• Aucun résultat trouvé

Supposé qu'un propriétaire entende réclamer une indemnité, quelle procédure engagera-t-il? Le Tribunal fédéral exige que soit

ouverte une voie judiciaire. Il peut s'agir du juge civil ou d'un juge adntinistratif 123.

A Genève, la question demeure douteuse. Selon un projet de loi déposé le 4 mai 1973 124, c'est la Commission cantonale de

conciIia-117 Cf., par exemple: RDAF 1967, p. 219.

118 Art. 163 LeI.

119 De même à Carouge, compte tenu des plans désignés à L'art. 169 LeI.

Ces plans sont conçus de telle sorte qu'ils incitent à la surélévation, donc souvent à la destruction!

12(1 RO 99 la 35 ss, 41.

121 Gygi (note 112), p, 100 ss ; Monteil (note 98), p, 461.

122 Les restrictions découlant de la LeI ne constituant pas une mesure préparatoire en vue du c1assement, on n'en tiendra pas compte dans le calcul de la moins-value éventuelle: ImbodenlRhinow (note 61), t. II, p. 939-941.

122 blft L'arrêt RO 102 la 243 ss, 250-252, paru tandis que cet artic1e était sous presse, n'infirme pas notre sentiment.

123 Saladin (note 86), p, 179 ss; Gygi (note 112), p. 83 ss; GriseZ (note 61), p. 407; Zb11955, p. 125; 1965, p. 351-352; 1974, .p. 174 et note rédactionnelle p.176.

124 Mémorial 1973, p, 1643 S5.

tion et d'estimation instituée par la loi sur l'expropriation 125 qui doit connaître des demandes de constatation du cas d'expropriation maté-rielle et d'indemnité

"6.

Ce projet reste en souffrance devant le Grand Conseil. Quid, en l'état actuel du droit? Pour le gouvernement, les demandes de ce type ressortiraient à la compétence générale du Tribunal de première instance 127. Nous ne partageons pas cette opinion. Quand fut édictée la loi sur l'expropriation, en 1923, le Tribunal fédéral n'avait pas encore développé ses principes sur l'expro-priation matérielle, qui trouvèrent leur première formulation publique et nette en 1943 " •. Si la Cour de justice a plusieurs fois affirmé, jadis, que la loi sur l'expropriation ne s'appliquait pas en matière de protection des monuments et des sites 129, ce n'était pas pour un motif de procédure, mais de fond: aucun texte légal ne le disposant, elle n'entendait pas allouer d'indemnité aux propriétaires touchés.

Dans un autre domaine, en revanche, le législateur avait posé lui-même, en 1929, l'obligation d'indemniser: il s'agissait de l'hypo-thèse où, d'une part, un propriétaire avait subi un préjudice du fait d'une interdiction de bâtir statuée par un plan d'extension et où, d'autre part, ce plan était modifié ou supprimé. Le dommage devait être estimé comme en cas d'expropriation 130. L'estimation incluait naturellement la constatation de cette dernière. Il ne nous incombe pas d'apprécier les règles fixées par la loi sur l'extension au regard de l'article 22 ter de la Constitution fédérale. Nous noterons seulement que, lorsque le légis-lateur genevois a prévu une indemnisation pour expropriation maté-rielle, il a ordonné l'application de la loi sur l'expropriation. D'aulres cas d'expropriation matérielle ayant été découverts par le Tribunal fédéral, il est indiqué de combler la lacune procédurale en recourant, derechef, à cette loi. Ainsi, en attendant qne le Grand Conseil veuille bien parachever son œuvre, nous pouvons d'ores et déjà tenir que la Commission cantonale de conciliation et d'estimation a compétence ponr trancher, de manière générale, les litiges relatifs à l'expropriation matérielle, quant au principe et quant à l'étendue de l'indemnité. La même solution analogique prévaut sur le plan fédéral "'.

Quel est le dies aestimandi pour ['indemnité? Le jour où la

restric-125 Art. 44 85 LExpr.

126 Mémorial 1973, p. 1645 (art. 34 E du projet).

127 Mémorial 1973, p. 1648.

128 GriseZ (note 61), p. 404-405 ; Aubert (note 78), t. II, p. 766; Gut (note 111), p. 73 S8.

129 Vierne (note 64), p. 114.

130 Art. 14 et 15 LExt.

""RD 94 l 300.

tion est entrée en vigueur, affirment le projet de loi susmentionné, la jurisprudence fédérale et la doctrine "'. S'agissant du classement et du maintien de bâtiments, quand l'immeuble est-il déprécié ?- A notre avis, si perte de valeur il y a, celle-ci intervient dès l'arrêté de classe-ment ou la collocation dans le plan de site, car le propriétaire ou d'éventuels acquéreurs savent, aussitôt, que la démolition leur est en principe interdite. Les effets en sont immédiatement reconnaissables 133,

Le classement est d'ailleurs mentionné au registre foncier 134. Que si, dans des circonstances particulières, le Conseil d'Etat autorise la démolition, il siéra de restituer l'indemnité 135, On peut aussi concevoir que la restriction ne déploie ses effets définitivement que lors du refus de l'autorisation de démolir '''. Ce serait négliger la perte de valeur subie, par hypothèse, dès la mise sous protection spéciale. Enfin, pour cerner au plus près les fluctuations de prix, il ne serait pas exclu d'admettre une procédure d'indemnisation en deux temps: le premier, marqué par le classement ou l'édiction du plan de site; le second, par le refus de démolir.

VI. Organes d'exécution

Sous réserve des attributions du Conseil d'Etat, l'autorité compé-tente pour l'application de la loi est, en règle générale, le Département des travaux publics 137. Ce dernier, qui comprend un service des monuments et des sites, bénéficie des préavis de la commission des monuments, de la nature et des sites.

Ayant envisagé, en 1920, de proposer la création d'un service des monuments et des sites, le Conseil d'Etat y avait renoncé 138" L'an-cienne loi ne mentionnait que l'archéologue cantonal, secrétaire de la commission rémunéré à la vacation 139. Des courants d'opinion très forts ont souhaité que le nouveau texte instituât un service des monuments et des sites, dirigé par un conservateur, à l'exemple de nombreux autres cantons 140. Rétif, le Conseil d'Etat estimait que, au

132 Mémorial 1973, p. 1644 (art. 34 B, al. 2 du projet) ; RO 93 1 145 ; Grisel (note 61), p. 409 ; Zimmerli (note 112), p. 157; Meylan (note 112), p. 356; Peter Wiederkehr, Die Expropriationsentschadigung, thèse, Zurich 1966, p. 154 ss;

Alfred Kuttler, Welcher Zeitpunkt ist für die Prage, ob eine materielle Ent-eignung vorliegt, massgebend ? Zb11975, p. 497 SS.

133 Imboden/Rhinow (note 61), t. II, p. 939-940.

134 Art. 17, al. 2 LPMNS.

13S Mémorial 1973, p. 1644 (art. 34 C du projet).

", Cf. Zb11974, p. 173.

137 Art. 43 ss LPMNS ; art. 1 RGA.

13B Mémorial 1920, Annexes, p. 271.

139 Art. 2 de la loi de 1920.

140 Knoptli (note 4), p. 220; Munz (note 33), p. 59 ss; Bühler (note 5), p. 38-39.

cas où ce poste devrait voir le jour, ce serait au gouvernement seul de le décider, en vertu des articles 116 à 119 de la Constitution can-tonale, qui lui donne le pouvoir d'organiser l'administration 141. Nous n'étudierons pas cet argument. Nous nous bornerons à relever ceci.

Le 8 septembre 1976, le Conseil d'Etat modifiait le règlement de l'administration cantonale pour joindre au service du plan d'aména-gement un service des monuments et des sites, lesquels forment ensem-ble la direction de l'aménagement du canton "'. Ayant procédé par voie réglementaire sur ce point, le gouvernement proposait au Grand Conseil, quelques mois plus tard, de voter une loi sur l'organisation de l'inspection cantonale des forêts, de la faune et de la protection de la nature 143, qui mentionne expressément le poste d'inspecteur cantonal. Pourquoi un règlement ne suffisait-il pas dans ce cas?

Pourquoi la loi peut-elle faire allusion à l'inspecteur des forêts (ce qu'elle faisait d'ailleurs déjà), mais non au conservateur des monu-ments?

La Commission de la nature, des monuments et des sites, créée en 1920, a été profondément remaniée. Ces dernières années, un senti-ment de malaise très vif s'est répandu dans les milieux intéressés et dans la population au sujet de la composition de cet organe et de son fonctionnement. On y déplorait la prédominance des architectes. On craignait qu'ils ne pussent pas, chacun, se prononcer en toute indé-pendance sur les projets des autres membres de la commission. Le Grand Conseil a voulu remédier à cette situation. Il a décidé d'inter-venir dans la désignation des dix-neuf commissaires nommés par le Conseil d'Etat en proposant lui-même six d'entre eux et en confiant à l'Association des communes genevoises le soin d'en proposer trois autres, les dix derniers étant choisis par le gouvernement et compre-nant, notamment, des spécialistes et des délégués d'associations can-tonales 144. A l'origine, la Commission des monuments et des sites réunissait des experts 145. C'est sa fonction traditionnelle, également dans les autres cantons. Elle donne l'avis des spécialistes aux respon-sables politiques 146. Le parlement, soucieux de laisser ce rôle à un tel

141 Mémorial 1974, p. 3247. Cf. art. 119 de la Constitution genevoise: «Le Conseil d'Etat règle les attributions et l'organisation des bureaux de chaque département... »

142 Art. 6 du règlement de l'administration cantonale, du 23 décembre 1966 (B 4 1).

143 Projet de loi 4653 sur l'organisation de l'inspection cantonale des forêts, de la faune et de la protection de la nature, Mémorial 1976, p. 3984.

1~ Art. 46 LPMNS.

145 Mémorial 1920, Annexes, p. 271.

146 Bühler (note 5), p. 37~38; Munz (note 33), p. 61; art. 29 de la loi modèle (note 60).

organe, lui en assigne un second: faire la liaison avec le Grand Conseil "', pour mieux informer les députés des problèmes posés par la protection des monuments et des sites et aussi pour atténuer les effets de la vaste délégation consentie au gouvernement, s'agissant par exemple des plans de site. Cette interpénétration des pouvoirs a fourni de bons résultats dans le cadre de la loi sur la faune, qui institue une commission de dix-neuf membres, dont six sont nommés par le parlement "'. Cependant, la sauvegarde du patrimoine architectural met en jeu des intérêts considérables, de sorte qu'on ne saurait exclure le risque que la Commission des monuments, de la nature et des sites ne devienne davantage le théâtre de pressions peu scientifiques "'.

Les préavis de la commission pourront-ils être retenus comme dires d'experts? En notre matière, il faut soubaiter que seule la compétence des historiens, des historiens de l'art, des spécialistes de la restauration et des architectes, représentés les uns par rapport aux autres dans des proportions équitables, inspirera les travaux de la commission.

Les partisans de la création d'un nouveau service pensaient qu'il serait placé sous l'autorité du conserVateur des monuments. Telle n'est pas la solution retenue par le Conseil d'Etat. Les tâches sont réparties de la manière suivante. Le chef du service a pour mission d'établir et de tenir à jour les listes d'objets portés à l'inventaire ou classés; d'instruire les propositions relatives à ces listes; d'étudier les projets de plans de site et de règlements spéciaux; de gérer les dossiers de protection; de participer à l'administration du Fonds cantonal des monuments, de la nature et des sites; d'assurer le secrétariat de la commission et la liaison avec les services et les autorités intéressés.

Trois membres de la Commission des monuments, de la nature et des sites exercent des fonctions spéciales: l'archéologue cantonal (assisté d'un archéologue cantonal adjoint); l'historien des monuments;

enfin le conservateur des monuments, qui contrôle le bon état des objets classés et qui prend, à titre provisionnel, les mesures conserva-toires en application de l'article 5 de la loi 150. Ces mesures provi-sionnelles, une fois que la commission a donné son préavis, sont maintenues ou levées par le département.

Enfin, le désir du Grand Conseil de s'associer à la politique du gouvernement relative à la protection du patrimoine architectural se reflète dans l'exigence nouvelle de recevoir, chaque année, un rapport

147 Mémorial 1976, p. 1907-1908.

148 Art. 26 de la loi sur la faune, du 14 mars 1975 CM 8 1).

149 Cf. note 21.

ISO Art. 9 ss RGA.

sur l'activité de la Commission des monuments, de la nature et des sites 151.

Documents relatifs