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Tête et cou : implications dans la compartimentation biochimique et électrique des épines dendritiques

Les synapses se divisent par duplication synaptique

1.2.4.3. Tête et cou : implications dans la compartimentation biochimique et électrique des épines dendritiques

Les épines de type « mushroom » sont les plus actives sur le plan fonctionnel, preuve qu’une relation entre morphologie et fonction des épines existe. Au niveau de la tête, la taille de la PSD est directement proportionnelle au nombre de récepteurs au glutamate et plus particulièrement au nombre de récepteurs de type AMPA (du nom de leur agoniste pharmacologique l’acide alpha-amino-3-hydroxy-5-méthyl-4-isoxazolepropionique) qui font face à la fente synaptique où le glutamate est libéré par le bouton axonal. La taille de la tête étant liée au volume de la PSD, il existe donc une relation linéaire entre taille de la tête, taille de la PSD et nombre de récepteurs AMPA (Harris et al., 1992 ; Spacek and Harris, 1997 ; Harris, 2008).

Un autre point très important est la régulation de diffusion moléculaire par le cou. En 2005, Bloodgood démontre par photoactivation que les propriétés de restriction de diffusion du cou empêchent la diffusion du marqueur photoactivé du cou vers la dendrite, et inversement (Bloodgood. & Sabatini, 2005). La stimulation des récepteurs au glutamate par le compartiment pré-synaptique induit l’entrée d’ions (Na+ et Ca2+) et dans certains cas particuliers que nous verrons plus loin, la production de messagers secondaires comme le calcium et l’activation de cascades de signalisation. Les capacités de restriction de la diffusion du cou permettent ainsi une séquestration spatiale des processus de signalisation, ce qui restreint les réactions chimiques au niveau local, mais aussi évite la diffusion d’éléments potentiellement toxiques comme le calcium vers la dendrite.

Certaines études ont proposé que le cou de l’épine se comporte comme un câble électrique, que le courant envahisse la tête de l’épine sans diminution, mais que la résistance générée par le cou diminue l’amplitude des potentiels post-synaptiques excitateurs (PPSE) se propageant vers la dendrite (revu par Tsay and Yuste, 2004). Par une technique optique de « glutamate uncaging » il a été montré que l’amplitude des potentiels mesurée au niveau du soma est inversement proportionnelle à la longueur du cou (Araya et al., 2006). L’indépendance électrique de l’épine pourrait expliquer l’atténuation des potentiels post -synaptiques excitateurs acheminés de l’épine jusqu’au soma, mais également l’intégration linéaire/arithmétique des PPSE au niveau du soma, susceptible de générer un potentiel d’action. Ce phénomène est particulièrement spécifique des synapses axono-spinales puisqu’il

30 a été montré que lors d’une activation de synapse axono-dendritique, chaque potentiel est susceptible d’altérer les potentiels voisins (Araya et al., 2006).

Les épines dendritiques peuvent donc être considérées comme des domaines sub-micrométriques neuronaux semi-autonomes, dynamiques, compartimentés sur le plan morphologique, électrique et biochimique. Ces particularités permettent l’activation spécifique des épines, associée à la libération de glutamate par le bouton axonal et l’induction de cascades de signalisation séquestrées au sein de l’épine. L’intégration linéaire des PPSE au niveau du soma pourrait quant à elle permettre l’induction de potentiels d’action par une activité synchrone de l’ensemble des synapses excitatrices.

L’isolation de l’épine sur le plan biochimique pourrait être à l’origine de changements morphologiques et fonctionnels plus ou moins durables qui font intervenir une machinerie protéique complexe et notamment des composants de la PSD. Dans le prochain sous-chapitre, nous allons nous intéresser aux constituants de la PSD, ainsi qu’à leurs effets dans un contexte de plasticité particulier : la potentialisation à long terme.

2. La PSD

La densité post-synaptique ou PSD tient son nom comme nous l’avons vu de sa particularité à être dense aux électrons et à apparaitre comme une zone sombre de plusieurs dizaines de nanomètres d’épaisseur. Sa haute teneur en protéines et lipides la rendent résistante aux détergents, et c’est cette particularité qui est utilisée pour l’isoler et l’étudier (Carlin et al., 1980). Plus d’une centaine de protéines différentes ont été identifiées à ce jour. Sont présents à la PSD parmi ce spectre : des récepteurs-canaux, des récepteurs à activité tyrosine kinase, des canaux ioniques voltage-dépendants, des protéines d’échaffaudage comme la PSD-95, des molécules d’adhésion cellulaire responsables du lien physique entre axone et épine, de l’actine filamenteuse (actine-F) et globulaire (actine-G) et des protéines se liant à l’actine (Actin Binding Proteins) (Figure 22), entre autres. La PSD d’une synapse glutamatergique se compose notamment de récepteurs au glutamate tels le récepteur AMPA, NMDA (du nom de son ligand pharmacologique le N-méthyl-D-Aspartate) et kaïnate (du nom de son ligand, l’acide kaïnique). De par leur implication dans les processus de plasticité, seuls les récepteurs AMPA et NMDA seront décrits ici.

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2.1. Les récepteurs AMPA

Les récepteurs AMPA ou AMPAr sont des récepteurs-canaux glutamatergiques tetramériques. Les sous-unités possèdent un domaine C-terminal crucial dans la régulation de la fonction des AMPAr, incluant l’ouverture du canal, le déplacement et la stabilisation à la synapse (Anggono & Huganir, 2012). Les AMPAr sont sujets à un trafic vésiculaire intense où leur nombre à la PSD dépend de l’endocytose et de l’exocytose à la membrane post-synaptique ainsi que de leur diffusion latérale. Lors d’une LTP, les AMPAr sont exocytés au niveau de l’épine (Patterson et al., 2010). Au contraire, on observera davantage de phénomènes d’endocytose des AMPA dans le cadre d’une dépression à long terme (Long Term Depression ; LTD ; Kessels & Roberto, 2009).

Figure 22: Architecture moléculaire de l’épine dendritique et de la PSD.

Schéma simplifié montrant l’organisation moléculaire de la PSD. La PSD (zone rose) fait face

à l’élément pré-synaptique au niveau de la membrane plasmique de l’épine. Notez la présence

de récepteurs à neurotransmetteurs (NMDAr et AMPAr dans le cas d’une synapse

glutamatergique) et de protéines d’échafaudage (PSD-95, Shank). Le cytosquelette d’actine est

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2.2. Les récepteurs NMDA

Les récepteurs NMDA (NMDAr) sont des récepteurs ionotropiques à cinétique d’ouverture particulière. Elle dépend de deux facteurs : la fixation du glutamate pré-synaptique, et une dépolarisation de la membrane plasmique post-synaptique. Un bouchon fait d’un ion magnésium obstrue le canal, qui ne s’ouvre qu’après dépolarisation membranaire. Le NMDAr est perméable aux ions sodium, potassium et calcium, ce dernier étant un messager secondaire essentiel pour les processus de plasticité. Nous reviendrons plus en détail sur la structure et la fonction des récepteurs NMDA dans la section 3.2.

2.3. Partenaires des AMPAr et NMDAr : exemples d’interaction avec PSD­