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Le but est d'avoir une voie d'accès à ces esters de (E)-butadiènyles 88 rapide, sélective, versatile offrant de bons rendements et utilisant des produits de départ commerciaux ou facilement accessibles. En étudiant les méthodes existantes dans la littérature, peu de méthodes répondent à ces critères. C'est pourquoi nous avons décidé de développer une nouvelle méthode de synthèse permettant de répondre au mieux aux exigences que nous nous étions fixées.

La méthode générale de synthèse utilisant la technique d'acylation du crotonhaldéhyde avec l'anhydride propionique fut testée par J. Velker et n'a pas donné de résultats satisfaisants. En effet, des essais d'optimisation de la sélectivité, en modifiant la concentration de l'anhydride ainsi qu'en variant le temps de réaction, n'a permis d'obtenir qu'une sélectivité E/Z d'environ 2 à 1 avec un rendement de 60 %.

Partie théorique: synthèses stéréosélectives des esters de butadiènyles

L'approche développée par P. Duhamel offre des perspectives interessantes. En effet, il a constaté que l'énolate de potassium pouvait être sélectivement O-acylé à basse température par des électrophiles durs tels que les chlorures d'acides. En outre, DeCusati a montré qu'il était possible de former sélectivement l'énolate (E) par déprotonation du crotonaldéhyde avec le tert-butanolate de potassium.

En combinant ces deux techniques, nous avons pu développer une nouvelle méthode de synthèse des (E)-butadiènyles esters [92].

OK R1 O R1 O Cl R R1 O O R tBuOK, -78°C DeCusati (E) Duhamel 105 88

5.2.1 Synthèse utilisant une O-acylation avec les chlorures d'acides comme électrophiles

La première étape de la synthèse consiste à effectuer une déprotonation du crotonaldéhyde 105 ou d'un de ses dérivés par la base tert-butanolate de potassium. Pour cela, nous avons dissout la base dans le THF et refroidit la solution à -80°C. A cette température le mélange reste fluide et on introduit au goutte à goutte une solution de chlorure d'acide dissout dans le THF. L'addition doit être lente afin de ne pas augmenter la température du mélange, qui aurait pour conséquence une perte de sélectivité [118]. Ce contrôle rigoureux de la température exige l'utilisation d'un thermomètre interne. Ainsi, si la température lors de l'acylation ne dépasse pas -60°C, la sélectivité E reste totale. De plus, afin de s'assurer que la déprotonation soit totale, et d'éviter des réactions secondaires de type aldol ou addition de Michael, on utilisera un excès de base. L'utilisation de chlorures d'acides comme électrophiles permet l'introduction d'un bon nombre de variations structurelles.

La formation de produits secondaires tels que l'ester de tert-butyle peut être évitée par un «quenche» aqueux de la réaction à basse température. La purification des esters de butadiènyles se fait par distillation fractionnée. L'étude du spectre RMN du produit brut montre que la réaction se révèle quantitative et sélective (aucune trace de l'isomère Z est observée par RMN du proton). Seule la présence de tert-butanol est constatée. Toutefois, les rendements des produits isolés sont diminués par la polymérisation des diènes lors de la distillation et un ajout d'inhibiteur de radicaux tels que l'hydroquinone ou le BHT n'apporte aucune amélioration. Un point également important est la qualité de la base tert-BuOK utilisée. Les rendements obtenus avec un échantillon neuf sont nettement supérieurs à ceux obtenus avec un lot moins récent. De plus comme cette base est connue pour faire des

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peroxydes, il serait bon de purifier l'échantillon par sublimation afin d'avoir une reproductibilité rigoureuse des rendements.

Substances R1 R2 R3 Rendements 88a H H H 55 88b CH3 H H 66 88c CH3 CH3 H 63 88d OCH3 H H 58 88e Phtalimido H H 81* 88f CH3 H CH3 71 88g BOC-NH CH3 H 47* 88h COCH3 H H 38 88i OBn H H 80 88j tert-Bu H H 86 88k Ph H H 55

*purifié par recristallisation, ** purifié par flash chromatogarphie Tableau 1 : synthèse des esters de (E)-butadiènyles 88a-k selon une méthode modifiée de

DeCusati et Olofson

La confirmation de la configuration (E) de la partie butadiènyle esters de type 88a-k est apportée en complément des études par spectroscopie RMN par la structure de 88e déterminée par diffraction aux rayons X.

O N O O O H H H H H 88e RX de l'ester 88e

5.2.2 Synthèse utilisant une O-acylation avec des esters activés comme électrophiles

L'attrait des chlorures d'acides comme agents acylants est indéniable. Cependant, leur synthèse n'est pas toujours compatible avec certains groupes fonctionnels. Ainsi, dans le souci

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d'étudier l'utilisation des esters activés comme électrophiles. Cette technique permet d'éviter la formation du chlorure d'acide et nécessite uniquement d'avoir l'acide carboxylique correspondant.

Si l'on étudie la réactivité des esters activés en terme d'électrophilie [121;122], on constate qu'elle se situe en dessous les chlorures d'acides et des anhydrides d'acides. De plus, de ces esters activés sont largement utilisés dans la synthèse peptidique [122]. Il reste à vérifier si leur réactivité est suffisante à -80°C.

Le choix des groupes activateurs de l'acide carboxylique s'est porté sur le nitrophénol et sur le pentafluorophénol. En effet, ces deux dérivés phénoliques sont commerciaux et leurs esters correspondants semblent avoir une bonne réactivité.

Pour étudier leur réactivité, nous avons décidé de synthétiser les deux esters activés 109 et 110. Le composé 108 est un exemple de précurseur dont le chlorure d'acide n'est pas accessible par les méthodes standards. La synthèse de 108 (Schéma 55) est décrite par G.M.

Whitesides [123] , la seule étape délicate se situe au niveau de la saponification de l'ester n-

butylique. Il faut suivre attentivement la réaction par CCM, ajouter une quantité stoechiométrique de KOH et réacidifier très prudemment la solution avec H2SO4 afin de ne

pas cliver l'éther silylé.

O n-BuO OH O OTBDMS n-BuO O O H OTBDMS O O OTBDMS NO2 OH O O2N O O F F F F F O2N 107 108 109 TBDMSCl,

imidazol KOH nitrophénolDCC, DMAP

110

pentafluorophénol, EDC,DPTS

Schéma 55 : synthèses des esters activés 109 et 110

L'étape d'estérification se fait en utilisant une méthode classique de synthèse d'esters à partir d'acides caboxyliques sous des conditions douces [124]. L'utilisation du système DCC/cat.DMAP comme activateur de la fonction acide carboxylique offre l'avantage d'utiliser des réactifs communs et peu onéreux. Cependant, les rendements obtenus restent modestes (44 %) et les problèmes de solubilité de l'urée (la DCU) résultante de la réaction lors de la purification rendent ce système peu attrayant. Pour contourner cet écueil, nous avons utilisé,

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pour la synthèse de 110, le système EDC/DPTS qui permet d'obtenir d'excellents rendements (91 %) sans problème de purification car l'urée résultante est dans ce cas soluble à l'eau [125]. Les deux esters activés 109 et 110 ont été testés dans la réaction d'acylation de l'énolate de potassium résultant de la déprotonation du crotonhadéhyde (Schéma 56).

Les mêmes conditions que celles décrites précédemment ont été utilisées et on a constaté que ce type d'électrophile possédait une réactivité suffisante à -80°C pour piéger le (E)-énolate formé. Dans ce cas, la libération du phénolate peut être constatée sur CCM, l'acylation est également très rapide. De la même manière que précédemment, afin d'éviter des réactions secondaires par la présence en solution des anions phénolate et tert-butanolate, on «quenche» la réaction à -80°C avec une solution aqueuse. L'étude de la RMN du proton du brut réactionnel montre qu'il n'y a également, dans ce cas, que la formation de l'isomère E. La purification des deux produits a été effectuée par chromatographie flash, en prenant soin de désactiver la silice avec un ajout de 1 % de triéthyle amine dans le mélange d'élution. Avec cette méthode nous avons obtenu les esters de (E)-butadiènyles dans de bons rendements (55- 75 %). O O TBDMSO NO2 OK O O R1 O O O2N F F F F F , THF, -80°C R1= Ph-NO2 , 88l OTBDMS, 88m 55-75% ou 109 110

Schéma 56 : synthèse des esters de (E)-butadiènyles avec des esters activés comme

électrophiles

Cette étude montre que l'utilisation des esters activés est une alternative efficace à l'utilisation de chlorures d'acides comme électrophiles pour la synthèse des esters de 1,3-butadiènyles. Ce résultat ouvre la possibilité à l'introduction de groupe fonctionnels intéressants tels que des alcools protégées, des amines protégées et tous les autres groupes fonctionnels sensibles au milieu acide.

5.2.3 Synthèse utilisant une C-silylation de l'ester de butadiènyle 88a

Les deux méthodes précédentes étaient basées sur une O-acylation de l'énolate du crotonaldehyde. Nous avons décidé d'étudier la possibilité de synthétiser des esters de butadiènyles possédant une liaison C-Si en alpha du groupement ester. En effet, les composés contenant ce type de liaison carbone-silicium ont été reconnus pour être des réactifs intéressants [126]

Partie théorique: synthèses stéréosélectives des esters de butadiènyles

Nous pensions introduire la liaison C-Si en effectuant une C-silylation de l'acétate de para- nitrophénole commercial. En effet, en jouant sur la nature de l'atome métallique, contre ion de l'énolate formé lors de la déprotonation de l'ester, et sur addition de cosolvants polaires, aprotiques tels que HMPA ou DMPU, on peut favoriser soit la O- ou la C-silylation.

Des calculs thermodynamiques ont montré que la formation du cétène acétal doit être favorisée par formation de la liaison O-Si (123 kcal/mol) par rapport à la formation de la liaison C-Si (73 kcal/mol) [127]. A l'opposé, l'isomère O-silylé devrait être défavorisé par la formation de la double liaison C=C (145 kcal/mol) par rapport à la liaison C=0 (175 kcal/mol) [128]. Ainsi, on observe une différence de 15-28 kcal/mol, selon les valeurs choisies pour les valeurs énergétiques des liaisons, en faveur de la structure O-silyl cétène acétal. De plus, un argument en défaveur d'une O-silylation apparaît que la résonance entre le groupe carbonyle et l'oxygène de l'ester est interrompue. Ainsi, des esters dont cette résonance est impossible sont complètement O-silylé [129] tandis que les amides, où cette interaction est grande sont majoritairement C-silylé [130]. En outre, on a constaté que les isomères C-silylés sont généralement beaucoup plus stables que les isomères O-silylés [131].

Pour résumer (Figure 4), même si la généralisation n'est pas possible, plusieurs facteurs sortent des études décrites dans la littérature[126;132-134]. Les énolates de lithium donnent un mélange de O-et C-silylation [135] tandis que les énolates de sodium et de potassium forment exclusivement la O-silylation [136]. Ainsi, dans la majorité des cas, des systèmes de solvant de type THF/HMPA permettent une meilleure séparation de la paire d'ions, et favorisent la O-acylation [137]. O OR O OR SiR3 O OR SiR3

THF et cosolvant tels que HMPA ou DMPU, contre ions métalique de la base: K+, Na+

THF

contre ion métallique de la base: Li+

O-Silylation favorable

C-Silylation favorable

Figure 4 : résumé des facteurs favorisant la O- ou la C-silylation des alkyl esters

Nous avons effectué nos premiers essais sur l'acétate de para-nitrophénole 111. Les conditions que nous avons utilisées étaient LHMDS comme base et le solvant le THF. Nous avons effectué la déprotonation à -80°C puis piègé l'énolate avec le diméthylphényle chlorosilane. Cependant, bien que la formation du produit C-silylé 112 fut constatée, les problèmes de purifications, la stabilité du composé et les rendements faibles (15-40%) nous ont convaincus de trouver une autre voie de synthèse.

Partie théorique: synthèses stéréosélectives des esters de butadiènyles O O NO2 O O Si NO2 1, LHMDS 2, DMPSCl THF, -78°C problème de stabilité de purification 15-40% brut 111 112

Schéma 57 : premiers essais de C-silylation

Pour contourner ce problème, nous avons finalement utilisé l'expérience acquise lors de l'élaboration d'une méthode de synthèse des O-butadiènyle-O-trialkylsilyls cétènes acétals, technique qui sera exposée dans le chapitre 6. En effet, nous avons développé une technique permettant de synthétiser le O-silyl cétène acétal 89a par déprotonation à -110°C de l'acétate de 1,3-butadiènyle 88a (voir chapitre 6) avec LHMDS ou NaHMDS dans un système de solvant THF/HMPA ou THF/DMPU.

Nous sommes donc capables de déprotoner l'acétate de 1,3-butadiènyle 88a. Cependant, nous devons favoriser, dans ce cas, la C-silylation par rapport à la O-silylation. Pour cela, conformément aux facteurs influant ces deux processus décrits plus haut, nous avons décidé d'effectuer cette réaction dans des conditions réactionnelles semblables, à l'exception de l'addition du cosolvant polaire HMPA qui lui favorise la O-silylation : nous devrions ainsi observer majoritairement la formation du produit C-silylé.

Nous avons effectué cette réaction avec le trimétylchlorosilane et le diméthylphénylchlorosilane comme agents silylants, à une température de -110°C, en utilisant un mélange 2:1 de THF/Me-THF pour éviter au THF de figer, Schéma 58. Le temps de réaction nécessaire pour la réaction a été estimé à 2 h à basse température, puis l'énolate de lithium est piègé par un ajout rapide d'agent de silylation. En effet, un facteur supplémentaire favorisant la C-Silylation par analogie avec la C-alkylation étudié par Juaristi [138] semble être la vitesse d'addition de l'agent silylant. Ainsi, une addition rapide d'agent silylant favoriserait la C-Silylation par rapport à la O-silyllation.

Finalement, la réaction est stoppée par un 'quenche' aqueux à -110°C. Les spectres RMN ont montré la présence majoritaire du composé C-silylé. La purification de ce dernier par distillation ou par chromatographie flash, après avoir pris soin de désactiver la silice avec la triéthylamine, permet d'obtenir le composé C-silylé avec des rendements acceptables (30- 71%). Toutefois, ces produits présentent une forte tendance à la polymérisation lors de la distillation.

Partie théorique: synthèses stéréosélectives des esters de butadiènyles O O O O Si R R= Ph, 88n CH3, 88o LHMDS, R(CH3)2SiCl THF/2-Me-THF, -110°C 30-71% 88a

Schéma 58 : C-silylation de l'acétate de buta-1,3-diènyle 88a

5.2.4 Synthèse de l'acétate de 3-(tert-butyl-diméthyl-silanyloxy)-buta-1,3-diènyle (102a) O O TMSO O O OEt OK O O O O +

100a 101a 102a

Schéma 59 : synthèse de l'acétate de 3-(tri-méthyl-silanyloxy)-buta-1,3-diènyle

La synthèse l'acétate de 3-(tri-méthyl-silanyloxy)-buta-1,3-diènyle (Schéma 59) s'est faite suivant la procédure décrite dans la littérature [116]. La variante que nous avons introduite est l'utilisation de l'énolate de potassium du butène-3-one-1-oxyde 100a [139], pour des raisons de réactivité, à la place de l'énolate de sodium utilisé dans la synthèse reportée [114;116]. Ainsi par déprotonation de l'acétone avec le méthanolate de potassium et condensation du formiate d'éthyle on obtient l'énolate de potassium 100a sous forme de cristaux beiges dans de bon rendement (70 %). L'acylation de cet l'énolate de potassium par le chlorure d'acétyle se fait selon la procédure décrite par Potman [116]. On obtient le propionate de (E)-butène-3- one-1-yle 101a sous forme d'une huile incolore dans une rendement de 50 % après purification par distillation fractionnée.

La dernière étape consiste à énoliser la cétone α,β-insaturé pour former un analogue des diènes de Danishefsky. Pour cela, beaucoup de procédures sont décrites dans la littérature [113-117;140;141], mais nous avons choisi la méthode décrite par P. Cazeau [115] utilisant le système TMSCl, triéthyle amine, NaI, pentane/acétonitrile. Cette méthode nous a permis d'obtenir l'acétate de 3-(triméthyl-silanyloxy)-buta-1,3-diènyle 102a avec un rendement global de 23 % au départ de l'acétone.

Partie théorique : synthèses des cétènes acétals

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Synthèses des butadiènyles cétènes acétals

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