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6.1 Etat de l’art : Les renforts Non Tissés

6.1.1 Technologie des non tissés

La fabrication du non tissé nécessite trois étapes. La première étape consiste en la formation d’un voile à partir de balles de fibres coupées, de filaments ou de granulés de polymères. Elle peut être réalisée par plusieurs procédés : voie sèche, voie aérodynamique, voie fondue et voie humide. En termes de volumes de production, la voie fondue et la voie sèche sont des méthodes largement dominantes dans le marché des non tissés. Ensuite, une étape de consolidation de la nappe est nécessaire afin de donner une certaine cohésion et résistance à la structure fibreuse, cette étape est absente dans le procédé par voie fondue. Elle peut être effectuée par des moyens mécaniques (aiguilletage, jet de fluide), chimiques (imprégnation, pulvérisation, enduction), thermiques (fusion) ou par combinaison de ces moyens [5,6]. La dernière étape est l’étape de finition qui permet d’apporter une ou plusieurs propriétés au non tissé. Par la suite, une étape d’impression ou de gaufrage peut être réalisée pour un effet décoratif ou fonctionnel. En outre, des propriétés telles que l’absorption du non tissé, l’ignifugation, la micro-encapsulation peuvent être améliorer par traitment ou enduction sur le non tissé.

Pour la première étape de formation du voile, différentes technologies existent dans l’industrie textile et papetière qui sont [1,7] :

- La voie sèche (Drylaid)

La formation du voile par voie sèche est issue de la chaîne de filature classique où les mêmes machines de base sont employées (voir Figure 6-2). La première étape consiste à amener des balles de fibres sur un tapis roulant afin de former une nappe en entrée de la carde. Cette matière est ensuite cardée, ce qui consiste en un procédé mécanique permettant de nettoyer et paralléliser les fibres afin de les transformer en voile. Cette transformation est possible grâce à différents passages par le cylindre alimentaire, les cylindres travailleurs et dépouilleurs et plusieurs tambours hérissés de dents qui peignent les fibres (voir Figure 6-3). Cette opération peut être suivie par une étape de nappage par le biais d’une nappeuse qui permet d’étaler plusieurs couches de voile pour préparer à la consolidation. L’avantage de cette méthode est que la ligne de carde facilite l’utilisation des fibres relativement longues. Selon la configuration de la carde, les fibres peuvent être orientées dans la longueur du voile ou disposées aléatoirement.

Figure 6-2: Schéma de procédé par voie sèche (Drylaid) [8]

Figure 6-3: Schéma d’une carde [9] - La voie aérodynamique (Airlaid)

Comme présenté à la Figure 6-4, pour le procédé Airlaid, les fibres sont dispersées sur un tapis convoyeur dans un flux d’air afin de les transporter et les projeter aléatoirement sur un tapis de formation équipé d’un système d’aspiration par des tambours rotatifs perforés. Ces fibres forment alors un voile qui possède une plus faible densité que celui à la sortie de

la carde. La voie aérodynamique permet d’utiliser différents types de fibres, qui peuvent être très courtes et mélangées ou non. Cette technique permet de produire une nappe totalement isotrope [11].

Figure 6-4: Schéma de procédé par voie aérodynamique (Airlaid) [8] - La voie humide (Wetlaid)

Le procédé humide est similaire au procédé papier. Il consiste à utiliser un mélange de fibres avec une grande quantité d’eau constituant une pâte (0,1 à 0,25 g/l) [7]. Cette pâte est ensuite transportée sur un tapis roulant où le voile est formé par aspiration d’eau jusqu’à ce qu’il soit asséché. Par la suite, ce voile est consolidé à l’aide de cylindres compresseurs (Figure 6-5). Cette technologie est fréquemment utilisée dans le domaine de la filtration. En effet, elle permet de contrôler l’orientation des fibres afin d’obtenir des matériaux isotropes [10], homogènes et bien compact avec des masses surfaciques entre 50 et 2500 g.m-2 [11].

- La voie fondue (Spunlaid)

Ce procédé de fabrication est utilisé pour les fibres de polymère filables (polyamide, polypropylène etc.) à l’état fondu. Il consiste à extruder et fondre le polymère sous forme de granulés à travers des filières afin de former une nappe de filaments. A la sortie, ces filaments sont refroidis et déposés sur un tapis transporteur. On peut distinguer deux méthodes possibles : le spunbond ou le meltblown. La première se décompose en une étape d’extrusion et de filage par un étirage de filaments et une étape de consolidation par refroidissement (voir Figure 6-6). La deuxième méthode est le meltblown qui combine l’extrusion par un jet d’air à haut débit. Dans ce cas, le polymère subit un courant d’air chaud qui va disperser les filaments avant de le solidifier pour former un voile de fil continu. Par voie fondue, on peut obtenir des masses surfaciques de 15 à 400 g.m-2 [11].

Figure 6-6 : Schéma du procédé par voie fondue (SpunLaid) [8] Pour la deuxième étape de consolidation, on retrouve trois principaux moyens:

- Mécanique :

La consolidation mécanique se fait par un enchevêtrement mécanique des fibres formant la nappe. Cet enchevêtrement assure la cohésion et le liage de la structure grâce à la friction inter-fibres. Deux procédés de liage mécanique existent : l’aiguilletage et l’hydroliage. La technique d’aiguilletage est fréquemment utilisée pour les non tissés à applications techniques. L’aiguilletage est assuré par une aiguilleteuse munie de plusieurs aiguilles à crochets, pouvant être placées sur une ou deux faces, et disposées verticalement par rapport à la nappe de fibres (voir Figure 6-7). Les aiguilles pénètrent la nappe fibreuse en entrée, entraînent et traversent les fibres à la descente ce qui permet d’enchevêtrer les fibres et leur donner une certaine cohésion, comme présenté sur la Figure 6-8. L’aiguilletage permet d’obtenir des non tissés de 100 à 4000 g.m-2

de masse surfacique [11]. La qualité de l’aiguilletage est contrôlée par la densité d’aiguilletage, exprimée en coups.cm-

² et la profondeur de pénétration des aiguilles [12]. Cette sollicitation mécanique modifie les propriétés des fibres et de la structure du non tissé lui-même. Pour cette raison, plusieurs études ont été réalisées pour examiner l’effet de l’aiguilletage à l’échelle fibre et renfort. Miao et al. [13] ont démontré que la profondeur de pénétration de l’aiguille a un effet plus important sur l’endommagement des fibres par rapport à la densité d’aiguilletage. Mais si

ces deux paramètres dépassent une valeur critique, une nette diminution des propriétés mécaniques du non tissé est observée par la rupture des fibres [12-16]. A l’échelle du renfort, Ghosh et al. [17] ont montré que l’augmentation de ces deux paramètres entraine l’amélioration de la résistance du non tissé mais également la baisse de sa déformabilité. De même, Das et al. [18] ont mis en évidence qu’une densité d’aiguilletage élevée entraine une augmentation de la densité du non tissé avec l’amélioration de résistance mécanique en traction abrasion, au choc et à la rupture. Cependant, ils ont remarqué la forte apparition du phénomène d’endommagement voire la rupture des fibres. Egalement, les non tissés aiguilletés sont performants en épaisseur ce qui aide à réduire les problèmes de délamination [19].

Figure 6-7: Schéma du Principe d'aiguilletage [20]

Figure 6-8: Aiguilletage d’un non tissé

Principe d'aiguilletage [21] (à gauche) et image MEB de la surface d'un non tissé en viscose consolidé par aiguilletage mécanique [22] (à droite)

Une deuxième technique mécanique est l’aiguilletage hydraulique ou l’hydroliage. Comme présenté dans la Figure 6-9, le voile de fibres est compacté entre une grille et des bandes de compression et passe sur des cylindres perforés en dépression afin d’éliminer l’excès d’eau. Les fibres sont enchevêtrées par des jets d’eau fins à très haute pression, de 150 à 250 bars (voir Figure 6-10) [22]. Les jets d’eau sont envoyés sur la face endroit puis sur la face envers du voile des fibres. Les non tissés hydrauliquement consolidés possèdent un aspect doux, déformable et très résistant mécaniquement mais présentent une forte anisotropie [23].

Figure 6-9: Schéma du Principe de la consolidation hydraulique [22]

Figure 6-10: Hydroliage d’un non tissé

Principe de la consolidation hydraulique (à gauche) et image MEB de la surface d'un non tissé en cellulose obtenu par voie humide et consolidé par aiguilletage hydraulique

(à droite) [22]

- Chimique :

Cette méthode consiste en l’application d’un agent liant à l’état liquide au voile de fibres (voir Figure 6-11). Cet agent liant est généralement utilisé de manière liquide mais il peut être sous forme d’adhésifs en poudre, de mousses ou de solvants organiques. L’application du liant peut être réalisée par pulvérisation à travers des buses, par un bain d’imprégnation ou par enduction. Avec l’imprégnation par bain le non tissé obtenu est peu poreux avec une colle uniformément répartie mais en utilisant la pulvérisation, la répartition de la colle est moins uniforme ce qui entraîne un non tissé poreux (voir Figure 6-12) [22]. Ensuite, une dernière étape de séchage est nécessaire pour compléter la consolidation. Dans le cas de poudre, l’adhésif est mélangé à la nappe de fibres puis fondu.

Figure 6-11: Schéma du principe de la consolidation chimique [20]

Figure 6-12: Image MEB de la surface d'un non tissé en cellulose obtenu par voie sèche et pulvérisation [22]

- Thermique :

Le liage thermique met à profit les propriétés thermoplastiques des fibres synthétiques, qui ont la capacité de créer une adhésion dans des conditions de température adaptées, pour assurer la cohésion du voile par échauffement. La consolidation consiste à chauffer le voile de fibres pour créer cette adhésion (Figure 6-13). Dans le cas où la thermo-fixation n’est pas effectuée directement sur la fibre constituante, il est commun d’utiliser une fibre possédant une température de fusion inférieure et de l’introduire dès la constitution du voile ou d’utiliser une fibre bi-composante. La chaleur nécessaire au thermo-liage peut être apportée par un four à air chaud au flux contrôlé, dans le cas d’un voile nécessitant un point de fusion peu élevé, voir par calandrage qui permet par l’ajout de pression afin d’obtenir des produits moins volumineux.

Figure 6-13: Schéma du principe de la consolidation thermique [20]

Figure 6-14: Image MEB de la surface d’un non tissé en cellulose obtenu par voie sèche et consolidé thermiquement (à gauche) et par thermofusion (à droite) [22]