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Chapitre 1 μ État de l’art

1.3 Réhabilitation des sols pollués par les HAP

L'estimation du risque induit par la présence des HAP dans l’environnement est basée sur le croisement entre des aspects liés à leur dangerosité (détermination de leur toxicité) et l’estimation de l'exposition. Lorsque le risque est avéré, il peut y avoir nécessité de dépolluer ces sols et/ou

d’en limiter la dispersion. Dans le cas de sols contaminés, il est possible de traiter le sol en place (méthodes in situ), soit après excavation directement sur le site (méthode on site) ou sur une plateforme de traitement (méthodes ex situ). À ce jour, de nombreuses stratégies de remédiation sont possibles : extraction par solvant, oxydation chimique, dégradation photo-catalytique, remédiation électrocinétique, traitement thermique… (Gan et al. 2009). Mais ces techniques, basées sur des méthodes physico-chimiques coûteuses, sont souvent peu adaptées au traitement

de grandes surfaces et affectent négativement la fertilité et l’activité biologique des sols.

Bien que plus longues, des techniques biologiques telles que la bioremédiation ou la

phytoremédiation sont souvent jugées plus respectueuses de l’environnement et moins coûteuses

que les techniques classiques de traitement sur site et hors site. Toutefois, les procédés biologiques ne permettent de traiter que la fraction de polluants disponibles. La bioremédiation consiste en l’utilisation d’organismes vivants, en particulier les micro-organismes, pour dépolluer

2009). Les micro-organismes utilisent le polluant comme source d’énergie. Il est possible d’accélérer cette biodégradation en inoculant des micro-organismes spécifiques ou en stimulant

l’activité microbienne indigène par des améliorations biochimiques du milieu (e.g. apports de nutriments, pH, potentiel d’oxydoréduction). La phytoremédiation fait référence à « l’utilisation

des plantes vertes et de leur microbiote associé, d’amendement du sol et de techniques

agronomiques pour éliminer, contenir, ou rendre moins toxiques les contaminants environnementaux » (Cunningham et al. 1995).

1.3.1 Principes et mécanismes de la phytoremédiation

La phytoremédiation recouvre différents procédés dont les principaux sont la phytostabilisation, la rhizodégradation, la phytodégradation, la phytoextraction et la phytovolatilisation (Figure 4).

Figure 4 Principaux mécanismes de phytoremédiation (Sterckeman et al. 2012)

Le choix du procédé et de son efficacité potentielle dépendent du type de contaminants (métalliques, organiques, multi-contamination), de leurs caractéristiques (volatilité,

biodégradabilité), de leur disponibilité ainsi que des propriétés agronomiques du sol. La phytostabilisation et la phytoextraction sont des techniques généralement utilisées pour les polluants métalliques. Dans le cas de pollutions organiques des sols, les processus impliqués sont la phytodégradation, la phytovolatilisation, la phytostimulation et la rhizodégradation (Sterckeman et al. 2012). La première, la phytodégradation, consiste à dégrader certains

composés organiques à travers l’activité métabolique de la plante (e.g..production d’enzymes de type déhalogénase, oxygénase). La seconde méthode, la phytovolatilisation, consiste en

l’absorption du contaminant dans le sol, sa métabolisation sous forme gazeuse dans la plante et sa

libération dans l’atmosphère. La troisième, la rhizodégradation est un processus de remédiation dans lequel les contaminants sont transformés par les micro-organismes de la rhizosphère. La plante stimule l’activité métabolique, et de ce fait, l’activité dégradante des communautés

fongiques et bactériennes dans la rhizosphère.

Tous ces procédés sont actifs au sens où ils nécessitent l’implantation d’un couvert végétal

spécifique. Dans certains contextes (risque plus limité), un procédé d’atténuation naturelle peut

être mis en place. La rhizoatténuation consiste à laisser se développer le couvert végétal local sur

le site. L’action naturelle des plantes et les mécanismes de sorption irréversibles suffisent à la dissipation lente de la pollution (Ouvrard et al. 2014), sans intervention humaine au cours des années. Ce procédé est toujours accompagné de la mise en place d’un plan de suivi de la

pollution.

1.3.2 Avantages et inconvénients liés à la phytoremédiation

Le Grenelle de l’Environnement compte les sites et sols pollués parmi ses champs d’action

plantes seront de préférence utilisées » pour la réhabilitation des sites pollués. En effet, la phytoremédiation est moins invasive et moins destructive que les procédés de remédiations physico-chimiques. Ces derniers déstructurent le sol et le laissent généralement biologiquement inactif. Le Tableau 2 présente des coûts estimés de traitements sur site et hors site, avec et sans plantes, dans des projets divers de réhabilitation de sites pollués en France et aux États-Unis.

Tableau 2 Estimations des coûts de procédés de remédiations physico-chimiques et de

phytoremédiation de sols en France et aux États-Unis (d'après Sterckeman et al. 2012)

Procédé Pays Contaminant

Coût (€ m-2 de terre) Minimum ou

moyen Maximum

Confinement in situ France Organiques et/ou minéraux 5 60

Extraction chimique hors

site France

Organiques et/ou

minéraux 34 546

Désorption thermique sur

site France Organiques 25 46

Stabilisation

physico-chimique sur site France Métaux 10 50

Phytoremédiation États-Unis Métaux 4 39

Phytostabilisation France Organiques et/ou minéraux 2 12

Phytoextraction France Métaux < 4 40

Les coûts liés à la réhabilitation d’un sol varient principalement selon la localisation du site à traiter, le type de contaminant, le niveau et l’étendue (horizontale et verticale) de la

contamination, ainsi que les travaux impliqués. Néanmoins, l’excavation et les traitements physico-chimiques sont les moyens les plus onéreux, quand la phytoremédiation apparaît comme étant le procédé le moins cher. De plus, le couvert végétal peut restaurer en partie les services

écosystémiques perdus par le sol. Du fait des risques de transfert des contaminants à la plante, la biomasse ne peut être utilisée pour un usage alimentaire mais elle peut être valorisée par d’autres

utilisations comme énergétique ou production de matière première (service

d’approvisionnement). La nouvelle végétation peut également participer à une meilleure qualité

de l’air et de l’eau alentour, diminuer l’érosion et capter le carbone atmosphérique dans le sol (services de régulation et d’assistance). Elle offre également un nouveau paysage à d’anciens sites urbains abandonnés et autres sites contaminés (service culturel).

Néanmoins, la phytoremédiation requiert plus de temps que les techniques physico-chimiques et peut nécessiter plusieurs successions culturales. De plus, dans les cas de sols fortement contaminés comme ceux de friches industrielles, les végétaux sont soumis au stress de la pollution et leur efficacité de remédiation s’en trouve affectée. Cette efficacité peut être

considérée comme multifactorielle : conditions environnementales, nature (origine, type, disponibilité du polluant) et répartition de la pollution, espèce végétale (biomasse, tolérance à la pollution, potentiel absorbant, profondeur d’enracinement).

2 Fonctionnement de la plante en présence de HAP