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I - Classification anatomopathologique

2) Les tumeurs du parenchyme pinéal :

Les tumeurs du parenchyme pinéal représentent moins d’un tiers des tumeurs de la région pinéale (12 à 30%) (46)(47), et moins de 0,3% de l’ensemble des tumeurs du système nerveux central. Aux Etats Unis, 10 à 50 cas de tumeurs du parenchyme pinéal sont diagnostiqués chaque année. (47)

Leur classification a été l’objet de nombreuses controverses. La dernière classification de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) divise les tumeurs du parenchyme pinéal en : (115)

- pinéalocytome (ou pinéocytome), tumeur bien différenciée grade I de l’OMS,

- pinéaloblastome (ou pinéoblastome), tumeur immature grade IV de l’OMS,

- tumeur du parenchyme pinéal à différenciation intermédiaire (TPPint), grade II ou III. Dans les séries décrites dans la littérature, le pourcentage des pinéalocytomes varie de 30 à 60%, et certaines tumeurs à différenciation intermédiaire semblent surgradées en pinéaloblastome.

a) Les pinéalocytomes : (22), (23)

Ils sont plus fréquents après 40 ans avec une fréquence presque égale dans les deux sexes.

L’aspect macroscopique est celui d’une tumeur non invasive, bien limitée, ferme, gris rosé, non nécrotique, parfois hémorragique. Sur le plan histologique, les pinéalocytomes se présentent sous deux formes : le pinéalocytome typique et le pinéalocytome pléiomorphe ou glandulaire :

- Le pinéalocytome typique évolue en nappes diffuses avec une disparition partielle de la lobulation de la glande normale. Les cellules tumorales ménagent de larges plages fibrillaires appelées pseudorosettes pinéalocytaires, de taille variable plus ou moins confluentes. Les pinéalocytes tumoraux ont des cytoplasmes relativement abondants, ovoïdes avec parfois des prolongements en « club de golf » bien visibles sur les colorations argentiques. Les cytoplasmes sont éosinophiles ou clarifiés, les noyaux sont arrondis ou réniformes. Le tissu interstitiel contient de fins capillaires et des vaisseaux hyalins.

- La variante pléiomorphe correspond à des zones de pinéalocytome typique renfermant de grandes cellules dystrophiques au noyau hyperchromatique et/ou des cellules d’allure ganglionnaire.

Ces deux formes de pinéalocytome ne présentent ni mitose, ni nécrose tumorale.

Figure 33 : Pinéalocytome composé de cellules bénignes bien différenciées formant des rosette.

Les cellules tumorales expriment fortement les marqueurs neuronaux et/ou neuroendocrines (neurofilaments, synaptophysine, chromatine A, énolase neuronale spécifique). De plus, ces tumeurs peuvent exprimer des marqueurs neurosensoriels (antigène S, rhodopsine) rappelant la phylogenèse de la glande pinéale. La sérotonine et la tryptophane hydroxylase impliquées dans la synthèse de la mélatonine peuvent également être mises en évidence. Les données sur la sécrétion et sur la libération de mélatonine par les cellules tumorales restent contradictoires. Les marqueurs gliaux (protéine acide gliale fibrillaire GFAP, vimentine, PS100) sont présents dans les cellules interstitielles.

L’étude ultrastructurale de ces cellules confirme la différenciation neurosensorielle et neuroendocrine avec la mise en évidence d’organites spécifiques du pinéalocyte : ruban circonscrit de vésicules rappelant le ruban synaptique des photorécepteurs, des filaments torsadés et des vésicules à cœur dense de type neuroendocrine.

Figure 34 : pinealocytome

D : Immunohistochimie de la synaptophysine révélant une positivité au centre des rosettes (marquage brun par la méthode de l’immunopéroxydase, x20). Barre = 100 µm.

E : Immunohistochimie des neurofilaments révélant une positivité au centre des rosettes (marquage brun par la méthode de l’immunopéroxydase, x40). Barre = 50 µm.

b) Les pinéaloblastomes :

A l’opposé du pinéalocytome, cette tumeur maligne embryonnaire indifférenciée présente des analogies avec les médulloblastomes et les autres tumeurs neuroectodermiques primitives (PNET)(48) . Ces tumeurs surviennent dans les deux premières décennies de la vie avec une plus grande incidence avant 10 ans, et une discrète prépondérance masculine. Elles donnent de fréquentes métastases par la voie du liquide céphalorachidien (surtout en intra péritonéal, après dérivation ventriculo-péritonéale) et leur évolution est souvent fatale. Ces tumeurs apparaissent, à l’étude macroscopique, souvent volumineuses, friables, nécrotico-hémorragiques, infiltrant le tissu cérébral adjacent. L’étude histologique montre une prolifération monomorphe de petites cellules bleues(43). Ces cellules ont des cytoplasmes peu abondants autour de noyaux arrondis ou en forme de carotte (forme pseudomédulloblastique du pinéaloblastome). L’index mitotique est le plus souvent élevé, les vaisseaux peuvent présenter une hyperplasie endothéliale, et des plages de nécrose sont souvent observées. Ils renferment souvent des pseudorosettes neuroblastiques de type Homer Wright ou des rosettes de Flexner-Winstersteiner comme dans les rétinoblastomes auxquels les pinéaloblastomes peuvent être associés (rétinoblastome trilatéral). Cette tumeur n’exprime que faiblement ou focalement les marqueurs neuronaux ou neuroendocrines. Les cellules ne possèdent que de rares organelles à l’étude ultrastructurale.(23)

Figure 35 : pinealoblastome

A : Image macroscopique d’une section sagittale passant par l’épiphyse montrant une tumeur gélatineuse qui élargit la glande et envahit le système ventriculaire. Barre = 3 cm.

B : Coupe en celloïdine du cerveau de l’image A montrant l’invasion tumorale de la région dorsale (tectum/tegmentum) du tronc cérébral et du cervelet. La tumeur comble le quatrième ventricule et s’étend dans les espaces sous-arachnoïdiens (H&E). Barre = 3 cm.

C : Vue microscopique montrant une grande densité de cellules peu différenciées avec des noyaux ronds, hyperchromatiques (H&E, x10). Barre = 200 µm.

D : Fort grossissement montrant l’ébauche de rosettes dans certaines régions (H&E, x40). Barre = 50 µm.

E : Immunohistochimie du Ki67 (Mib-1) montrant une positivité du noyau de nombreuses cellules en division (marquage brun en immunopéroxydase, x20). Barre = 100 µm.

F : Imprégnation métallique d’Achùcarro-Hortega modifiée montrant les prolongements des cellules tumorales et leur aspect en brins épars sans terminaison bien définie (x100). Barre = 20 µm.

c) Les tumeurs du parenchyme pinéal à différenciation intermédiaire (TPPint) et les tumeurs mixtes pinéalocytome/pinéaloblastome :

Les TPPint se rencontrent chez l’adulte jeune entre 20 et 40 ans. L’aspect macroscopique est proche de celui des pinéalocytomes.

Les TPPint présentent différents sous-types histologiques, avec une forme fortement lobulée par une trame vasculaire endocrinoïde hyalinisée. Cette forme est souvent surgradée en pinéaloblastome. Une deuxième forme d’architecture diffuse peut poser des problèmes de diagnostic avec les oligodendrogliomes ou les neurocytomes(49). Certains TPPint ont des aspects transitionnels entre pinéalocytome et forme lobulée ou diffuse.

Les TPPint sont composées de cellules au cytoplasme relativement abondant, au noyau arrondi, régulier, à la chromatine poivre et sel et au nucléole plus ou moins bien visible. Le nombre de mitoses est variable ainsi que l’expression des marqueurs neuronaux ou neuroendocrines. Une prolifération endothéliale et des foyers de nécrose peuvent être observés.(43),(22),(23)

Les tumeurs mixtes pinéalocytome/pinéaloblastome sont rares ; elles alternent des plages de pinéalocytome typique et de pinéaloblastome avec un index mitotique élevé et des remaniements hémorragiques.

L’aspect ultrastructural est en relation avec le degré de différenciation de ces TPPint : certaines sont riches en vésicules à cœur dense témoignant d’une surdifférenciation neuroendocrine. Les autres TPPint comme les pinéalocytomes renferment des organelles de type neurosensoriel.

Tableau 1 : étude immunohistochimique de la glande pinéale normale et des tumeurs du parenchyme pinéal.

PN : pinéale normale ; PC : pinéalocytome ; PB : pinéaloblastome ; TPPint : tumeur du parenchyme à différenciation intermédiaire.NF : neurofilaments ; SYN : synaptophysine ; Chrg A : chromogranine A ; GFAP : protéine gliofibrillaire acide ; 0 : pas de marquage. +/Ŕ : marquage faible ; ++ : marquage moyen à fort ; +++ : marquage très intense ; CI : cellules interstitielles ; PV : périvasculaire ;V : vaisseaux ; VIM : vimentine.

Une étude statistique(22),(43) basée sur une série multicentrique de 66 tumeurs du parenchyme pinéal, a montré une corrélation entre la survie des malades, l’importance de la différenciation neuronale, neuroendocrine et/ou neurosensorielle (marquage des neurofilaments), les critères de malignité (en particulier le nombre de mitoses observées), et a permis de proposer une classification en quatre grades pronostiques :

- le grade 1 correspond au pinéalocytome typique ou au pinéalocytome pléiomorphe à différenciation ganglionnaire,

- le grade 4 correspond au pinéaloblastome,

- le grade 2 correspond aux TPPint renfermant moins de six mitoses et présentant un immunomarquage antineurofilament nettement positif, - le grade 3 correspond aux TPPint avec six mitoses ou plus, et les

TPPint avec moins de six mitoses mais sans expression des neurofilaments. Les tumeurs mixtes pinéalocytome/pinéaloblastome correspondent également à ce grade.

Le but de cette classification est de mieux définir le pronostic des TPPint (sans grade défini) de la classification de l’OMS et celui des pinéalocytomes grade II de l’OMS dont certains semblent sous-gradés ou surgradés. L’analyse statistique a montré une différence significative des courbes de survie selon les quatre grades de cette nouvelle classification proposée

Figure 36 : tumeurs du parenchyme pineale

A. Pinéalocytome typique avec une prolifération cellulaire diffuse et de larges plages fibrillaires (pseudorosettes pinéalocytaires).

B. Pinéalocytome pléomorphe (ou ganglionnaire) avec un fond de pinéalocytome typique. Présence de volumineuses cellules au noyau irrégulier hyperchromatique et de cellules d'allure ganglionnaire.

C. Tumeur du parenchyme pinéal à différenciation intermédiaire : forme lobulée par une trameconjonctivo-vasculaire abondante, sclérohyaline.

D. Tumeur du parenchyme pinéal à différenciation intermédiaire : forme diffuse composée de cellules au noyau arrondi régulier.

E, F. Pinéaloblastome : tumeur à petites cellules au noyau hyperchromatique en forme de carotte (E) ou rond (F).

Alors que plusieurs séries ont déjà rapporté de nombreux cas de tumeurs de la région pinéale associées à une composante papillaire, les tumeurs du parenchyme pinéal associant cette composante restent une entité très rare.

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