Chapitre 1 μ État de l’art
2.2 Le système racinaire
Un intérêt plus approfondi est porté au fonctionnement du système racinaire, premier organe de la plante en contact avec les polluants dans le sol. Deux principaux modèles architecturaux de système racinaire se distinguent : le système racinaire fasciculé, caractérisé par le développement
de nombreuses racines adventives, d’égale importance, et le système racinaire pivotant, avec le
développement prédominant d’une racine principale. Celle-ci est issue de la croissance de la radicule de la plantule, qui se développe et se ramifie en racines latérales, d'ordre inférieur. Les racines latérales (secondaires, tertiaires, etc.) peuvent dans certains cas prendre beaucoup d'importance dans les systèmes racinaires fasciculés (Figure 6).
Figure 6 – Architectures racinaires de type pivotant et fasciculé (d'après « Notions essentielles de botanique générale : la racine »)
2.2.1 Structure et développement
La croissance racinaire longitudinale a lieu à l’extrémité de la racine, l’apex (Figure 7). Zone
méristématique, l’apex est le siège de divisions cellulaires, permettant à la racine une croissance continue en longueur. Les cellules initiales du méristème apical sont dans le centre quiescent. Une coiffe protège le méristème apical, qui a pour origine une zone située au-dessous du centre quiescent. Les cellules externes produisent une gaine de mucilage polysaccharidique ayant un rôle lubrifiant, permettant une meilleure pénétration de la racine dans le sol. Les cellules dérivées du méristème apical forment, de l’intérieur vers l’extérieur, le procambium, le méristème fondamental et le protoderme. Cette zone de division cellulaire est suivie d’une zone d’élongation
des cellules, mécanisme majeur de la croissance racinaire, et d’une zone de différenciation. Le
procambium est à l’origine des tissus conducteurs, le xylème et le phloème qui forment la stèle ou au cylindre central de la racine. Les tissus fondamentaux, ou de soutien, sont issus du
assises cellulaires superficielles, originaires du protoderme, offrant une protection périphérique à la plante, avec pour dénomination le rhizoderme chez les racines. Certaines cellules rhizodermiques peuvent se différencier en poils absorbants, spécialisés dans le prélèvement de
l’eau et des sels minéraux (Figure 7).
Figure 7 - Structure type d’une racine (Nabors 2008)
Le développement racinaire dépend de la plante mais également des conditions environnementales, telles que la distribution spatiale et temporelle de l'eau et des nutriments, ainsi que des propriétés physiques du sol lui-même. Ces informations sont reconnues comme des signauxexternes et relayés par des messagers internes, les hormones.
Une hormone est généralement définie comme une substance naturelle qui exerce des effets
variables sur l’organisme selon sa concentration ou selon le type ou la localisation des cellules cibles. Les hormones végétales, ou encore phytohormones, sont synthétisées dans les racines
même ou d’autres parties de la plante. Elles permettent la communication intercellulaire en jouant
un rôle de messagers chimiques. Ces molécules se lient à des protéines associées aux membranes
des cellules ciblées, déclenchant ainsi une série d’évènements, appelée voie de transduction du
signal. Cette voie fait intervenir des molécules intermédiaires, des messagers secondaires,
interagissant pour relayer l’information. Les informations sont véhiculées dans l’ensemble de l’organisme et régulent le fonctionnement et le développement de la plante par stimulation ou
inhibition. Les réponses hormonales peuvent impliquer plusieurs voies de transduction du signal. À ce jour, six groupes d’hormone végétale ont été définis : les auxines (substances possédant des propriétés physiologiques voisines et une conformation chimique apparentée à l'acide indole-acétique), les cytokinines (substances proches des bases puriques), les gibbérellines (molécules diterpènes, possédant toutes un noyau énantiomère du gibbérelane), les brassinostéroïdes (autres molécules organiques ayant une activité biologique), l’acide abscissique (ABA), et l’éthylène (hydrocarbure gazeux simple).
Les hormones sont en interaction constante et peuvent affecter les différents processus de la croissance des racines de multiples façons. Les auxines, produites dans le méristème (Leyser 2006), interviennent notamment dans la formation et le développement des ramifications racinaires (Benková et al. 2003; Blilou et al. 2005). A contrario, les cytokinines inhibent
l’initiation des racines latérales et la vitesse d’élongation des racines (Aloni et al. 2006; Laplaze
et al. 2007). De même, l’accumulation d’ABA stimule la croissance racinaire, et au niveau des parties aériennes, son accumulation a une action inhibitrice (Sharp 1996). A l’inverse,
l’augmentation de la concentration en acide gibbérellique (AG) inhibera la croissance racinaire,
et notamment des racines latérales, et stimulera la croissance aérienne (Chaves et al., 2007, Gou et al., 2010). D’autres signaux chimiques peuvent participer comme l’éthylène qui stimule la biosynthèse d’auxines (Hodge 2009). En contrôlant le développement racinaire, ces hormones, parfois antagonistes, ont un rôle important dans la modulation du prélèvement et de
l’assimilation des nutriments (Rubio et al, 200λ).
2.2.2 Fonctionnement
L’absorption de l’eau et des solutés présents dans la solution du sol se produit au niveau des cellules non lignifiées du rhizoderme, relativement perméables. Les poils absorbants constituent
une zone d’absorption maximale, qui cheminent l’eau et les solutés vers le xylème dans la stèle centrale. La force principale qui permet l’extraction de l’eau et sa conduction dans le xylème est la transpiration foliaire et la tension qu’elle induit sur la colonne d’eau dans la plante. L’eau
transpirée est remplacée par celle absorbée. Les racines peuvent prélever des nutriments, sous la forme d’ions, dissous dans la phase aqueuse du sol. Les solutés doivent cependant traverser des membranes pour pénétrer dans la racine. La Figure 8 présente la voie empruntée par l’eau
Figure 8 - Voie d’absorption et de transports de l’eau et des sels minéraux dans les racines (Nabors 2008)
L’eau passe par l’apoplasme du rhizoderme et des cellules de l’écorce jusqu’à l’endoderme.
L’endoderme est l’assise cellulaire la plus interne de l’écorce, possédant une bande imprégnée de
subérine, appelée cadre de Caspary. La subérine est un polymère proche de la lignine, à caractère lipophile et riche en fonctions phénoliques et aromatiques. Le cadre de Caspary oblige l’eau et les
sels minéraux à traverser la membrane plasmique des cellules endodermiques par osmose et à
passer de cellule en cellule jusqu’aux tissus conducteurs, via les plasmodesmes. Ce mouvement à travers les cellules est aussi appelé transport symplastique, le symplasme étant l’ensemble des
cytoplasmes interconnectés.