• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE I : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE

1. La variole et les autres maladies causées par les Orthopoxvirus

1.2 La variole

1.2.5 Les traitements

A ce jour, aucun traitement n’a fait la preuve de son efficacité contre la variole chez l’homme. La méthisazone, de la famille des dérivés thiosemicarbazone, fût la première molécule antivirale a avoir été utilisée (Bauer, 1965 ; Driscoll, 2002). Son mode d’action est le blocage de la synthèse protéique durant la phase tardive de la maturation du virion (De Clercq, 2001). Malgré sa toxicité par administration systémique, elle a été utilisée pour traiter des cas d’eczéma vaccinatum et de vaccine progressive.

Quelques molécules disposant d’AMM pour le traitement d’autres pathologies virales se sont révélées capables d’inhiber in vitro la réplication des Poxvirus (De Clercq, 2001). Parmi ces molécules, on peut citer :

La ribavirine, un inhibiteur enzymatique de l’IMP déshydrogénase, ce qui lui confère une activité antivirale à large spectre. Ainsi, elle inhibe la réplication de tous les OPVs (Baker, Bray, et Huggins, 2003), et se montre active sur un modèle lapin de kératite vaccinale (Sidwell et al., 1973). Néanmoins, elle n’est pas efficace contre les complications neurologiques car elle ne traverse pas la BHE.

Le cidofovir (HPMPC), un analogue de la cytosine. Il est encore plus efficace que la ribavirine contre les OPVs, mais présente une importante toxicité rénale lorsqu’il est

administré par voie intraveineuse. Actuellement, cette molécule possède uniquement une AMM pour le traitement de la rétinite à cytomégalovirus chez la patients atteints de SIDA. Son administration est accompagnée par celle de probénécide et demande une bonne hydratation pour diminuer la toxicité rénale. Chez la souris, une seule injection intraveineuse, réalisée jusqu’à quatre jours après infection intranasale par le CPXV, protège 90 % des animaux (Bray et al., 2000). Des résultats encourageants ont également été obtenus chez le modèle primate infecté par le MPXV (Stittelaar et al., 2006). Une autre étude, réalisée sur un modèle eczema vaccinatum cynomolgus, consistant à observer l’effet de l’administration de cidofovir et / ou d’ immunoglobulines anti-vaccine (VIG), a montré que les deux thérapeutiques sont efficaces si elles sont administrées de façon concomitantes à l’infection (Crance Jean-Marc et Garin Daniel, communication personnelle). De plus, elles pourraient avoir une action synergique puisque le cidofovir a une action rapide pendant les cinq jours p.i., alors que les VIG sont actives plus tardivement et neutralisent la virémie à huit jours p.i. A ce jour, de nouvelles formes moins invasives et moins toxiques du composé sont en cours de développement : une forme orale (Kern et al., 2002) et une forme aérosol (Roy et al., 2003), même si des souches virales résistantes au cidofovir ont déjà été isolées (Smee et al., 2002).

Concernant les immuno-modulateurs, d’anciennes études ont montré que l’interféron est efficace sur les kératites vaccinales (Jones, Galbraith, et Al-Hussaini, 1962). Plus récemment, des essais réalisés avec un groupe de molécules de faible poids moléculaire, les imidazoquinolinamines (Stanley, 2002), montrent une activité antivirale via une éventuelle stimulation de la réponse immune innée.

Pour le traitement des complications infectieuses cutanées, l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (AFSSaPS) a établi des recommandations d’utilisation des traitements antibiotiques. Pour les formes non sévères, elle préconise l’utilisation par voie orale de pristinamycine, d’oxacilline, de cloxacilline et d’amoxicilline/acide clavulanique. Pour les formes sévères, elle préconise l’utilisation de l’association par voie injectable de l’oxacilline et de la cloxacilline. Tous ces traitements devraient être administrés selon les schémas posologiques validés par l’autorisation de mise sur le marché (AMM). L’AFSSaPS rappelle également l’importance des soins locaux des lésions.

Aujourd’hui, de nombreuses autres molécules sont à l’étude. Les propriétés idéales recherchées pour une nouvelle drogue anti-Poxvirus sont : la conservation de l’activité lors d’une administration par voie orale, plus confortable que la voie intraveineuse ; une demi-vie intracellulaire relativement longue pour diminuer la fréquence de l’administration ; une bonne stabilité permettant une conservation au long court ; un faible coût de production et une innocuité même chez les enfants et les personnes immunodéprimées (Kern, 2003). Les principales molécules étudiées appartiennent à deux classes : les molécules inhibant la réplication virale et celles empêchant la dissémination systémique.

Les inhibiteurs de la réplication virale sont majoritairement des analogues nucléosidiques (De Clercq, 2001) ainsi que:

- les inhibiteurs de l’IMP deshydrogénase (dérivés de la ribavirine : FICAR, EICAR, tiazofurin, selenazole)

- les inhibiteurs de la SAH hydrolase (neplanocine et dérivés)

- les inhibiteurs de l’OMP décarboxylase et de la CTP synthetase (pyrazofurine et dérivés, carbodine et dérivés)

- les inhibiteurs de la thymidilate synthase (dérivés dUrd 5-substitués)

- les analogues nucléosidiques ciblant la synthèse de l’ADN viral (vidarabine et dérivés de l’arabinoside, analogues de l’adénoside, S2242)

- les nucléosides phosphonates acycliques (dérivés de l’HPMPC ou cidofovir et de l’HPMPA ou adefovir).

Les molécules diminuant la dissémination virale en inhibant la production des formes virales EEV, ont été développées (Sliva et Schnierle, 2007). Le STI-571 ou Glivec inhibe la tyrosine kinase réalisant la phosphorylation de la protéine virale A36R permettant la formation de la queue d’actine (Yang et al., 2005). Deux autres molécules ont un effet similaire : U1026 et CI-1033. Le ST-246 quant à lui vise la protéine virale F13L (Yang et al., 2005). L’efficacité du ST-246 a été montré chez la souris et l’écureuil contre différents OPVs (Quenelle et al., 2007; Sbrana et al., 2007) et est maintenant testé en phase clinique. Cette molécule est la deuxième, avec le cidofovir, considérée comme pouvant être utilisée chez l’homme.

De plus, de nouvelles protéines virales ont été identifiées comme cibles potentielles :

- la topoisomérase virale H6R, inhibée par la novobiocine et la coumermycine (Bond, Reichert, et Stivers, 2006 ; Sekiguchi et al., 1996).

- les protéines B1R et F10L (protéines kinases 1 et 2 respectivement) car les protéines kinases sont en général de bonnes cibles antivirales.

- la thymidylate kinase (A48R) et la thymidine kinase (J2R), inhibées par des molécules utilisées dans le traitement des infections au virus Herpès (Kern, 2003).

Pour finir cette liste de cibles virales non exhaustive, on peut noter que la protéine H1L est essentielle à la réplication virale et qu’elle pourrait donc constituer une cible idéale (Liu, Lemon, et Traktman, 1995).