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ou détachement.

Nous présenterons dans ce quatrième chapitre les fruits de notre travail de terrain. C'est ici que nous apporterons les débuts d'une réponse aux questions à l'étude. D'abord, nous dévoilerons les caractéristiques principales et pertinentes de l'échantillon. Nous exposerons ensuite les résultats de la collecte de données en deux temps. Dans un premier lieu, la présentation et l'analyse des facteurs incitant à poser des gestes d'attachement ou de détachement permettront de couvrir la sous-question de recherche : de quelle façon les facteurs structurels et/ou individuels présents dans la trajectoire des jeunes enseignant(e)s québécois(es) les incitent à poser des gestes d’attachement ou de détachement face au métier enseignant? Dans un second lieu, l'explication des grandes trames décisionnelles-types menant à persévérer ou à abandonner apportera un éclairage sur la question de départ : qu’est-ce qui incite les jeunes enseignant(e)s québécois(es) à rester en enseignement ou à quitter le domaine dans leurs premières années de pratique?

Les jeunes travailleurs rencontrés

Les vingt-deux témoignages ont été recueillis auprès de jeunes enseignants : réorientés ou toujours en activité dans le milieu scolaire, au préscolaire-primaire ou au secondaire, titulaires ou spécialistes, de secteurs différents, etc. L'Encadré 2 présente en un coup d'œil la population à l'étude. Nous trouvons intéressant de considérer chaque participant dans son ensemble et cette grille permet de visualiser chacun des participants en quatre temps : son profil socio-démographique -sexe, âge au moment de l'entrevue ainsi qu'à l'entrée sur le marché du travail enseignant (incluant l'année d'obtention du baccalauréat), et nombre d'enfants durant les expériences-; son profil professionnel enseignant -formation initiale, discipline(s) et niveaux enseigné(s), nombre d'années totales en activité-; sa trajectoire professionnelle enseignante -chem inem ent (en cours d'insertion, enseignement en poste ou avec permanence, réorientation) et état actuel-; et les gestes posés durant ses expériences -gestes d'attachement ou de détachement. D'abord, nous présenterons et commenterons brièvement l'échantillon aux trois premiers temps. Ensuite, nous exposerons exhaustivement le quatrième temps, puisqu'il servira de base à la présentation et à l'analyse subséquentes des résultats.

Profils socio-démographique et professionnel

Nous avons donc interrogé cinq hommes et dix-sept femmes ce qui, bien que l'échantillon n'avait pas de visée représentative, correspond aux ratios projetés par Ouellette (2001) dans son étude prévisionnelle sur les effectifs enseignants. En général, les participants ont suivi un parcours linéaire quant à la formation (secondaire, collégial général, baccalauréat en enseignement de quatre ans) et ont obtenu leur diplôme dans les « temps »,

Encadré 2: Profil des vingt-deux participants rencontrés

Profil socio-

d ém ographiqu e Profil professionnel enseignan t

Tra jec to ire professionnelle

en seig n an te G e s te s posés LL Ì Âge e n tr e v u e  ge e n tr é e 1 (a nn ée d ip m e 2) CO s tn & n LU Fo rm a ti o n in iti al e (b . e n s .) 4 LO s) )(s £ -CD n li n c i cg ic e cis ns D en CD u ( a e iv i z An n é e s e n a c ti v it é 7 C h e m in e m e n t8 eu "S CO CO -LU A tt a c h e m e n t9 D é ta c h e m e n t1 0 P1 H 28 22 (2006)

O Educ (IAT, Arts), Educ

Prim- sec

7 I-E Permanence Res P2 F 3O 23 (2005) 2 Danse Danse (ECC) Sec 7 I-M-(E)-M- (E)

Signe contrats Res D P3 F 27 23

(2008)

O Educ Educ Prim 3 I-R Enseigne au collégial B, Ref, Q P4 29 25

(2008)

O ALS ALS (journ.)

Sec 2 I-R Copropriétaire

pharmacie (B)Q

P5 F 28 22 (2006)

O BEPP Tit Prim 6 I-(E) Signé poste #2 en 2013 PM- Res D, C P6 F 33 27 (2012) 2 Litt/ frang.

Fran Sec 2 I-M-I-M-I Signe contrats PM, Res P7 F 34 22 (2OOO) 3 Math et info Math (info, rel, géo)

Sec 12 I-E-M-E-M-E Permanence Res P8 F 27 23 (2008) 2 BEPP Tit- (anglais) Prim 2.25 I-AT-I-M-R- M-I-R Enseigne au collégial (privé) Rev AT, C, RéT, Q P9 F 26 22 (2008) O Educ Educ, (ALS)

Prim 2.5 I-R Coordinatrice régionale saines habitudes de vie

RM C, Q P1O F 32 23

(2003)

O BEPP Tit Prim 4 I-R-I Permanence (privé) Rev, Res RéT P11 F 25 22 (2009) O Adapt scol Tit, orthopéd

Prim 3 I-(R) Signe contrats Res D P12 F 32 23

(2003)

O BEPP Tit Prim 9 I-E Permanence en 2012 PM, Res

D P13 F 31 25

(n.a.)

O Litt Fran (géo, ALS, hist.)

Sec 2.5 I-R Tech centre aide en français -collège privé

C, (B)Q P14 34 26

(2004)

O Educ Educ Prim 1.5 I-R Coordinateur- fédération sportive

RM Q P15 F 32 24

(2004)

2 BEPP Tit Prim 2.5 I-M-I-M-I-R Garderie en milieu

familial (B)Q P16 F 32 23 (2003) O BEPP Tit Présc prim 2 I-R AVSEC Q P17 F 29 22 (2OO5)

2 BEPP Tit Prim 7 I-M-E-M-E Signe poste #2 en 2013 PM, Res

D P18 F 3O 23

(2OO5)

2 Arts ALS (arts) Sec 7 I-E-AT-E-M- E-M-E

Permanence Res AT, C P19 F 28 24

(2008)

O ALS ALS Prim 2.5 I-R Adjointe administrative RM Ref, Q P2O F 32 23

(2003)

O BEPP Tit Prim 7 I-(E)-R Guide tourisme d'aventure RM Q P21 H 33 23 (2OO2) 1 Sc. IAT, math, (sc)

Sec 5 I-E-P-R Météorologue Q P22 H 28 26

(2011)

O Educ ECR (éduc)

Sec 2 I Signe contrats Res

1. Age d'entrée : âge à la fin de la formation initiale. Exceptions : P6 et P13 ont d'abord complété un baccalauréat en études littéraires et, une fois dans le milieu scolaire, ont entrepris une formation en enseignement du français au secondaire menant au brevet d'enseignement. Dans ces deux cas, l'âge d'entrée correspond à l'âge de l'obtention de leur premier engagement enseignant.

2. Année d'obtention du dipiôme mise en gras chez les participants ayant reçu une formation initiale correspondant à la réforme de 1997. 3. Enfants : nombre d'enfants pendant les expériences d'enseignement couvertes par la recherche.

4. Formation initiale : B. ens. : baccalauréat en enseignement; Adapt scoi : adaptation scolaire; ALS : enseignement de l'anglais langue seconde; BEPP : baccalauréat en éducation préscolaire et primaire; Arts : enseignement des arts plastiques; Danse : enseignement de la danse; Éduc : enseignement en éducation physique et à la santé; Fran : enseignement du français au secondaire; Litt : baccalauréat en études littéraires; Math et info : enseignement des mathématiques et de l'informatique au secondaire (double spécialisation); Sc. : enseignement des sciences au secondaire.

5. Discipiine(s) enseignée(s) : ALS : anglais langue seconde; Anglais : anglais, langue d'enseignement; Arts : arts plastiques; Danse : danse; ECC : éducation au choix de carrière; Éduc : éducation physique et à la santé; ECR : éthique et culture religieuse; Fran : français; Géo : géographie; H ist : histoire; IA T : initiation à la technologie; Info : informatique; Journ. : journalisme; Math : mathématiques; Orthopéd : orthopédagogue; Rei : religion; Sc : sciences; Tit : titulaire de classe. La mise entre parenthèses indique que la matière a été enseignée, mais dans une proportion inférieure par rapport aux autres. 6. Niveau(x) : Présc : préscolaire; Prim : primaire; Sec : secondaire.

7. Années en activité : Correspond au nombre d'années en fonction depuis l'obtention du diplôme (hormis P6 et P13, voir note 1) jusqu'au moment de l'entrevue ou de la désertion du métier.

8. Cheminement : A T : arrêt de travail forcé; E : enseignement en poste ou avec permanence; I : en cours d'insertion; M : congé de maternité; P : congé de paternité; R : réorientation. La mise entre parenthèses indique que le candidat est très près d'être dans cette étape de son cheminement.

9. Attachement : PM : persévérer malgré; RM : rester malgré; Res : rester; Rev : revenir.

10. Détachement : A T : être en arrêt de travail forcé; B : briser un contrat; C : consulter pour des raisons liées au travail; D : douter; Q : quitter; R e f : refuser un contrat; R éT : se réorienter temporairement; (B)Q : briser le contrat en cours parce qu'on quitte définitivement l'enseignement.

Note : Les différents états du cheminement (8) et gestes d'attachement (9) et de détachement (10) sont inscrits selon l'ordre chronologique dans lequel ils ont été vécus par le participant durant sa trajectoire professionnelle.

c'est-à-dire autour de vingt-deux vingt-trois ans (vrai pour seize des participants). L'année d'obtention de leur diplôme indique que la majorité a été formée dans les principes de la réforme de 1997, plusieurs faisant par ailleurs partie des premières cohortes ainsi formées81. Quelques-uns ont étiré leur parcours scolaire de deux ou trois ans (cinq). D'ailleurs, bien que cette information n'apparaisse pas dans le tableau, nous notons au passage que neuf des participants étaient déjà en activité en tant qu'employé en enseignement dans le milieu scolaire avant l'obtention de leur diplôme. Certains ont ainsi obtenu des contrats de remplacement ou de la suppléance dès leur première année de formation et de ce fait, personne n'est entré en activité après vingt-sept ans. Le mode de recrutement a fait en sorte que plusieurs participants ont pratiqué dans les mêmes régions82 (huit dans Lanaudière, quatre en Estrie) et bien que l'Outaouais ou le Saguenay-Lac-Saint-Jean par exemple ne soient pas représentés, des régions aux caractéristiques variées sont présentes dans l'étude (Gaspésie, Abitibi, Montérégie, Centre-du-Québec, Laval, Laurentides, Chaudières-Appalaches, Montréal). Toutefois, personne ne vient du grand nord et une seule répondante a vécu une expérience dans le secteur public à Montréal, lequel, est-il nécessaire de le rappeler, est fortement multiethnique. Le milieu anglophone, bien que présent dans l'étude, est également peu représenté (une participante). Quelques participants ont par ailleurs évolué à un moment ou à un autre dans le secteur privé (cinq), mais une seule d'entre eux y a passé l'ensemble de ses expériences. Ce sont sans aucun doute les plus grosses lacunes de l'échantillon puisqu'autrement, il regroupe des milieux favorisés comme défavorisés, urbains comme ruraux, des commissions scolaires sur des territoires très étendus comme sur des territoires restreints, etc.

81 Certains nous ont d'ailleurs confié que les formateurs universitaires avouaient parfois ouvertement ne pas trop être au courant de ce dont retournait ladite réforme.

82 Afin d'éviter que les participants soient reconnus, nous n'avons pas inclus la région dans le profil socio-démographique présenté à l'Encadré 2.

C ro is e m e n t de v a ria b le s a v e c le s e x e

Parmi les cinq hommes, un seulement a eu un enfant durant ses expériences. Par ailleurs, trois des hommes ont reçu une formation en enseignement de l'éducation physique et à la santé, un en enseignement de l'anglais langue seconde et un en enseignement des sciences au secondaire. Ce dernier est l'un des deux participants n'ayant pas été formé selon les principes de la réforme, et le seul à n'avoir jamais enseigné selon ceux-ci. Trois d'entre eux ont enseigné au secondaire seulement, un au primaire seulement, et un aux deux niveaux. Malgré le seul congé de paternité, toutes les trajectoires sont linéaires, sans allées et venues, sans interruption, sans consultation pour des raisons liées au travail, sans même de doute sur les choix; soit ils restent, soit ils ont quitté. Trois des hommes interrogés se sont donc réorientés et deux sont toujours en activité, un est permanent alors que l'autre est en cours d'insertion.

Quant aux femmes, huit ont eu des enfants durant leurs expériences d'enseignement. Huit des participantes ont reçu une formation en éducation préscolaire-primaire, deux en éducation physique et à la santé, une en danse, une en arts, une en adaptation scolaire, une en anglais langue seconde et une en mathématiques et informatique au secondaire, cette dernière étant l'autre participante n'ayant pas été formée post réforme83. Deux participantes ont d'abord complété des études littéraires avant de suivre une formation pour obtenir le baccalauréat en enseignement du français au secondaire, une seule l'achevant84. Quatre femmes ont enseigné au secondaire seulement, dix au primaire seulement, une au préscolaire et au primaire, et une au primaire et au secondaire. La durée de leur présence en enseignement varie entre deux et douze ans. Malgré certains parcours en apparence linéaires, ils sont tous soit interrompus par des congés de maternité (quatorze fois), une réorientation temporaire (deux participantes), des arrêts de travail en cours d'année scolaire pour épuisement professionnel (deux cas), des bris de contrats (deux événements); ou soit marqués par le doute (forte remise en question chez cinq des huit participantes qui ne se sont jamais réorientées) ou par une consultation chez un professionnel pour des raisons reliées au travail (dans cinq cas, dont trois qui se sont réorientées).

A u tre s d o n n é e s c ro is é e s

De manière plus générale, la moitié des candidats ont été appelés à enseigner une discipline dans laquelle ils n'avaient pas été directement formés; trois ont enseigné davantage dans une ou d'autre(s) discipline(s) que dans leur champ de formation initiale (dont un seulement est réorienté à ce jour). De ces onze, sept sont toujours en enseignement et quatre ont quitté. A contrario, parmi les douze cas de réorientation répertoriés, sept n'ont enseigné que dans leur domaine de formation. Bien que tous s'entendent pour dire qu'il n'est pas évident de

83 Elle dit avoir été invitée, à la fin de sa formation, à une table ronde sur la question (la réforme en étant alors au début de son implantation). Puis, durant ses premières années, elle dit avoir eu connaissance de la formation continue offerte en lien avec la réforme, mais que le fait d'être novice et de changer souvent d'école ne lui a pas vraiment permis d'accéder à toutes les formations dont elle aurait bénéficié si elle avait eu un poste plus stable.

84 L'autre candidate (P13) n'ayant pas terminé son programme de formation en enseignement constitue donc le seul participant de l'étude « non légalement qualifié » (sans brevet d'enseignement desservi par le MELS).

travailler dans une discipline qui n'est pas celle pour laquelle on a été formé, les données recueillies à ce niveau permettent de dire que cela n'est pas apparu dans les cas étudiés comme un facteur déterminant incitant à s'attacher ou se détacher de l'enseignement. Dans un autre ordre d'idées, parmi les treize cas de réorientation (temporaires ou définitives), onze se sont produits à l'intérieur des trois années suivant l'obtention du diplôme, ces données venant corroborer le caractère critique des premières années.

Finalement, des onze participants n'étant plus à ce jour en enseignement, seulement deux se sont réorientés dans des métiers qui n'ont aucun lien avec leur choix initial de l'enseignement. L'une de ces participants travaille comme adjointe administrative dans un bureau et l'autre est copropriétaire d'une pharmacie, le domaine pharmaceutique ayant par ailleurs été son premier choix de carrière à l'université. Tous les autres participants réorientés occupent des emplois qui ont un lien avec leur travail en enseignement. Ce lien réside pour certains dans la matière dans laquelle ils s'étaient formés -sciences et météorologue, français et technicienne au centre d'aide en français, éducation physique et à la santé et coordinatrice régionale des saines habitudes de vie ou coordinateur dans une fédération sportive-, pour d'autres dans l'enseignement et l'accompagnement comme tels -éducatrice en milieu familial, AVSEC85 et guide de tourisme d'aventure- ou encore dans les deux chez d'autres -enseignantes au niveau collégial. Nous le mentionnons ici pour montrer que le choix initial de carrière n'est pas fait à la légère, dans le sens où les jeunes choisissent ce métier parce que des facettes de celui-ci les intéressent réellement.

Gestes d'attachement et de détachement

Nous en venons aux gestes posés. La façon dont les candidats ont été sélectionnés, entre autres selon qu'ils étaient réorientés ou toujours en activité dans le milieu scolaire préscolaire-primaire et secondaire, a été exposée dans la méthodologie. Nous ne reviendrons pas tout de suite sur ces deux catégories qui, nous l'avons mentionné, nécessitent que l'on creuse davantage pour bien saisir les processus décisionnels qui mènent à leur aboutissement respectif. Nous présentons d'abord ici à plat l'échantillon selon le quatrième temps mentionné précédemment : les différents gestes d'attachement et de détachement posés en cours de cheminement.

Nous énonçons d'emblée ce qui apparaîtra comme une évidence : les vingt-deux participants rencontrés ont, à un moment ou à un autre de leur vie, fait le choix de l'enseignement. C'est là le premier geste d'attachement posé. Ceux-ci ont également choisi d'entreprendre une formation (tous), de la terminer (sauf P13) et d'entrer sur le marché du travail enseignant (tous). À travers ce que nous considérons être le début de leur trajectoire enseignante, ces jeunes maîtres en devenir manifestent déjà un rapprochement ou parfois, un éloignement de

l'enseignement. C'est pourquoi le choix initial sera traité à part des autres gestes d'attachement et de détachement.

Au niveau des gestes d'attachement, parmi les répondants toujours en activité, nous avons relevé quatre participants qui ont, à un moment ou à un autre, persévéré malgré le fait qu'ils n'appréciaient pas l'expérience qu'ils vivaient (P5, P6, P12, P17). A contrario, chez ceux qui se sont réorientés, nous avons compté quatre participants qui sont restés malgré le fait qu'ils ne se sentaient pas à leur place en enseignement et ce, sans égard pour l'appréciation des expériences vécues (P9, P14, P19, P20). Deux participantes sont par ailleurs revenues (P8, P10) après avoir quitté d'une façon qu'elles pensaient être définitive.

Du côté des gestes de détachement, cinq des onze répondants toujours en fonction86 ont avoué avoir déjà remis sérieusement en question le choix du métier enseignant au point d'envisager une réorientation de carrière (P2, P5, P11, P12, P17). Nous avons également dénombré parmi les vingt-deux participants deux refus (P3, P19) et un bris (P3)87 de contrat. Cinq participantes ont par ailleurs eu recours aux services d'un professionnel (médecin de famille, services psychologiques, orienteur) pour des raisons liées au travail (P5, P8, P9, P13, P18), et trois d'entre elles ont reçu un diagnostic d'épuisement professionnel (P8, P13, P18), dont deux en cours d'année scolaire, les forçant à se retirer temporairement du milieu enseignant (P8, P18). Dans un même ordre d'idées, deux gestes de rupture volontaire et qui se voulait définitive, mais qui n'ont finalement été que temporaires, soit quelques années, ont également été répertoriés (P8, P10).

C'est sur chacun de ces gestes d'attachement et de détachement que nous nous pencherons subséquemment, en essayant de comprendre comment les facteurs individuels et structurels présents dans la trajectoire des jeunes enseignants auraient pu les inciter à les poser. Après quoi, nous présenterons les gestes ultimes de

rester ou de quitter.

Leur histoire

Nous souhaitons mentionner d'entrée de jeu que les résultats et les analyses ici présentés relèvent des seuls cas rencontrés dans le cadre de l'étude. L'échantillon n'étant ni représentatif ni d'une taille permettant la généralisation ou même la saturation des informations, les constats ici faits n'ont pas d'ambition d'universalité ou d'exhaustivité. Toutefois, ils donnent à voir avec une certaine rigueur les processus des jeunes enseignants interrogés et en ce sens, l'information qu'ils recèlent est valable et utile. Nous exposerons donc ici l'ensemble des données récoltées. Présentées et analysées, les données que nous faisons ressortir constituent les facteurs

86 Nous avons ici exclus les douze participants s'étant d'une façon ou d'une autre réorientés, puisqu'il va de soi qu'ils aient à un moment ou à un autre douté fortement de leur choix. L'analyse de cette remise en question aurait été redondante, parce que dans tous les cas, les motifs de leur départ expliquent les motifs du doute vécu avant le choix de quitter.

d'influence dominants. Les catégories ont ainsi été réduites suffisamment pour présenter des types généraux dominants, tout en rendant compte avec le plus de justesse et de précision de tous les cas de figure appréhendés durant la recherche.

Choisir : premier geste d'attachement...de détachement

Tel que mentionné, le premier acte d'attachement à l'enseignement est incontestablement le fait de le choisir comme projet de carrière. Les décisions de s'inscrire à la formation en enseignement, de compléter le baccalauréat de quatre ans et d'entrer sur le marché du travail enseignant sont autant d'actions confirmant le choix initial. Ce geste d'attachement, parfois déjà teinté de détachement, est apparu essentiel, voire déterminant dans la trame narrative des participants rencontrés. C'était déjà dit, le jeune enseignant est défini par soi comme personne enseignante, avant l'entrée en fonction. Les auteurs sont unanimes, cette première identité influence l'élaboration future de l'identité professionnelle et conséquemment, les choix en cours de carrière. Voici donc pourquoi et comment cette décision initiale est prise chez les répondants, et ce qui en découle.

D'abord, pourquoi choisit-on l'enseignement? Les réponses résident à la fois dans ce qui motive le choix de carrière, et dans la façon plus générale dont il est fait. En effet, dans les cas rencontrés, les motifs du choix sont une chose, mais ce sont souvent les facteurs et la façon qui mènent à statuer sur ces motifs qui marquent le degré d'attachement (et parfois déjà de détachement) à l'enseignement. Cette force du choix initial laisse à son tour davantage augurer le déroulement de l'insertion ou de la désertion professionnelle, que la nature des motifs eux-mêmes. Nous expliquerons ce constat en présentant d'abord les motivations énoncées par les répondants en ce qui a trait à leur choix de l'enseignement, et en dépeignant ensuite les contextes dans lesquels elles

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