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Techniques d‘électrophysiologie

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I. Etude in vitro

9. Techniques d‘électrophysiologie

Le xénope Xenopus laevis connu sous le nom de grenouille à griffe d‘Afrique du Sud est un amphibien de l‘ordre des anoures et membre de la famille des Pipidés (Figure 36). C‘est un animal aérobie mais totalement aquatique ne remontant à la surface de l'eau que pour respire.

Ces batraciens ont normalement une face dorsale de couleur foncée et tachetée et une peau riche en chromatophores qui peuvent changer en fonction des conditions environnementales. Leur taille est relativement importante, les mâles sont 30 % plus petits que les femelles (Goldin, 1992).

Les xénopes femelles sont élevées dans l‘animalerie de l‘Institut Pasteur –Tunis. Le xénope se satisfait d'un simple aquarium ou d'un bac dans lequel il vit en pleine eau. La contenance minimum d'un bac pour maintenir une quinzaine de femelles doit être de l'ordre de 50 litres. Chaque bac doit être recouvert d'un couvercle grillagé pour empêcher la fuite des animaux. L'eau d'élevage doit être dépourvue de chlore et la température maintenue à 22°C. Le nettoyage des bacs est réalisé de façon régulière.

L'alternance nycthémérale de l'éclairage sera assurée par une horloge avec une périodicité de 12 h/12 h. Les xénopes sont nourris deux fois par semaine avec du cœur et /ou du foie de bœuf ou de poulet, ils sont supplémentés de granulés vue leur régime qui est exclusivement en viande et pauvre en calcium et en vitamine D (Gurdon et al., 1971).

9.2. Les ovocytes de xénope

Les ovocytes de xénope sont prélevés à partir des lobes ovariens. Chez la femelle xénope, les ovaires représentent 15% du poids total de la grenouille pendant la reproduction et sont chacun constitués de 24 lobes (Lofts, 1974). Chaque lobe contient des centaines d‘ovocytes à tous les stades de développement (Figure 36).

Figure 36 : Les ovocytes de xénope. A. Ovocytes de xénope avant traitement à la collagénase. B. Représentation d’un ovocyte de xénope de stade V avant traitement à la collagénase (modifié d’après Bianchi, 2006). C. Ovocytes de xénope après traitement à la

Un ovocyte est entouré de plusieurs couches de cellules :

- Membrane vitelline : couche non cellulaire fibreuse qui donne sa rigidité à l'ovocyte

- Cellules folliculaires : couche de cellules qui ont de nombreuses connections avec l'ovocyte via des jonctions de type Gap (Browne et al., 1979), possèdent des canaux potassium endogènes et doivent donc être éliminées par un traitement à la collagénase.

Le développement des ovocytes se fait en six stades. En évoluant, ceux-ci changent de couleur et augmentent de taille. Dans la majorité des cas, le stade V est optimal pour les enregistrements électrophysiologiques. En effet, à ce stade, les ovocytes sont de grande taille et peuvent être facilement et délicatement pénétrés par les électrodes. Ils ont une taille de 1 à 1,2 mm avec les hémisphères animal et végétatif bien distincts. Le stade VI est caractérisé par l‘apparition d‘un croissant équatorial non pigmenté.

Les ovocytes de xénope ont été exploités dans la recherche en laboratoire et ce système devint vite très populaire pour l‘expression hétérologue et la caractérisation fonctionnelle des canaux ioniques, de récepteurs et de transporteurs clonés (Dascal, 1987 ; Sigel, 1990). Les ovocytes de xénope comportent plusieurs avantages par rapport aux lignées cellulaires pour l'expression hétérologue :

- Les xénopes sont facile à entretenir, n'exigent pas trop de place, ne coûtent pas très cher et permettent l'obtention de plusieurs centaines d'ovocytes par opération,

- Le diamètre des ovocytes est d'environ 1 mm, ce qui facilite leur manipulation et l'injection de substances,

- Les conductances endogènes sont relativement faibles en amplitude,

- Les ovocytes sont capables de traduire l'ARN ou l'ADN injecté mais également dans certains cas d'effectuer des modifications post-traductionnelles nécessaires au fonctionnement de la protéine (Sigel, 1990),

- La manipulation des ovocytes est faite à température ambiante, en milieu non stérile, et ils peuvent être maintenus près de 12 jours dans un milieu adéquat.

La xénope est anesthésiée dans un bain de solution de 2 L de Tricaïne (Ethyl 3- Aminobenzoate Methanesulfonate, Sigma) à 1,7g/ L pendant 45 min à. Une incision de 0,5 à 1 cm est réalisée en laparotomie (au niveau du flanc du xénope) et les sacs d‘ovocytes sont prélevés délicatement à l‘aide de pinces. L‘incision doit être recousue avec du fil résorbable stérile (Vicryl, 3.0) en réalisant des points serrés permettant de maintenir la plaie hermétiquement fermée. La xénope est ensuite placée sous l'eau pour enlever la tricaïne. Il est inutile d‘appliquer des antibiotiques sur la plaie car la peau du xénope secrète des peptides ayant des activités antimicrobiennes à large spectre (Soravia et al., 1988). Les sacs ovariens prélevés sont lavés et séparés en paquets d‘une centaine d‘ovocytes dans une Solution de Barth modifiée avec calcium (MBS + Ca2+) constitué de 88 mM de NaCl, 1 mM de KCl, 0,41 mM de MgCl2, 2,4 mM de CaCl2, 2,4 nM de NaHCO3, 0,33 mM de Ca (NO3)2 , 0,82 mM de

MgSO4 et de 10 mM d‘Hepes (pH= 7,5 ajusté avec du NaOH 5N). Les ovocytes sont ensuite

lavés avec une solution de Barth modifiée sans calcium (MBS-Ca2+) constituée de 88 mM de NaCl, 1 mM de KCl, 0,41 mM de MgCl2, 2,4 nM de NaHCO3, 0,82 mM de MgSO4 et de 10

mM d‘Hepes (pH= 7,5 ajusté avec du NaOH 5N). Une défolliculation enzymatique des ovocytes en agitation douce pendant 45 à 50 min (collagénase A et B (1 mg/mL) permet d‘enlever la couche de cellules folliculaires qui entourent les ovocytes. Cette étape est cruciale, car les cellules folliculaires constituent une barrière mécanique gênant les nano- injections de matériels génétique et l‘empalement des microélectrodes d‘enregistrement. De plus, elles ralentissent le retour à un potentiel de membrane stable après la dépolarisation induite par l‘empalement (Kusano et al., 1982). Par la suite, les ovocytes sont lavés trois fois par la solution MBS. Pour dénuder les ovocytes, une défolliculation manuelle est aussi nécessaire, elle se fait sous loupe binoculaire et à l‘aide de deux pinces fines.

Les meilleurs ovocytes seront alors transférés dans des solutions d‘incubation de type MBS+Ca2+ et ils seront incubés pendant quelques heures à 19° - 20°C, puis ils seront transférés dans une solution MBS-Ca2+ avant d‘entamer les enregistrements.

9.4. Transcription in vitro des ADN clonés

Avant leur expression dans les ovocytes de xénope, les différents ADN clonés ont été transcrits en ARN à l‘aide du kit T7 mMESSAGE mMACHINE® (Ambion®, Austin, Texas, USA). Les plasmides servant de matrice à la réaction de transcription ont été précédemment linéarisés avec une endonucléase : SpeI (Promega) pour les sous-unités auxiliaires clonées dans le vecteur pGEM et NotI (Invitrogen) pour les sous-unités principales clonés dans pGH19 (Tan et al., 2002). La réaction de transcription a été faite à 37°C suivant les

instructions du fournisseur. Les ARN ont ensuite été purifiés avec le kit MEGAclearTM (Ambion®) puis conservés à -80°C.

9.5. Injection des ovocytes

Les injections d‘ARN dans l‘ovocyte ont été réalisées grâce à un nano-injecteur automatique Nanoject II (Drummond Scientific Company, Broomall, Pennsylvanie, USA). Elles se font grâce à des capillaires (Drummond) étirés avec une étireuse (Narashige, Japon). Pour l‘expression des canaux Kv3.1, l‘injection d‘un mélange de sous-unité principale et de sous- unité auxiliaire dans un rapport 1:1, a été faite dans le cytoplasme de l‘ovocyte. Le volume injecté variait de 8,2 nL à 50,6 nL d‘ARN pour une concentration allant de 0,2 à 0,5 µg/µL. Les quantités injectées étaient donc de l‘ordre de 2 à 35 ng d‘ARN. Après injection, les ovocytes ont été incubés à 4°C pendant 15 min, puis ils ont été placés dans du milieu d'incubation (SOS normal supplémenté de gentamycine 50 mM, pénicilline/streptomycine 100 mM et pyruvate de sodium 2,5 mM (Sigma-Aldricht)). L‘incubation moyenne pour les différentes combinaisons de sous-unités principales et sous-unités auxiliaires était de 2-3 jours à 18°C.

9.6. Mesure du courant Kv3.1 par la technique de la double microélectrode en potentiel imposé

La technique de la double micro-électrode intracellulaire est utilisée pour mesurer les flux ioniques traversant les canaux ioniques exprimés dans les ovocytes de xénopes. Nous avons utilisé cette technique afin de caractériser les effets du 7KC (25 µM), 24S-OHC (25 µM) et C24:0 (20 µM) sur les courants Kv3.1 .

Le stand de mesures électrophysiologiques est protégé par une cage Faraday, pour éviter le maximum de bruits de fond externes. Sous loupe binoculaire, l‘ovocyte est placé dans une encoche au fond d‘une cuve en plexiglas immergée dans une solution qui diffère selon le type d‘enregistrement est qui est appliquée en perfusion grâce à un distributeur de solution à électrovalves (Biologic).

L‘ovocyte est empalé par deux micropipettes préparées à l‘aide d‘une étireuse programmable (Sutter Instruments), une électrode d‘enregistrement est connectée à l‘entrée de l‘amplificateur (Geneclamp500B – Axon Instruments) et l‘autre électrode d‘injection du courant est connectée à la sortie de l‘amplificateur différentiel. La résistance externe des micropipettes est mesurée avant tout enregistrement et leurs résistances doivent respecter l‘intervalle 1-2 MΩ (Figure 35).

Figure 37: Un ovocyte de Xenopus laevis empalé par deux microélectrodes

La microélectrode est une micropipette remplie d‘une solution KCl à 3 M très conductrice, dans laquelle est plongé un fil d‘argent chloruré. Cette microélectrode est connectée à l‘amplificateur (Geneclamp 500 B, Axon Instruments) qui est à son tour relié à un oscilloscope analogique / numérique (Hameg) qui permet de visualiser les réponses électriques de la cellule. Pour stocker et analyser ces activités électriques, un logiciel pClamp8 (Axon Instrument) gère tout le stand via une interface (Digitata 1440A, Axon Instruments) reliée à une carte d‘acquisition installée dans l‘unité centrale de l‘ordinateur (Figure 37).

Pour la mesure du courant Kv3.1, la conductance de cellules entières (G) a été calculée selon l'équation suivante:

G = Imax / (V-EK)

où I représsente le courant stationnaire mesuré à la fin de chaque étape de dépolarisation, V le potentiel et EK le potentiel d'inversion du potassium calculé à -98 mV.

Les valeurs de conductivité ont été exprimées en fonction du potentiel de la membrane et étaient adaptées à une seule distribution de Boltzmann de la forme suivante:

y = max / [1 + exp (V1 / 2 - V) / k]

où V représente le potentiel d'essai, V1 / 2 le potentiel de demi-activation, et k le facteur de pente (Wickenden et al., 2008).

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