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4 – Synthèse des différentes évolutions du B2i : d'un enseignement technique vers un enseignement info-

documentaire

Globalement, il nous faut garder à l'esprit que le B2i a été envisagé dès le début comme un processus évolutif ; dans les premiers textes parus au Journal Officiel relatifs à ce brevet, il est inscrit que sa mise en place doit être progressive. Il est également stipulé que le B2i est un référentiel de compétences « de bases » ; il n'est pas absolu, et d'autres compétences qui n'y figurent pas pourront être développées à travers les processus pédagogiques mis en place par les professeurs. Cela explique pourquoi les différentes évolutions du B2i s'inscrivent chacune dans la continuité des précédentes, en maintenant le même nombre de thèmes et ce quel que soit le niveau étudié (Primaire, Collège, Lycée…). Les évolutions du référentiel sont donc plus subtiles que ce à quoi on aurait pu s'attendre au premier abord, et c'est en étudiant en détail les différentes compétences que nous pouvons juger des évolutions concrètes de ce Brevet.

Comme nous l'avons déjà constaté, le B2i était initialement fortement tourné vers des compétences informatiques. L'objectif était de s'assurer que tous les élèves soient capables d'utiliser les outils informatiques : maîtriser la souris, le clavier, se repérer dans les interfaces graphiques, comprendre les notions de répertoires, de fichier… Ces compétences, assez terre à terre, étaient justifiées par le fait que l'ordinateur était à cette époque encore peu répandu dans les ménages

français. Notons aussi que dans sa première version, le B2i était exclusivement tourné vers le niveau Primaire et le Collège ; ainsi, si se sont avant tout des compétences techniques, d'accès à la machine qui y ont été développées, c'est aussi car le niveau d'enseignement au sein duquel le B2i prenait place ne permettait pas d'inculquer des compétences trop poussées. Nous retrouvons des compétences informatiques techniques dans le référentiel 2013 niveau lycée, même si elles sont moins détaillées par rapport aux versions précédentes et portent sur des objets plus complexes ; on pense à celles du thème 5 du référentiel 2013 niveau 3, où il est question de code source et de métadonnées… Au final, on peu bien dire que les compétences du référentiel le plus récent s'inscrivent bien dans la continuité des versions précédentes.

A côté de cette réduction du nombre de compétences techniques, on note à contrario la présence de plus en plus marquée de compétences d'un autre type que nous avons décidé de séparer des autres. Nous pouvons reprendre la terminologie que nous avons vu dans la partie précédente en désignant ces compétences sous le vocable de « compétences info-documentaires ». Il s'agit essentiellement des compétences liées à la culture de l'information : à sa recherche, à son utilisation, à l'évaluation de sa qualité, de sa fiabilité, de son utilité... Cela appelle bien à des compétences documentaires, mais aussi à des compétences d'avantage « éthiques » puisqu'elles nécessitent une réflexion personnelle. Avoir conscience que l'information peut être présentée d'une certaine façon pour pousser le lecteur à l'interpréter d'une certaine manière n'est pas évident et c'est grâce à ces compétences documentaires que les élèves pourront prendre conscience de ce phénomène. Le B2i stipule même que ces savoirs peuvent être formalisés sous la forme de règles de « bonne conduite » à adopter lors de l'utilisation de l'outil informatique. Si elles ne sont pas indépendantes des compétences techniques, ces règles sont davantage liées à la posture à adopter lors de l'utilisation d'Internet ; règles de politesse, qualité de l'expression, vie privée, regard critique sur le contenu, respect des droits d'autrui, maîtrise des informations personnelles… Il nous semble que ces compétences se distinguent des autres car elles poussent l'élève à adopter un regard critique sur sa propre utilisation d'Internet et sur les informations qu'ils y trouvent, élément qui nous intéresse directement dans le cadre de nos travaux. On ne se contente plus d'être capable d'interroger les plate-formes documentaires, on doit aussi questionner leur contenu. Elles sont en lien avec les théories sur la Culture de l'Information que nous avons vues précédemment, et elles se sont de plus en plus imposées suite au différentes révisions du B2i. Voici les compétences du référentiel 2013 niveau 3 que nous classons parmi les compétences « info-documentaires » :

2 – Adopter une attitude responsable - Comprendre et appliquer les conditions d’utilisation des services en ligne

(autoriser ou pas l’utilisation de la géolocalisation, du partage de données

et d’application, etc.)

- Être responsable de toutes ses publications y compris lors de l’utilisation d’un pseudonyme

- Publier un document en s’appuyant sur des ressources dont l’élève n’est

pas l’auteur dans le respect des règles (droit de citation, respect des

licences, etc.)

- Comprendre et respecter les grands principes résultant de la loi

informatique et libertés (droit à l’information, droit d’accès, droit de

rectification des données, de suppression, d’opposition et principes de

finalité, de pertinence et de proportionnalité).

3 – Créer, produire, traiter, exploiter des données - Distinguer une simulation ou une modélisation de la réalité, lors du

traitement des informations ; préciser le contexte associé aux résultats

obtenus et ses conséquences sur leur interprétation. Identifier la nature

des modèles employés et leurs limites de validité.

documenter filtres nécessaires pour que la requête soit pertinente. 5 – Communiquer,

échanger

- Construire des identités adaptées aux différents contextes (public, privé,

professionnel, personnel)

- Identifier les éléments de stratégie commerciale des services et matériels

utilisés

- Porter un avis critique sur une situation liée à l’usage du numérique dans

le respect des règles (modalités de diffusion des informations buzz, hoax,

etc.)

- Participer à un débat en ligne dans le respect des interlocuteurs

(Nétiquette)

- Chercher et identifier l’origine de la publication en utilisant au besoin le

code source, pour exploiter un document

Certaines compétences nous paraissent être à la fois informatiques et documentaires ; on pense notamment aux compétences liées à « l'accessibilité » sur Internet. Néanmoins, celles que nous avons classé dans le tableau précédent nous semblent être les plus importantes. Notons que même si elles se sont surtout développées dans la dernière version du référentiel, elles n'y sont pas apparues spontanément. Certaines compétences éthiques prennent leur source dans les premières versions du B2i. Par exemple, dès le B2i 2000 Niveau 1, on trouve la présence d'une compétence intitulée « prendre l'habitude de s'interroger sur la pertinence et sur la validité des résultats produits par le traitement des données au moyen de logiciels et, plus généralement, témoigner d'une approche critique des données disponibles ». On trouve également la compétence : « faire preuve d'esprit critique face aux documents, en recherchant quelques critères propres à évaluer leur validité : auteur, source, date de création et de modification. ».

Les compétences « info-documentaires » occupent donc une place prépondérante dans le B2i. Dans le cadre de notre travail, nous avons décidé de nous focaliser sur ces compétences-ci puisque nous pouvons les mettre en lien avec les travaux théoriques sur la culture de l'information que nous avons vu précédemment. Ce sont en effet ces compétences qui vont nous permettre de transmettre aux élèves quelles sont les bonnes pratiques à adopter face à l'information. Notre recherche mettra donc de côté les compétences strictement informatiques. Après avoir étudié ces compétences et leur évolution, il peut-être intéressant de revenir sur les différentes conceptions de l'éducation à l'information qui ont été développées par les auteurs. Au final, quelle est la conception de l'information proposée par l’Éducation Nationale à travers le B2i ? Doit-on parler d'usage de l'information à propos du B2i ? Cela paraît un peu réducteur : cette expression est relative au simple usage de l'information, et elle semble oublier d'autres aspects importants développés dans les compétences info-documentaires. Qu'en est-il de la maîtrise de l'information ? Cette expression paraît plus appropriée car elle induit l'idée d'une maîtrise intellectuelle plus poussée ; on sait comment utiliser l'information, mais on sait aussi comment elle est produite, comment elle se répand dans la société, et on sait quelle est la posture et la méfiance qu'il faut adopter face à l'information. Néanmoins, les fondements du B2i vont encore plus loin ; à travers le B2i, l’Éducation Nationale cherche à créer des élèves totalement indépendants face à l'information et qui adoptent une certaine posture pendant leur recherche scolaire, mais aussi dans la vie de tous les jours. Un des objectifs du B2i est bien de faire des élèves information literates, possédant une certaine culture de l'information qui leur permettra à terme de devenir des citoyens éclairés capables de prendre des décisions autonomes, en toute connaissance de cause. C'est donc bien la culture de l'information que l’Éducation Nationale essaye de développer à travers le B2i.

5 – Au final, est-il légitime de vouloir mettre en place un