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4-1- La biopsie transrectale écho-guidée : 4-1-1- Historique :

Le diagnostic du cancer de la prostate a évolué depuis 1963 date à laquelle Takahaschi et al. étaient les premiers à utiliser l’échographie transrectale pour explorer la prostate. Depuis lors, la technique de la biopsie prostatique s’est améliorée réduisant du même coup le nombre de complications telles les infections, la gêne et la douleur secondaire 93.

En 1981, HOLM et al. avaient rapporté la technique de biopsie transperinéale écho-guidée de la prostate qui était cependant encore imprécise, surtout pour les petites tumeurs du fait de l’éloignement de l’aiguille et de la sonde 94.

En 1989, la supériorité de cette approche par rapport aux biopsies digito-guidées avait été prouvée, et cette technique était devenue le gold standard 95.

En 1990, TORP-PEDERSON et al. avaient présenté les résultats de la biopsie prostatique écho-guidée transrectale utilisant une aiguille 18 gauge chargée dans un dispositif automatique de biopsie et rendant ainsi la biopsie plus confortable pour le patient et pour le chirurgien 93.

L’utilisation de l’échographie (US) a révolutionné la biopsie, le guidage n’était plus approximatif par le toucher. Elle permet à l’opérateur de distinguer les différentes zones de la glande et un repérage en trois dimensions.

4-1-2- Modalité de réalisation de la biopsie :

 Consultation pré biopsique : - Information du patient :

Une fois l’indication de biopsie de la prostate est posée, on informe le patient sur le déroulement du geste, les suites attendues et les complications potentielles 97.

- Interrogatoire et examen clinique :

Ils recherchent les facteurs de risque, les complications ou les difficultés pouvant être rencontrées durant la procédure (chirurgie du canal anal, sténose). Ils aident à éliminer ou minimiser les risques allergiques, hémorragiques et infectieux.

- Prévention du risque allergique :

- Prévention du risque hémorragique :

Un interrogatoire ciblé est réalisé recherchant des antécédents hémorragiques, la prise d’un traitement anticoagulant ou antiagrégant plaquettaire. En l’absence de risque, il n’est pas recommandé de bilan particulier. S’il existe un risque ou que l’interrogatoire n’est pas réalisé de façon fiable, un bilan comportant numération des plaquettes, temps de Quick et temps de céphaline activé (TCA) est réalisé. Si le patient est sous traitement, il est nécessaire d’évaluer le risque de saignement si les biopsies sont réalisées sous traitement et du risque de thrombose si le traitement est arrêté.

- Prévention du risque infectieux

L’interrogatoire est ciblé sur l’existence de signes d’infection urinaire. Une bandelette urinaire est réalisée. Un examen cytobactériologique des urines (ECBU) peut être proposé.

L’interrogatoire recherche également la prise de fluoroquinolones dans les mois précédents ou d’allergie connue aux antibiotiques.

En cas de signes d’infection urinaire, de bandelette urinaire positive ou douteuse, d’interrogatoire impossible ou d’antécédent de prostatite dans les trois mois précédents, un ECBU est recommandé.

Les biopsies prostatiques sont réalisées sous une antibioprophylaxie par fluoroquinolones (ofloxacine 400 mg [98, 99]) ou ciprofloxacine 500 mg [98, 100,

101] en prise unique par voie orale 1 à 2 heures avant le geste. En cas d’allergie

aux fluoroquinolones, l’antibioprophylaxie est réalisée par une céphalosporine de troisième génération (ceftriaxone 1 g) par voie intraveineuse une heure avant le geste [98, 99].

La prévention de l’endocardite d’Osler n’est pas nécessaire [102].

 Préparation du patient: - Préparation cutanée :

Des mesures d’hygiène corporelle élémentaire s’imposent, comme tout patient qui rentre dans un secteur interventionnel. Le bénéfice d’une douche (cheveux compris) précédant la biopsie est nécessaire après préparation rectale.

Dans notre étude, aucun patient n’a bénéficié d’une préparation cutanée

[103].

- Préparation rectale :

Une préparation rectale par lavement est optionnelle mais est conseillée pour diminuer l’inconfort du patient lors de l’introduction et de la manipulation de la sonde d’échographie, causé par la présence de matières dans l’ampoule rectale. Une ampoule rectale vide permet également de bénéficier d’une image échographique qui n’est pas artefactée par la présence de matières [88]. La préparation par lavement diminue le risque de bactériurie et de bactériémie survenant lors des biopsies [104].

Dans notre étude on a opté pour la réalisation d’un lavement rectal à base de NORMACOL avant la toilette matinale le jour même du geste.

- Prophylaxie par antibiotiques 105, 106 :

Les différents comités d’experts s’accordent sur la nécessité d’administrer une antibioprophylaxie. Les fluoroquinolones s’accompagnent d’une excellente pénétration intraprostatique qui conduit à des concentrations tissulaires élevées

Les fluoroquinolones systémiques (ofloxacine 400mg ou ciprofloxacine 500mg) sont recommandées en une prise unique par voie orale une à deux heures avant le geste 92.

 Réalisation des biopsies: - Salle d’examen

Les biopsies peuvent se dérouler dans l’enceinte du bloc opératoire ou en consultation. La salle d’examen doit être suffisamment spacieuse pour permettre une disposition du matériel qui n’entrave ni le médecin ni le patient. À part l’infirmière qui aide le médecin pour la réalisation des biopsies, on diminue au possible la présence de personnes non indispensables au bon déroulement de l’examen afin de préserver l’intimité du patient. Il est important que le patient puisse être le plus détendu possible pour la réalisation du geste afin de diminuer la douleur de celui-ci [106].

- Techniques de réalisation:  Matériel [98] :

Pour réaliser une biopsie prostatique, on utilise une sonde d’échographie, un guide qui sera clippé sur la sonde et une aiguille à biopsie.

La sonde d’échographie:

Le standard actuel est la biopsie écho-guidée par voie transrectale.

On utilise une sonde endo-rectale de 5 à 10 MHz de fréquence. Elle permet d’avoir des images d’une grande finesse. La biopsie de la prostate n’est pas un geste stérile, le rectum est toujours septique. Le but n’est donc pas de faire un geste parfaitement aseptique, mais de limiter les conséquences

septiques par la préparation du patient (lavement éventuel, antibioprophylaxie) et d’éviter une chaîne de contamination en traitant le matériel.

Idéalement, il faudrait une sonde d’échographie stérile. Malheureusement, ce matériel n’est pas autoclavable. Il faut donc se contenter d’une désinfection.

La sonde doit, entre chaque biopsie, subir au minimum un processus de désinfection de niveau intermédiaire (bactéricide, virucide et fongicide).

Figure 9: Biopsie prostatique écho-guidée par voie transrectale 85. 1. Pistolet à biopsie.

2. Sonde d’échographie endo-rectale.

2

1

Guide de la biopsie:

Il doit être placé à l’extérieur de la gaine, il doit être à usage unique ou stérilisé.

Aiguille à biopsie :

C’est une aiguille de 18 Gauge à usage unique. Elle est manipulée à l’aide d’un boitier à déclenchement automatique permettant un prélèvement de 15 à 17 mm de longueur en une fraction de seconde.

L’extrémité de l’aiguille doit être à l’aplomb de la zone à biopsier. La réalisation de biopsies antérieures impose de transpercer la capsule prostatique et de faire pénétrer l’aiguille d’environ 15 mm à l’intérieur de la glande avant de déclencher le prélèvement.

 Le reste du matériel :

Fixateur (formol 10%), fiche de renseignement clinique pour l’histologie, gants stériles, gel d’échographie stérile, un champ stérile.

 Position du patient [107] :

Il peut être installé indifféremment en décubitus latéral ou en décubitus dorsal, selon les habitudes du chirurgien. On peut améliorer la position en plaçant les fesses au-delà du coin de la table, des appuis en mousse peuvent être placés sous les mollets. Une installation satisfaisante facilite l’échographie transrectale ainsi que l’utilisation du pistolet à biopsie.

Figure 10.a : Installation du patient en position latérale 92

 Anesthésie [108, 109] :

La biopsie est un acte douloureux. Une étude réalisée au niveau de l’ «Urological Institute» notifiait que les patients ayant eu une biopsie sans anesthésie présentaient des douleurs qui vont du modéré à insupportable [108, 109].

La douleur est due principalement à l’inconfort lié à la sonde endo-rectale, le passage des aiguilles à travers la coque prostatique ainsi que la localisation apicale du premier prélèvement [108, 109].

Des études ont comparé le bloc péri-prostatique et l’anesthésie intra rectale et ont démontré la supériorité du bloc péri-prostatique, du fait que l’instillation endo-rectale du gel ne traversera probablement pas les multiples feuillets du fascia de Denonvilliers et ne réalisera au mieux qu’une anesthésie superficielle de la muqueuse rectale permettant d’inhiber la douleur provoquée par l’introduction de la sonde rectal [108 - 110].

La réalisation d’un bloc péri-prostatique est recommandée. Elle est plus efficace que le gel anesthésiant seul [111, 112]. Le bloc péri-prostatique est réalisé

à l’aide d’une aiguille de 22 G. On injecte 10 ml de lidocaïne 1 % en un ou plusieurs points postérolatéraux.

 Protocole de biopsies:

L’analyse échographique de la prostate est indispensable pour la réalisation de biopsies de qualité. On étudie les dimensions prostatiques, l’échostructure, la forme, et les anomalies de contour de la glande. Les biopsies peuvent être réalisées en coupes axiales ou sagittales.

 Schéma en cas de première série de biopsies [113, 114, 85:

 Les recommandations de l’AFU 2011 en cas de première série de biopsie [85 :

- Le schéma en sextant n’est plus approprié du fait d’un taux de détection inférieur de 30 % par rapport aux autres schémas étendus.

- En l’absence d’anomalie clinique (stade T1c) et/ou à l’imagerie (échographie ou IRM), le schéma étendu de 12 prélèvements est recommandé comme schéma standard. Pour chaque lobe, les prélèvements sont réalisés au niveau médio-lobaire et latéral, à la base, au milieu et à l’apex.

- En cas de prostate de volume inferieur à 50cm3, les deux biopsies médio-lobaires de l’apex peuvent ne pas être pratiquées (schéma à dix biopsies).

- L’option de réalisation d’un schéma de biopsies initiales de plus de 12 prélèvements n’augmente pas significativement le taux de détection.

- En cas d’anomalie clinique ou à l’imagerie, intra- ou péri-prostatiques, des biopsies dirigées complémentaires peuvent être réalisées [85.

- Lorsque le toucher rectal et le PSA sont très suspects d’un cancer localement avancé, étendu à l’ensemble de la glande (stade clinique T2c a T4), un seul prélèvement dans chaque lobe est suffisant.

Figure 11: Schéma de 12 biopsies échoguidées en coupes sagittales (a) et oblique latéralement (b). Les biopsies sont réalisées au tiers supérieur, à la base, au tiers moyen, au

Figure 12: Schéma de 12 biopsies échoguidées en coupes frontales obliques ou transverses

avec des prélèvements réalisés au tiers supérieur, à la base (a), au tiers moyen, au milieu (b), et au tiers inférieur, à l’apex (c) 85.

 Schéma en cas de deuxième série de biopsies :

Selon les recommandations de l’EAU 2019 une deuxième série de biopsie est indiquée en cas de :

- PSA qui reste élevé et / ou PSA en augmentation.

- TR suspect : risque de CaP compris entre 5 et 30% [115, 116].

- Petite prolifération acineuse (glandulaire) atypique : 31 à 40% de risque de CaP [117, 118].

- Néoplasie intraépithéliale de la prostate de haut grade (HGPIN) étendue (> 3sites de biopsie,) : risque de 30% de CaP [118, 119].

- Quelques glandes atypiques immédiatement adjacentes à la néoplasie intraépithéliale prostatique de haut grade : 50% de risque de cancer de la prostate [120].

- Carcinome intracanalaire : risque supérieur à 90% de CaP de haut grade associé [121].

- Résultats positifs de l'IRM multiparamétrique (IRMmp) 122.

L’«AFU », dont la publication des recommandations est antérieure à celles de l’«EAU», propose qu’en l’absence d’une IRM recherchant un cancer antérieur, quatre à six prélèvements de l’apex antérieur et de la zone de transition soient réalisés [123].

Pour ces biopsies antérieures, le point d’entrée de la biopsie est à mi-distance entre le bord latéral de la prostate et le milieu de celle-ci (Fig 12). Il faut enfoncer l’aiguille de prélèvement dans la glande prostatique avant de déclencher le prélèvement. L’objectif de ces prélèvements est d’explorer des

Figure 13: Schéma de quatre biopsies antérieures en coupes transverses. Coupes

prostatiques frontales obliques ou transverses obtenues avec une sonde dont le faisceau est dans l’axe de la sonde, à la moitié supérieure (a) et à la moitié inférieure (b) 85.

 Conditionnement des carottes biopsiques 124.

Chaque carotte biopsique doit être conditionnée de façon à pouvoir être clairement identifiée et envoyée au pathologiste avec des renseignements cliniques (données du TR, valeur du PSA, traitement par inhibiteurs de la 5-alpha-réductase).

Elles peuvent être placées directement dans un flacon de formol permettant leur conservation.

Il est cependant préférable de les placer sur une mousse imprégnée d’alcool et insérée dans des cassettes qui les maintiennent en bonne position. Ces cassettes sont mises dans du formol.

Les sites des biopsies seront localisés sur un schéma qui est joint aux prélèvements.

L’étiquetage des flacons et les documents accompagnants (précisant en particulier l’identité du patient, la date, l’opérateur, la nature des prélèvements) doivent être faits au fur et à mesure pour éviter toute erreur 124.

4-2- La biopsie transpérinéale :

Plusieurs études ont comparé l’efficacité des biopsies transrectales et des biopsies transpérinéales. Elles ont montré que cette dernière présente plusieurs avantages par rapport à la biopsie transrectale [125, 126] :

-Ses prélèvements sont plus précis, avec les prélèvements antérieurs et apicaux.

-Elle apporte un meilleur rendement dans la détection du CaP.

-C’est un examen bien toléré par la plupart des patients, aucune complication sérieuse n’a été décrite.

Par ailleurs, il n’y a pas de consensus sur le protocole des biopsies transpérinéales et le nombre d’études reste limité [127]. Alors que d’autres

études n’ont pas montré de supériorité des biopsies transpérinéales par rapport aux biopsies transrectales échoguidées. Pour Shinghal et al. les biopsies transpérinéales guidées par échographie sont moins précises que les biopsies transrectales [128].

Terris a comparé l’exploration échographique par voie transpérinéale et par voie transrectale pour la détection des lésions suspectes. Il est apparu que la voie transpérinéale apportait une visualisation de la prostate et un calcul de son volume équivalents à ceux de la voie transrectale. Néanmoins, les zones suspectes hypoéchogènes n’étaient pas détectées par voie transpérinéale [129].

La biopsie transpérinéale est réalisée avec un repérage échographique endorectal, des aiguilles type Tru-Cut 14G et nécessite une anesthésie générale ou locorégionale.

La plupart des études publiées ont évalué des patients ayant une suspicion persistante d’un CaP et au moins une première série de biopsies négatives. Les taux de détection dans ce cas variaient de 23 à 38 %.

Les cartographies biopsiques tridimensionnelles de la prostate par voie transpérinéale sont au stade expérimental, notamment dans le cadre de la sélection des candidats à un traitement focal [130]. Les biopsies sont réalisées à

l’aide d’une grille de curiethérapie tous les 5mm (distance entre deux emplacements d’aiguilles dans la grille de curiethérapie) et le nombre de prélèvements, supérieur à 40, dépend du volume prostatique.

La biopsie transpérinéale n’a pas été pratiquée dans notre étude, la technique préconisée est la biopsie transrectale échoguidée.

4-3- Les biopsies guidées par l’imagerie par résonance magnétique (IRM):

Actuellement, le diagnostic du cancer de la prostate s'appuie sur la biopsie systématique par échographie transrectale, dans laquelle 10 à 12 carottes sont prélevées à partir de la base, du milieu et de l’apex prostatique 74, 131. Mais cette technique rate environ un tiers des cancers cliniquement significatifs 95, 132. En outre, environ 25% des hommes ont une progression de la maladie après une prostatectomie radicale 132.

Les progrès réalisés par l’IRM permettent dorénavant de cibler les biopsies sur les zones potentiellement suspectes. Des recommandations de bonne pratique de réalisation de l’IRM prostatique ont été précisées en 2011

133, puis plus récemment par le système PI-RADSTM V2 134, 135. L’IRM doit

être réalisée avec une séquence en pondération T2, une séquence de diffusion et une séquence dynamique avec contraste et prend donc le nom d’IRM multiparamétrique. La prostate est subdivisée en 39 secteurs pour améliorer et standardiser la localisation des zones suspectes mises en évidence 134. Il est

dérivé de la sectorisation prostatique en 27 secteurs de Dickinson 133.

Le score PI-RADS V2 d’une image prostatique suspecte associe une cotation sur les trois séquences IRM (T2, diffusion et séquence dynamique) pour évaluer le risque de présence d’un cancer cliniquement significatif.


Compte tenu de l’importance de la stadification de la maladie et du fait de l'utilisation accrue de l'IRM-mp, les urologues disposent désormais d'un nouvel outil pour identifier les lésions de la prostate et évaluer l'anatomie de la prostate. Les lésions peuvent être identifiés et biopsiés par une fusion mentale ou cognitive ou par une fusion d’image écho-IRM. À l'heure actuelle, plus d'une demi-douzaine de combinaisons de logiciels ont été développées et commercialisées dans ce but 136, 137. Les deux systèmes les plus utilisés sont MRI-TRUS image fusion targeted biopsy (TBx) et direct in-bore or in-gantry MR-guided biopsy 138.

IRM Multiparamétrique

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