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3.3

Trois types de canaux m´ecanosensibles bact´eriens

Diff´erents types de canaux MS ont ´et´e observ´es dans la membrane de E.coli (Berrier et al. , 1989, 1996; Oakley et al. , 1999). Selon leur conductance, trois types de canaux ont pu ˆetre identifi´es (Sukharev et al. , 1994; Levina et al. , 1999). Les propri´et´es sont r´ecapitul´ees dans le tableau 3.1 et seront d´evelopp´ees dans la suite du paragraphe :

– les MscM (Mechanosensitive channel with Mini conductance), – les MscS (Mechanosensitive channel with Small conductance), – les MscL (Mechanosensitive channel with Large conductance).

famille MscM MscS MscL

cin´etique lente interm´ediaire rapide

conductance 0,1-0,4 nS 1 nS 3,5 nS

s´electivit´e faiblement anionique faiblement cationique non s´electif

g`enes inconnu yggB, kefA mscl

Tab. 3.1: Les trois familles de canaux MS bact´eriens.

3.3.1 Propri´et´es physiologiques

Fonctionnellement, ces trois types de canaux (MscM, MscS et MscL) semblent faire partie d’une r´eponse gradu´ee `a des chocs osmotiques de diff´erentes amplitudes. Ils agissent de mani`ere compl´ementaire. En effet, une relation existe entre niveau de conductance et seuil de sensibilit´e m´ecanique (Berrier et al. , 1996) les MscM s’ouvrent en premier `a faible tension, suivi par les MscS puis les MscL (fig. 3.2).

Le MscL est caract´eris´e par une conductance tr`es ´elev´ee et un seuil d’activation proche de la limite lytique des membranes biologiques.

Le MscS est le produit de deux g`enes distincts : i) yggB qui correspond au MscS `a proprement parler et qui semble, au contraire du MscL, aussi voltage-d´ependant (Martinac et al. , 1987; Sukharev et al. , 1997) ; ii) kefA dont le canal est connu sous le nom de MscK `a cause des ions potassium qui r´egulent son activit´e. Ces deux canaux (MscS et MscK) ont la mˆeme conductance et le mˆeme seuil d’activation. Les canaux MscS sont responsables de la majorit´e de l’activit´e MscS, l’ouverture des canaux MscK ´etant tr`es rare (elle ne n´ecessite pas seulement une tension membranaire mais aussi une concentration en ions potassium ´elev´ee) (Li et al. , 2002).

L’activit´e du MscM est caract´eris´ee par une faible conductance mais son identit´e mol´eculaire n’a pas ´et´e d´etermin´ee.

Les canaux MscS et MscL jouent un rˆole physiologique ´evident dans l’osmor´egulation chez les procaryotes. En effet, des cellules d´epourvues de ces deux canaux meurent lors d’un choc hypo- osmotique alors qu’elles deviennent r´esistantes lorsqu’on r´etablit l’expression du MscL (Levina

Chapitre 3. Les canaux m´ecanosensibles bact´eriens

Fig. 3.2: Diversit´e structurelle et fonctionnelle des canaux MS bact´eriens. Chaque section illustre la topologie (`a gauche), l’activit´e d’un canal unique (au milieu) et le niveau d’activation (`a droite) (Extrait de Perozo & Rees (2003)).

3.3.2 Propri´et´es structurales

Les structures cristallographiques des canaux MscL de Mycobacterium tuberculosis dans l’´etat ferm´e et MscS de Escherichia coli dans l’´etat ouvert ont initialement ´et´e d´etermin´ees en 1998 et en 2002 (Chang et al. , 1998; Bass et al. , 2002) mais des am´eliorations ont ´et´e r´ecemment apport´ees aux deux structures (Steinbacher et al. , 2007). Seules les nouvelles structures, r´esolues `

a 3,5 et 3,7 ˚A respectivement, seront donc d´ecrites ici.

Les MscL et MscS sont pr´esents respectivement sous forme de penta- et d’heptam`eres, le pore entourant l’axe de sym´etrie rotationnelle au centre de chacun des canaux (fig. 3.3). Bien qu’ils partagent une organisation divis´ee en domaines transmembranaires et cytoplasmiques, leurs re- pliements polypeptidiques sont bien distincts, indiquant qu’ils ne partagent pas d’ancˆetre ´evolutif commun.

Chaque sous-unit´e du MscL pr´esente une topologie simple compos´ee de deux h´elices trans- membranaires (TM1 et TM2) et d’un domaine cytoplasmique (fig. 3.3). Dans l’ordre s´equentiel, les douze premiers r´esidus (Nterminaux) adoptent un repliement en h´elice α qui se positionne tr`es probablement sur la surface cytoplasmique de la membrane. Il est a noter que le positionne- ment de cette r´egion, non r´esolue dans la premi`ere structure cristallographique, va `a l’encontre des hypoth`eses de rˆole et de placement formul´ees auparavant (Sukharev et al. , 2001a). L’h´elice TM1 borde le pore. Elle est reli´ee `a la TM2 par une boucle p´eriplasmique proche de deux brins

3.3. Trois types de canaux m´ecanosensibles bact´eriens

Fig. 3.3: Structure des canaux MscL (gauche) et MscS (droite). En haut, vue du dessus (cˆot´e p´eriplasmique). En bas, vue de cˆot´e. La repr´esentation est de type cartoon. Le placement de la membrane est indiqu´e sur les vues de cˆot´e. La coloration est faite par r´egion sur un monom`ere. MscL : en vert, h´elice Nterminale, en rouge la TM1, en bleu la TM2 et en jaune l’h´elice Cterminale. MscS : en rouge la TM1, en bleu la TM2, en jaune la TM3, en vert le domaine β-milieu et en orange le domaine Cterminal.

Chapitre 3. Les canaux m´ecanosensibles bact´eriens

β antiparall`eles. L’h´elice TM2, au contact des lipides, retraverse la membrane vers le cytoplasme o`u les h´elices Cterminales s’arrangent en faisceau.

Bien que l’arrangement du domaine transmembranaire du MscS soit aussi relativement simple, le repliement du domaine Cterminal est beaucoup plus complexe que celui du MscL (fig. 3.3).

Chaque sous-unit´e est compos´ee de trois h´elices transmembranaires. Contrairement au MscL, l’extr´emit´e Nterminale est p´eriplasmique. Les h´elices TM1 sont en contact avec les lipides, les TM3 forment le pore. L’h´elice TM3 est connect´ee au domaine cytoplasmique qui renferme en son centre une cavit´e de plus de 40 ˚A de diam`etre, connect´ee au cytoplasme par plusieurs ouvertures. Cette cavit´e est form´ee de deux domaines de chaque sous-unit´e, appel´ees β-milieu et Cterminal. Le domaine β-milieu est organis´e en feuillet β connect´e `a celui des sous-unit´es adjacentes pour former une structure en feuillet β ´etendue tout autour de la prot´eine. Cette organisation est similaire `a celle de la prot´eine Sm impliqu´ee dans le traitement des ARNm (Mura et al. , 2003). Le domaine Cterminal est constitu´e de brin β et d’h´elices α organis´es de la mˆeme mani`ere que les ferredoxines selon la classification SCOP (Murzin et al. , 1995). L’assemblage heptam´erique complet est connect´e en Cterminal par un β-barrel `a sept brins contenant un brin de chaque sous-unit´e.

Chapitre 4

Le canal MscL : de la s´equence `a la

fonction

Le canal m´ecanosensible bact´erien de grande conductance (MscL) joue un rˆole pr´epond´erant dans la r´egulation osmotique et agit comme une v´eritable soupape de s´ecurit´e pr´eservant la cellule de la lyse lors de chocs hypo-osmotiques. C’est le premier canal m´ecanosensible clon´e (Sukharev et al. , 1994) et le premier dont la structure a ´et´e r´esolue (Chang et al. , 1998). Sa s´equence polypeptidique ne pr´esentait aucune homologie avec une prot´eine dont la structure ´etait connue (Sukharev et al. , 1994). L’int´erˆet qu’il a suscit´e a permis de collecter de nombreuses donn´ees exp´erimentales sur sa localisation, son mode d’action et sa cin´etique. Sa localisation dans la membrane et les donn´ees accumul´ees semblent en faire un mod`ele d’´etude id´eal de la m´ecanotransduction `a travers les bicouches lipidiques. Comprendre les forces et m´ecanismes mol´eculaires gouvernant les interactions entre bicouche lipidique et canal pourrait aider `a com- prendre et `a construire un mod`ele g´en´eral pour les prot´eines activ´ees par stimulus m´ecanique.