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Les traitements médicamenteux

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VI. Physiopathologie et traitement de l’insuffisance cardiaque

VI.2. Les traitements médicamenteux

VI.2.1.

Généralités

Le traitement de l'IC a pour objectifs d’améliorer les symptômes et ainsi la qualité de vie et de diminuer la mortalité. Les traitements médicamenteux actuels les plus efficaces sont ceux qui s’opposent aux mécanismes de dérégulations neurohormonales, décrites précédemment, que sont les β-bloquants et les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IEC). Ils font partie du traitement conventionnel de l’IC en plus des diurétiques. En effet, la thérapeutique actuelle associe :

- Un IEC, traitement de référence, prescrit en première intention. Plusieurs études cliniques, SOLVD (enalapril), SAVE (captopril), AIRE (ramipril) et TRACE (trandolapril) ont démontré une réduction du risque de mortalité allant de 19 à 27%.

- Un β-bloquant, en s’opposant aux effets délétères des catécholamines, ils réduisent significativement la mortalité toutes causes confondues de 30 à 35% par rapport à un

placebo (Hjalmarson & Fagerberg, 2000; McAlister et al., 2009; Packer et al., 2002).La dose optimale doit être atteinte impérativement de manière très progressive.

- Des diurétiques en cas de signes congestifs, ils permettent de soulager rapidement les symptômes.

Les nouvelles recommandations européennes sur l'IC de l’ESC (McMurray et al., 2012) préconisent maintenant les antagonistes des récepteurs minéralocorticoïdes comme traitement de première intention avec les IEC et les β-bloquants, autrefois prescrits qu’en cas de sévérité de la maladie. Leur importance clinique a été démontrée par l’essai EMPHASIS-HF avec l’éplérénone.

Des traitements supplémentaires sont recommandés chez les patients insuffisamment améliorés par le traitement de première intention ou qui présentent une intolérance aux médicaments. Ils peuvent comporter, en fonction de la situation, des antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II (ARA II) en cas d'intolérance aux IEC, de la digoxine prescrite en cas de symptômes persistants, de anticoagulants (aspirine ou antivitamines K) en cas de coronaropathie associée, des dérivés nitrés et des antiarythmiques.

Le traitement de l’IC chronique est bien codifié, une telle prescription ne peut être généralisée pour tous les patients, chaque cas nécessitant une médication adaptée, selon les recommandations des sociétés savantes en cardiologie.

VI.2.2.

Traitements ciblant la voie β-adrénergique

Les β-bloquants

Dix ans après la découverte des β-ARs par Raymond Ahlquist, le premier β-bloquant, le dichloroisoprotérénol, fût synthétisé par les laboratoires Eli Lilly en 1958 (Bylund, 2007; Frishman, 2008). Peu de temps après, Sir James W. Black trouva la première utilisation clinique des β-bloquants pour le traitement de l'angine de poitrine avec le propranolol (Stapleton, 1997). Cette découverte lui a valu le Prix Nobel de physiologie ou médecine en 1988. Dès lors, de nombreuses études cliniques ont été réalisées pour étudier l'utilisation des β- bloquants pour soigner l'angine de poitrine, l'hypertension, les arythmies et le post-infarctus du myocarde.

Le premier essai clinique proposant l'utilisation des β-bloquants pour le traitement de l'insuffisance cardiaque a été documentée en 1975 dans le British Heart Journal par F.

Waagstein (Waagstein et al., 1975). Les essais contrôlés et randomisés pour leur utilisation dans le traitement de l’IC ont commencé dans les années 1980, la pertinence clinique a été acquise dans les années 1990.

Ce fut un changement radical de stratégie pour le traitement de l’IC, vu qu’à l’époque ce sont à l’inverse, des agonistes β-adrénergiques qui étaient utilisés pour le traitement de l’IC chronique pour leurs effets inotropes positifs. Cependant, leur utilisation s’est heurtée soit à une perte d’efficacité par désensibilisation adrénergique soit à une toxicité excessive responsable de troubles du rythme cardiaque et d’une aggravation de la mortalité. Les agonistes β- adrénergiques comme la dobutamine demeurent actuellement utilisés dans le cas d’IC aiguë.

En effet, l’IC est caractérisée par une hyperactivation de la voie adrénergique, résultant en une augmentation de catécholamines circulantes et ainsi à une exposition chronique des cardiomyocytes à de fortes concentrations de catécholamines, qui a pour conséquences la toxicité cellulaire, des effets proarythmiques et la désensibilisation de la voie β-adrénergique. Plusieurs études in vitro ou utilisant des souris transgéniques qui surexpriment les β-ARs ont confirmé les effets délétères de l’activation chronique de la voie β-adrénergique et des effets bénéfiques lorsque des antagonistes β-ARs sont utilisés, d’où le développement clinique des β- bloquants.

Les β-bloquants représentent un traitement médicamenteux de choix chez les patients en IC stable. Il y a plusieurs β-bloquants, avec des propriétés pharmacologiques différentes. Certains sont non sélectifs vis-à-vis des récepteurs β1-, β2-, voire des β3-ARs, d’autres bloquent spécifiquement les β1-ARs. Ils peuvent posséder des effets vasodilatateurs via un antagonisme α-adrénergique. Ils ont également des propriétés pharmacodynamiques différentes.

Seuls trois β-bloquants sont validés dans l’IC à partir d’études randomisées : le carvédilol (US Carvedilol Heart failure, COPERNICUS), le bisoprolol (CIBISII) et le métoprolol (MERIT- HF)*. Toutefois, les effets secondaires sont nombreux et les contre-indications doivent être scrupuleusement respectées. Le fait de disposer de plusieurs molécules peut permettre d'avoir une alternative en cas d'intolérance à l'une d'elles et de choisir la molécule la plus appropriée aux patients en fonction de la pression artérielle et de la fréquence cardiaque.

Les inhibiteurs de phosphodiestérases

Inhibiteurs de PDE3. Les effets inotropes positifs de l’inhibition de PDE3 a fourni une

médicaments pour le traitement de maladies cardiaques chroniques (Muller et al., 1990a; Nicholson et al., 1991). Un certain nombre d’inhibiteurs de PDE3 sélectifs, dont la milrinone, ont été mis au point pour traiter les patients atteints d'IC. Cependant, le traitement chronique avec la milrinone a été associé à un risque accru de mortalité (Packer et al., 1991). L’inhibition de la PDE3 induit l’apoptose, et la mort subite causée par des arythmies. Néanmoins, la milrinone est encore utilisée dans le traitement de l'IC aiguë.

Il est important de noter que les IPDE3, largement présentés comme séléctifs des PDE3 comme la milrinone et l’enoximone, inhibent aussi la PDE4 dans les mêmes gammes de concentrations. De plus, l’inhibiteur sélectif de la PDE4, le roflumilast, a récemment été homologué pour le traitement de la maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC), un scénario clinique généralement associé à un risque cardiovasculaire accru. Cela a conduit de nombreux groupes, dont le notre, à s’intéresser de plus prés au rôle de PDE4 dans le cœur (pour revue voir (Eschenhagen, 2013)).

Inhibiteurs de PDE5. Les inhibiteurs de la phosphodiestérase 5 (IPDE5), représentés par le

sildénafil, le vardenafil et le tadalafil, ont prouvé depuis la fin des années 90 leur efficacité et leur bonne tolérance dans le traitement de la dysfonction érectile (DE). L’augmentation de la prévalence de la DE chez les patients IC et l’observation d’effets bénéfiques des IPDE5 sur la fonction cardiaque, ont permis de s’intéresser au rôle potentiel des IPDE5 pour le traitement de l’IC.

En effet, plusieurs petites études chez l’Homme et dans des modèles animaux, ont montré le rôle bénéfique de l’inhibition de PDE5 dans l’IC. Ainsi, il a été montré que le sildénafil entraine une augmentation de la consommation d’O2, une diminution des résistances vasculaires systémiques et de la rigidité aortique, une amélioration des capacités à l’effort et de la qualité de vie (Bocchi et al., 2002; Hirata et al., 2005; Webster et al., 2004). De plus, les IPDE5 possèdent d’autres mécanismes protecteurs comme la réduction de l’apoptose, de la fibrose et de l’hypertrophie ventriculaire chez la souris (Chau et al., 2011). Enfin, très récemment, des effets bénéfiques des IPDE5 sur la biogénèse mitochondriale, importante pour la fonction cardiaque, ont été suggérés (Bayeva et al., 2012; De Toni et al., 2011).

Même si les indications reconnues des IPDE5 sont encore très limitées en dehors de la DE, leurs mécanismes d’action peuvent suggérer pour l’avenir de multiples perspectives thérapeutiques, notamment pour le traitement de l’IC.

L’administration d’un inhibiteur de la PDE5, peut être envisagée dans le but de soulager les symptômes et d’améliorer la tolérance à l’effort chez les patients qui sont atteints d’IC de stade avancé, associée à une hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). Les IPDE5 peuvent être une alternative de traitement chez les patients qui ne peuvent tolérer le traitement standard de l’IC ou qui demeurent symptomatiques sous thérapie standard. Ils peuvent être administrés sans risque, à l’exception des patients avec des maladies coronariennes recevant des nitrates, dont la coadministration peut causer l’hypotension et la mort. Des études à long terme et ayant un plus grand nombre de sujets sont nécessaires pour mieux comprendre le rôle des inhibiteurs de la PDE5 dans l’IC.

Les dérivés nitrés

Les dérivés nitrés, nitrates et donneurs de NO, sont des vasodilatateurs indépendants de l’endothélium. Ces substances contiennent dans leur structure chimique un ou plusieurs groupements NO capables d’activer la sGC, ce qui a pour effet d’augmenter les concentrations intracellulaires de GMPc, qui va à son tour, via l’activation de la PKG, diminuer la disponibilité du calcium intracellulaire et entrainer la relaxation du muscle lisse vasculaire. Leur effet vasodilatateur prédomine au niveau de la circulation veineuse. En administration prolongée, ils sont soumis à un phénomène de tolérance d’origine plurifactorielle.

En urgence, lors de poussées d’IC aigue avec œdèmes, les dérivés nitrés restent une des bases de la prise en charge thérapeutique. Ils induisent une baisse de la pression télédiastolique du ventricule gauche, de la pression capillaire pulmonaire moyenne, des pressions pulmonaires et de la pression auriculaire droite, sans modification importante du volume systolique, de la fréquence cardiaque et du débit cardiaque.

En traitement chronique, ils constituent un traitement symptomatique efficace pour la dyspnée, mais n’augmentent pas la survie. En effet, au cours de l’IC chronique systolique, leur utilisation se justifie chez les patients demeurant symptomatiques après le traitement standard d’IC. Au cours de l’IC diastolique, ils diminuent les symptômes liés à la stase pulmonaire, en diminuant les pressions du remplissage du ventricule gauche. Leur administration doit cependant être progressive et prudente, car une baisse trop importante des pressions de remplissage peut s’accompagner chez ces patients d’une baisse préjudiciable du débit cardiaque en plus du phénomène d’échappement thérapeutique qui limite l’efficacité de cette classe thérapeutique à long terme.

VII.

La phosphodiestérase de type 2

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