation. MEYER a introduit ensuite la notion de zones quasi-plates [MEYER98].

La Ligne de Partage des Eaux (LPE) est quant à elle un opérateur de croissance de régions définissant une connexion par cheminement basée sur le gradient morphologique d’une image. Les germes de la LPE correspondant aux minima du gradient morphologique. L’algorithme des cascades de LPE [BEUCHE94] (ou « waterfall ») permet de constuire une LPE hiérarchique non paramétrique qui procède à une fusion des bassins versants et qui correspond à une hiérarchie de partitions.

Nous proposons à présent un nouveau critère connectif qui est une variation des connexions par cheminements et des connexions par seuil, nous les appellerons les connexions homogènes.

Definition 8. Deux points p et q appartiennent à une même zone homogène d’une image I ssi kI(p) − I(q)k ≤ k × Ψ(Germe(p)), avec Germe(p) le pixel germe de la région de p et

Ψ(p)= 1

nv

P

pv∈V (p)kI(p) − I(pv)k.

I(p) désigne les données associées au pixel p, V (p) désigne l’ensemble des voisins du point p et nv le cardinal de cet ensemble,k· k est une norme L2 etk un nombre réel correspondant à la finesse de la partition générée.Ψ(p) étant proche d’une mesure de gradient, les pixels se trouvant dans des zones homogènes (la variation dans leur voisinage est faible) seront traités en premier comme germes de région. Chaque région est composée initialement d’un pixel et croît en aggré-gant progressivement les pixels adjacents à celle-ci selon la règle précédente. Ceci se traduit par le fait qu’un pixelq est aggrégé à une région R si la distance entre un pixel p de R voisin de q estk fois inférieure à l’homogénéité du pixel germe de R. k représente le saut d’homogénéité accepté pour que deux pixels appartiennent à une même région. Nous utilisons une implantation efficace à base de files hiérarchiques. Les zones homogènes produisent des segmentations dont la finesse décroît avec l’augmentation du paramètrek (la contrainte est relachée). Une hiérarchie de partitions obtenues pour des valeurs croissantes de k est bien évidemment non stratifiée car cela diminue le nombre de germes initiaux tout en relachant la contrainte d’homogénéité. Si l’on désire construire une hiérarchie de partitions de zones homogènes qui soit stratifiée, il faut se contraindre à respecter le principe d’inclusion des régions entre deux niveaux succes-sifs de la hiérarchie. Tout comme pour l’algorithme des cascades, une façon de réaliser ceci est d’appliquer le principe des zones homogènes sur un graphe d’adjacence de régions obtenu par une partition fine par zones homogènes. Ceci nous amène à reformuler le principe des zones homogènes sur graphe qui permet de définir une partition d’un graphe.

Definition 9. Deux noeudsvietvj d’un grapheG appartiennent à une même zone homogène si kf(vi) − f(vj)k ≤ k0 × Ψ(Germe(vi)) avec Germe(vi) le noeud germe de la région de vi et

Ψ(v) = 1

δ(v)

P

u∼vkf(v) − f(u)k

De la même manière que pour les zones homogènes définies sur une image, tous les noeuds du graphe sont considérés comme des germes et sont enfilés dans une file de priorité selonΨ(v). f(v) est un vecteur associé à chaque noeud du graphe ; cela sera un vecteur couleur moyen calculé à partir de la partition initiale. L’algorithme de construction d’une hiérarchie de partitions de zones homogènes est alors donné par l’algorithme 3.

2.4. Hiérarchies de partitions 45

α : entier ; k : réel ; k0

: réel ; α ← 1 ; Définir αend

Pα← Zones homogènes de finesse k de l’image initiale. Gα = (Vα, Eα) pour une partition initiale Pα.

Tant que (α ≤ αend) faire

Gα+1← Zones homogènes de finesse k0

deGα

α ← α + 1 Fait

Algorithme 3: Hiérarchie de partitions par zones homogènes.

L’algorithme prend deux paramètresk et k0.k définit la finesse de la partition initiale et k0

définit la finesse des partitions successives de la hiérarchie. Le réglage de k et k0

est primordial pour la performance de l’algorithme. La figure 2.25 présente quelques niveaux d’une hiérarchie de partitions par zones homogènes stratifiées aveck = 0 et k0 = 0.5. Le premier niveau est très sur-segmenté et les suivants permettre d’extraire les principaux composants visuels de l’image en décimant le graphe.

FIG. 2.25 – Une hiérarchie de partitions par zones homogènes stratifiées (niveaux0, 1 et 10). La première ligne présente l’image originale. La deuxième ligne présente les cartes de régions ob-tenues. La dernière présente les graphes d’adjacence de régions où chaque région est représentée par un disque coloré par la couleur moyenne de la région qu’il représente.

Le comportement des zones homogènes se situe entre les connexions à seuils (zones quasi-plates) et les connexions par cheminement (ligne de partage des eaux). Cependant, elles sont beaucoup plus adaptées à une utilisation dans le cadre de segmentations automatiques et no-tamment celles induites par les hiérarchies de partitions. Ceci pour plusieurs raisons : elles ne nécessitent pas de marqueurs, elles fonctionnent sur l’image et non sur son gradient morpho-logique ce qui ne pose pas de problème pour l’utilisation de la couleur [HANBUR01] et ceci quel que soit l’espace couleur utilisé. De plus, contrairement aux zones quasi-plates, les zones homogènes s’adaptent localement au contenu de l’image car le seuil d’appartenance à une ré-gion dépend de l’homogénéité mesurée en ce point. Elles préservent également les structures

fines qui peuvent être détruites lors du calcul d’un gradient. La figure 2.26 présente plusieurs ni-veaux de hiérarchies de partitions produites par zones quasi-plates, zones homogènes stratifiées et par cascades. La carte de saillance (dernière colonne de la figure 2.26) illustre l’importance de chaque pixel tout au long des niveaux. La saillance d’un pixel est définie comme le plus haut niveau auquel ce pixel est à la frontière entre deux régions. On constate bien alors le caractère intermédiaire des hiérarchies par zones homogènes stratifiées par rapport aux critères connectifs classiques. Une carte de saillance extraite par l’une ces méthodes peut être interprétée comme un détecteur de contours basé régions [ARBELA04]. Nous avons comparé expérimentalement le comportement des zones homogènes comparativement aux deux approches classiques de hiérar-chies de partitions que sont les zones quasi-plates et la ligne de partage des eaux. Afin d’avoir une réelle validation expérimentale, nous avons mené nos tests sur 200 images de la base d’images naturelles de Berkeley. On notera qu’habituellement, les approches morphologiques proposées dans la littérature le sont sans validation expérimentale à grande échelle [ANGULO07]. Nous avons alors pu constater que les zones homogènes sont de très bons candidats pour la segmen-tation automatique d’images [56, 70]. Elle sont d’ailleurs à présent utilisées comme composant de base de segmentation automatique en vidéo-surveillance dans le cadre du projet BOSS (on Board Wireless Secured Video Surveillance) à l’INRETS [56].

FIG. 2.26 – Hiérarchies de partitions par les zones quasi plates (ligne du haut), zones homogènes (ligne du milieu) et cascades (ligne du bas). Les partitions présentées correspondent aux niveaux 1, 5 et 10 de la hiérarchie (de gauche à droite) et la dernière colonne présente la carte de saillance correspondante sur les dix niveaux.