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4 Coagulation et procédé

1.3 Les techniques basées sur la diffusion de la lumière

1.3.1 Les techniques statiques (SLS)

Dans le cas d’une mesure par SLS, un faisceau laser de fréquence ω (et donc de lon- gueur d’onde λ connue) va impacter la suspension étudiée. Ces appareils permettent de remonter à une distribution de tailles à partir de la répartition de l’intensité diffusée à différents angles, par le biais de la théorie de Mie. Du fait de sa complexité, cette théorie

ne sera pas exprimée en détail ici, cependant son principe est décrit. Plus de détails sont fournis dans la littérature (Hergert and Wriedt [2012]). En supposant les parti- cules sphériques et homogènes, Mie a proposé une résolution rigoureuse des équations de Maxwell décrivant la diffusion d’une onde électromagnétique - le faisceau lumineux incident - par une particule sphérique. Cette résolution nécessite les indices optiques introduits auparavant pour les matériaux et les milieux traversés par l’onde incidente (Annexe 1). La résolution de Mie est en théorie applicable pour une sphère de n’importe quelle taille, expliquant son utilisation pour des techniques de SLS, et la large gamme de tailles observable proposée par une telle technique. La Figure 27 montre de manière qualitative la diffusion lumineuse d’une sphère en fonction de sa taille par rapport à la longueur d’onde du faisceau incident telle que prédite par la théorie de Mie. Cette diffu- sion génère une figure de diffraction avec extrema locaux, dont un maximum d’intensité dans la direction du faisceau incident.

Figure 27 – Représentation de la diffusion lumineuse prédite par la théorie de Mie Bien qu’approximative, cette dernière nous permet de constater deux phénomènes essentiels. Le premier est la dépendance angulaire de la diffusion : une particule va diffuser la lumière à 360°, mais à intensité différente selon l’angle. La théorie de Mie permet de prendre en compte avec succès cette dépendance, comme le montre la Figure 28, comparant les prédictions de la diffusion par la théorie de Mie avec les résultats obtenus expérimentalement par photométrie avec un latex de diamètre moyen 1,19 µm.

1.3 Les techniques basées sur la diffusion de la lumière

Figure 28 – Comparaison de l’évolution théorique et expérimentale de la diffusion à 360° d’une particule de polystyrène de diamètre 1,19 µm (Marshall et al. [1976])

La deuxième information importante est la grande dépendance de l’intensité de la lumière diffusée avec la taille de la particule. Chaque particule va donc avoir une "em- preinte" particulière. La connaissance de cette empreinte par l’acquisition de données à différents angles va permettre de remonter à une taille - ou distribution de tailles - grâce à cette théorie.

Lorsque la taille des particules est très petite devant la longueur d’onde du faisceau incident (dpart < 10λ), on tombe dans le cadre de la diffusion dite de Rayleigh, où le

faisceau est diffusé par les particules sans phénomène de diffraction (pas d’extrema d’intensité marqués) : il s’agit du 1er cas présenté Figure 27. Bien que la théorie de Rayleigh représente un cas particulier de la théorie de Mie, il est intéressant de noter qu’historiquement, cette dernière a été découverte plus récemment (1908) que celle de Raileygh (1871).

En pratique, un appareil de SLS se compose d’un laser (voire deux) et d’une multi- tude de détecteurs placés à différents angles afin de pouvoir capter l’intensité en fonction de l’angle de diffusion et ainsi reconstituer la figure de diffraction induite par la diffusion du faisceau incident par les particules. Le logiciel associé à l’appareil de mesure - le gra- nulomètre laser - calcule ensuite une distribution volumique de tailles. Ce calcul repose sur les théories évoquées précédemment, qui permettent d’exprimer l’intensité diffusée en fonction de la taille des particules et de paramètres optiques tels que les indices de réfraction et d’absorption des particules et du solvant. La gamme de tailles couverte par ce type de dispositif est large : de quelques dizaines de nm au mm. Cependant, ces techniques sont très sensibles aux indices de réfraction et d’absorption des matériaux utilisés, ce qui peut poser des difficultés quand ces données ne sont pas ou que partiel-

lement connues. Une information sur la morphologie des agrégats peut être extraite des mesures en SLS par la détermination de la dimension fractale Df.

1.3.1.2 Introduction à la dimension fractale Df

La notion de dimension, ambigüe, possède plusieurs définitions :

1. Le nombre de coordonnées utilisées pour placer un point dans l’espace (la di- mension topologique). Dans ce cas, une surface plane est un espace de dimension 2 ;

2. On peut aussi définir la dimension d’un espace à partir des propriétés géomé- triques des objets qui le constituent (Botet [2001]). Cette définition permet l’obtention de dimensions non entières.

L’utilisation de la seconde définition permet d’introduire une distinction entre la dimen- sion de l’objet (par exemple 2,7) et celle de l’espace dans lequel cet objet évolue (3). A noter qu’il est donc possible d’obtenir des objets de dimension 2 sans qu’ils appartiennent à un plan.

En 1975, Mandelbrot [1975] a introduit la notion de fractale, objet présentant la propriété d’autosimilarité. Les éléments primaires constitutifs d’une fractale s’agencent en un motif, qui se répète quelle que soit l’échelle d’observation. La Figure 29 propose une représentation schématique de cette notion.

Figure 29 – Autosimilarité d’un objet fractal (Jullien [1986])

Il est désormais fréquent de considérer les agrégats comme des structures fractales. Ces derniers peuvent alors être caractérisées par la dimension fractale en masse Df. Cette dimension va permettre de relier la masse m d’un agrégat à son rayon

1.3 Les techniques basées sur la diffusion de la lumière m mpart = npart = k.  R a Df (101) Cette dimension peut varier entre l’unité (pour un assemblage linéaire de particules primaires) et 3 (pour une sphère). L’intérêt de cette grandeur est de pouvoir s’affranchir de la conventionnelle hypothèse de sphéricité au profit d’une dimension plus exacte.

Intéressons-nous désormais à l’influence du mécanisme de contact sur Df. On dis-

tingue deux cas limites permettant de modéliser l’agrégation :

1. Le modèle amas-amas (cluster-cluster) considérant le grossissement par ren- contre entre agrégats ;

2. Le modèle monomère-amas (particle-cluster), dans lequel les particules initiales vont venir se coller sur l’agrégat de référence et contribuer à son grossis- sement.

Bien que ces modèles sont avant tout des modèles de simulation, ils correspondent à une certaine réalité physique : l’homogénéité ou l’hétérogénéité des distributions de tailles d’agrégats. Outre le modèle, il est nécessaire de prendre en compte le mécanisme limi- tant l’agrégation. Lorsque les particules se déplacent aléatoirement, l’agrégation peut être limitée par le phénomène de diffusion (Diffusion-Limited Aggregation : DLA) ou la probabilité de collage des agrégats (Reaction-Limited Aggregation : RLA). Selon le phé- nomène limitant, la structure des agrégats va être amenée à différer. Dans le cas d’une agrégation limitée par la diffusion, le moindre contact d’une particule - ou d’un agrégat - avec les bords d’un autre agrégat va être efficace. Les structures résultantes seront alors relativement ouvertes, associées à des Df relativement faibles. Lorsque l’efficacité

de collision physico-chimique est inférieure à l’unité (RLA), les particules - ou agrégats - ont plus de chances de pénétrer dans la structure d’un autre agrégat avant de s’adhérer définitivement. A modèle identique, les valeurs de Df obtenues en régime DLA seront

en général plus faibles que celles obtenues en régime RLA. La Figure 30 présente des agrégats obtenus numériquement selon le modèle de collision et le phénomène limitant, avec la valeur de Df associée.

Figure 30 – Evolution de la structure d’un agrégat en fonction du modèle de collision (Phalippou and Kocon [2004])

Lorsque les particules vont entièrement suivre les lignes de courants et que les tra- jectoires des particules sont rectilignes, on obtient un autre régime, appelé balistique (ballistic collision). Dans ce cas, la littérature fournit aussi des ordres de grandeur de Df selon le modèle considéré (Warren et al. [1995], Zaccone et al. [2009]). Le Tableau

10 récapitule les ordres de grandeur théoriques de Df en fonction du type d’agrégation

considéré.

Tableau 10 – Valeur de la dimension fractale théorique en fonction de la nature des collisions

Diffusion-Limited Reaction-Limited Ballistic

Cluster - Cluster 1,8 2,1 1,9 - 2

Particle - Cluster 2,4 - 2,5 3 3

1.3.1.3 Diffusion de la lumière par un agrégat fractal

La diffusion de lumière par un agrégat, par nature plus ou moins poreux et sphérique, est plus compliquée à modéliser que dans le cas de simples sphères. Cependant, sous certaines conditions, des approximations sont envisageables. La plus employée dans le cas de l’étude d’agrégation est l’approximation de Raileigh-Gans-Debye (Sorensen [2001], Gregory [2009]). On appelle q le vecteur de diffusion, défini comme tel :

1.3 Les techniques basées sur la diffusion de la lumière

q = 4.π λ .sin(

θ

2) (102)

Où θ est l’angle de diffusion, et λ la longueur d’onde du faisceau incident. Lorsque les particules initiales (de rayon a) peuvent être considérées comme des diffuseurs de Rayleigh (2.a < λ), la structure de l’agrégat est prise en compte en ajoutant un facteur de structure (S(q)) à l’expression de l’intensité diffusée par une particule primaire sphérique (P (q)), soit :

I(q) ∝ S(q).P (q) (103)

En traçant I(q) en fonction de q (en échelle Log-Log), il est possible de distinguer 3 régions (Figure 31) :

1. Lorsque q−1 >‌> 2.R (R étant le rayon de l’agrégat considéré), la diffusion va

essentiellement dépendre du volume au carré des particules constituant l’agrégat. L’intensité de lumière diffusée est donc indépendante de la forme de l’agrégat. 2. Lorsque q−1<‌< 2.a, l’intensité de la lumière diffusée ne sera pas influencée par la

structure de l’agrégat ; la lumière diffusée par un agrégat composé de n particules sera égale à la lumière diffusée par n particules initiales

3. Pour des valeurs intermédiaires de q−1, on aura I(q) ∝ S(q) ∝ q−Df. Dans

cette région, il est possible d’extraire des informations sur la dimension fractale des agrégats.

L’utilisation de données brutes fournies par un appareil comme le Master- sizer 2000 permet donc d’obtenir des valeurs de Df lorsque 2.R<‌<q−1<‌<2.a.