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1. Introduction

1.4 Régulation de l’expression génique et cycle cellulaire

1.4.2 Mécanismes de régulation du cycle cellulaire

1.4.2.3 Ubiquitination par l'APC/C

À l'image des complexes SCF, l'APC/C est composé de plusieurs sous-unités qui forment le cœur de l'enzyme. L'APC/C comprend 12-13 protéines dépendamment des espèces et il n'est fonctionnel qu'en présence d'un cofacteur, soit Cdc20 ou Cdh1. Ces derniers activent l'APC/C, en plus de contribuer à la reconnaissance du substrat (400, 503). À l'opposé des complexes SCF, où seule la protéine réceptrice F-box participe au recrutement du substrat, l'APC/C contacte ses cibles directement et ne dépend pas

strictement de ses co-activateurs pour effectuer cette tâche (347). Chez la levure S.

cerevisiae, l'APC/C catalyse la formation de chaînes de polyubiquitine à partir de la lysine

48 de l'ubiquitine (430). Chez l'humain, la lysine 11 est préférentiellement utilisée, bien que des chaînes générées à partir des lysines 48 et 63 sont aussi observées (242). Ces variations sont attribuables aux différentes E2 ubiquitine ligases qui peuvent s'associer à l'APC/C (242).

L'APC/C et ses coactivateurs interagissent avec des substrats possédant des éléments de reconnaissance spécifiques, les plus communs étant les boîtes de Dégradation (D box, consensus RXXLXXXN) et les boîtes Lysine/Acide glutamique/Asparagine (KEN box, consensus KEN) (503). À l'origine, la boîte KEN a été identifiée comme un motif ciblé exclusivement par l'APC/CCdh1 (403) quoiqu'il est maintenant évident que l'APC/CCdc20 peut se lier dans certains cas à des protéines arborant des séquences KEN (503). Contrairement à ce qui a été établi pour la reconnaissance de cibles par le complexe SCF, il semble que la phosphorylation de quelques substrats de l'APC/C les protège de l'action de cette ubiquitine ligase. Toutefois, l'étendue de ce phénomène n'est pas déterminée puisque cet effet stabilisateur conféré par la phosphorylation n'a été montré que pour quelques ligands de l'APC/C (216, 400, 428, 503). Enfin, l'activation de l'APC/C ne mène pas à la régulation simultanée de tous ses substrats puisqu'un ordre précis dans leur dégradation est observé (310). Ces différences sont attribuables à des variations cinétiques dans l'ubiquitination des cibles de l'APC/C, certaines protéines étant polyubiquitinées suite à un seul événement d'association avec l'enzyme, alors que d'autres doivent interagir plusieurs fois avec l'enzyme avant que soient assemblées des chaînes d'ubiquitine (422).

L'APC/C est indispensable pour l'accomplissement de plusieurs événements se produisant en phase M. Ses fonctions essentielles consistent en la destruction des cyclines mitotiques et la promotion de la séparation des chromatides sœurs. Il facilite également la sortie de mitose et a des rôles dans les phases G1 et G0 (400).

Ainsi, l'APC/CCdc20 initie la dégradation de la Cycline A dès la prométaphase. Par la suite, cette enzyme promeut l'anaphase en ubiquitinant la Cycline B et la Sécurine, d'où le nom de l'APC/C. En effet, la destruction de la Sécurine conduit à l'activation de la protéase séparase. Puisque cette dernière clive les complexes de cohésine qui maintiennent les chromatides sœurs ensemble, la ségrégation des chromosomes vers les pôles opposés du fuseau mitotique peut alors commencer (400).

Dès l'instant où tombe l'activité des Cdk conséquemment à la dégradation de la Cycline B, l'APC/CCdh1 entre en scène. Cette E3 ubiquitine ligase participe à la dégradation d'un large éventail de substrats dont certains sont aussi reconnus par l'APC/CCdc20, alors que d'autres lui sont exclusifs (400). Cdc20 est d'ailleurs une des premières protéines ciblées à la dégradation par l'APC/CCdh1 (413). Parmi les substrats mitotiques de l'APC/CCdh1, on retrouve aussi les kinases de la famille Aurora et Polo-like, qui sont impliquées dans plusieurs événements précoces de la mitose tels que l'assemblage du fuseau mitotique et l'attachement des chromosomes à ce fuseau (22, 70, 150, 310, 315, 460). En toute fin de mitose, des composants du fuseau mitotique et des régulateurs de la cytokinèse sont ubiquitinés par l'APC/CCdh1 (407). L'enzyme demeure active jusqu'en fin de phase G1, où elle participe à l'assemblage des complexes de pré-réplication sur l'ADN en contribuant à la destruction d'inhibiteurs de ce processus (118). Également, l'APC/CCdh1 est important pour le maintien de la phase G0 puisqu'il empêche l'entrée prématurée des cellules quiescentes dans le cycle de division cellulaire (536). Il prévient aussi le passage trop hâtif des cellules de la phase G1 vers la phase S en contrôlant entre autres la dégradation de la protéine F-box SKP2 (24, 527). Puisque que SCFSKP2 cible des inhibiteurs de Cdk et promeut la prolifération cellulaire, il est clair que l'activité de l'APC/CCdh1 en phase G1 contribue à maintenir l'activité des Cdk à de bas niveaux et régule conséquemment l'entrée des cellules dans le cycle de division cellulaire (25). Finalement, de nombreux mécanismes permettent d'inactiver l'APC/CCdh1 alors que les cellules s'engagent dans la phase S.

L'APC/C est un régulateur majeur du cycle cellulaire dont l'activité doit être contrôlée pour permettre la coordination de nombreux événements. Il a été observé que l'enzyme est soluble dans le cytoplasme, en plus d'être enrichie sur le fuseau mitotique et sur les centrosomes. Cette distribution subcellulaire est cohérente avec les fonctions mitotiques de l'APC/C et suggère qu'il puisse être activé localement pour cibler des protéines à la dégradation (400). D'ailleurs, de nombreux mécanismes de contrôle du cycle cellulaire visent principalement les coactivateurs Cdc20 et Cdh1, sans lesquels l'APC/C n'est pas fonctionnel.

Les niveaux protéiques de Cdc20 varient durant le cycle cellulaire et son expression débute en phase S par l'activation de sa transcription (146, 413). Cependant, son association avec l'APC/C n'est possible qu'en mitose, lorsque plusieurs sous-unités de l'APC/C sont phosphorylées par les kinases mitotiques Cdk1 et Polo-like1 (400). De plus, il a été suggéré que l'activité de l'APC/CCdc20 puisse être inhibée par la protéine Emi1, un pseudosubstrat de l'APC/C (356). La dégradation d'Emi1 par SCFβ-TRCP en prophase précède de peu l'ubiquitination de la Cycline A par l'APC/CCdc20 (339). La destruction d'Emi1 pourrait donc contribuer à l'activation temporaire de l'APC/C durant la prométaphase, bien que cette protéolyse ne semble pas absolument essentielle à la mise en fonction de l'APC/C (114).

L'APC/CCdc20 est de nouveau inhibé en prométaphase par un système de contrôle, le "Spindle Assembly Checkpoint" (SAC) (368). Un des effecteurs potentiel de ce point de contrôle est un complexe nommé "Mitotic checkpoint complex" (MCC), qui est composé des protéines MAD2, BubR1, Bub3 et Cdc20 (487). L’inclusion de Cdc20 dans le complexe a pour effet de bloquer l’activation de l’APC/C, ce qui va mettre un frein à la progression des cellules dans la mitose. Le mécanisme est fonctionnel jusqu'à ce que tous les chromosomes soient attachés au fuseau mitotique. Ceci empêche les cellules d'entrer prématurément en anaphase, ce qui aurait des conséquences catastrophiques puisque les cellules filles issues de la division obtiendraient un nombre inapproprié de chromosomes (368). L'inactivation du SAC survient uniquement lorsque tous les chromosomes sont

correctement associés au fuseau mitotique. Cet événement permet à Cdc20 d'accomplir ses fonctions essentielles en anaphase, avant qu'il ne soit dégradé par l'APC/CCdh1 (368, 413). Ainsi, de nombreux mécanismes participent au contrôle de Cdc20, en restreignant son activité qui ne se manifeste que sur une courte période en mitose.

La régulation de Cdh1 est aussi très élaborée, bien que des processus différents contrôlent Cdh1 et Cdc20. Par exemple, les niveaux du messager de Cdh1 sont constants tout au long du cycle cellulaire, contrairement à ceux de l'ARNm de Cdc20 (413). Également, l'activité des Cdk régule l'association entre Cdh1 et l'APC/C, mais d'une toute autre façon. Alors que la phosphorylation de l'APC/C favorise son association à Cdc20, la phosphorylation de Cdh1 inhibe son interaction avec l'APC/C. D'ailleurs, l'atténuation de l'activité des Cdk engendrée par la destruction de la Cycline B via l'APC/CCdc20 et la déphosphorylation de Cdh1 sont des événements qui marquent une transition dans l'activation de l'APC/C. En effet, ceci rend Cdh1 fonctionnel, qui peut donc s'associer à l'APC/C pour cibler Cdc20 à la dégradation par le protéasome (400).

L'APC/CCdh1 accomplit ses différentes tâches jusqu'en fin de la phase G1, où plusieurs mécanismes participent à son inactivation. Entre autres, l'APC/CCdh1 contribue au déclin de sa propre activité en visant l'E2 ubiquitine ligase qui lui est associée, soit UBCH10. Ce changement de cap mène à l'expression de la Cycline A qui interagit avec Cdk2 et phosphoryle Cdh1 pour l'inhiber (421). Le passage du point de restriction entraîne aussi l'expression des cibles d'E2F, dont l'inhibiteur de l'APC/C Emi1 fait partie. Ce dernier contribue donc à limiter l'activité de l'APC/CCdh1 en interphase (114, 220). Enfin, une réduction des niveaux protéiques de Cdh1 est observée dans les phases G1 et S (282, 413). Il est suggéré que cette diminution soit attribuable à la protéolyse de Cdh1, qui serait ciblé au protéasome par le complexe SCF et par l'APC/CCdh1 (37, 314). L'expression des cyclines mitotiques résultant de l'inactivation globale de l'APC/C favorise donc la progression des cellules dans le cycle de division cellulaire.

L'analyse du fonctionnement des E3 ubiquitine ligases qui contrôlent la progression dans le cycle cellulaire fait ressortir tous les liens qui unissent l'APC/C et les complexes SCF. L'APC/C peut réguler l'activité de SCF en ciblant à la dégradation une de ses protéines réceptrices, soit SKP2. SCF module pour sa part les fonctions de l'APC/C en ubiquitinant son coactivateur Cdh1 et son inhibiteur Emi1. Les fenêtres d'activité de ces E3 ubiquitine ligases ainsi que certaines de leurs cibles sont illustrées à la figure 12.

Figure 12: Périodes d'activité des E3 ubiquitines ligases SCF et APC/C au cours du cycle cellulaire. Les principales cibles de ces ubiquitines ligases ainsi que les phases du cycle cellulaires durant lesquelles elles sont dégradées sont représentées. Les substrats de l'APC/C sont indiqués en teintes de rouge, soit rouge pâle pour l'APC/CCdc20 et rouge foncé pour l'APC/CCdh1. Les substrats du complexe SCF sont présentés en teintes de bleu, soit bleu pâle pour SCFSKP2, bleu intermédiaire pour SCFFBW7 et bleu foncé pour SCFβ-TRCP. Adapté de (371).

Les multiples événements de phosphorylation et de dégradation ciblée assurent la coordination des processus menant à la duplication du matériel génétique d'une cellule et à sa ségrégation équitable dans des cellules-filles. La progression unidirectionnelle de la

cellule dans les phases du cycle cellulaire est possible grâce à des réseaux complexes de contrôle dans lesquels les Cdk, les complexes SCF, l'APC/C ainsi que leurs différents activateurs et inhibiteurs jouent des rôles primordiaux (195, 318, 411, 425). Plusieurs études ont aussi mis en lumière le rôle des facteurs de transcription dans le cycle cellulaire. Ils soutiennent la division par l'activation de la transcription de gènes requis pour compléter les phases successives du cycle cellulaire. Cependant, il n'est pas très clair si la régulation post-transcriptionnelle est aussi impliquée dans la prolifération contrôlée des cellules puisque le sujet a été très peu approfondi. Quelques indices nous laissent toutefois entrevoir la possibilité que la régulation post-transcriptionnelle puisse participer au contrôle fin de l'expression de régulateurs du cycle cellulaire et de gènes exprimés transitoirement au cours du cycle.

1.4.3 Régulation post-transcriptionnelle de l'expression génique et cycle