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2.3.1/

Principe et formulation du probl `eme direct

La tomographie d’imp ´edance ´electrique (Electrical Impedance tomography, EIT) est une m ´ethode visant `a donner une cartographie de la r ´esistivit ´e d’un milieu. A l’instar de la spectroscopie, elle s’appuie sur un mod `ele de l’imp ´edance de contact entre les ´electrodes et le milieu. Toutefois, aucun mod `ele du milieu ni de l’ ´echantillon `a analyser n’est fourni. Les informations sur les propri ´et ´es sont obtenues `a l’aide d’une multitude de mesures d’imp ´edance effectu ´ees `a l’aide d’un grand nombre d’ ´electrodes. Ce nombre est g ´en ´eralement de 16 ou 32. La multitude des mesures recueillies est la cl ´e permettant d’aboutir `a la cartographie souhait ´ee, comportant un nombre relativement important d’informations.

(a) Repr ´esentation sch ´ematique. (b) Adjacent pair drive.

FIGURE2.10 La tomographie d’imp ´edance ´electrique sur puce99.(a) Repr ´esentation sch ´ematique d’une puce pour la tomographie d’imp ´edance ´electrique.(b) Pr ´esentation duadjacent pair driveutilis ´e en tomographie d’imp ´edance ´electrique.

Un exemple de dispositif de tomographie mentionn ´e dans la litt ´erature par Sun99 est donn ´e Fi- gure 2.10a. Afin d’aboutir aux mesures d’imp ´edance, la technique habituelle consiste `a injec- ter du courant entre des ´electrodes, puis de mesurer la tension r ´esultante entre d’autres paires d’ ´electrodes. Diff ´erentes m ´ethodes d’injection et de mesure du courant existent. On parle notam- ment deadjacent pair drivecomme pr ´esent ´e Figure 2.10b, o `u le courant est inject ´e entre 2

´electrodes adjacentes, puis la tension mesur ´ee entre toutes les paires d’ ´electrodes adjacentes qu’il est possible de former en excluant les ´electrodes servant `a l’injection du courant. On parle ´egalement deopposite pair drive, ou encore de m ´ethodes o `u le courant est inject ´e de mani `ere

plus uniforme.

D’autres g ´eom ´etries et positionnement d’ ´electrodes sont couramment utilis ´es. La formulation g ´en ´erale du probl `eme est la suivante : lorsque les courants ´electriques

I

l

(l = 1, 2, ..., L)

sont in-

ject ´es dans l’objet

par les ´electrodes

e

l

(l = 1, 2, ..., L)

aux fronti `eres

∂Ω

et la distribution de

r ´esistivit ´e

ρ

est connue sur

, le potentiel ´electrique correspondant u peut ˆetre d ´etermin ´e `a partir de l’ ´equation aux d ´eriv ´ees partielles, d ´eriv ´ee des ´equations de Maxwell :

∇.(1

ρ∇u) = 0

dans

Ω,

(2.8)

u+ z

l

1

ρ

∂ρ

∂n

= U

l, l=1,2,...,L

,

(2.9) Z el

1

ρ

∂u

∂ndS = I

l, l=1,2,...,L

,

(2.10)

1

ρ

∂u

∂n

= 0

sur

∂Ω\

L [ l=1

e

l

,

(2.11)

o `u

z

l est l’imp ´edance effective de contact entre la

l

i `eme ´electrode et l’ ´electrolyte,

U

lest le potentiel

sur la

l

i `eme ´electrode et

n

la normale sortante unitaire de l’ ´electrode.

La conservation des charges impose de plus :

L

l=1

L

l=1

I

l

= 0,

(2.13)

L’Equation 2.8 donne une solution unique pour la distribution du potentiel ´electrique, si les condi- tions aux limites sont d ´efinies. Le probl `eme direct est bien pos ´e en termes d’existence, d’unicit ´e et de stabilit ´e.

2.3.2/

R ´esolution

Puisque la distribution du potentiel d ´epend de la distribution de r ´esistivit ´e, il ne peut pas ˆetre r ´esolu analytiquement pour des valeurs arbitraires de

ρ

. Par cons ´equent, une approche g ´en ´erale est d’utiliser un mod `ele num ´erique qui peut simuler les valeurs des potentiels sur les ´electrodes les plus proches possibles des donn ´ees de tension mesur ´ees exp ´erimentalement. Le mod `ele num ´erique discr ´etise le domaine en de petits ´el ´ements de telle sorte qu’une solution approch ´ee peut ˆetre obtenue. On se tournera g ´en ´eralement vers des m ´ethodes de Galerkine du type ´el ´ements aux limites (BEM), diff ´erences finies (FDM) ou ´el ´ements finis (FEM) pour une r ´esolution num ´erique. Un logiciel opensource, Eidors, permet ce type de simulation. Dans cette configuration, une hypoth `ese forte qui consiste `a utiliser une mod ´elisation 2D est faite.

R ´egularisation du probl `eme : La r ´esolution du probl `eme inverse consiste `a calculer la distri- bution de r ´esistivit ´e lorsque le courant inject ´e est connu et les tensions sont mesur ´ees au niveau des ´electrodes. Le probl `eme inverse est lui mal pos ´e: les solutions ne sont pas uniques, en

raison de la nature des ph ´enom `enes physiques mis en jeu et du nombre limit ´e d’informations. Pour obtenir une solution acceptable, le probl `eme est r ´egularis ´e. La r ´egularisation fait r ´ef ´erence `a un processus consistant `a ajouter de l’information `a un probl `eme pour ´eviter le surapprentissage. Cette information prend g ´en ´eralement la forme d’une p ´enalit ´e envers la complexit ´e du mod `ele. Ici, la r ´egularisation se fait gr ˆace `a l’introduction d’informations a priori sur la solution : le proces- sus pour r ´esoudre le probl `eme inverse consiste ici `a trouver une valeur stable de

ρ

, de telle sorte que la diff ´erence entre les simulations num ´eriques du potentiel

U(ρ)

et la tension

U

mesur ´ee est minimale :

min

ρ

||U −U(ρ)||.

(2.14)

Le type de r ´egularisation le plus utilis ´e en EIT, et plus g ´en ´eralement pour la r ´esolution de probl `emes qui ne sont pas bien pos ´es ainsi que pour les probl `emes inverses, est la r ´egularisation de Tikhonov. Dans le but de privil ´egier une solution particuli `ere dot ´ee de propri ´et ´es qui semblent pertinentes, le terme de r ´egularisation est introduit dans la minimisation. Cette m ´ethode de r ´egularisation permet d’am ´eliorer le conditionnement du probl `eme inverse.

R ´esolution du probl `eme : Le type de r ´esolution du probl `eme de l’EIT d ´epend principalement des performances souhait ´ees en termes de vitesse et de pr ´ecision. Diff ´erents auteurs pr ´esentent des travaux donnant de bonnes performances statiques, c’est `a dire en termes de convergence et erreur r ´esiduelle. Ces m ´ethodes peuvent ˆetre bas ´ees sur un algorithme de Newton-Raphson mo- difi ´e100, un algorithme de r ´etroprojection101, une m ´ethode variationnelle102, une approche maxi- male a posteriori103, une m ´ethode d’ ´echantillonnage Monte Carlo104, un algorithme de reconstruc- tion directe105ou encore sur un algorithme de Gauss-Newton99. Tous ces algorithmes de recons- truction utilisent un ensemble complet de mesures ind ´ependantes afin d’obtenir une image.

En revanche lorsque de bonnes performances dynamiques sont souhait ´ees, ces m ´ethodes s’av `erent peu efficaces. Une approche pour surmonter le probl `eme de vitesse consiste `a utiliser des fen ˆetres temporelles plus courtes dans la mesure des tensions. Toutefois, deux inconv ´enients doivent ˆetre consid ´er ´es pour conserver des performances acceptables :

— Cela augmente le niveau de bruit des mesures,

— Les distributions d’imp ´edance ne sont g ´en ´eralement pas statistiquement ind ´ependantes. Concernant les distributions d’imp ´edance, il ne serait pas appropri ´e de consid ´erer chaque recons- truction s ´epar ´ement, puisque si les reconstructions successives sont r ´ealis ´ees ind ´ependamment, des informations s ´equentielles temporelles sont perdues. Ainsi, une solution propos ´ee106pour di- minuer le temps de calcul est de se baser sur un mod `ele dynamique, int ´egr ´e dans un filtre de Kalman (standard). Le filtre de Kalman est un outil faisant partie de la cat ´egorie des observateurs d’ ´etat, permettant d’estimer un ou plusieurs param `etres `a partir de la connaissance d’une autre grandeur. Ce type d’outil sera d ´ecrit dans la section suivante. Gr ˆace au mod `ele d’ ´etat, repr ´esentatif de la dynamique suppos ´ee du syst `eme, la corr ´elation entre deux ´etats successifs est prise en compte. La r ´esistivit ´e, en chaque point, est r ´e-estim ´ee apr `es obtention du jeu de mesures de ten- sions pour chaque injection de courant. La vitesse d’estimation est ainsi grandement augment ´ee (31 fois sup ´erieure pour un dispositif comportant 32 ´electrodes). De plus l’utilisation du filtre de Kal- man permet de minimiser l’influence des perturbations gr ˆace `a une prise en compte de donn ´ees statistiques sur le bruit de mesure et sur les perturbations.

Une contribution ult ´erieure exploite un EKF (Extended Kalman Filter, variante non-lin ´eaire du filtre de Kalman ditstandard) afin d’am ´eliorer les performances de reconstruction. La justification du

choix de l’EKF au lieu du filtre de Kalman standard est que l’EKF pr ´esente de meilleures perfor- mances de reconstruction, en particulier dans les situations o `u la distribution de la r ´esistivit ´e change fortement par rapport `a l’ ´etat de lin ´earisation suppos ´e. L’am ´elioration est obtenue au d ´etriment d’une charge de calcul l ´eg `erement accrue qui est due `a la mise `a jour des tensions d’ ´electrodes et de la matrice Jacobienne pour chaque it ´eration. L’auteur int `egre ´egalement un ´etat augment ´e auquel il associe une r ´egularisation de Tikhonov afin de tenir compte du caract `eremal-pos ´edu

probl `eme. La cartographie de r ´esistivit ´e peut alors ˆetre reconstruite comme pr ´esent ´e Figure 2.11. L’objet en surface du liquide modifie les lignes de champ ´electrique dans le milieu, et ainsi sa pr ´esence est d ´etect ´ee par le syst `eme.

2.3.3/

Conclusion

La tomographie d’imp ´edance est donc une m ´ethode permettant d’obtenir des informations sur les propri ´et ´es ´electriques d’un milieu en exploitant un grand nombre de mesures. Contrairement `a la spectroscopie d’imp ´edance, elle ne se base pas sur un mod `ele ´electrique donn ´e de l’ ´echantillon. De l’absence de ces hypoth `eses, et en raison du grand nombre d’informations que l’on souhaite obtenir (le potentiel ´electrique en chaque point du maillage), naissent toutefois des difficult ´es de r ´esolution, notamment dues au caract `ere mal pos ´e du probl `eme. La tomographie exploite diff ´erents outils permettant la r ´esolution du probl `eme inverse : l’utilisation d’observateurs d’ ´etat pour la re- construction dynamique `a partir de plusieurs capteurs et d’outils pour am ´eliorer le conditionne- ment. Tandis que la tomographie a pour objectif de reconstruire la r ´esistivit ´e d’un milieu dans son int ´egralit ´e, notre objectif, la mesure de position d’une cellule dans une puce microfluidique par imp ´edancem ´etrie se base sur les hypoth `eses de l’homog ´en ´eit ´e du milieu liquide et de la cellule. La synth `ese d’un observateur de la position d’un objet est donc un sous-probl `eme de celui de la tomographie : on souhaite connaˆıtre le barycentre des points dont la r ´esistivit ´e est tr `es diff ´erente de celle du reste du milieu. Les outils utilis ´es en tomographie apparaˆıssent alors a priori comme

FIGURE2.11 Tomographie d’imp ´edance ´electrique sur puce. (a) Des images optiques de Physarum

polycephalum sur le gel d’agar dans les puces de tomographie,(b) Des images reconstruites

correspondantes. La cellule de Physarum est plus conductrice que le gel d’agar, et est repr ´esent ´ee plus brillante (rouge) dans les images reconstruites.(c) Le bruit est ´elimin ´e par filtrage des r ´egions de faible

conductivit ´e.

transposables `a la mesure de position d’une cellule. La moindre quantit ´e d’information requise, induite par les hypoth `eses d’homog ´en ´eit ´e des ´el ´ements constitutifs du capteur, permet de plus d’envisager une dynamique de la mesure plus importante gr ˆace `a une charge de calcul plus faible.