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Les résultats du chapitre V ont mis en évidence une variation importante de la pro-duction magmatique en fonction de la configuration des modèles. Les paramètres les plus influents sont le taux de convergence des plaques et le pendage. Le taux de production magmatique varie de 4 km3/Ma dans le cas de subductions lentes (vc = 2cm/an) à envi-ron 12 000 km3/Ma dans le cas de subductions très pentées (αs= 80˚). L’épaisseur de la croûte chevauchante joue quant à elle un rôle inhibiteur sur le développement de la fusion pour des croûtes épaisses (hc > 40 km).

Ces résultats numériques sont-ils en accord avec les données pétro-géochimiques sur les taux d’éruption dans les arcs volcaniques ?

D’après Hawkesworth et al. (2004) et Zellmer et al. (2005), les émissions volcaniques en surface varient entre 100 et environ 15 000 km3/Ma (Figure VI.2) à l’échelle globale, ce qui correspond à la gamme de valeurs obtenue dans les modèles numériques.

Le taux d’éruption volcanique correspond au magma qui est émis en surface. Une grande part de la production magmatique contribue à la formation de plutons et reste piégée en profondeur. Les données de Zellmer et al. (2005) sont donc des valeurs minimales de la production magmatique.

Ages pré-éruptifs (ans) ? Ta u x d ’ér u ption (k m 3/M a) 10 0,0001 0,001 0,01 0,1 1000 100000 Olkaria, Kenya Tenerife Taupo Vésuve Asal Rift Ethiopie Auckland Longonot, Kenya Etna Etna (1971-1961) Etna (1971-1981) Piton (1931-1974) Kilauea (1823-1975) Kilauea (1952-1971) Fuego (1932-1979) Hawaii (50 ka average) St. Vincent,

L. Antilles Long Valley

Estimation du modèle pour les Antille Estimation du modèle

pour Fuego

FIG. VI.2 –Variations des taux de production volcanique pour différents volcans à la surface de la Terre (modifié d’après Zellmer et al., 2005). Les âges pré-éruptifs correspondent à l’intervalle de temps écoulé entre la production du magma et l’éruption volcanique. Les volcans correspondant aux zones de subduction (zones noires) sont : Fuego (Guatemala), St Vincent (Petites Antilles), Taupo (Nouvelle Zélande). Le taux

de production magmatique varie de 100 à 15 000 km3/Ma dans les zones de subduction. La gamme de

variation avec le modèle numérique sont symbolisé par des flèches rouges.

Dans le cas des Antilles, Zellmer et al. (2005) évaluent le taux d’éruption de l’île de St Vincent à au moins 200 km3/Ma. Les caractéristiques géométriques de cette région sont les suivantes : un taux de convergence de 1,1 cm/an, un pendage de 37˚ (Heuret, 2005) et une croûte chevauchante de 33 km d’épaisseur (Jarrard, 1986). Dans cette gamme de valeurs des paramètres géométriques, les résultats obtenus aux chapitres IV et V con-duisent à des taux de production compris entre environ 200 km3/Ma et 10 km3/Ma. La valeur maximale correspond à l’hypothèse où le coin du manteau est continuellement saturé par une teneur en eau de 0,5 wt%, tandis que la valeur minimale tient compte du partitionnement de l’eau entre les phases solide et liquide avec une évacuation instantanée de l’eau consommée dans la phase liquide lors de la fusion partielle. Cette comparaison suggère donc que dans cette région le coin du manteau est continuellement saturé en eau.

Le second exemple évalue un taux de production magmatique de l’ordre de 15 000 km3/Ma pour le volcan Fuego au Guatemala. Les caractéristiques de cette zone de sub-duction correspondent à une croûte chevauchante épaisse de 47 km (Jarrard, 1986), un taux de convergence de 8 cm/an et un pendage de 30˚ (Heuret, 2005). Par rapport au cas précédent, on pourrait s’attendre, d’après les tests numériques, à ce que l’épaisseur plus importante de la croûte chevauchante résulte en une diminution du taux de production vol-canique, tandis que le taux de convergence élevé induise une augmentation de ce dernier. Comme cela a été montré au chapitre V des taux de production de l’ordre de plusieurs milliers de kilomètres cubes par millions d’années sont associés à des processus de fu-sion anhydre éventuellement accentués par l’érofu-sion de la lithosphère chevauchante. La valeur théorique obtenue pour un taux de convergence de 8 cm/an est d’environ 4 000 km3/Ma, soit quatre à cinq fois moins que le taux de production observé par Zellmer et al. (2005). Les modèles théoriques suivent donc bien l’évolution observée entre les Antilles et le Guatemala du fait des variations du taux de convergence, mais ils tendent à sous-estimer les taux de production. Une explication possible pourrait être une sous-estimation de l’érosion sub-lithosphérique.

Nos modèles ont donc tendance à sous-estimer les taux d’éruption dans les arcs vol-caniques. Cette observation est renforcée par le fait que la totalité du volume de magma n’arrive pas en surface. En effet, le taux d’éruption correspond à la partie du taux de pro-duction magmatique qui est émis par un volcan. Une part importante des magmas restent piégés et cristallisent en profondeur sous la forme de plutons. De plus, toutes les configu-rations des modèles n’ont pas été envisagées, et des interactions entre paramètres peuvent avoir des effets contradictoires. Ainsi, dans l’arc des Aléoutiennes, Jicha et al. (2006) cal-culent un taux de production magmatique maximum de 182 km3/Ma, dont 62 km3/Ma (34%) contribuent à la mise en place des plutons. Les caractéristiques géométriques de cette zone de subduction se rapprochent de celles du Guatemala, avec un taux de con-vergence de 7 cm/an et un pendage de 35˚(Heuret, 2005). Dans le cas présent, le Moho est moins profond qu’au Guatemala (25 km). Le taux de production magmatique devrait donc être plus élevé, or il est très inférieur.

Dans l’exemple du Guatemala, la plaque plongeante est jeune. Son épaisseur de lithos-phère thermique est comprise entre 40 et 50 km, contre 90 à 100 km dans le cas des Aléou-tiennes et des Antilles (Heuret, 2005). L’épaisseur de la lithosphère thermique peut donc être un paramètre à introduire dans notre modèle pour valider cette hypothèse. Nous pou-vons envisager une étude plus locale sur des zones de subduction bien documentées sur le plan géophysique et géochimique, afin de comparer l’efficacité du modèle à expliquer les observations.

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