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4 LE CAS DE LA DISCIPLINE « FRANÇAIS »

4.2 Supports et mise en pratique des apprentissages

4.2.4 Ce que le terrain laisse paraître

Dans la mesure où j’ai renoncé à mener un travail sur l’écrit en particulier, je n’ai pas poussé très loin ma recherche concernant les dominantes enseignées en français. J’ai pu noter d’après les questionnaires que dans leurs cours, les professeurs tiennent compte des quatre compétences (CO, CE, PO, PE) évoquées en didactiques des langues ainsi que de la compétence culturelle. Par ailleurs, en ce qui concerne le domaine linguistique : le lexique (et/ou vocabulaire), la conjugaison, la grammaire et l’orthographe ont été cités. L’étude des textes est aussi mise en avant. Si elle est inexistante en FLE aux niveaux qui nous intéressent, la plupart des enseignants ont bien conscience qu’il s’agit là d’une activité incontournable pour intégrer une classe de FLM. En outre, les grandes directives du programme du collège sont suivies et les enseignants font place à divers enseignements de FLM tels que les types de discours, les types de textes, le lexique et sa formation, les registres de langue, les discours directs et rapportés etc. Le problème le plus fréquemment évoqué au sujet de la mise en place d’une progression est que l’année est courte et que plus l’élève est âgé, plus il est censé accumulé les savoir-faire et connaissances.

 Les influences de la didactique du FLE

Sur le terrain, j’ai pu assister à différents cours. Certains répondaient à une logique très proche du FLE. Ainsi, un enseignant suit la progression d’une méthode FLE adaptée à un public de collégiens en insérant dès que faire se peut des éléments permettant de mieux aborder la classe de FLM tels que la définition de l’ironie, le métalangage utilisé lors de l’étude des différents systèmes verbaux (l’indicatif et sa signification dans l’exemple précis) l’origine d’un mot (le mot alcool) lors d’une activité portant sur les correspondances phonie/graphie, le concept d’homonymie lors d’une dictée fabriquée dans laquelle des homophones ont été insérés etc. Dans un autre cours, les compétences travaillées étaient les deux compétences orales. Les élèves devaient s’exprimer sur des sujets en rapport avec la compétence pragmatique et les aspects linguistiques travaillés dans la semaine (inviter, accepter et refuser). En binôme, ils avaient cinq minutes pour imaginer un canevas en rapport avec la situation tirée au sort et ensuite devaient présenter leur point de vue à la classe en

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SPAËTH Valérie, « Le français « langue de scolarisation » et les disciplines scolaires » in CHISS Jean-Louis, (dir.) Immigration, école et didactique du français, Coll. Langues et didactique, Ed. Didier, Paris 2008, p.87.

Céline PILLON – master 2 L’intégration des grands adolescents nouvellement arrivés – juin 2008 98

jouant la scène. Chaque semi-improvisation était ensuite commentée par l’enseignante et la classe dans le but de mettre en évidence les réussites et les maladresses des uns et des autres afin d’aller plus loin dans l’apprentissage tout en corrigeant les erreurs et les imperfections. Ailleurs, des élèves de CLA collège, le jour de ma visite, ont travaillé sur les photographies de l’exposition de Yann Arthus-Bertrand sur le développement durable. Les élèves répartis par groupes de deux devaient choisir une image et la décrire ou la commenter selon leurs niveaux. Les plus avancés pouvaient travailler sur le texte et expliquer pourquoi et pour qui il était écrit. A la première étape orale succédait une prise de notes mettant en évidence un vocabulaire utilisable pour décrire ou pour exprimer ses sentiments. Un autre enseignant, travaillant en CLA de lycée général a abordé un poème de Prévert « Le message » en demandant aux élèves d’émettre des hypothèses quant au contenu du poème. Ensuite, il leur a distribué le texte sous une forme tronquée et leur a fait inventer une fin. L’un des objectifs était de travailler sur les accords du participe passé avec l’auxiliaire « avoir », le texte s’y prêtant. La séance s’est poursuivie par un travail individuel à l’écrit pendant lequel le professeur allait de table en table pour venir en aide aux uns et aux autres. Ensuite, les productions ont été lues et l’une d’entre elle a été choisie pour être recopiée par tous. Le poème initial a finalement été découvert et explicité dans son intégralité à la manière des cours de littérature en FLM.

 Et celles de la didactique du FLM

Les contenus abordés dans d’autres cours évoquaient plus encore les méthodes employées en FLM. Une enseignante travaillant avec des élèves d’un niveau A2 commençait une séquence sur le dialogue lors de ma venue. Ce jour là, elle a abordé les règles et les marques du dialogue à partir d’un dialogue improvisé avec la classe et écrit au tableau. Ensuite, les élèves eurent pour tâche de reconstituer un dialogue transcrit dans le désordre et, une fois l’exercice fini, il leur a été demandé de le lire tour à tour en binôme, en adoptant la bonne tonalité. A l’issue de cette première heure, l’enseignante projetait de mettre en évidence les différences existant entre le dialogue « classique », le dialogue théâtral et le dialogue romanesque. L’objectif, en expression écrite, était d’aborder le passage d’une forme à l’autre après avoir initié un travail sur les discours rapportés. La littérature a souvent été choisie comme objet d’étude. La poésie, déjà évoquée, a en fait été rencontrée à six reprises. Une enseignante de CLA 3/4 (niveaux A2 et A2+), travaillant sur un groupement poétique, avait comme objectif culturel de faire découvrir des formes poétiques et quelques poètes français. Elle souhaitait aussi, pour ce qui est de l’aspect pragmatique, permettre l’usage de

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dictionnaires, le travail sur la mise en voix et sur l’expression des sentiments. Le lexique était la priorité linguistique de sa séquence puisqu’elle comptait étudier la présence de la polysémie dans les poèmes choisis, le vocabulaire des sentiments et des sensations ainsi que quelques figures de styles comme les comparaisons, les métaphores ou la personnification. Tout cela en suivant la plus pure tradition FLM mais en s’adaptant au niveau des élèves et en prenant bien soin d’expliciter toutes les notions rencontrées et de les réinvestir fréquemment. Une autre collègue menait depuis quelques séances un travail sur le conte. Les trois premières séances avaient été consacrées à un travail sur le repérage des personnages et des verbes ainsi qu’à une initiation aux notions de récit, de narrateur et de narration. En ma présence, les temps du récit et le schéma narratif du conte (schéma de Greimas) ont été abordés. D’autres séances allaient compléter le travail en mettant en évidence, entre autre, le schéma actanciel et les discours rapportés. Une enseignante de CLA de LP cette fois a commencé son cours en faisant réciter différents poèmes et en insistant sur les manières de dire face à un public (tonalité, gestes, regards, débit etc.). Ensuite, elle a fait réaliser différentes tâches (linguistiques ou rédactionnelles) à ses élèves en fonction de leurs niveaux. Les exercices réalisés ont été repris et corrigés en commun à la fin de la séance. Chaque élève est parti en sachant ce qu’il devait travailler pour le cours suivant. Ces quelques exemples prouvent que les professeurs de FLS ont recours à la didactique du FLE et aux contenus préconisés en FLM pour élaborer leurs séquences. Par ailleurs, les ambiances de classes sont bonnes et les travaux collectifs et différenciés fréquents. Bien sûr, il m’aurait fallu des périodes d’observation plus longues pour obtenir plus de précisions quant aux démarches choisies. Il m’a semblé toutefois que dans les pratiques, on tendait vers ce qui était préconisé par les instructions officielles aussi floues soient elles.