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On a tenté précédemment de mettre en évidence le type d'apports que I' ECAP tire de son insertion dans la réalité italienne - à savoir principalement une élaboration politique et pédagogique de la fonnation ouvrière. En Suisse, par contre, l'attente au sujet d'une collaboration souhaitée - mais pas toujours facile - avec les syndicats suisses ne peut être que très différente, d'autant plus que cette collaboration est encore et pour le moment fonnelle. Une brève esquisse des caractéristi­

ques des syndicats suisses et de leurs positions face à l'immigration pennettra de comprendre cette situation.

3.1

Les positions face à l'immigration

Lo structure sy"ndicale suisse s'articule en quatre organisations qui reflètent des tendances et des concep­

tions politiques différentes. L'Union syndicale suisse (USS) est de tendance socialiste; la Confédération des syndicats chrétiens (CSC) s'inspire de la doctrine sociale chrétienne; les syndicats évangéliques (SVEA) et l'Union

au moment de l'analyse des positions des enseignants et des élèves, étant donnée son importance dans la prati­

que quotidienne des cours.

suisse des syndicats autonomes (USSA) est de tendance libérale.

Du point de vue quantitatif, l'USS et la CSC sont les plus importantes avec, respectivement

76,8 %

et

17,2%

des travailleurs syndicalisés en

1975 (1).

L'USS

et la CSC sont surtout implantées dans les secteurs éco"".' nomiques où la présence des travailleurs étrangers est la plus importante, à savoir la construction, la métallurgie et l 1 industrie textile.

La position de l'USS face à la présence des travail­

leurs étran-gers s'exprime dès

1957

dans les orientations économico-politiques sanctionnées lors de la révision de ses statuts. L'action syndicale vise en effet à "la garan­

tie du plein emploi", à "l'élévation du niveau de vie"

ainsi qu'à "la promotion du système économique suisse".

Aussi, l'accord syndical à la politique d'immigration du patronat et du Conseil Fédéral est-il conditionnel

(2)

:

cette politique n'impliquera pour les Suisses aucune ag­

gravation des conditions de travail ni une diminution de leurs possibilités d'emploi. C'est pourquoi les préoccupa­

tions de la FTMH

(3)

face au nombre croissant de tra­

vailleurs immigrés se référaient-elles principalement à la mise en danger du haut niveau de qualité de la

produc-(1)

Données tirées de "Les syndicats en Suisse", USS,

1976,

Berne.

(2)

Cf. Dol eschai.

(3)

li nous semble possible d'élucider les positions de l'USS à la lumière de cette de sa plus importante fédération, la FTMH (Fédération des travailleurs de la métallurgie et de l'horlogerie).

tion suisse ou de la politique de "paix du travail" née dans la métallurgie (1). Par contre un développement de l'appareil de production rendu possible grâce à une immigration de main d'œuvre considérée et voulue com­

me conjoncturelle et à l'accroissement de la population résidente ne pouvait qu'être approuvé par les syndicats.

En d'autres termes, le soutien des syndicats à une politique libérale d'importation de main d'œuvre étran­

gè�e se situe dans le cadre d'une politique économique anti-cyclique. L'immigration est tolérée lorsqu'elle per­

met une exploitation maximale des capacités productives de l 'dpparei 1 de production déjà en place; par contre, l'immigration est considérée comme facteur de "surchauf­

fe de ! 'économie" à long terme (2). C'est dans ce con­

texte que s'expliquent les incitations syndicales à la mo­

dération de la politique migratoire; à la limitation du ' nanbre de travailleurs immigrés; ainsi que son soutie� à la politique de la Confédération de rotation de la main d'œuvre étrangère.

La reconnaissance, depuis les années 60, de la néces­

sité structurel le de la présence d'une main d'œuvre étran­

gère amène pourtant les syndicats à revendiquer une plus grande générosité à l'égard des possibilités de regroupe­

ment familial - ceci allant de pair avec des mises en gar­

de relatives à toute augmentation ultérieure de la main d'œuvre étrangère et une demande pour un contrôle plus systématique. C'est finalement en 1963-1964 que la politique fédérale s'aligne sur les positions syndicales à travers le plafonnement du contingent de la main

d'oeu-(1) Cf. Geschë:iftsbericht, p.29, SMUV, 1956, in Riedo, p. 44.

(2) Cf. 11 L'USS et les travailleurs immigrés", in Histoire du mouvement ouvrier suisse, p.359.

vre étrangère.

3.2 Les positions face aux immigrés

Les syndicats ont toujours déployé envers les immigrés une activité visant à augmenter leur taux de syndicalisa­

tion; à leur assurer "aide et protection contre toute for­

me d'exploitation et de discrimination"; ainsi que des conditions de travail identiques à celles des nationaux.

Une telle politique n'a pas toujours donné des résul­

tats satisfaisants, ainsi que le notait le président de l'USS lors de la manifestation du 1er mai 1973 à Bâle. Il dénon­

çait "l'insuffisance de notre solidarité à l'égard des travail­

leurs venus d'autres pays. Ce manque de générosité, c'est un terrain propice aux tentations de la xénophobie et de l'apartheid ... A ceux qui ont la responsabilité du syndica­

lisme, ce comportement apparaît inquiétant parce qu'il est incompatible avec la vocation internationale de notre mouvement, inquiétant aussi parce qu'il nous confronte avec certaines de nos négligences" (1). Le fort mouve­

ment xénophobe qui apparaît au début des années 70, et dont la base est en partie ouvrière, révèle la crise de la politique syndicale face à l'immigration. La nécessité de reconsidérer cette politique apparaît alors, poussant .à un dialogue et à une confrontation ouverts avec les asso­

ciations d'immigrés dans le respect de finalités récipro­

ques (2).

(1) Cf. correspondance syndicale suisse; extrait du discours de E. Canonica, 1 mai 1973 ;. cité dans: Histoire du mouvement ouvrier suisse, p. 3 61.

(2) Cf. pour son importance, c0mpte tenu du lieu, le mes­

sage adressé par l 'USS au 27e congrès FCLI, Winterthur, 4-5 juin 1977, in Emigrazione ltaliana No 27, 1977, Zurich.

Ce changement de position se retrouvera également à la CSS. Sa politique a été en effet particulièrement ouverte envers les immigrés entre les années 60 et 70

-une fois admise l'incidence structurelle du phénomène migratoire. la CSS s'est principalement attachée à re­

vendiquer une pratique plus humanitaire envers les im­

migrés et elle s'est prononcée pour l'abolition du statut de saisonnier. Un tel mouvement a débouché sur une initiative populaire {"Etre solidaires"), demandant, entre autres, l'abolition de ce statut.

3. 3 la collaboration avec 11 ECAP

la base des rapports entre l'émigration organisée et les syndicats suisses a été résumée dans une déclaration d'un représentant syndical italien en Suisse lors du pre­

mier congrès national des associations d'émigrés italiens en Suisse : "l'existence d'un fort mouvement syndical suisse comme d'importantes organisations de l'émigration ne peut que mettre en route une démarche revendicative aux conséquences sociales importantes. Elle révèle une réalité qui ne peut être ignorée et encore moins sous­

estimée. Il est impossible de penser ou de demander une marginalisation des uns ou des autres. Il est, par contre, possible d'envisager une collaboration concrète à chaque niveau" (cf. Alfieri p.18).

l'ECAP s'insère dans cette optique. Elle tend, dès le début, en tant qu'organisation syndicale, à promouvoir des moments d'élaboration commune de la problématique de l'émigration en Suisse. Ainsi elle favorise des occa­

sions de rencontres lors de stages de fonnation syndicale auxquels ont toujours participé des militants syndicaux, ou des colloques. Une meilleure connaissance des pra­

tiques réciproques à travers des confrontations ouvertes a permis de jeter les bases d'une collaboration qui vient de s'amorcer. Ainsi l'ECAP organise de nombreux cours

de formation de base avec la collaboration des syndicats suisses. Ces derniers se chargent de l'information sur les cours auprès de leurs membres et ils interviennent dans les négociations avec les autorités locales et le patronat

{congés spéciaux pour les examens; aménagement des horaires lorsque les cours se déroulent sur le lieu de tra­

vail; remboursement des frais d'inscription aux cours pour les membres du syndicat).

On s'achemine lentement vers la _généralisation de cette pratique, en fonction de la situation locale.

l'objectif qui reste encore à atteindre est celui d'une véritable coordination dans le domaine de la fonnation professionnelle, qui permettrait de faire converger des activités gérées aujourd'hui de manière autonome par les syndicats suisses et l'ECAP.

DEUXIEME PARTIE

VII. L E S LI G N E S D 1 R E C T R 1 C E S D E L ' A C T 1 V 1 T E

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