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Les différentes techniques « d’impression » des ephemera de la

impression.

2. Les supports des ephemera envoyés par avion (Classeur R4 « Tracts envoyés par avions »)

Les supports des ephemera envoyés par avion, sont beaucoup moins diversifiés que les supports de la Résistance intérieure analysés précédemment. En effet, l’intégralité de ces documents du corpus est produite sur du papier.

Après cette étude matérielle des documents de la Résistance du corpus on constate que le terme d’ephemera, en raison de la très grande diversité des documents, est bien adapté pour qualifier ces productions de la Résistance. En effet, il rend compte des différents types de documents (des tracts et papillons aux bulletins et affiches), des différents formats et est adapté à tous les supports, papier ou non. Un ephemera peut prendre différentes formes, il est impossible de définir un critère unique à ce niveau-là.

V. I

MPRESSION

Après l’étude du format, de la nature des documents et des supports, l’analyse formelle des ephemera du fonds Lachassagne passe par des observations de l’impression de ces documents. Il existe en effet plusieurs techniques différentes pour produire et reproduire des ephemera. Après un rappel de ces différentes techniques, artisanales ou plus professionnelles, une analyse précise des moyens d’impression utilisés dans le corpus sera réalisée.

A. Les différentes techniques « d’impression » des

ephemera de la Résistance

Des plus artisanales aux plus perfectionnées, les techniques pour repr oduire les différents ephemera de la Résistance sont nombreuses. Les techniques utilisées pour les tracts, les papillons et autres productions éphémères de la Résistance sont les mêmes que pour les journaux clandestins. Il existe cinq techniques pour produire

des ephemera : la copie manuscrite, l’utilisation de tampons et de pochoirs, la dactylographie, la ronéotype et l’imprimerie. Il semble essentiel de définir ces différentes techniques55.

1. Les documents manuscrits

Le premier moyen de production des ephemera est la copie manuscrite. Il s’agit de la technique la plus « artisanale »56 mais aussi, du même coup, la plus accessible.

Elle ne demande aucun moyen particulier, il suffit juste de posséder de quoi écrire et d’un support sur lequel l’écrire. La production d’ephemera manuscrits est ainsi très simple mais peu efficace en termes de diffusion puisque le nombre de documents produits reste forcément limité.

2. L’utilisation de tampons ou de pochoirs

Le second moyen de production des ephemera est l’utilisation de tampons et de pochoirs. Cette méthode est surtout utilisée pour réaliser des papillons puisqu’elle ne permet pas de réaliser de longs textes. En effet, elle sert avant tout à faire des illustrations accompagnées éventuellement d’un court message. Les pochoirs et les tampons étaient réalisés artisanalement par les résistants. L’utilisation de pochoirs est plus facilement accessible puisque la réalisation du pochoir, qui servira ensuite à créer plusieurs documents, demande moins de compétences techniques que la réalisation du tampon qui suppose une gravure à l’envers par rapport au résultat souhaité. Les tampons et les pochoirs pouvaient également servir à créer simplement des illustrations sur un document réalisé avec une autre méthode de production. Les pochoirs et les tampons permettent de réaliser artisanalement plusieurs documents mais la diffusion reste tout de même limitée.

55 Pour chaque technique un exemple du corpus est donné, voir Annexe n°3.

56 Les chercheurs parlent souvent de phase « artisanale » pour évoquer les techniques qui permettent de reproduire

Photo 4 : Essais de différents tampons/pochoirs sur une feuille (R2, n°313) 3. Les documents dactylographiés

Le troisième moyen de production des ephemera est la dactylographie. Il s’agit également d’une méthode dite « artisanale ». Pour utiliser cette méthode, il faut avoir à disposition une machine à écrire et du papier. Marie-Cécile Bouju, dans son article consacré aux techniques de production des journaux clandestins57, rappelle

que la machine à écrire fait partie du quotidien des Français depuis la Belle Époque. Le secteur tertiaire s’est en effet développé et les services administratifs se sont modernisés en s’équipant de machines à écrire. Les résistants mettent ainsi à leur service un outil de bureau très utilisé à leur époque. Ils en détournent la fonction première pour en faire un moyen de produire les journaux clandestins mais aussi les ephemera. La diffusion des documents dactylographiés est cependant relativement limitée puisqu’ils doivent être tapés à la machine un à un.

4. Les documents ronéotypés

Le quatrième moyen de production, ou plutôt dans ce cas de copie, des ephemera est la ronéotype. Les résistants détournent ainsi un autre objet de bureau : la ronéo. Il s’agit d’une machine à polycopier à l’alcool. Cette méthode reste encore « artisanale ». Régis Le Mer58 explique le procédé : « Trois feuilles sont

57 BOUJU Marie-Cécile, Manuscrite, ronéotypée, imprimée… : la presse clandestine en France pendant la

Seconde Guerre mondiale, p.7 (disponible en ligne : <http://histoire-sociale.univ-paris1.fr/Collo/17- Presse%20cland%20colloque%20paris.pdf>).

58 LE MER Régis, Imprimeurs clandestins à Lyon et aux alentours (1940 -1944). Lyon, Mémoire active, 2014, p.

superposées : une feuille blanche classique, une feuille paraffinée et une feuille de papier carbone ; la feuille paraffinée (appelée parfois stencil ou pochoir) reçoit le texte en négatif grâce au papier carbone. Et l’encre de ce négatif va servir, par dilution, à copier à l’identique d’autres feuilles, en la passant dans la ronéo. La dilution donne souvent une impression violette. » Cette technique permet d’imprimer entre 100 et 200 feuilles à partir d’une même feuille paraffinée. La ronéo permet ainsi de copier les ephemera et accroit leur diffusion.

La ronéo a eu beaucoup de succès pour la reproduction des journaux clandestins. Les autorités ont alors interdit en octobre 1940 la vente libre des papiers dits « duplicateurs » et des appareils « type ronéo ». Les résistants n’ont pas arrêté pour autant de se servir de cet appareil, ils ont alors souvent volées les ronéos des services administratifs.

5. Les documents imprimés

Enfin, le dernier moyen de production des ephemera est l’imprimerie. Il s’agit de la technique la plus efficace en termes de diffusion puisqu’elle permet de faire de nombreux exemplaires mais c’est aussi la technique la plus difficile d’accès. Contrairement aux méthodes « artisanales » qui demandent peu de technique, l’imprimerie en revanche demande des connaissances techniques spécifiques. Les résistants adoptent deux stratégies pour imprimer leurs productions clandestines.

D’une part, ils font appel aux imprimeurs professionnels. Nombreux sont les imprimeurs qui ont accepté d’aider les résistants. De nombreuses imprimeries ont dû fermer à cause de l’Occupation. Il ne reste alors que les imprimeries de la presse autorisées et les imprimeries de Labeur59. Ce sont ces dernières qui ont principalement aidé les résistants. Une très grande solidarité existe entre les imprimeurs de la Résistance ce qui a permis l’efficacité de ce moyen de production. Les imprimeurs aident les résistants bien souvent au péril de leur vie. Imprimer un des documents clandestins est une tâche risquée, dangereuse et particulièrement surveillée par les autorités à la fois occupantes et collaboratrices. Les risqu es encourus sont très lourds et les répressions souvent synonymes de mort. Le 30 septembre 1941, le code des otages annonce l’arrestation prioritaire de ceux qui

59 : Définitions (cf. Larousse, en ligne : <http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais>). Imprimerie de

labeur : « imprimerie où l’on fabrique des labeurs, par opposition à l’imprimerie de presse ». Labeur : « ouvrage typographique de longue haleine, par opposition aux bilboquets ou travaux de ville ».

auront « collaboré à la distribution de tracts ». L’ordonnance allemande du 18 décembre indique que « quiconque aura confectionné ou distribué des tracts sans y être autorisé, sera puni de la peine de travaux forcés ou de celle de l’emprisonnement et dans les cas particulièrement graves, de la peine de mort ». Les imprimeurs résistants sont les parmi les plus touchés. Nombreux sont les imprimeurs qui ont perdu la vie pour leurs activités clandestines. Régis Le Mer60 estime « qu’avec les opérateurs radio, les imprimeurs sont parmi ceux qui ont payé le plus lourd tribu à la Résistance, jusqu’à la Libération ».

D’autre part, certains mouvements comme Combat ou Défense de la France possèdent leurs propres imprimeries. Ils impriment alors leurs propres journaux et leurs propres ephemera mais aussi parfois des productions d’autres mouvements de résistance.