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5 – Au final, est-il légitime de vouloir mettre en place un enseignement en faveur de la Culture de l'Information ?

Suite à l'étude des différentes évolutions successives du B2i, nous avons constaté que l'apparition du B2i lycée est relativement récente (elle a eu lieu en 2006). Après avoir comparé les compétences développées dans chaque niveau du référentiel actuel, nous avons aussi constaté que tous les thèmes du référentiel sont similaires d'un niveau à l'autre. Néanmoins, les compétences info-documentaires sont plus présentes au niveau Lycée qu'au niveau Collège, et son formulée de façon plus complexe et détaillée.

La question initiale qui nous a poussé à étudier les mesures mises en place par l’Éducation Nationale pour favoriser le développement d'une culture de l'information auprès des élèves était la suivante :

« Quelle est la légitimité des mesures mises en place par l’Éducation Nationale pour inciter les élèves à adopter de bonnes pratiques dans la recherche et l'utilisation d'informations sur l'Internet ? ».

Au regard des développements qui ont été effectuées dans notre travail de recherche théorique, nous pouvons penser que oui, ces mesures paraissent légitimes (c'est à dires qu'elles ont une raison d'être, qu'elles sont justifiées) au regard des éléments suivants :

- Les mesures développées par l’État sont basées sur des concepts scientifiques précis, en particulier sur les concept d'Information Literacy et de Culture de l'Information. Ces concepts ont formé au fil du temps des domaines de recherche à part entière et ont été étudiés par un grand nombre de chercheurs. Les mesures mises en place par l’Éducation Nationale trouvent premièrement leur légitimité à travers ces travaux de recherche qui ont été préalables à leur élaboration.

- Les incidences de la Culture de l'Information sont, comme on l'a vu, multiples : elle permet aux individus de trouver et d'utiliser l'information de la façon la plus profitable possible. Elle permet d'agir contre les inégalités. Mais surtout, elle va avoir des incidences sur la vie des individus en tant que citoyens : une bonne culture de l'information permet d'adopter à tout moment un regard critique sur les faits qui nous sont présentés, et nous rend autonome. Elle permet de créer des citoyens plus éclairés dans leur participation à la démocratie, ce qui est pour nous un élément essentiel en tant que professeur.

- Les programmes développés en faveur de la Culture de l'Information ont évolué au fil du temps, en relation directe avec l'évolution de la Société de l'Information. De fait, les compétences que l'on retrouve dans les référentiels comme le B2i sont directement en lien avec les problèmes que nos élèves vont devoir surmonter.

Ainsi, il est difficile de critiquer la légitimité des mesures mises en place par l’Éducation Nationale. Les mesures mises en place et les moyens mis à disposition des enseignants permettent de servir des objectifs clairs et justifiés. Néanmoins, nous pensons qu'un dernier questionnement peut être effectué au regard des comportements que nous avons observés pendant le travail de nos élèves de 1ère. Pour rappel, j'ai identifié un certain nombre de comportements de la part de mes élèves : la plupart des groupes possédaient une certaine aisance dans leur utilisation de l'outil informatique. Certains groupes ne parvenaient pas à identifier si les sites internet qu'ils utilisaient étaient partisans ou non. D'autres mettaient en oeuvre une utilisation sommaire des moteurs de recherche, sans questionnement visible quant à la formulation de la recherche… Je me suis donc attelé à sensibiliser quelques groupes à ces questions. Très vite, j'ai remarqué que même si leurs actions n'allaient pas dans ce sens, les élèves semblaient avoir des connaissances préalables sur certains sujets en lien avec la Culture de l'Information. Je me souviens d'un groupe qui travaillait sur un sujet relatif à l'Euro et ses objectifs. Pendant leur recherche documentaire, les élèves se rendaient sur des sites Internet dont certains étaient des sites partisans, écrits par des blogueurs et non par des professionnels. Lorsque j'allais voir ce groupe, je ne voyais aucun questionnement sur la fiabilité de ces sites. Lorsque je leur demandai s'ils pensaient que leur site était vraiment fiable, la position des élèves changeait immédiatement : après cette question, ils m'ont expliqué qu'en fait ce site n'est peut-être pas fiable car on voit qu'il s'agit d'un blog, que les blogs peuvent être écrits par n'importe qui, et donc qu'il faut se méfier… Au final, si ces questionnements ne semblaient pas apparaître spontanément chez les élèves, il me semblaient qu'ils possédaient tout de même des notions à ce sujet, même s'ils n'avaient pas l'air d'y avoir pensé spontanément. Dans un second groupe où j'ai effectué la même observation, les élèves m'ont dit qu'ils ont connaissance de ces questions car ils les ont travaillé lorsqu'ils ont passé le B2i niveau collège…

Ces observations sont paradoxales : les élèves n'ont pas spontanément adopté un comportement conforme aux bonnes pratiques de la culture de l'information, mais pourtant, lorsque l'on les lance sur cette question, ils tiennent un discours relativement éclairé sur la façon dont l'information doit être recherchée et utilisée sur l'Internet. Il semble y avoir une différence entre les

pratiques effectives des élèves et leurs pratiques réelles au sujet de l'Information. Puisque ces groupes semblent tenir leurs connaissances du B2i niveau Collège, une dernière question peut-être posée au sujet de la légitimité des mesures mises en place par l’Éducation Nationale pour inciter les élèves à adopter de bonnes pratiques dans la recherche et l'utilisation d'informations sur l'Internet : nos lycéens sont-ils totalement vierges au sujet des bonnes pratiques à adopter sur l'Internet ? Dans l'étude menée par Sophie JEHEL, dont nous avons parlé précédemment, il était dit que les élèves ont conscience que l'information sur Internet n'est pas toujours exacte. Nous allons aller plus loin en essayant de mesurer les connaissances dont nos élèves disposent à propos d'Internet et les pratiques qu'ils mettent en œuvre pendant la recherche.

Dans la partie suivante, nous allons présenter les résultats d'une enquête menée auprès d'une de nos classes. Dans cette enquête, je me suis demandé quelles sont les pratiques réelles des élèves en phase de recherche d'informations sur l'Internet. En répondant à cette question, nous pourrons savoir si les mesures proposées par le B2i sont réellement légitimes ou pas. C'est seulement au regard de cette dernière question que l'on pourra émettre une conclusion finale quant à la légitimité des mesures mises en place par l’Éducation Nationale pour favoriser les bonnes pratiques sur l'Internet. En effet, à quoi bon chercher à inculquer certaines compétences à nos élèves si ces derniers ont déjà connaissance de celles-ci et son capables de les mettre en œuvre lors de leur arrivée au lycée ? Pour répondre à cette question, j'ai effectué une enquête de terrain auprès de l'une de nos classes qui n'a pas bénéficié d'une formation spécifique à l'information au lycée. Nous pouvons formuler plusieurs hypothèses :

- Les élèves auront des connaissances hétérogènes sur le sujet, ce qui entraînerait des différences de pratiques.

- Si certains élèves auront connaissance des bonnes pratiques à adopter, ils ne les mettent pas forcément en œuvre.

- Si les élèves ne mettent pas en œuvre ces bonnes pratiques, cela pourrait s'expliquer par deux choses : soit ils n'en ont tout simplement pas connaissance, soit ils refusent volontairement de les mettre en œuvre dans le cadre d'un travail scolaire, par facilité.

PARTIE II : QUELLES SONT LES PRATIQUES