• Aucun résultat trouvé

Chapitre 3 : Arythmies et pathologies ventriculaires

3.1 Les principales pathologies ventriculaires

3.1.3 Le syndrome de Brugada

Le syndrome de Brugada (BrS) a longtemps été considéré comme une canalopathie, substrat arythmogène d'origine fonctionnels, mais elle est actuellement associée à une pathologie d'origine structurelle.

Dénition Le syndrome de Brugada est une maladie génétique (dysfonction du canal sodique) dans 20 à 33% des cas, et responsable de 20% des morts subites sans cardio-myopathies sous-jacentes [Brugada and Brugada, 1992]. Les patients sont le plus souvent asymptomatiques. Le réel enjeu est de détecter chez ces sujets, ceux qui peuvent présenter des syncopes par arythmie ventriculaire, ou un arrêt cardiaque.

Deux hypothèses ont été longtemps discutées an d'expliquer les origines de ce syn-drome. La première relate une anomalie fonctionnelle de repolarisation, due à la mutation de plusieurs gènes, qui seraient à l'origine de ce syndrome. La mutation du gène le plus fré-quent est le SCN5A dans 15 à 33% des cas. Celui-ci joue un rôle majeur dans la fabrication du canal sodique. La mutation de celui-ci entraîne donc un dysfonctionnement du canal sodique provoquant une dispersion de la repolarisation entre les couches de l'endocarde et de l'épicarde (Figure 3.6).

Figure 3.6  Syndrome de Brugada : dispersion de la repolarisation

A gauche, la gure montre les potentiels d'actions, dans un cas normal et l'ECG correspondant. A droite, l'impact d'une repolarisation précoce sur les potentiels d'action et l'ECG, est

présentée.

Extrait de [Nattel, 2010]

La seconde hypothèse, met en avant une anomalie de la dépolarisation. Dans ce cas, la vitesse de conduction serait ralentie dans le ventricule droit et la présence d'un substrat arythmogène favoriserait le développement de cette pathologie (Figure 3.7). Koonlawee Nademanee [Nademanee et al., 2011] fut le premier à montrer que la région du RVOT (right ventricular outow tract) serait arythmogénique chez les patients atteints du

syn-3.1. Les principales pathologies ventriculaires

drome de Brugada. Par la suite, d'autres études en accord avec les résultats de K. Na-demanee ont démontré la présence d'un substrat structurel dans la région du RVOT, se traduisant par la présence de potentiels anormaux fragmentés [Kofune et al., 2011,Zhang et al., 2016].

Figure 3.7  Syndrome de Brugada : anomalie de la dépolarisation Une conduction ralentie dans le VD, entraîne une activation tardive du RVOT (1A). Le potentiel daction du RVOT est donc retardé (1B haut) par rapport au potentiel daction du ventricule droit (VD), (1B bas). Au début du cycle cardiaque (1D) le potentiel membranaire du

VD est plus positif que le RVOT, et agit comme une source, conduisant le courant électrique vers le RVOT (1C, direction a). An dassurer un circuit fermé, le courant se déplace du RVOT

vers le milieu extracellulaire du VD. (1C, direction c). Une électrode positionnée sur le RVOT (en V2 par exemple) enregistre une déexion positive (1C, direction b). Durant cette phase du cycle cardiaque lélectrode enregistre une élévation du segment ST (1D, bas, trait en gras). Puis

le courant, se déplaçant du milieu extracellulaire vers lintérieur du VD, créé une dépression du segment ST (1C, direction d). Dans la prochaine phase du cycle cardiaque (1F), le gradient de potentiels entre le VD et le RVOT sont inversés, puisque le potentiel membranaire est désormais

plus positif dans le RVOT que dans le VD. Le RVOT cette fois agit comme une source, conduisant le courant électrique en circuit fermé dans le sens inverse (1E). Le courant séloigne

de la voie précordiale droite (1E, d), entraînant une onde T négative (1F, bas, trait en gras). Figureextraite de [Meregalli et al., 2005] modié par Arthur Wilde [Wilde et al., 2010] ;

Présentement, aucunes de ces deux hypothèses n'est privilégiée. Diagnostic

Le syndrome de Brugada se traduit sur un ECG standard par un bloc incomplet droit (BID) et une élevation du segment ST. Trois types sont à diérencier (Figure 3.8) :  le type 1 : BID avec un sus-décalage du segment ST en dôme, principalement sur les

dérivations précordiales V1 et/ou V2, et plus rarement V3, avec une élévation du point J3 de plus de 2 mm au-dessus de la ligne isoélectrique. L'onde T est négative en V1 et V2 et parfois V3 ;

 le type 2 : BID avec un sus-décalage du segment ST en selle, avec une élévation du point J de plus de 2 mm au-dessus de la ligne isoélectrique. L'onde T est positive ou biphasique ;

 le type 3 : BID avec un sus-décalage du segment ST en selle, avec une élévation du point J de plus de 1 mm au-dessus de la ligne isoélectrique.

Figure 3.8  Tracé ECG d'un patient atteint du syndrome de Brugada

Le tracé de gauche montre un syndrome de Brugada de type I avec élévation du segment ST en forme de dôme (visible en V1 et V2). Le tracé de droite montre un syndrome de Brugada de

type II avec élévation du segment ST en forme de selle (visible en V2). Extrait du site https ://www.e-cardiogram.com/syndrome-de-brugada-generalites/

Les tests pharmacologiques, parfois couplés à des épreuves d'eorts, sont généralement utilisés pour mettre en avant certaines pathologies comme l'utilisation de l'ajmaline dans le syndrome de Brugada. L'ajmaline injectée en intraveineuse permet de bloquer les canaux sodiques responsables du sus décalage du segment ST et de favoriser l'apparition d'un ECG typique Brugada. Les types 2 et 3 ne sont pas toujours associés au syndrome de

3.1. Les principales pathologies ventriculaires

Brugada. Le test à l'ajmaline permet de transformer les types 2 et 3 en type 1 si le patient est atteint du syndrome de Brugada. En eet, seul un ECG de type 1 permet un diagnostic positif de cette pathologie.

Une autre man÷uvre est de placer les électrodes V1 et V2 au 2ème et 3ème espace in-tercostal respectivement. Cette méthode permet, de la même façon que le test à l'ajmaline, de transformer les types 2 et 3 en type 1 et d'éviter un test pharmacologique.

Le risque de mort subite est dicile à quantier. Cependant, le type 1 spontané, sans provocation par un test supplémentaire, semble avoir la plus forte valeur prédictive an d'évaluer le risque de mort subite.