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2.3 Premier regard sur les données inclinométriques

3.1.2 Théorie de la poro-élasticité

Terzaghi [1925] fut l’un des premiers à se confronter à l’étude du comportement poro- mécanique des sols, qu’on nomme également théorie de la consolidation. Il mit au point l’équation 1D du problème en se fondant sur une expérience pour laquelle une contrainte uniaxiale est appliquée à un échantillon de sol saturé et confiné [Wang, 2000]. Cependant, la généralisation à un domaine 3D de la théorie de la consolidation revient à Biot [1941], re- formulée plus tard par Rice et Cleary [1976]. Dans sa formulation du problème, comprenant un milieu poreux saturé par un fluide, Biot [1941] met en jeu deux paires de variables : une paire pour décrire l’état du milieu, à savoir la déformation ou strain² et la contrainte σ, et une paire pour caractériser l’état du fluide, à savoir la pression de pore p et l’accumulation massique relative de fluide dans un volume de contrôleξ. Notons que ² et ξ d’une part, et p etσ d’autre part, sont analogues : le premier couple est adimensionnel tandis que le second s’exprime en unité de pression. En coordonnées principales, c’est-à-dire lorsque les axes du repère orthonormé (x, y, z) coïncident avec la direction des contraintes normalesσxy et

σzrespectivement, alors ces quantités sont liées de la manière suivante [Wang, 2000] :

²x= 1 Eσx− ν Eσy− ν Eσz+ 1 3Hp (3.1) ²y= −ν Eσx+ 1 Eσy− ν Eσz+ 1 3Hp (3.2) ²z= −ν Eσx− ν Eσy+ 1 Eσz+ 1 3Hp (3.3) ξ = 1 3H(σx+ σy+ σz) + 1 Rp (3.4)

où E dénote le module d’élasticité ou module d’Young et ν le coefficient de Poisson, qui sont des propriétés purement élastiques du milieu2. Le paramètre H est exprimé par Rice et Cleary [1976] en fonction du module de compressibilité des grains Kg(minéraux du matériel

poreux) et du module de compressibilité isostatique K tel que

H =µ 1 K− 1 Kg ¶−1 (3.5)

avec [Wang, 2000]

K = E

3(1 − 2ν) . (3.6)

Enfin, R est connu sous l’appellation module de Biot à contrainte constante. Il s’agit là d’un paramètre poro-élastique car il fait intervenir les quantités clés qui caractérisent le milieu poreux et le fluide : la porositéφ, le module de compressibilité de l’édifice poreux Kφ et le module de compressibilité du fluide Kf. Ainsi, on a [Wang, 2000]

R =· µ 1 K− 1 Kg ¶ + φ µ 1 Kf − 1 Kφ ¶ ¸−1 . (3.7)

La distinction entre Kg et Kφ n’est pas évidente : le premier concerne uniquement la compressibilité des grains, le second est une propriété de leur agencement mécanique. Pour un milieu dans lequel la porostiéφ ne varie pas sous l’action d’une variation de pression ou de contrainte, on suppose souvent que Kg = Kφsi la phase solide est composé d’un seul

type de minéral ou plusieurs minéraux ayant la même compressibilité Kg. Les phases mi-

nérales présentes naturellement dans les sols et réservoirs poreux peuvent être très variées et posséder des propriétés sensiblement différentes. Toutefois, en l’absence d’information précise concernant ce point et en considérent que dans la plupart des cas Kg est en général

assez élevé devant K, on peut simplifier le problème en posant Kg = Kφ[Berryman, 1992]. Le tableau3.1regroupe les ordres de grandeurs de K et Kg pour quelques types de roches

courantes.

TABLEAU3.1 – Ordres de grandeurs du module de compressibilité isostatique K et du module de com- pressibilité des grains Kgpour quelques roches types d’après Wang [2000].

Roche K (GPa) Kg(GPa) Grès 5 à 15 25 à 45 Calcaire 20 à 35 70 à 110 Argile ∼ 0.05 Infini Granite 25 à 35 ∼ 45

Les équations3.1à3.4sont une combinaison linéaire de 4 variables dépendantes (², ξ,

σ et p) liés par 4 paramètres supposés indépendants (R, H, E et ν). Le fait même que Biot [1941] ait introduit le principe de linéarité dans sa théorie de la consolidation est une hy- pothèse de travail. Certes, les équations permettent de plutôt bien prédire les phénomènes poro-élastiques observés dans la nature, il n’en est pas moins que rien ne laisse présager que, par exemple, le strain reste lié linéairement à la pression de façon indéfinie. Il est donc im- plicitement prévu que ces équations constitutives de la théorie de la poro-élasticité linéaire

soient appliquées uniquement dans la mesure où les changements d’état des variables dé- pendantes sont faibles [Biot et Willis, 1957]. Une autre hypothèse de la théorie de Biot [1941] mérite d’être éclaircie. Il s’agit du principe de réciprocité, qui dicte que le volume d’eau expulsé d’un VER de contrôle sous l’action d’une contrainte (avecδp = 0) est exactement le même que le volume d’expansion du VER lié à une variation équivalente de la pression de fluide (avecδσ = 0). Cela repose sur la présomption que le travail (énergie) nécessaire pour accomplir ces deux opérations « réciproques » est le même. Comme la théorie de la poro-élasticité est utilisée pour caractériser dynamiquement les systèmes, on peut se poser la question du bien-fondé de cette hypothèse. En effet, si une quantité d’énergie∆W1est consommée pour sortir un volume de fluide d’un espace de contrôle, n’est-il pas possible d’envisager qu’il faille un travail un peu plus grand |∆W2| > |∆W1| pour retrouver dans ce même espace, le volume perdu en augmentant la pression ? Le réarrangement des grains après le travail∆W1fourni pour une compaction peut-il être défait avec une énergie −∆W1 pour une expansion ? Autrement dit, n’existe-t-il pas une hystérèse dans l’aller-retour entre les deux situations ? Sans que cela soit nécessairement vérifiable dans tous les cas de figure, il convient de garder cette hypothèse à l’esprit lors de l’application de la théorie de Biot [1941] à l’étude dynamique des réservoirs poreux.

Ainsi, lorsqu’un milieu poreux saturé est soumis à une variation soudaine des contraintes σ et/ou de la pression de fluide p, la perturbation est encaissée par l’assemblage poreux so- lide d’une part et le fluide d’autre part. On introduit communément le coefficient de Skemp- ton B, qui détermine dans quelle proportion la charge est supportée par ces deux ensembles. Ce coefficient se définit tel que [Wang, 2000]

B = −δp δσ ¯ ¯ ¯ ¯ ξ=0 . (3.8)

Lorsque B est proche de 0, c’est le milieu qui presque entièrement soutient la charge induite par un incrément de contrainte ou de pression, et c’est le fluide qui se comprime. Dans le cas extrême inverse, où B = 1, c’est le fluide qui supporte la charge et c’est le milieu uniquement qui se déforme. Ces expériences de pensée s’effectuent sous condition qu’il n’y ait pas de variation de la masse de fluide (ξ = 0), que l’on nomme aussi conditions non-drainées. On peut alors montrer à partir des équations3.4et3.8que

B =R

Il est intéressant de noter que dans le cas où B = 1, alors R = H et d’après les équations3.5

et3.7, cela signifie que le système ne dépend plus des propriétés poro-élastiques, mais seule- ment des paramètres élastiques. En outre, une variation de pression de fluide est entière- ment équivalente à une variation de contrainte mécanique sur le milieu. Par conséquent, lorsque le coefficient de Skempton est proche de 1, le milieu se comporte approximative- ment comme un corps purement élastique. Cette situation est rencontrée lorsque le matériel poreux est très compressible par rapport à l’eau.

3.1.3 Les deux approches rentenues pour la modélisation hydromécanique