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Chapitre III – Méthodologie Étude Archéométrique

I. Étude macroscopique

2. Techniques non-invasives

La phase d’observation précédemment décrite, est nécessaire pour le bon déroulement de la suite de l’étude et plus particulièrement pour la mise en application du protocole d’examens et d’analyses des cercueils. Ce protocole se veut multi-échelle et multi-spectral, et a été mis en place au sein du laboratoire du C2RMF dans le cadre particulier de ce projet. Il a été appliqué de façon systématique sur chacun des objets étudiés. Il peut être divisé en deux grandes étapes distinctes.

La première, non-invasive et non-destructive comprend tout d’abord la campagne d’imageries multi-spectrales ainsi que les analyses in-situ.

1) Les techniques d’imagerie

La radiographie des rayons X (RX) révèle des indices sur les techniques de fabrication des œuvres et sur leur état de conservation. Un faisceau de RX illumine l’œuvre et les rayons qui parviennent à traverser l’objet sont enregistrés par un détecteur placé à l’arrière de l’objet étudié. Le faisceau de RX incident, généré par un tube RX (Isovolt, fenêtre de bérylium, 165 kV- 19 mA) est atténué de manière spécifique en fonction des matériaux constituant l’objet examiné. Cette absorption des RX par la matière dépend de leurs longueurs d’ondes, du numéro atomique Z, de la masse volumique et des épaisseurs des matériaux rencontrés. Le détecteur de RX utilisé peut être un film argentique ou un capteur numérique. Les premiers disposent d’un large panel de sensibilité, de résolution et de taille permettant de s’adapter aux différentes caractéristiques des objets étudiés.

Le choix de la tension détermine l’énergie et donc le pouvoir de pénétration des photons émis, dans la matière. Elle permet d’obtenir une densité optique ainsi que des nuances de gris (contraste) adaptées à une bonne lecture du cliché. L’intensité du courant dans le tube de RX et le temps d’exposition ont une influence sur le noircissement et le contraste du cliché. La distance entre la source et le détecteur est déterminée en fonction des dimensions de l’objet étudié (taille et volume). Plus ces critères sont élevés, plus la distance sera importante afin de minimiser le flou géométrique et les déformations. Enfin, afin de garantir la meilleure netteté du cliché, le détecteur doit être le plus en contact possible avec la zone intéressante de l’objet examiné. Les différents paramètres dépendent de l’objet et varient à chaque cliché. Pour les cercueils, la tension est comprise entre 35 et 80 kV, l’intensité du tube entre 8 et 10 mA et le temps d’exposition entre 3 et 4 min. La distance entre la source et le détecteur est de 3 m pour chacun d’entre eux et les films utilisés sont des Kodak INDUSTREX AA400.

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La photographie en lumière visible (Vis), restitue l’image de l’œuvre telle qu’elle apparaît à la

lumière du jour. On utilise un appareil photographique muni d’un détecteur Si-CCD. La sensibilité du détecteur Si-CCD va de 300 à 1000 nm, c'est-à-dire de l’ultraviolet au proche infrarouge en passant par le domaine de la lumière visible. Dans le cas présent, on utilise un filtre qui coupe les ultraviolets et le proche infrarouge de manière à enregistrer uniquement le domaine de la lumière visible. Cette image sert aussi à la production de l’image composite infrarouge en fausses couleurs (IRFC) et de l’image en lumière visible corrigée (Vis corrigée).

L’image en lumière visible corrigée (Vis corrigée)est produite à partir de la photographie Vis.

L’œuvre et la reproduction de la photographie Vis sont examinées sous un illuminant D65 (référence standardisée pour l’éclairage dans l’industrie graphique). L’image Vis est modifiée par une correction colorimétrique avec le logiciel Photoshop jusqu’à ce que la reproduction de cette image soit la plus ressemblante possible à l’œuvre originale. Cette nouvelle image corrigée est utilisée comme constat d’état de l’apparence de l’œuvre telle que l’œil humain la perçoit. L’image obtenue est aussi utilisée pour localiser les analyses ponctuelles effectuées avec les techniques spectroscopiques.

La photographie dans le proche infrarouge (NIR) consiste à prendre une photographie dans le

spectre du proche infrarouge en illuminant l’objet avec un éclairage émettant dans l’infrarouge. On utilise un appareil photographique muni d’un détecteur Si-CCD (300-1000 nm) avec un filtre qui coupe les ultraviolets et le spectre de la lumière visible. Seules les radiations NIR réfléchies sont enregistrées par l’appareil. On obtient une image en nuance de gris où l’on peut observer et distinguer les matériaux qui absorbent les infrarouges (comme le noir de carbone qui apparaitra noir) des matériaux qui réfléchissent les infrarouges (comme le blanc de plomb). Cette image est aussi utilisée pour produire l’image composite infrarouge en fausses couleurs (IRFC).

L’imagerie par infrarouge en fausses couleurs (IRFC) est une technique de traitement d’image

qui fusionne la photographie en lumière visible (Vis) avec l’image NIR. L’opération consiste à créer une image composite en utilisant les canaux Rouge et Vert d'une image Vis et le canal Rouge de l’image NIR. Les fausses couleurs obtenues sont ensuite comparées à une base de données pour distinguer des matériaux sur un objet et éventuellement émettre une hypothèse d’identification.

La technique de fluorescence visible induite par les ultraviolets (UVF)consiste à prendre une

photographie dans le spectre visible en illuminant l’objet avec une lumière UV. On enregistre alors l’effet de fluorescence induite émise par l’objet dans le spectre de la lumière visible. Les matériaux organiques récents ont tendance à être plus fluorescents que les matériaux anciens. D’autre part, certains matériaux (tels que les colles, les vernis et certains matériaux colorants) émettent des fluorescences caractéristiques indépendamment de leur ancienneté.

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La technique d’imagerie par luminescence infrarouge (LIR) consiste à prendre une

photographie dans le spectre du proche infrarouge en éclairant une œuvre avec une lampe LED émettant dans le rouge (610 nm). On utilise un appareil photographique muni d’un détecteur Si-CCD (300-1000 nm) avec un filtre qui coupe les ultraviolets et le spectre de la lumière visible. On obtient une image en nuance de gris où l’on peut identifier en blanc la présence de cuprorivaïte (CaCuSi4O10) qui possède la propriété caractéristique d’émettre une luminescence dans l’infrarouge (910 nm) quand elle est excitée à 610 nm.

La campagne d’imagerie permet d’obtenir des informations sur la nature de certains matériaux ainsi que leur répartition à l’échelle de l’objet. Il s’agit d’un support complémentaire aux fiches d’observations décrites précédemment. Cela nous permet de déterminer les zones d’intérêts ou a contrario les zones à éviter pour les analyses in-situ ou même pour les prélèvements. La radiographie RX renseigne sur l’état de la structure, l’imagerie UV révèle la fluorescence de certains matériaux généralement organiques ou de restauration, et celles NIR et LIR permettent de mettre en évidence des matériaux spécifiques.

2) Les analyses in-situ

De nombreux équipements d’analyses portatifs et in-situ sont présents au C2RMF, mais leur utilisation n’est pas toujours systématique. Les méthodes d’analyses qui ont été choisies dans un premier temps sont la spectrométrie de fluorescence de rayons X (XRF) et la spectroscopie de réflectance optique dans le domaine visible (FORS-Vis).

La spectrométrie de réflectance dans le visible (FORS-Vis)permet la mesure physique de la couleur des matériaux par l’obtention d’un spectre de réflexion dans le visible (400-800 nm). Comparé à une base de donnée, le spectre enregistré peut révéler la présence d’un matériel spécifique (comme un pigment ou un colorant par exemple).

Le spectromètre Laser2000 a été employé, équipé d’un illuminant D65 sur une gamme spectrale compris entre 400 et 800 nm. La taille du spot est de 2mm pour un angle de travail de 45° par rapport au support. Les acquisitions sont effectuées via le logiciel SpectraWiz après une calibration sur Halon (blanc) et noir pour des durées de 200 ms.

La spectroscopie de fluorescence de rayons X (XRF) consiste à détecter les rayons X émis par le

matériau sous l’effet de son interaction avec un faisceau de rayons X. Cette analyse permet la détection de la plupart des éléments chimiques composant le matériau. Lorsqu'elle est utilisée sans flux d'hélium, cette technique a le potentiel de détecter les éléments plus lourds que le magnésium (Mg). D’autre part, ces éléments chimiques sont détectés uniquement si leur présence est supérieure à la limite de détection de l’appareil.

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Il s’agit d’une technique classique pour l'identification des composés inorganiques tels que les pigments. Bien que ce type d’analyse ne nécessitent pas de contact, il est important de garder à l’esprit que le faisceau de rayons X pénètre en réalité une épaisseur de matière plus importante que la seule couche picturale superficielle. Ainsi, le résultat obtenu ne peut que difficilement être corrélé à une zone précise de la stratigraphie. Aussi, pour pallier cet aspect technique, des analyses des couches sous-jacentes des couches de polychromie sont effectuées lorsque ces dernières sont mises à fleur, afin d’avoir une meilleure compréhension de la stratigraphie couche à couche. Ceci permet de déterminer la composition de ces couches et donc leur éventuelle contribution lors de l’analyse des couches picturales de surface. Pour des questions de représentativité plusieurs zones d’une même couleur sont étudiées sur chaque partie d’intérêt de l’ensemble funéraire (extérieur et intérieur de cuve, couvercle, etc.). Ces zones d’intérêt sont déterminées grâce aux observations préliminaires à l’œil nu et aux campagnes d’imagerie sous différents rayonnements. Les parties restaurées sont ainsi évitées. Ces techniques nécessitent une surface d’analyse relativement conséquente (spot de 3 mm de diamètre) d’où le choix d’analyser de larges zones de remplis, et d’éviter les tracés fins ne permettant pas d’obtenir un spectre suffisamment représentatif. Le caractère non-invasif et non- destructif de cette technique autorise une multiplication des mesures et donc la possibilité de vérifier l’homogénéité des compositions des matériaux et cela pour chaque couleur au niveau de chaque partie d’étude de l’objet (cuve, couvercle, etc.). La spectroscopie XRF permet donc d’obtenir des informations élémentaires à l’échelle de l’objet.

Deux équipements portables ont été utilisés pour réaliser les analyses XRF in-situ : le Niton XL3t et l’Elio.

Le premier possède un tube de rayons X avec une anode d’argent (Thermo Fisher Scientific) couplé à un détecteur semi-conducteur à haute performances. Le logiciel d’acquisition est le NITON Data Transfer (NDT) PC Software. Les acquisitions sont effectuées sur une durée de 180 s pour une tension de 50 kV et une intensité de 40 µA. L’analyse est faite sans contact, la distance entre l’objet et l’appareil étant de l’ordre de 5 mm.

Dans le cas de l’équipement Elio, le tube de rayons X de 4 W contient une anode de rhodium (Newton Scientific) et est couplé à un détecteur SDD Amptek. Le logiciel d’acquisition est le XG Elio Software. Les acquisitions sont effectuées sur une durée de 180 s pour une tension de 40 kV et une intensité de 100 µA. L’analyse est faite sans contact, la distance entre l’objet et l’appareil étant de l’ordre de 15 mm.

Les données obtenues avec les deux appareils XRF ont été traitées à l’aide du logiciel PyMCA (Solé et al., 2007).

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