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Transcription et remodelage de la chromatine

3. L E CONTRÔLE DE LA TRANSCRIPTION EN CONDITIONS INFLAMMATOIRES

3.3. Transcription et remodelage de la chromatine

Comme beaucoup de facteurs de transcription, NF-κB n’a pas la capacité de reconnaitre ses éléments de réponses lorsqu’ils sont localisés dans des régions compactées de la chromatine [248]. Pour assurer l’accessibilité de l’ADN, la position des nucléosomes est alors finement régulée par les complexes de remodelage de la chromatine. Parmi ces facteurs protéiques, certains utilisent l’hydrolyse de l’ATP pour altérer les liens histones-ADN tandis que d’autres mettent en jeux des modifications post-traductionnelles sur la queue N-terminale des histones.

a) Les acteurs de la transcription coopèrent avec des complexes de remodelage de la chromatine

L’importance de cette collaboration entre facteurs de transcription et complexes de remodelage de la chromatine est bien illustrée par le modèle de l’enhanceosome décrit au locus IFN-β [249] (Figure 1.13). À l’état basal, le positionnement des nucléosomes au niveau du promoteur de l’IFN-β rend la boîte TATA inaccessible à TFIID [250]. L’induction du gène codant pour l’IFN-β nécessite le recrutement conjoint de 3 familles de facteurs de transcription, dont NF-κB, IRF3/IRF7 et ATF-2/c-JUN, au niveau d’une région enhancer. Cet enhancer est une région de 50 pb, localisée à la position -104 et -55 en amont du TSS [251]. Initialement, NF-κB (p50/RelA) est recruté au niveau d’un élément conservé appelé PRDII (PRDs: positive

regulatory domains) et facilite le recrutement des protéines IRF et ATF-2/c-Jun. Une fois

assemblés, ces facteurs de transcription qui constituent l’enhanceosome, agissent comme une plateforme et recrutent séquentiellement des complexes de remodelage de la chromatine tel que SWI/SNF et l’histone acétyle transférase CBP/p300. L’acétylation des histones et le remodelage de la chromatine par SWI/SNF entrainent un repositionnement des nucléosomes couvrant la boîte TATA, augmentant ainsi l’accessibilité de TBP à son site et l’assemblage du PIC [252].

Figure 1.13: Modèle de l'enhanceosome au locus IFN-β. D’après [253]. Trois familles de facteurs de transcription sont recrutées au niveau d’un enhancer et permettent l’initiation de la transcription via le recrutement de complexe de remodelage de la chromatine.

b) Les modifications post-traductionnelles des histones

La mise en place de modifications post-traductionnelles sur la queue N-terminale des histones constitue un autre moyen de moduler le niveau de compaction de la chromatine et l’expression des gènes environnants. Parmi ces modifications post-traductionnelles l’acétylation et la méthylation sont les plus décrites. L’acétylation des histones est associée positivement à la transcription. La méthylation des histones, quant à elle, peut être associée positivement ou négativement à la transcription, selon le résidu modifié.

La tri-méthylation de la lysine 27 de l’histone H3 (H3K27me3)

La marque H3K27me3, associée à la répression transcriptionnelle, est déposée par EZH2, une histone méthyltransférase appartenant au complexe Polycomb Repressive Complex 2 (PRC2), via son domaine SET. Le cœur du complexe PRC2 est composé de 4 sous unités : EZH2, SUZ12, EED et RbAP46/48. L’association de ces trois sous-unités est nécessaire à l’activité catalytique d’EZH2. D’autres protéines accessoires peuvent s’ajouter au complexe PRC2, telles que JARID2, EEBP2 et PCls pour moduler l’activité enzymatique du complexe, son recrutement au niveau de la chromatine ou encore sa liaison à l’ADN. La composition du complexe PRC1 est quant à lui est très hétérogène et dépend du contexte cellulaire. On retrouve quatre sous-unités : ChromoBox protein (CBX), PolyComb Group Factor (PCGF), Human Polyhomeotic Homolog (HPH), et une E3-ubiquitin ligase RING. Ces complexes PRC1 et PRC2 coopèrent pour induire la condensation de la chromatine nécessaire à la répression transcriptionnelle. PRC2 dépose la marque H3K27me3 qui est ensuite reconnue par les protéines CBX. Une fois fixé, le complexe PRC1 va catalyser la mono-ubiquitination de la lysine 119 de l’histone H2A (H2AK119ub1) par l’une ou l’autre des protéines RING1A ou RING1B.

Deux histones déméthylases, contenant un domaine JmjC, incluant Ubiquitously transcribed tetratricopeptide repeat, X chromosome ou KDM6A (UTX) et Jumonji Domain- Containing Protein 3 ou KDM6B (JMJD3), sont répertoriées comme étant les enzymes qui déméthylent spécifiquement la marque H3K27me3. UTX est caractérisé par la présence de 6 répétions tétratricopeptide (TPR), en plus du domaine catalytique JmjC et d’un domaine treble

clef zinc-finger. Le domaine TPR contient de nombreuses copies d’un motif de 34 acides

aminés dégénérés impliqués dans l’assemblage de complexes multiprotéiques. En effet, UTX a la particularité de s’assembler avec différents complexes protéiques contenant des H3K4 méthyl transférase comme MLL2, MLL3 [254, 255].

Rôle fonctionnel de JMJD3 dans la transcription

En réponse à l’activation de la signalisation NF-κB, l’expression de l’histone déméthylase JMJD3 est rapidement induite grâce à des sites κB, localisés dans sa région promotrice [256]. Les médiateurs inflammatoires comme le LPS et le TNFα augmentent le recrutement de JMJD3 dans les régions promotrices, activant ainsi des réseaux de gènes régulés par NF-κB via une déméthylation de la marque H3K27me3 [256–258]. En contrôlant le statut de méthylation des promoteurs grâce à son activité enzymatique, JMJD3 va alors favoriser l’étape d’initiation de la transcription.

La contribution de JMJD3 au processus de transcription ne s’arrête pas à une action locale, restreinte aux régions promotrices. Sous l’influence du TGF-β, des données de ChIP- sequencing révèlent qu’environ 68% des peaks correspondant au recrutement de la Pol II en cours d’élongation (phosphorylée sur la Ser2) co-localisent avec la distribution de JMJD3 dans les régions codantes de ses gènes cibles [259]. En s’associant avec la Pol II, JMJD3 stimule l’élongation de la transcription en altérant l’architecture de la chromatine en recrutement le complexe de remodelage de la chromatine SWI/SNF [260] ou via une déméthylation de larges domaines H3K27me3 localisés dans le corps des gènes [259]. En l’absence de JMJD3, la progression de la Pol II au niveau des jonctions introns-exons caractérisées par un enrichissement de la H3K27me3, est abolie [259].

De manière intéressante, plusieurs évidences suggèrent que JMJD3 peut également activer la transcription de gènes inflammatoires, indépendamment de son activité histone déméthylase [261, 262]. Dans ce contexte, JMJD3 favorise la relâche de la pause de la Pol II et stimule sa progression le long du corps du gène [262]. Le mécanisme moléculaire sous- jacent implique le recrutement de facteurs d’élongation tels que SPT6, SPT16, CDC73, et SEDT2. Dans ce modèle, la protéine SPT6 pourrait se lier au CTD de la Pol II phosphorylé sur la Ser2 [263] et agir en synergie avec SPT16 pour coordonner le couplage du processus de transcription à l’éviction des nucléosomes [264]. Lors de la phase d’élongation de la transcription, la progression de la Pol II nécessite le désassemblage des nucléosomes en aval du complexe d’élongation et leur réassemblage en amont [264]. L’association de JMJD3 avec l’histone méthyle transférase SETD2, qui catalyse le dépôt de la marque H3K36me3 dans le corps des gènes, joue également un rôle important en limitant la synthèse de transcrits cryptiques (les transcrits cryptiques sont initiés à l’intérieur des régions codantes) [265].

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