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Article 1: TGF-β programs central-memory differentiation in ex vivo stimulated human

2. TGF-β favorise la migration et la rétention intra-tumorale des LT

L'efficacité de l'immunothérapie du cancer repose principalement sur l'obtention d'une réponse effectrice forte et durable des LT cytotoxiques dans la tumeur. Un des obstacles majeurs à la réalisation de cet objectif est la migration inefficace des LT vers le site de la tumeur.

Dans notre deuxième étude, nous avons exploré le potentiel du TGF-β à améliorer la migration et la rétention des LT-OT-I stimulés ex-vivo vers le site de la tumeur, dans un modèle murin de carcinome pulmonaire exprimant le peptide OVA (Lewis Lung Carcinoma- LLC-OVA). Nos données ont montré que le traitement ex-vivo des LT-OT-I au TGF-β augmente l'expression de plusieurs molécules associées à un phénotype de migration et de

rétention tissulaire, telles que le CXCR3, le CD103 et plus modestement le CD69 et réduit en contrepartie l'expression du récepteur de "homing" CD62L. L'inhibition du CD62L par le TGF-β a déjà été observée (462), mais est en contradiction avec nos résultats chez l'humain (voir article 1). Cette divergence peut être liée à des différences dans la conception des expériences (exp. Type de stimulation, force du signal TCR,..) ou à des différences entre l'humain et la souris. De même l'induction de l'expression du CXCR3 par le TGF-β a déjà été observée dans les LT murins (400, 561), les NK humains (403) et les LT CD8+ dérivés du

sang de cordon (562). Enfin, le TGF-β est connu pour induire l'expression du CD103 lors de l'activation des LT en régulant directement la transcription de son gène, ITGAE (559, 563, 564).

Par la suite, un test compétitif de migration en Transwell a permis de montrer que les LT-OT-I traités ex-vivo au TGF-β ont une meilleure capacité à migrer en réponse aux ligands recombinants du CXCR3 et que cette migration est dépendante des récepteurs associés aux protéines Giα en général et plus spécifiquement du CXCR3. De plus, les LT-OT-I exposés ex-

vivo au TGF-β ont aussi montré une meilleure capacité à migrer en réponse aux surnageants des tumeurs LLC-OVA. Bien qu'aucun test n'a encore été réalisé pour mesurer l'expression des ligands du CXCR3 par les tumeurs LLC-OVA, la perte du potentiel migratoire des LT-OT-I traités ex-vivo au TGF-β par rapport aux contrôles non traités en réponse aux surnageants des LLC-OVA, après leur prétraitement avec un anticorps bloquant spécifiquement le CXCR3, suggère la présence de ces chimiokines dans les surnageants utilisés. De plus, les résultats du test de migration compétitif in vivo ont révélé que, 3 et 72 heures après leur transfert adoptif, les LT-OT-I traités au TGF-β ont migré plus efficacement vers les rates et les tumeurs LLC- OVA comparés aux contrôles non traités. L'infiltration d'un plus grand nombre de LT-OT-I

traités au TGF-β dans les tumeurs après 3h du TA est probablement due à une meilleure capacité des LT-OT-I traités au TGF-β à migrer vers la tumeur, puisque nous pensons que cette durée de temps n'est pas suffisante pour permettre la mise en place d'autres processus (prolifération in situ, survie, rétention,..) pouvant influencer l'étendue de l'infiltration tissulaire. La migration précoce des LT-OT-I traités au TGF-β pourrait être due, là aussi, à une plus forte expression du CXCR3 par ces cellules. Cependant, pour le vérifier il sera nécessaire de refaire les mêmes tests après administration in vivo d'un anticorps bloquant spécifiquement le CXCR3 aux souris porteuses de tumeurs LLC-OVA.

Les chimiokines et leurs récepteurs représentent un des axes majeurs qui contrôlent le recrutement des LT cytotoxiques (CTL) au site de la tumeur et orchestrent la réponse anti- tumorale (565, 566). Parmi eux, le CXCR3 et ces ligands, CXCL9 et CXCL10 (inductibles par l'IFN-γ), ont été décrits comme jouant un rôle crucial dans l'immunité anti-tumorale (330, 561, 567, 568). Leur expression dans le microenvironnement tumoral est associée à une importante infiltration de la tumeur par les LT effecteurs et à un bon pronostic chez des patients atteints d'un cancer colorectal ou d'un mélanome (486-489). Dans une étude récente, Mikuchi et ses collaborateurs ont démontré avec élégance, dans des modèles murins et humains de mélanome, que la signalisation en aval du CXCR3 était un point de contrôle essentiel et indispensable pour que les LT CD8+ spécifiques aux tumeurs transférés circulent dans le

système vasculaire tumoral (561). En accord avec cette étude, les résultats obtenus suite au test de migration in vivo suggèrent que le TGF-β améliore la migration des LT-OT-I transférés vers le site de la tumeur en induisant l'expression du CXCR3. Cette observation est soutenue par une récente étude où les auteurs ont étudié le rôle du TGF-β dans la formation des Trm dans le rein. Leurs résultats ont montré que le TGF-β favorise la formation de LT résidants

dans le rein en améliorant l'entrée tissulaire des LT effecteurs. Dun point de vue mécanistique, le TGF-β induit l'expression des ligands des E et P sélectines et du CXCR3 qui coopèrent pour faciliter la migration transendothéliale des LT CD8+ effecteurs dans le rein (569). Plus tôt, le

même groupe a montré chez la souris qu'une signalisation continue du TGF-β était requise pour maintenir l'expression du CXCR3 sur les LT CD8+ mémoires circulants (569).

Après 72h du TA, l'infiltration de la tumeur par un plus grand nombre de LT-OT-I traités au TGF-β a pu faire intervenir d'autres processus, tels que la rétention des LT dans la tumeur par l'interaction du CD103, fortement exprimé par ces cellules, à son ligand, l'E- cadhérine, exprimé par les tumeurs LLC-OVA. Bien qu'un rôle du CD103 dans la migration des LT vers les épithéliums ait déjà été suggéré (570, 571), les résultats de plusieurs études indiquent plutôt un rôle important du CD103 dans la rétention des LT dans les tissus épithéliaux (572). En effet, le CD103 induit l'arrêt des LT en interagissant avec l'E-cadhérine exprimée dans les tumeurs épithéliales (573). L'infiltration de la tumeur par un nombre important de LT CD8+CD103+ a été associée à une meilleure survie des patients atteints de

carcinomes ovariens (229) ou pulmonaires (228), suggérant ainsi l'implication du CD103 dans le recrutement des LT dans l'épithélium tumoral. Au contraire, l'accumulation préférentielle de LT CD8+CD103- dans le stroma tumoral et associé à une réponse anti-tumorale inefficace

(574, 575).

Bien que cet aspect n'ait pas encore été abordé dans notre étude, il est reconnu qu'en plus de favoriser la rétention des LT dans la tumeur, le CD103 peut réguler d'autres fonctions des LT. En effet, dans le microenvironnement tumoral, il a été démontré que le rôle du TGF-β ne se limitait pas à induire l'expression de l'intégrine CD103, mais il régule également son

activation via l'initiation de la signalisation des voies ILK et AKT/PKB, Ce qui renforce l'interaction CD103-E-cadhérine, et contribue à initier la signalisation " outside-in" du CD103, favorisant ainsi la mobilité, la migration et la cytotoxicité des LT (574). De ce fait, le CD103 régule non seulement le recrutement et l'adhésion des LT à l'épithélium tumoral, mais aussi la prolifération, la sécrétion des cytokines, la maturation de la synapse immunologique et la réponse cytotoxique des LT vis-à-vis des tumeurs épithéliales (573, 576-579). Des expériences complémentaires (exp.tests de cytotoxicité in vivo et in vitro,..) devront être effectuées afin de vérifier si le CD103 induit par le TGF-β entraine des effets similaires dans notre système.

A la suite du test de migration in vivo, nous avons également observé une plus grande proportion de LT-OT-I traités au TGF-β dans la rate, après 3 et 72h du TA. Ceci peut être expliqué par le fait que ces cellules expriment plus fortement le récepteur de chimiokine, CCR7, qui en réponse à ses ligands, CCL19 et CCL21, permettrait de les recruter vers la rate (580, 581). De même, bien que modeste, une plus forte expression du CD69 par les LT-OT-I traités au TGF-β, pourraient empêcher leur exclusion de la rate via l'inhibition du récepteur d'exclusion, Sphingosine 1-phosphate receptor-1 (S1P1) (227). Enfin, le CXCR3 plus

fortement exprimé par les LT-OT-I traités au TGF-β peut participer à leur migration vers la rate, puisque celui-ci peut se lier au CCL21 produit dans la zone T de la rate (582). De plus, une étude dans un modèle de granulomatose hépatique chez la souris a montré que l'induction immédiate de l'expression du CXCR3 durant la phase d'activation des LT dans les organes lymphoïdes secondaires coïncide avec une augmentation de la production de ses ligands, CXCL9 et CXCL10, par les DC matures. Les LT activés sont ainsi séquestrés jusqu'à 4 jours dans les ganglions drainant avant d'être recrutés dans les tissus périphériques. Bien que cette étude ne soit pas directement liée à nos observations, ces données pourraient laisser entrevoir

un rôle potentiel du CXCR3 dans la rétention des LT dans la rate les premiers jours suivant leur transfert.

Enfin, malgré une meilleure infiltration des tumeurs LLC-OVA par les LT-OT-I traités au TGF-β comparé aux contrôles non traités, cela n'a pas suffi à éliminer ou à ralentir durablement la croissance tumorale. Plusieurs facteurs peuvent expliquer la faible efficacité thérapeutique des LT-OT-I infiltrant la tumeur, par exemple, l'inhibition de la réponse anti- tumorale par le microenvironnement immunosuppresseur de la tumeur ou une faible expression des ligands de CXCR3 dans le microenvironnement tumoral. Le ralentissement de la progression tumorale observé à des temps précoces dans le groupe ayant reçu des LT-OT-I traités au TGF-β, nous laisse une petite fenêtre pour intervenir et bonifier notre stratégie thérapeutique en associant le traitement ex-vivo des LT au TGF-β à d'autres stratégies thérapeutiques qui par un effet synergique pourraient améliorer l'efficacité thérapeutique des LT infiltrant la tumeur.

Dans un premier temps, l'expression des ligands du CXCR3 dans le microenvironnement tumoral pourrait être amplifiée par différentes stratégies. En effet, l'expression des ligands du CXCR3 est variable d'une tumeur à l'autre (487, 488). Plusieurs stratégies ont déjà été envisagées pour booster leur production dans le microenvironnement tumoral et favoriser le recrutement des LT effecteurs. Parmi elles, des études précliniques ont montré que l'administration des ligands de TLR (Toll like receptors) (CpG ou poly I:C) ou d'IFN-α a permis d'induire la production des ligands de CXCR3 par les cellules stromales (fibroblastes, monocytes ou leucocytes CD45+) du microenvironnement tumoral (583, 584).