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La chirurgie est un traitement local visant à réaliser une ablation totale de la lésion cancéreuse. Il s’agit du meilleur espoir curatif des patients atteints d’une tumeur pulmonaire de stade précoce44, 54-57. Selon la taille et la localisation de la tumeur, ainsi que l’état du patient, le chirurgien thoracique peut réaliser une résection limitée, une ablation totale du lobe pulmonaire, la lobectomie, ou encore une ablation totale du poumon tuméfié, la

pneumectomie. Pour lutter contre l’infiltration des cellules cancéreuses dans le réseau lymphatique, et donc éviter la récidive, un curage des ganglions lymphatiques est systématiquement effectué dans la zone touchée. Cela permet également de réaliser la stadification du cancer en vérifiant la présence de cellules cancéreuses au sein de ces ganglions, et d’administrer un traitement de seconde ligne le cas échéant44, 58,59.

Avant la chirurgie, les cliniciens évaluent la faisabilité d’une telle opération en vérifiant les critères d’opérabilité du patient. Cela permet de déterminer le rapport entre les risques encourus, et les bénéfices potentiellement induits par l’opération. Il est d’autant plus important d’évaluer cela que la population touchée par le cancer du poumon est dans la majorité des cas constituée de personnes âgées. L’état global du patient est évalué selon le Performance Status de l’Organisation Mondiale de la Santé qui déterminent le degré d’autonomie de patient. Un bilan cardio-vasculaire et respiratoire est effectué afin de déterminer si le patient est physiquement apte à subir une telle opération59. De plus, le statut tabagique du patient est également étudié et un accompagnement d’arrêt tabagique est proposé aux fumeurs car il s’agit d’un important facteur de risque pour la survie des patients1, 5, 6.

1.6.2 Radiothérapie

Il s’agit également d’une technique locale, visant à détruire la tumeur en lui administrant un faisceau de particules de haute énergie directement sur le tissu pulmonaire affecté60. Ce traitement est utilisé dans plusieurs cas cliniques différents, en fonction notamment du stade de la maladie. Dans le cadre des stades I, la radiothérapie est entreprise lorsque la tumeur est inopérable. Soit parce que la tumeur est inatteignable, soit parce que l’état du patient ne permet pas de réaliser l’opération. Pour les stades les plus avancés, elle est réalisée en complément de la chirurgie si la tumeur n’a pu être réséquée complètement et/ou de la chimiothérapie afin de diminuer la taille de la tumeur et ainsi faciliter la résorption de cette dernière. Dans le cadre des tumeurs de stades IV, la radiothérapie permet de détruire les métastases directement sur les organes touchés44.

La radiothérapie est utilisée avec parcimonie car celle-ci ne se contente pas de détruire le tissu tumoral, elle tue également les cellules saines. Bien que cette technologie repose sur le fait que les cellules saines ont une meilleure capacité de se réparer et donc de cicatriser l’organe en question, elle peut cependant être responsable de dommages irréversibles, et peut engendrer le développement de cancer des organes exposés aux rayons60. Nous l’avons décrit plus haut, les radiations administrées aux patientes avec une tumeur mammaire sont significativement associées à une augmentation des risques de développement de tumeurs pulmonaires5, 17.

1.6.3 Chimiothérapie

La chimiothérapie est un traitement systémique, consistant en l’administration de molécules qui agissent contre les mécanismes impliqués dans la division cellulaire excessive des cellules tumorales. Comme ces

médicaments transitent par la circulation sanguine, ils sont capables d’atteindre et d’agir sur toutes les cellules cancéreuses du corps. Par conséquent, il s’agit du traitement de référence des stades métastatiques de cancer du poumon pour lesquels elle est utilisée seule61. Pour les cancers avancés localisés, la chimiothérapie est utilisée en combinaison avec la radiothérapie afin de contrer la dissémination des cellules tumorales tout en diminuant la taille de la lésion primaire. Dans le cadre des stades précoces, la chimiothérapie peut être utilisée comme thérapie adjuvante44.

1.6.4 Pathologie moléculaire

La pathologie moléculaire est l’étude des caractéristiques biologiques moléculaires associées au développement et à l’évolution d’une maladie. Dans le cas du cancer du poumon, elle est utilisée principalement pour guider les cliniciens dans le choix des thérapies ciblées à administrer. Les techniques de pathologie moléculaire sont majoritairement réalisées sur le tissu tumoral issu des biopsies ou des résections chirurgicales. Actuellement, deux types de biomarqueurs moléculaires sont testés dans le cadre des tumeurs pulmonaires à savoir les mutations somatiques, ainsi que les biomarqueurs immunologiques.

1.6.4.1 Mutations

- EGFR : Epidermal Growth Factor est situé sur le bras court du chromosome 7 (7p11.2). Ses 28 exons codent pour une protéine transmembranaire dont le domaine cytoplasmique comporte une activité tyrosine kinase qui, une fois activée, contrôle la prolifération, la mort cellulaire programmée (apoptose), l’angiogenèse ou encore la migration cellulaire 62-66. Ce gène est muté dans environ 10% à 30% des adénocarcinomes diagnostiqués chez les non-fumeurs. Il s’agit le plus souvent d’une mutation somatique du codon 858 dans l’exon 21 substituant une arginine pour une leucine, ou plus rarement d’une délétion dans l’exon 1942. Cette mutation a été mise en relation avec la réponse à des traitements de chimiothérapies (erlotinib, gefitinib et afatinib), qui sont des inhibiteurs des voies tyrosines kinases. En revanche, elle ne discrimine pas les sous-types histologiques d’adénocarcinomes, si bien que le test de cette mutation n’est recommandé qu’après diagnostic ou suspicion d’adénocarcinomes42, 63. Or, il semblerait que la mutation du gène EGFR soit observée très tôt dans la transformation cellulaire des voies respiratoires inférieures, voire même dans les cellules épithéliales saines. Il semblerait également qu’il existe une corrélation entre les mutations EGFR et les adénocarcinomes à bon pronostic vital comme les adénocarcinomes in situ, ceux à invasion minime et à prédominance lépidique42.

- KRAS : ce gène code pour une GTPase agissant à la suite de la voie de signalisation de EGFR. À l’inverse des mutations du gène EGFR, les mutations de KRAS concernent d’avantage les fumeurs. Leurs fréquences atteignent 10 à 30% des tumeurs non-mucineuses et entre 80 et 100% des adénocarcinomes

invasifs mucineux42. À noter que les mutations des gènes de la famille Ras sont fréquentes dans plusieurs types de cancers. Cette famille de protéines intervient dans la diffusion et l’amplification des signaux intracellulaires, notamment issus de l’activation de EGFR. Lorsque KRAS est muté, la protéine est activée de façon constitutive, indépendamment de son activation, induisant ainsi la prolifération cellulaire, l’immortalisation des cellules, ou encore leur migration67. Actuellement, KRAS n’est la cible thérapeutique d’aucun médicament utilisé en clinique63. En revanche, cette mutation a été associée à une résistance aux thérapies anti-EGFR68.

- BRAF : ce gène code pour une kinase agissant une fois de plus sur la même voie de signalisation que les mutations précédentes, juste en aval de KRAS68. Dans 93% des cas, il s’agit d’une mutation de l’acide aminé 600 substituant un acide glutamique en valine dans l’exon 15. Celle-ci touche moins de 5% des adénocarcinomes41, 68 et a été associée avec le phénotype micropapillaire, papillaire et lépidique des adénocarcinomes invasifs42. La mutation de ce gène est, comme celles de KRAS, associée à la résistance aux traitements anti-EGFR. Des inhibiteurs spécifiques sont également en cours d’étude68. Autrement dit, la mutation de BRAF est testée lorsqu’il s’agit d’un stade avancé d’adénocarcinome invasif, sans possibilité de chirurgie curative, notamment lorsque le résultat du test de la mutation du gène EGFR est positif44.

- ALK : touchant 3 à 7% des adénocarcinomes, il s’agit ici d’un réarrangement génétique sur le chromosome 2p qui engendre la fusion des gènes ALK et EML4. La dimérisation de la protéine fusionnée engendre une activation constitutive de la voie des tyrosines kinases engendrant une fois de plus des troubles au sein de la multiplication et de la mort cellulaire programmée. Cette anomalie touche en majorité les jeunes hommes n’ayant jamais ou peu fumé au cours de leur vie42. Tout comme les mutations KRAS et BRAF, la mutation de ALK induit une résistance aux inhibiteurs des tyrosines kinases64, 68. Ce réarrangement génique est la cible thérapeutique du crizotinib et ceritinib qui agissent directement dans la cellule, en revanche, le test de détection n’est pas encore systématique en clinique.

- ROS1 : il s’agit d’un réarrangement génétique qui est retrouvé dans 1% des NSCLC. Ce gène code pour un récepteur tyrosine kinase fonctionnant en étroite collaboration avec ALK, les mutations de ces deux gènes sont cependant rarement concomitantes69. Le résultat de cette mutation est une fusion du domaine tyrosine kinase du récepteur avec diverses protéines telles que SDC4, EZR ou SLC34A2, induisant son activation constitutive et par conséquent une multiplication anarchique des cellules. Cette mutation n’est pas spécifique au cancer du poumon70, en revanche dans le cas d’une tumeur pulmonaire, elle est significativement associée aux adénocarcinomes69, 71. Tout comme les patients positifs pour la mutation de ALK, les patients positifs pour le réarrangement de ROS1 peuvent avoir une thérapie ciblée : le crizotinib70.

1.6.4.2 Immunologie

- TTF-1 : La piste immunologique est également prometteuse pour l’amélioration du diagnostic, du pronostic et la personnalisation des traitements des adénocarcinomes. TTF-1 (Transcription Thyroid Factor-1), est associé aux adénocarcinomes à bon pronostic vital, à savoir les adénocarcinomes lépidiques ainsi que les adénocarcinomes à invasion minime avec prédominance lépidiques. Cependant, il ne semblerait pas que TTF-1 soit directement associé au pronostic vital des patients72, 73. Il est également présent avec intensité forte à modérée dans 80% des cas d’adénocarcinomes papillaires et acinaires. En revanche, les adénocarcinomes plus agressifs tels que ceux à prédominance micropapillaire et solide n’exprime TTF-1 de manière intense que dans 20 à 30% des cas. En clinique, la détection immunohistochimique de TTF-1 est réalisée pour différencier les adénocarcinomes des carcinomes épidermoïdes43. En effet, TTF-1 est totalement absent des carcinomes épidermoïdes. Il semblerait que l’utilisation de ces marqueurs soit moins sensible à mesure que le grade tumoral augmente72, 74. L’un des avantages de TTF-1, est qu’il est spécifique au cancer bronchique et de la thyroïde. Cela permet donc d’identifier l’origine de la tumeur primaire73, 74.

- PD-L1 : il s’agit du ligand de PD-1, complexe formant un point de régulation indispensable de la réponse immunologique au cancer du poumon. Plusieurs anticorps monoclonaux sont en cours d’approbation pour l’utilisation clinique, comme le pembrolizumab et le nivolumab75. Le « NCCN Guidelines » recommande de tester ce marqueur lorsqu’il s’agit d’un stade avancé d’adénocarcinome, afin de cibler la thérapie44. La positivité immunohistochimique à PD-L1 est associée à un mauvais pronostic vital76, en revanche, les données sont actuellement insuffisantes pour l’utiliser comme outil pronostic dans la pratique courante.

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