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TRAITEMENT LITTÉRAIRE ET RÉALITÉ DU PHÉNOMÈNE

Dans le document SE RETIRER DU MONDE (Page 78-88)

monde est évoqué comme une opération permettant de mieux comprendre ce qu’est l’essence de la conscience et de son rapport au monde, avant qu’une réflexion, par définition seconde, ne vienne altérer le sentiment de cette expérience première et fondatrice. Certes les significations métaphysiques que tire le phénoménologue de cette opération ne sont évidemment pas les mêmes ; Merleau-Ponty repense le concept d’intentionnalité en développant la thèse que toute conscience est conscience perceptive. Mais la volonté du philosophe de définir l’essence de la conscience en retrouvant « cette présence effective de moi à moi » et en ayant « l’ambition d’égaler la réflexion à la vie irréfléchie319 » est une démarche qui s’inscrit dans la perspective ouverte par la philosophie du sens intime. La critique contemporaine aurait tort de négliger ce courant philosophique du 18e siècle qui, en définitive, se situe hors de l’opposition entre les Lumières et les anti-Lumières, en proposant une autre voie. Le retrait du monde est ici l’occasion d’une herméneutique, permettant de penser ma relation existentielle à moi-même, à l’autre et aux choses.

En dépit de la philosophie privilégiant l’action humaine et tout projet reposant sur une dynamique individuelle ou collective visant l’utilité sociale, l’expérience de la retraite continue donc bel et bien à faire l’objet d’une réflexion métaphysique, peu accessible, convenons-en, au public mondain. Elle est également l’occasion d’un débat public dans la deuxième moitié du 18e siècle. Il n’est certes plus exactement question du retrait absolu dans un lieu hostile à l’homme et les adversaires des philosophes eux-mêmes, catholiques et protestants, confèrent au retrait solitaire ou collectif des attraits multiples. Cette valorisation existe aussi dans l’autre camp, mais l’on observera que, dans ce cas, elle est surtout le fait de gens de lettres qui furent mêlés aux philosophes, sans jamais participer activement au combat philosophique : nous n’évoquerons pas l’archétype trop connu qu’est évidemment Rousseau, mais Marmontel qui écrit ses Mémoires en pleine révolution, dans un lieu retiré du monde. La réflexion nourrie par les troubles du moment fait surgir chez ce carriériste des lettres la nostalgie d’un paradis perdu qui a tous les traits d’une retraite idéale : la communauté familiale et villageoise de son enfance apparaît à la fois comme un refuge et une vie antérieure situés loin des tumultes d’un monde plein de bruit et de fureur. Chez Bernardin de Saint-Pierre, la retraite acquiert également une valeur heuristique lorsqu’éclate la Révolution : en intitulant un ouvrage paru en 1789 Les vœux d’un solitaire, il vise à réinstaurer un nécessaire recul par rapport aux événements qui se précipitent, la possibilité d’une hauteur de vue et une fidélité à soi-même susceptible de s’ancrer dans une approche religieuse et métaphysique du monde. Le solitaire est présenté paradoxalement comme le seul être capable d’accéder à un jugement politique véritablement détaché, parce non soumis aux décisions hâtives de ceux qui, submergés par la fièvre collective, auraient l’œil rivé sur l’actualité immédiate. L’idée revient en force et convainc manifestement de nombreux lecteurs.

Didier MASSEAU

Université François Rabelais - Tours

LES RETRAITES MONASTIQUES SUBIES EN FRANCE AU 18E SIÈCLE :

TRAITEMENT LITTÉRAIRE ET RÉALITÉ DU PHÉNOMÈNE

Le dictionnaire de Furetière définit la retraite comme « une séparation du commerce du monde, soit par principe de piété en s’enfermant dans un Couvent, soit par amour de la solitude pour mener une vie privée, & retirée, &c.320. » Dans cette phrase, la construction pronominale au participe présent – « s’enfermant » – indique bien que la mise à l’écart du monde est une action volontaire du sujet sur lui-même. Le fait même d’évoquer des retraites monastiques subies, donc involontaires, comme nous le proposons dans l’intitulé du présent article renvoie alors à une situation paradoxale321. C’est bien ce paradoxe qui semble être au cœur d’un certain nombre de discours des hommes de lettres du 18e

siècle. En effet, dans les ouvrages des écrivains proches de la philosophie des Lumières la retraite monastique est très souvent présentée comme un état de souffrance résultant d’une mise à l’écart du monde imposée par des parents à une jeune fille sans vocation. Le thème de la vie conventuelle et, plus particulièrement, de la retraite monastique subie, a d’abord été un objet d’études littéraires, que ce soit par l’analyse d’un genre particulier comme le théâtre monacal, de la figure de la religieuse dans la littérature ou d’une œuvre spécifique comme La Vie de Marianne de Marivaux ou La Religieuse de Diderot322. Les historiens ont, quant à eux, le plus souvent abordé cette question en s’interrogeant, plus généralement, sur le recrutement et la vie du clergé régulier323.

Le topos littéraire renvoie pourtant à une réalité : celle des vocations religieuses forcées telles qu’elles apparaissent dans les procédures d’annulation des vœux de religion. Il est en effet possible pour une personne ayant prononcé ses vœux sous la contrainte ou de manière irrégulière d’en demander l’annulation auprès d’un tribunal ecclésiastique (officialité). Ces procédures judiciaires ont laissé d’abondants témoignages dans les archives. Dans une recherche en cours324, nous avons recensé à l’heure actuelle 299 réclamations contre des vœux de religion envoyées aux officialités au cours du 18e siècle325. Ces sources sont d’autant plus partielles que les propos retranscrits sont ceux d’avocats, de réclamants et de défenseurs qui ont tout intérêt à donner une version des faits servant leur cause. Mais elles permettent malgré tout d’appréhender le phénomène du point de vue de ceux qui l’ont effectivement vécu. Sur ces 299 demandes, seules 17 sont le fait de religieuses, soit moins de 6 % du total. Ce dimorphisme sexuel semble inversé dans la littérature, qui présente la retraite monastique

320 Antoine Furetière, Dictionnaire universel, contenant généralement tous les mots françois tant vieux que modernes et les termes des sciences et des arts, … corrigé et augmenté par M. Basnage de Beauval et en cette nouvelle édition revu … par M. Brutel de La Rivière, La Haye, Husson, 1727, t. 4.

321 Le terme « monastique » est ici employé dans un sens général renvoyant à l’ensemble des religieuses et religieux ayant prononcé des vœux solennels et vivant dans une communauté à l’écart du monde séculier et ne désigne donc pas uniquement les moniales et les moines vivant dans un monastère.

322 Voir notamment le chapitre consacré au « théâtre “monacal” sous la Révolution » dans Edmond Estève,

Études de littérature préromantique, Paris, Champion, 1923, p. 83-137 ; Jeanne Ponton, La Religieuse dans la

littérature française, Québec, Presses de l’Université de Laval, 1969 ; Pascale Éjarque, Écrire la clôture

conventuelle. Réalités féminines, rêveries masculines dans La Vie de Marianne de Marivaux, Paris, Champion,

2009 ; Georges May, Diderot et La Religieuse : étude historique et littéraire, Paris, Presses Universitaires de France, 1954 ; Christophe Martin, La Religieuse de Diderot, Paris, Gallimard, coll. Folio, 2010.

323 Voir par exemple Geneviève Reynes, Couvents de femmes. La vie des religieuses cloîtrées dans la France des XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, Fayard, 1987 ;Dominique Dinet, Vocation et fidélité : le recrutement des réguliers dans les diocèses d’Auxerre, Langres et Dijon, XVIIe-XVIIIesiècles, Paris, Economica, 1988 ; Bernard Dompnier, Enquête au pays des frères des anges. Les Capucins de la province de Lyon aux XVIIe-XVIIIe siècles, Publications de l’Université de Saint-Étienne, 1993.

324

Thèse de doctorat en préparation sur « les vocations religieuses forcées en France au 18e siècle » à l’Université de Limoges, FLSH, CRIHAM ; sous la direction d’Albrecht Burkardt.

325 Notre corpus actuel est en effet composé de 299 demandes d’annulation de vœux de religion recensées dans les Archives Départementales de la Meuse, de l’Aube, du Doubs, de la Gironde, du Gers, de l’Isère, du Nord, du Rhône, de la Meurthe et Moselle, du Puy de Dôme, de la Seine-Maritime, du Tarn, de la Haute-Garonne et dans les Archives Nationales.

subie comme un phénomène très majoritairement, voire exclusivement féminin326. Le constat d’un tel décalage entre la réalité judiciaire du phénomène et son traitement par les écrivains invite à s’interroger sur le caractère représentatif de la fiction, mais aussi sur le choix fait par les hommes de lettres de mettre très majoritairement en scène des femmes enfermées contre leur gré dans des couvents plutôt que des hommes. Sous l’Ancien Régime, le statut de la femme est semblable à celui d’une mineure passant, généralement, de l’autorité paternelle à la tutelle de son époux. Si les femmes sont peu présentes et représentées dans la sphère publique, cela est encore plus vrai pour des religieuses cloîtrées dans leur couvent. Les écrivains se feraient donc les porte-paroles et les défenseurs du sexe faible ne pouvant faire entendre sa voix qu’à travers celle des hommes327

. Pour apporter quelques éléments de réflexion sur ces questions, nous nous proposons d’étudier la manière dont la retraite monastique féminine subie est présentée dans le drame de Jean-François de la Harpe Mélanie, ou la religieuse forcée328, en le mettant en regard avec les sources judiciaires.

La pièce met en scène l’entrée en religion imposée à Mélanie par son père afin de favoriser l’établissement de son fils dans le siècle. Elle se déroule au parloir d’un couvent parisien le jour supposé de la profession religieuse. Cependant, Mélanie ne se sent pas attirée par la vie religieuse et ce d’autant moins qu’elle est tombée amoureuse de son cousin, Monval, lors d’une visite qu’il lui a rendue au parloir. Madame de Faublas essaie, avec le soutien d’un curé, de persuader son mari de ne pas obliger sa fille à prononcer ses vœux. Leurs tentatives restant vaines, Mélanie préfère se donner la mort. Les ressorts dramatiques de cette pièce sont caractéristiques du théâtre monacal, notamment l’exacerbation de la dimension tragique de l’entrée en religion sans vocation en raison d’une histoire d’amour impossible. La grande majorité des pièces mettant en scène des retraites monastiques subies sont écrites et représentées pendant la Révolution, une fois que les pratiques qu’elles dénoncent ont été abolies. Le drame en trois actes et en vers de La Harpe est particulièrement intéressant car il a été publié dès 1770, augmenté et modifié dans son édition de 1778329, même s’il n’a pu être joué qu’à partir de la période révolutionnaire qui autorise la représentation de réalités sociales autrefois interdites330. Dans l’avertissement introduisant les deux pièces suivant Mélanie, La Harpe est présenté comme un dramaturge qui « avoit eu de bonne heure une horreur profonde pour les vœux monastiques et pour tous les abus qui en sont la suite331

. » Cette position de l’auteur concernant la vie conventuelle est partagée par de nombreux hommes de lettres des Lumières condamnant le monachisme, en particulier l’inutilité économique et démographique des religieux. Cette pièce mérite donc d’être étudiée car elle est non seulement révélatrice des débats de la société dans laquelle elle voit le jour, mais est aussi un écho relativement fidèle de la réalité des problématiques et des enjeux à l’œuvre dans les retraites monastiques subies au 18e siècle.

326 Sur les quinze œuvres romanesques ou théâtrales du 18e siècle retenues dans le cadre de cet article et mettant en scène des retraites monastiques subies ou faites par dépit, dix concernent une jeune fille, trois, un homme et une femme, et deux un homme (voir tableau en annexe).

327 Mita Choudhury, Convents and Nuns in Eighteenth Century : Franch Politics and Culture, London, Cornell University, 2004, p. 50.

328

Jean-François de La Harpe, Mélanie, ou la religieuse forcée, drame en 3 actes et en vers, Suivie des Muses Rivales, du Dithyrambe couronné en 1779, de l’Epître sur la poésie descriptive, du Camaldule, de la Réponse d’un Solitaire à la Lettre de l’abbé de Rancé, et de quelques poésies diverses, Paris, Didot l’Aîné, 1792 (d’après l’édition de 1778).

329Ibid., avertissement de l’auteur, s. p.

330

Sophie Marchand, « Représenter la claustration : les décors de couvents, entre idéologie et scénographie » ; dans Costumes, décors et accessoires dans le théâtre de la Révolution et de l’Empire, dir.Philippe Bourdin et Françoise Le Borgne, Clermont-Ferrand, Presses Universitaires Blaise Pascal, 2010, p.41-55, p. 42.

La première scène de la pièce s’ouvre sur un échange virulent entre un homme de robe et son épouse à propos de l’établissement de leurs enfants. M. de Faublas présente le choix qu’il a fait pour l’avenir de ses enfants comme étant réfléchi puisqu’il insiste sur le fait qu’il a « pesé

ses projets » et en affirme le bien-fondé à sa femme qui semble discuter sa décision :

Non, madame ; en un mot, c’est trop me résister. J’ai pesé mes projets, je m’y dois arrêter. Pouvez-vous les blâmer ? Ma fortune est bornée. On offre à votre fils un brillant hyménée, L’espoir d’un régiment et d’un rang à la cour ; Dois-je seul m’opposer au bonheur de Melcour ? Avec cette alliance à tout on peut prétendre ; Et ne voyez-vous pas ce que je dois attendre ; Que bientôt dans les camps je puis voir illustré Un nom qui dans la robe est déjà décoré ? … Voulez-vous de mon fils retarder le destin ? À ce grand intérêt tout doit céder enfin. Ce n’est pas, après tout, un si grand sacrifice. Mélanie au couvent depuis deux ans novice, Formée à la retraite en ses plus jeunes ans,

Semblait en avoir pris les goûts, les sentiments … (p.1-2)

M. de Faublas affirme que « sa fortune est bornée », c’est-à-dire que son avancement dans le siècle – par son établissement, ses honneurs et sa richesse, notamment – connaît une limite. L’élévation sociale de la famille ne peut plus se faire par le biais de sa carrière robine et doit maintenant passer par l’établissement et le choix de carrière de ses enfants. C’est d’ailleurs pour cette raison que M. de Faublas se réjouit du mariage avantageux proposé à son fils, Melcour, mariage dont les retombées positives profiteraient à l’ensemble du lignage en asseyant sa réussite personnelle par l’obtention d’un « rang à la cour » et par la gloire militaire qui y serait associée. « Tout doit céder » à cette possibilité d’ascension sociale puisque ce mariage dépasse le simple intérêt personnel de l’établissement de Melcour. Cette union, sans doute arrangée, rappelle que sous l’Ancien Régime, les destins individuels entrent dans un « calcul paternel et familial d’accroissement et de profit des lignages332. » Comme l’écrit Robert Descimon à propos du milieu robin, dont il est justement question dans cette pièce : « Le père autoritaire (la mère, quand ce dernier est défunt) contrôle absolument les alliances, il prive filles et fils de leurs droits successoraux par divers montages juridiques, il encourage les vocations religieuses, il veut faire un aîné, à la mode nobiliaire, lequel sera seul en charge de la perpétuation du lignage333. »Le dessein de M. de Faublas semble bien être de faire reposer sur son fils l’avancement du lignage et d’écarter, pour cette raison, sa fille de la vie séculière en la destinant au couvent plutôt qu’à l’état marital. La motivation du père, dont rend compte cette scène – sacrifier un enfant pour mieux en établir un autre –, se retrouve dans les demandes de dissolution de vœux qui donnent néanmoins à voir des situations plus diverses. En effet, ce n’est pas toujours un garçon qui est favorisé par ses parents au détriment de sa sœur, comme c’est le cas dans la plupart des œuvres littéraires. Marie Michelle de Couhé de Lusignan a, par exemple, été obligée de faire profession dans l’ordre de

332 Jean Delumeau et Daniel Roche (dir.), Histoire des pères et de la paternité, Paris, Larousse-HER, 2000, p. 139-140.

333

Robert Descimon, « Patriarcat et discordes familiales. Les conflits liés aux enjeux de l’alliance et de la transmission dans la robe parisienne aux XVIe et XVIIe siècles », dans La justice des familles : autour de la transmission des biens, des savoirs et des pouvoirs : Europe, Nouveau Monde, XIIe-XIXe siècles, éd. Anna Bellavitis et Isabelle Chabot,École Française de Rome, 2011, p. 67-68.

Geneviève en 1725 car sa mère souhaitait l’écarter, elle, ainsi que ses deux frères, de la succession afin de favoriser le mariage de sa fille aînée avec Louis de Saint-Georges, chevalier seigneur de Reignier334.

M. de Faublas présente ce choix de vie religieuse imposé à Mélanie comme n’étant pas un « un si grand sacrifice » puisque sa fille a été « formée à la retraite » conventuelle dès son plus jeune âge. Mélanie a en effet été placée, comme beaucoup de jeunes filles de la noblesse et de la bourgeoisie, comme pensionnaire dans un couvent alors qu’elle n’était qu’une enfant pour y être éduquée. L’éducation conventuelle des jeunes filles est également un moyen pour les parents les destinant au cloître de leur éviter les regrets et les souffrances du monde séculier335. Mélanie n’est cependant plus une simple pensionnaire puisqu’elle est novice dans son couvent depuis deux ans. Le noviciat, dont la durée minimale est d’une année entièrement révolue, doit permettre à la future religieuse d’éprouver sa vocation, mais aussi sa capacité à vivre en communauté selon les règles de son ordre336. Pendant cette période, la novice est théoriquement libre de demander ses habits séculiers et de quitter son couvent pour retourner vivre dans le siècle, car elle n’est pas encore engagée dans l’état religieux par les vœux solennels337. Comme Mélanie n’a pas encore prononcé ses vœux, elle pourrait quitter ses habits religieux et revenir dans le monde, mais elle n’ose le faire et passer outre la volonté de son père. Il semble donc que ce soit ici la crainte révérencielle338 et la peur d’éventuelles représailles qui empêchent Mélanie de quitter son couvent. De tels obstacles sont également évoqués par les religieuses dans la majorité des procédures de réclamation. Ainsi, pendant son noviciat dans l’abbaye royale de Migette, Judith Aimée Françoise du Saix reçoit plusieurs lettres de sa mère dans lesquelles elle menace de l’abandonner si elle ne fait pas sa profession. Par peur de se retrouver seule dans le siècle, elle prononce ses vœux le12 décembre 1735339. De même, Anne Marie Pestatozzi, qui a fait profession dans l’abbaye royale de Saint-Pierre-les-dames de Lyon en 1764, ne proteste contre ses vœux qu’en 1780, après la mort de son père qu’elle respectait et craignait trop pour le faire de son vivant340

.

Mélanie n’a pas, à proprement parler, été forcée à entrer en religion, elle semblait même « en avoir pris les goûts » (p. 2), avant de se rendre compte qu’elle n’était pas faite pour cet état. Face à la détresse de sa fille, Mme de Faublas tente, par tous les moyens, de faire changer d’avis son mari et le supplie d’être juste et équitable avec ses deux enfants : « Soyez de vos enfants également le père ; / N’immolez point la sœur pour agrandir le frère. / Si, dans ses premiers ans, les soins des jeunes sœurs / Lui firent du couvent envier les douceurs, / C’est une illusion qui passe avec l’enfance, / Et j’ai pu voir depuis toute sa répugnance. / Je vous en informai » (p. 3). Mme de Faublas implore ici son mari de ne pas sacrifier sa fille au profit de son fils. Cette supplique n’est pas sans rappeler les discours des écrivains qui mettent en avant les qualités du « bon père » aimant également ses enfants en opposition à la figure du « père

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